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“Paris et Riyad sont deux grands objectifs pour l’année prochaine”, Richard Howley (1/3)

Howley
mercredi 22 novembre 2023 Mélina Massias

Qui est Richard Howley ? Âgé de trente et un ans, l’Irlandais a bluffé son monde en remportant avec maestria les deux premières étapes de la Coupe du monde Longines sur la ligue d’Europe occidentale, la plus disputée de toutes. Associé à l’atypique mais brillant Consulent de Prelet, un cheval né en Slovaquie, chez Svo Trans Feka, l’ancien disciple de Michael Whitaker n’a pas dit son dernier mot, loin de là. Installé en Angleterre, où il gère avec son épouse, Morgan Kent, HK Horses, une large écurie mêlant sport, élevage et commerce, Richard Howley a grandi sur l’île d’Emeraude, au sein d’une famille passionnée, sans pour autant être professionnelle du milieu. Reconnaissant n’avoir manqué de rien durant sa jeunesse, sans pour autant rouler sur l’or, le jeune homme s’est forgé son propre chemin, a appris la patience et l’abnégation et surmonté un grave accident l’ayant immobilisé plusieurs mois. Raisonné et déterminé, ce perfectionniste dans l’âme, qui a vu passer sous sa selle quelques excellentes cartouches, à l’image de Chinook ou Arlo de Blondel, semble en passe de vivre les plus belles heures de sa carrière, avec Riyad et Paris en ligne de mire. À l’occasion du salon du cheval de Lyon, le jeune trentenaire, au départ de deux championnats d’Europe à poney et un en Junior, s’est confié sur son parcours, ses ambitions et son fonctionnement. Rencontre en trois volets.

Votre saison indoor a commencé par un sacré doublé, avec deux victoires dans les étapes de la Coupe du monde Longines de Oslo et Helsinki, grâce à votre fantastique Consulent de Prelet (Consulent x Fuego du Prelet). Comment avez-vous vécu ces deux moments, qui vous ont permis d’imiter la prestation signée par Christian Ahlmann et l’inoubliable Taloubet K en 2010 ?

C’était incroyable ! Évidemment, c’était le plan de remporter ces deux Grands Prix. Pensions-nous que cela allait se produire ? Probablement pas. C’était fou. Les deux concours avaient une super ambiance, et se sont conclus par deux barrages très compétitifs, ce qui donne encore plus de sensations. Je suis aux anges avec Consulent. Il est en très grande forme et aborde cette saison indoor en frappant un grand coup. Je vais essayer d’être à son niveau et de continuer sur cette lancée.

Comment avez-vous croisé la route de Consulent ? Quelle a été votre première impression le concernant ?

J’ai rencontré Consulent grâce à un ami, Roland Clarke. Consulent a été élevé en Slovaquie, non loin de la République Tchèque. Il était monté par une jeune femme (Radka Hermely, ndlr) qui l’a formé jusqu’à ses dix ans (après que le bai a été monté en 2019 par Znedek Zila, ndlr). Ils ont évolué jusqu’au niveau 3*, puis nous l’avons acheté. Nous avons directement connu de bons débuts ensemble. Depuis, il n’a fait que se surpasser. L’an dernier, nous avons pris notre temps, et cette saison il a franchi le cap du très haut niveau rapidement. Il a été fantastique sur le circuit du Global Champions Tour ces derniers mois et continue sur sa lancée en intérieur.

Même s'il n'a pas marqué de point lors de l'étape de la Coupe du monde de Lyon, Richard Howley a tout de même obtenu une très belle deuxième place dans le Grand Prix secondaire du CSI 5*-W, grâce à Consulent de Prelet. © Mélina Massias

Quelles sont, selon vous, les principales qualités de Consulent ?

Il est extrêmement respectueux, très agile. Il a vraiment un style à lui, mais c’est comme s’il avait un œil sur chaque sabot. Il est très unique dans sa manière de sauter. Parfois, il s’exprime même trop, veut trop en faire et saute trop haut. Toutefois, en tant que sauteur, on ne peut pas lui trouver de défaut. Surtout, le plus important est qu’il est compétitif. Il peut sauter les obstacles les plus hauts du monde mais peut aussi gagner les épreuves les plus rapides. Cela rend l’aventure avec lui encore plus sympa. Personnellement, j’adore gagner. Je n’ai jamais envie d’entrer en piste pour être deuxième. Alors je crois que Consulent et moi nous sommes bien trouvés. Je suis enthousiaste pour 2024, qui est une année olympique. Mon cheval est en grande forme, donc nous allons viser cet objectif et voir ce qu’il advient.

