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Sans surprise, Henrik von Eckermann et King Edward Ress se lancent idéalement dans leur quête de doublé à Riyad

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mercredi 17 avril 2024 Mélina Massias

Un air de déjà-vu souffle sur Riyad. La capitale de l’Arabie-Saoudite, à qui la Fédération équestre internationale a choisi, en 2019, d’attribuer l’organisation de la finale de la Coupe du monde Longines, bien que de très nombreux droits humains y soient bafoués, a vu Henrik von Eckermann et King Edward Ress s’installer en tête des opérations après le premier des cinq parcours qui attendent les candidats à un podium. Particulièrement aérien dans cette épreuve de vitesse, le Suédois et son roi ont devancé de quelques centièmes Peder Fredricson, associé au vétéran Catch Me Not S, ainsi que l’Allemand Hans-Dieter Dreher, remarquable sur Elysium. À l’exception de l’élimination de Kevin Staut, qui a franchi le mauvais obstacle avec Visconti du Telman, et une incompréhension chère payée pour Richard Howley et Equine America*Consulent de Prelet, la plupart des favoris ont tenu leur rang, même si certains d'entre eux figurent pour l’instant en milieu de tableau. Quoi qu’il en soit, les jeux restent ouverts et la compétition ne fait que débuter. 

Aujourd’hui, aucun doute, King Edward Ress et Henrik von Eckermann étaient intouchables. Particulièrement aérien et bondissant, le petit alezan s’est joué de toutes les difficultés du premier tracé imaginé par Frank Rothenberger et Alan Wade pour la finale de la Coupe du monde Longines, édition 2024. Dans cette Chasse, jugée au Barème C, l’alezan et son numéro un mondial de cavalier n’ont pas fait dans la demi-mesure et ont pris tous les risques possibles pour couper la ligne d’arrivée en 66’’28, mercredi 17 avril. Personne n’a fait mieux et les doubles champions du monde et vainqueur sortant de la Coupe du monde se sont installés en tête, à cent jours tout pile du coup d’envoi des Jeux olympiques de Paris. Si la quête de l’Olympe sera assurément l’objectif majeur du duo cet été, la conservation de son titre sur le circuit hivernal de la Fédération équestre internationale (FEI) l’est aussi. 

Le sentiment du devoir (bien) accompli pour Henrik von Eckermann et King Edward Ress, qui tenteront de s'offrir une deuxième Coupe cette année, après celle remportée à Omaha en 2023. © Benjamin Clark Photography / FEI

“Notre parcours a été excellent, bien meilleur que l’an passé à Omaha, même si le résultat est le même. King Edward était beaucoup plus calme et a sauté de manière formidable, sans que j’aie à le pousser en avant”, s’est réjoui le Suédois, qui semble bien parti pour réaliser un nouvel exploit cette semaine.

Comme l'an dernier, Henrik von Eckermann et son roi Edward se sont offert un tour d'honneur à l'issue de la Chasse. © Martin Dokoupil / FEI

Avant-dernier à prendre le départ de cette première journée d’épreuves de jumping à Riyad, Henrik von Eckermann, qui n’a pas fait sauter son BWP, pépite de l’élevage de Wim Impens, lors de la warm-up de la veille, a doublé sur le fil son coéquipier Peder Fredricson, auteur quelques minutes plus tôt d’une véritable leçon d’équitation. Aux rênes de son fidèle Catch Me Not S, désormais âgé de dix-huit ans, le Scandinave a, lui aussi, réalisé un tracé parfait. Sa prestation transpirait l’expérience et la science. Après bientôt six ans d’association, son couple avec l’atypique fils de Cardento n’a peut-être jamais été aussi en phase, eux qui avaient pourtant décroché le bronze en individuel lors des Européens de Riesenbeck en 2021 et terminé troisième de la finale de la Coupe du monde de Göteborg deux ans plus tôt. Deuxièmes ce soir, en 67’’40, tous deux devront tenir la distance. Ils ne sont pour l’heure qu’à… deux unités de la tête. De quoi les laisser rêver d’une possible dernière distinction en grand championnat. 

