Certes, Upsilon s’est illustré sur les terrains de concours complet. Mais l’étalon de Thomas Carlile, disparu brutalement en fin de semaine dernière, se révèle être un excellent reproducteur tant dans sa discipline de prédilection que dans celle du saut d’obstacles, pour laquelle il a toujours démontré une aptitude certaine. Après s’être battu pour vivre et avoir profité de quatre années de retraite sportive, sous l’oeil toujours attentif de son cavalier et Camille Coton, le gris a poussé son dernier souffle à quinze ans, passant ainsi le flambeau à sa prometteuse production.
Sous la selle de Thomas Carlile, Upsilon a ébloui le monde du concours complet. Doté d’allures remarquables, d’une volonté de fer et d’un coup de saut à faire pâlir bien des chevaux de jumping, le gris n’a malheureusement pas connu la carrière qu’il aurait mérité. Frappé par une forme d’herpès virus en 2019, l’Anglo-arabe, fils de l’excellent Canturo, disparu à l’âge honorable de vingt-sept ans au printemps dernier, avait déjoué tous les pronostics en se relevant, allant même jusqu’à pouvoir ressauter quelques obstacles, sous la selle de Camille Coton, son ange gardienne, pour son plus grand plaisir. Dimanche 16 avril, Thomas Carlile a annoncé une terrible nouvelle. Son complice s’en est allé. À quinze ans, et alors que quelques jours auparavant le fils d’O’Vive (Fusain du Defey) apparaissait encore en pleine forme sous la selle, effectuant une petite détente de routine comme si de rien n’était, le destin a mis fin aux jours de ce reproducteur de premier plan.
Upsilon aurait sans nul doute pu prétendre à une carrière en saut d'obstacles. © Scoopdyga
“Mon cher Upsilon. Tu auras été notre rêve éveillé… Dès tes premiers pas, tu auras envoûté Patrick et Mapie (Sisqueille, ses naisseurs, ndlr) de leur réussite. Je me souviens de la première fois que je te rencontrais… Tu m’as bluffé par ton charisme et ta prestance. Personne ne pouvait rester indifférent devant toi. [...] Tu ne nous laisses que des souvenirs incroyables. Tu auras marqué tant d’esprits par ton éclat et ton talent. [...] Je suis sûr que Camille a été ta confidente et un ange pour toi, elle a su te redonner des ailes. Tu auras pu savourer ces douces années de paix que l’on te devait tant. L’injustice de la vie est revenue te foudroyer sans prévenir. Que tu nous manques Upsilon. Repose en paix mon ami. Le rêve de tout homme de cheval de croiser un jour le chemin d’un tel cheval”, a commenté le complétiste sur les réseaux sociaux. “Il n’y a pas de mots pour décrire cette perte si brutale… On aura, je pense, tout fait pour que tu vives au mieux dans les meilleures conditions possibles. Je ne remercierai jamais assez les personnes qui ont contribué, depuis le début de ta maladie, à ta rééducation, tant elle a été éprouvante au quotidien. Repose en paix Mon UpsiChou”, a ajouté Camille Coton, compagne de Thomas Carlile et première fan d'Upsilon.
Upsilon au modèle, aux côtés de son cavalier, Thomas Carlile. © Scoopdyga
Mais, bien au-delà de sa discipline de prédilection, pour laquelle il a déjà engendré de nombreuses jeunes pousses toutes plus prometteuses les unes que les autres, Upsilon a également transmis son sens de la barre à des puristes du saut d’obstacles. Un fait assez notable, qui pourrait faire de lui le successeur de Diarado, numéro un des pères de gagnant en concours complet et onzième de la hiérarchie dédiée au jumping selon la Fédération mondiale de l’élevage de chevaux de sport (WBFSH) ? En France, la production du regretté étalon Anglo-arabe s’élève à cinq cent cinquante produits, pour neuf cents saillies enregistrées entre 2013 et 2021. Alors que ses premières générations ont seulement neuf ans, Upsilon compte déjà vingt-deux descendants indicés à plus de 130 en saut d’obstacles.
Gandor du Fief ici aux côtés de Pierre Imbert, est l'une des figures de proue de la production d'Upsilon. © Mélina Massias
Parmi eux, se trouvent Gandor du Fief (ISO 144, mère par Corland), classé “Excellent” à six ans lors de la finale de Fontainebleau avec Pierre Imbert, Gerico Louvo (mère par Quintus La Silla), finaliste à six ans, Gimme Five (mère par Hurlevent de Brekka), “Excellente” à quatre ans, Farino du Guinefort (ISO 145, mère par Arpège Pierreville), Epsilon de Roulard (ISO 145, mère par Exploit de Roulard), Eau Vive de Béliard et son propre frère, Forban de Béliard (ISO 142, mère par Diamant de Semilly), remarqué lors de la finale des chevaux de sept ans l’an passé à Fontainebleau sous la selle de Marie Demonte et classé jusqu’à 1,40m, ou encore le prometteur étalon Esprit du Figuier (mère par Ryon d’Anzex). Récemment, Hippomundo plaçait même Upsilon parmi les meilleurs pères de jeunes chevaux et reproducteurs à surveiller dans les années à venir. Enfin, sur les quatre-vingt-huit produits enregistrés sur la base de données Horsetelex, quinze évoluent à 1,40m ou plus.
Forban de Béliard et Marie Demonte à Fontainebleau en septembre dernier. © Mélina Massias
Epsilon de Roulard, classée jusqu'en Grands Prix 3* à 1,50m à neuf ans, présentée ici par le Roumain Andrea Herck lors du championnat du monde des chevaux de sept ans, en 2021. © Sportfot
“Il y a également un cheval en France que je suis depuis déjà cinq ans : Upsilon, l’étalon de Thomas Carlile. Dès la première fois où nous l’avons vu, mon fils et moi avons dit qu’il serait l’un des meilleurs du monde”, avouait d’ailleurs Wim Impens, l’homme à l’origine du crack King Edward Ress, quelques jours avant la disparition du gris. Désormais, les filles et fils de l’Anglo-arabe, inoubliable pour son histoire et ses qualités, auront la lourde responsabilité d’honorer la mémoire de leur père.
Eau Vive de Béliard, digne héritière d'Upsilon. © Sportfot
Photo à la Une : Upsilon et Thomas Carlile à Pompadour. © Scoopdyga