Doté d'une technique bien à lui, le puissant Consulent de Prelet est un redoutable candidat au barrage. © Kim C Lundin / FEI



Avec vos deux victoires en Scandinavie, vous êtes pratiquement assuré d’être qualifié pour la finale du circuit, qui se déroulera à Riyad, au printemps prochain. Allez-vous faire de ce rendez-vous un objectif majeur de votre calendrier 2024 ou préférez-vous vous concentrer sur les Jeux olympiques, qui auront lieu quelques mois plus tard ? 

Paris est évidemment en ligne de mire, mais je pense que Consulent est aussi en mesure de participer à la finale de la Coupe du monde. C’est ma totale volonté de participer à cet événement et nous allons nous retrousser les manches pour performer là-bas. Nous aimerions bien collecter quelques points supplémentaires pour sécuriser notre qualification, mais cela devrait le faire. C’est très chouette d’avoir ces points aussi rapidement et d’avoir l’esprit tranquille en ce qui concerne notre qualification. Peut-être que cela nous enlèvera un peu de pression lors de nos prochains parcours. En tout cas, Paris et Riyad sont deux grands objectifs pour l’année prochaine.

L'Irlandais fait de la finale 2024 du circuit de la Coupe du monde Longines un objectif. © Kim C Lundin / FEI

Quel va être votre programme dans les prochaines semaines ? 

Après ce concours (entretien réalisé lors d’Equita Longines Lyon, le 3 novembre, ndlr), je vais aller à Prague, puis nous aurons trois semaines de repos. Ensuite, j’espère pouvoir me rendre à Londres, pour l’étape de la Coupe du monde, si les organisateurs me permettent de venir. Pour l’heure, ce n’est pas le cas, mais j’espère sincèrement que cela le sera. C’est un concours à domicile pour moi. Je vis en Angleterre, tout comme mes propriétaires. Ce sera très agréable de prendre part à ce concours, où je n’ai jamais monté. Je ne souhaite pas aller en concours tant que je n’ai pas le sentiment d’être dans une bonne position pour y être performant. Mon cheval est dans une super forme, et ce serait vraiment dommage si nous n’avions pas la chance d’aller à Londres. Je suis sûr que ce serait une belle expérience et que nous pourrions être compétitif. Lorsqu'on est sur une bonne lancée, il faut continuer.

Consulent de Prelet a concouru à Prague le week-end dernier. © Sportfot

Sur quels autres chevaux pouvez-vous compter pour épauler Consulent au plus haut niveau ? 

J’ai plusieurs chevaux. Mansini LTD (Caressini L x Marramas) a été très régulier toute la saison. Il a désormais pris un peu de recul des concours de très haut niveau afin d’être le fer de lance de mon second piquet de chevaux. De cette manière, je peux former mes jeunes chevaux dans son sillon. Ensuite, le deuxième cheval derrière Consulent est, je pense, l’un des meilleurs huit ans du monde, un cheval gris nommé Zodiak du Buisson (Zirocco Blue, né Quamikase des Forêts x Dutch Capitol). Il est fantastique ! Il a les derniers moyens, la dernière qualité. C’est un sauteur exceptionnel, et il a un vrai mental de sportif. Je pense qu’il est une super star ! 

Le génial Mansini, tout aussi à l'aise sur les pistes internationales que pour faire sourire l'adorable Winter, fille de Morgan Kent et Richard Howley, est un précieux atout pour les écuries HK. © Sportfot

Lorsqu'il évoque son tout jeune Zodiak du Buisson, quatrième des disputés Equita Masters à Lyon, Richard Howley manquerait presque de superlatifs ! © Mélina Massias

Comment se porte votre fidèle Chinook (Tygo x Wellington), qui vous a permis de goûter à vos premières grandes victoires internationales après avoir débuté sa carrière en concours complet ? 