Dans son style caractéristique et avec toute la maestria de son cavalier, Catch Me Not S a réalisé une excellente prestation. © Stefan Lafrentz / Hippo Foto



Troisièmes à l’aube de la deuxième étape de cette course de fond, Hans-Dieter Dreher et Elysium, né Ziroquado T, ont créé une petite surprise. Parfaitement à leur place et au niveau, tous deux se sont montrés excellents face au chronomètre, alors qu’on ne les voyait peut-être pas jouer d’entrée au sein du Top 3. Brillant, le fils de Quamikase des Forêts, alias Zirocco Blue, a coupé les cellules d’arrivée en 68’’49 sans jamais avoir semblé dans le rouge. Très à l’aise, le Holsteiner de douze ans a marqué des points.

Quelle entame pour Hans-Dieter Dreher et Elysium ! © Benjamin Clark Photography / FEI

Pas de surprise majeure…

Mais quelle jument, cette Dubaï du Cèdre ! Dans un train d’enfer, la Selle Français Originel a répondu du tac au tac à chacune des demandes de Julien Epaillard, réalisant l’un, si ce n’est le plus beau parcours de la soirée. La médaillée de bronze des derniers championnats d’Europe n’a jamais semblé forcer et est apparue parfaitement sereine malgré le tempo d’enfer qu’elle a imprimé tout au long du parcours, le tout agrémenté de virages serrés. Malgré tout, et comme nul n’est infaillible, le Normand et numéro un français n’a pas parfaitement centré son saut sur le numéro sur le numéro cinq, si bien qu’il en a frôlé le chandelier. Alors qu’il s’était déjà éloigné du vertical de plusieurs foulées, la barre qui le défendait est tombée au sol, lui infligeant un malus de trois secondes. Sans cette faute, la paire tricolore auraient pu caracoler en deuxième position. Malgré tout, son quatrième rang lui laisse encore le champ libre pour briller. Avant la remise des médailles, la route est encore longue. 

Particulièrement impressionnante, Dubaï du Cèdre a malheureusement frôlé un chandelier dans sa course folle, lors de laquelle elle n'a laissé aucun centième en route. © Dirk Caremans / Hippo Foto

Elle aussi impressionnante, bien qu’ayant une expérience moins conséquente que celle de son aînée alezane, Toulayna van het Bloesemhof n’a pas fait mentir les statistiques. En tête de notre classement des chevaux les plus réguliers à 1,60m sur les cinq derniers mois, la complice de Kent Farrington a rebondi sur le sable telle une petite balle et s’est sortie avec brio de cet enchaînement. Dernière à être passée sous la barre des 70’’00 sans concéder de faute, la fille de Toulon a pris une très belle quatrième place... ex-aequo avec Dubaï du Cèdre ! Demain, pour le Grand Prix, la Zangersheide cèdera toutefois sa place à Greya, né Contina 47, un peu plus expérimentée qu’elle.

Contrat rempli pour la bondissante Toulayna van het Bloesemhof. © Dirk Caremans / Hippo Foto

Bien lancé pour prendre la deuxième place provisoire avec sa Selle Français Dallas Vegas Batilly, le champion olympique Ben Maher, qui dispute seulement sa deuxième finale de la Coupe du monde, a concédé quatre points, pour se ranger au sixième rang provisoire. Christian Ahlmann, Max Kühner, Steve Guerdat ou encore Scott Brash ont également livré d’excellentes prestations avec un Mandato van de Neerheide des grands jours pour le premier, un EIC*Up Too Jacco Blue en pleine forme pour le deuxième, Is-Minka pour le troisième, fautif à une reprise, et Hello*Valentino, particulièrement brillant en début d’épreuve malgré un petit manque de fluidité dans les virages en fin de tour. Malgré tout, le neveu utérin du grand Fibonacci 17 a fait honneur à ses origines et montré de très, très belles choses, malgré son expérience encore limitée à ce niveau. 

Hello Valentino, neveu utérin d'un certain Fibonacci 17, a particulièrement bien sauté à Riyad. © Dirk Caremans / Hippo Foto

Dixième, entre Steve Guerdat et Scott Brash, rien que ça, la benjamine de la compétition, Skylar Wireman n’a pas eu froid aux yeux. La jeune américaine, auteure d’une saison hivernale remarquable outre-Atlantique, s’est élancée en dernière position, juste après… Henrik von Eckermann. Déterminé, l’amazone a tout donné, tout comme son généreux complice : Tornado. Le fils de Diarado et petit-fils de Chacco-Blue a fait étalage de toute son intelligence et de sa bonne volonté, offrant un immense sourire à sa cavalière de dix-neuf ans ! Dans la course, le couple pourrait bien imiter Hunter Holloway, qui avait confirmé tout son talent l’an dernier à Omaha. 



… sauf pour Richard Howley et Kevin Staut, d’ores et déjà hors course

Pour l’heure au-delà de la quinzième place après avoir ajouté six et trois points à leurs chronomètres respectifs, Grégory Wathelet, Jeanne Sadran, Pieter Devos, Marcus Ehning ou encore Mariano Martinez Bastida restent encore en course pour une place d’honneur, voire sur le podium, avec leurs excellents Ace of Hearts, Dexter de Kerglenn, Casual DV, Coolio 42 et Belano v. Wijnhoeve. En revanche, les choses se compliquent pour Martin Fuchs et Commissar Pezi, ainsi que Devin Ryan et Eddie Blue, vingt-trois et vingt-cinquièmes après des parcours entachés de deux fautes pour le premier et trois pour le second. 

Si elle n'a pu éviter une faute en fin de parcours, la toute jeune Casual DV a parfaitement tenu son rang pour son premier grand championnat. © Dirk Caremans / Hippo Foto

Surtout, deux grosses surprises ont marqué le début de la compétition en Arabie Saoudite. D’abord, il y eut le surprenant refus de Equine America*Consulent de Prelet, très bien engagé avec son cavalier irlandais, Richard Howley. Vainqueur des étapes d’Oslo et Helsinki en début de saison, l’attachant et compétitif duo allait bon train avant d’aborder le premier des deux doubles du tracé. Visiblement surpris, notamment par la présence d’un bidet, et quelque peu en perte d’équilibre, l’agile bai s’est gentiment arrêté. Prenant le temps de rassurer son complice et de revenir calmement sur la combinaison, Richard Howley a vu les secondes s’égrainer pour le classer… avant-dernier, un rang qu’il n’a, bien sûr, pas l’habitude d’occuper. Compétiteur dans l’âme, le cavalier du Trèfle, qui faisait de cette échéance un objectif majeur de cette saison, devra rebondir pour tenter de mener à bien son deuxième dessein : prendre part aux Jeux olympiques de Paris et y faire bonne figure. Encore plus surprenant, la compétition s’est achevée prématurément pour Kevin Staut et Visconti du Telman. Alors que la fille de Toulon semblait à son avantage après sept sauts, elle n’a pas compris l’intention de son cavalier pour aborder la huitième difficulté du parcours. Le Normand semblait vouloir prendre une option réussie par plusieurs cavaliers avant lui pour franchir le mur, mais a continué tout droit vers… le numéro cinq ! Le couple a alors franchi l’obstacle dans le mauvais sens et continué sa course avant d’être interrompu après quelques secondes de flottement par le jury. Drôle de scénario, presque inexplicable et qui n’est pas sans rappeler celui du barrage du Grand Prix Coupe du monde de Madrid, où le Tricolore et sa Selle Français avait laissé la victoire leur échapper en franchissant le mauvais obstacle en toute fin de barrage… 

Les résultats complets.