Il va bien et est désormais retraité. La dernière fois que je suis venu à Lyon, il y a quatre ans, il avait remporté une épreuve le samedi. Chinook a eu une formidable carrière, mais j’ai parfois gâché nos barrages au niveau 5*. De ce fait, je crois qu’il n’a pas eu les résultats qu’il méritait dans les épreuves les plus importantes. À Dublin, j’ai raté mon barrage, il était deuxième à Saint-Gall, sans-faute dans la Coupe du monde de Stuttgart, où il a ensuite glissé et est tombé au barrage… À chaque fois, une ânerie s’est mise en travers de notre route lors des grands jours. Mais quel cheval ! Il a été mon premier vrai grand cheval, le premier à m’avoir donné accès à ce genre de concours. Il m’a tellement appris et m’a révélé à ce niveau. Il m’a enseigné comment être un homme de cheval, comment être patient, et m’a appris à réellement contrôler mon équilibre. Chinook n’était pas le plus simple à monter, mais lorsqu’on ne commettait pas d’erreur, il aurait tout sauté. Un cheval incroyable.

Premier grand cheval de Richard Howley, Chinook est un heureux retraité depuis 2022. © Hippo Foto / Dirk Caremans



Pouvez-vous revenir sur votre parcours équestre ? Quel est votre premier souvenir impliquant un équidé ?

Je suis originaire du Nord-ouest de l’Irlande. Ma famille a toujours été amoureuse des chevaux. Ma mère est infirmière et mon père fermier et en quelque sorte vendeur de chevaux. Aussi loin que je me souvienne, nous avons toujours eu des poneys. Comme pour ma famille, le monde équestre est devenu mon monde. Nous avons tous été baigné dans cet univers dès le départ ; mes sœurs, ma maman, mon papa et moi. Cela a façonné nos vies et nous avons pris de l’ampleur au fur et à mesure. Nous n’avons peut-être pas eu l’éducation la plus aisée financièrement parlant, mais mes parents ont toujours été d’incroyables soutiens. Nous n’avons manqué de rien. Nous avons toujours eu tout ce dont nous avions besoin, et avions toujours des poneys pour nous accompagner en concours. Alors, respect à eux de nous avoir soutenu en tant que famille et enfants.

Richard Howley a débuté à Poney, catégorie dans laquelle il a d'ailleurs disputé deux championnats d'Europe, avant de disputer une échéance continentale de plus en Junior avec Caran, ici en photo à Jardy en 2010. © Sportfot

L’étape suivante de mon parcours a été de partir chez Michael Whitaker lorsque j’avais dix-sept ans. Je suis resté là-bas jusqu’à mes vingt ans. C’était une partie de ma vie incroyable. J’ai appris énormément et le simple fait d’être près d’un tel homme de cheval pendant si longtemps est formidable. J’ai vraiment appris, encore une fois, à être patient et à faire les choses correctement avec les chevaux. Michael et Melissa ont un système très simple, mais structuré. Tout le mérite leur revient pour tout ce qu’ils ont fait, pour la carrière de Michael et ce qu’ils font désormais pour leur fils, Jack, qui est un très bon ami. 

À vingt ans, je me suis cassé le dos. Une selle a cassé alors que je montais un cheval de trois ans. Je suis tombé sur la tête et me suis sévèrement blessé au niveau des vertèbres L2 et L3. Après cela, j’ai été incapable de bouger pendant trois ou quatre mois. À ce moment-là, j’avais déjà rencontré ma magnifique épouse, Morgan (Kent, ndlr). Je me suis installé chez elle parce que je ne pouvais même pas marcher. Elle m’a immédiatement pris sous son aile et s’est occupée de moi ce qui, heureusement, ne l’a jamais quitté depuis ! (rires) Ensuite, nous avons fondé nos écuries ensemble. C’était il y a environ dix ans maintenant.

Chinook a appris beaucoup de choses au co-fondateur de HK Horses. © Sportfot

Qu’avez-vous appris de cette période où vous ne pouviez ni vous déplacer librement, ni monter à cheval ? 

Tout ce que je pouvais faire était observer. Pour moi, cela a été le plus grand apprentissage. Je ne pouvais pas monter à cheval et étais frustré de ne rien pouvoir faire. Je devais rester assis et regarder. J’ai pu forger ma vision des choses dans ma tête, et la façon dont je voulais approcher ce sport, fonder mon système et gérer mes écuries. À la minute où je suis remonté en selle, tout était programmé dans ma tête. Depuis, cela ne m’a jamais quitté. La vision que j’avais au moment de ma blessure n’a jamais bougé.

Avez-vous craint de ne plus jamais pouvoir remettre le pied à l'étrier ?

Non, pas vraiment. Ma mère, peut-être, mais cette possibilité ne m’a jamais traversé l’esprit.

Photo à la Une : Richard Howley. Mélina Massias

La deuxième partie de cet entretien est disponible ici.