Infos pratiques

Jeudi, la compétition se poursuit à partir de 17h50, heure française, avec une épreuve disputée au format Grand Prix, en une manche plus barrage. À l’issue de celle-ci, l’écart de points entre tous les couples encore en lice sera recalculé, ce qui devrait resserrer encore davantage la compétition. Les épreuves des finales de la Coupe du monde Longines sont à suivre en direct sur Clipmyhorse.tv et les résultats sont accessibles en direct sur longinestiming.com.

Photo à la Une : King Edward Ress a offert un savoureux parcours à son cavalier, aux anges en sortie de piste. © Stefan Lafrentz / Hippo Foto


Aux lectrices et lecteurs de Studforlife

Ces derniers jours, des médias équestres de référence, tels que nos confrères allemands de St-Georg et nos consœurs scandinaves de WorldOfShowjumping, ont annoncé leur intention de boycotter ou de limiter leur traitement éditorial des finales des Coupes du monde de dressage et/ou de saut d’obstacles, qui se tiennent cette semaine à Riyad. L’attribution de ce sommet de la saison indoor à la capitale du royaume d’Arabie saoudite résulte d’une décision de la Fédération équestre internationale (FEI), annoncée fin 2019. Dans ce pays, un très grand nombre de droits humains sont bafoués, dont ceux des femmes et des personnes appartenant à la communauté LGBTQIA+. Pour ne citer que quelques exemples, Salma al-Shehab, doctorante à l’université de Leeds, a récemment été condamnée à trente-quatre ans de prison, suivie d’une interdiction de voyager de trente-quatre ans pour ses écrits et son activité pacifique sur le réseau social Twitter ; “aucun des conjoints mariés ne peut renoncer à des relations sexuelles ou à la cohabitation avec l’autre conjoint sans le consentement de ce dernier, ce qui implique un droit conjugal aux relations sexuelles”, comme l’écrit l’organisation Human Rights Watch ; les opposants au régime risquent des peines de prison ou la flagellation en place publique, parmi d’autres sanctions ; et l’homosexualité est pénalisée de mort…

Dans le même temps, la FEI ne cesse de promouvoir l’égalité des genres, l’inclusivité au sens large du terme, et ses actions en la matière… Questionnés à plusieurs reprises au sujet de l’incohérence entre leur parole et leurs actes, les dirigeants de la FEI ont déclaré que cette attribution était en quelque sorte un encouragement envers le royaume du Golfe à poursuivre sa politique d’ouverture et ses réformes ayant trait aux droits humains. Certes, l’Arabie saoudite progresse, mais à tout petits pas. Depuis quelques années, par exemple, les femmes ont le droit d’assister ou de participer aux événements sportifs… sous certaines conditions. Cependant, il ne faut pas s’y tromper : cela ne fait toujours pas de ce pays une terre de libertés – très loin s’en faut – mais simplement un théâtre sportif et/ou culturel un peu plus présentable. Pour le régime autocratique saoudien, par ailleurs régulièrement mis en cause pour son soutien à des groupes terroristes islamistes, il s’agit surtout d’obtenir en termes d’image le retour sur ses investissements colossaux en communication, nourris par la manne pétrolière dont il bénéficie.

Respectant pleinement les choix et la diversité des sensibilités de ses consœurs et confrères, Studforlife a choisi de rendre compte des aspects sportifs de ces finales, comme la rédaction l’a toujours fait, où que se tiennent les épreuves. Il faut rappeler que des concours se déroulent de longue date en Arabie saoudite, mais aussi au Qatar, aux Émirats arabes unis, en Chine, au Maroc, en Hongrie et en Pologne, parmi bien d’autres pays où les violations des droits humains sont plus ou moins graves et fréquentes. Le choix de Studforlife ne vaut nullement soutien à l’attribution de cet événement à l’Arabie saoudite par la FEI, qui tirera, à n’en pas douter, le bilan de ce choix controversé.