Sport
dimanche 7 février 2010
Marcus Ehning s'impose au terme d'un incroyable scénario à Bordeaux
Frank Rothenberger, le chef de piste, avait annoncé la couleur lors de la présentation de son parcours à la presse : « A Leipzig, j’ai eu seize sans faute, cette fois-ci je voulais rectifier le tir et c’est sans doute le parcours le plus difficile de la saison que j’ai construit ici ». Alors c’est un vrai grand champion que cette étape bordelaise de la Coupe du monde a consacré ce samedi soir : Marcus Ehning.
Rien d’étonnant car ce champion-là se nomme Marcus Ehning : mais le scénario qui lui a permis d’accéder à cette première victoire en Coupe du monde à Bordeaux était inimaginable.
Inimaginables d’abord les dégâts enregistrés en première manche : des fautes partout. Ce diable de parcours ne laissait pas un moment de répit, le moindre instant de déconcentration ne pardonnait pas. Pas un seul des douze obstacles (quinze à la vérité en comptant tous les éléments des combinaisons) n’a été épargné. Tous à terre. Si le couple cavalier cheval sortait indemne de cette première « diagonale du fou » qui, dès le vertical n°3 l’envoyait sur un triple assassin, les autres difficultés le guettaient à chaque coin de piste. Les cracks (comme le n°2 mondial et vainqueur de l’an passé, Albert Zoer, 16 points avec Sam), et les outsiders (comme Daniel Etter, le Suisse, pourtant vainqueur des deux premières étapes de la saison, 16 points aussi), tombaient les uns après les autres. Il fallut attendre le quinzième concurrent pour voir le premier sans faute de la soirée : Philippe Weishaupt, 25 ans, le jeune disciple de Ludger Beerbaum : « C’est vrai que je stressais un peu au paddock, j’avais effectivement trouvé ce parcours difficile à la reconnaissance et puis, quand j’entendais les résultats, je n’étais pas plus rassuré. Et finalement tout s’est bien passé, un parcours de rêve. Pendant longtemps, j’ai été le seul sans faute. Ensuite, plus l’épreuve avançait et plus les autres faisaient des fautes et plus je me sentais heureux… Jusqu’à ce que Marcus Ehning arrive… ».
Ehning aussi se posait des questions au paddock : « Après la reconnaissance, tout en admettant que ce parcours était vraiment dur, j’avais des certitudes, et puis quand j’ai vu les fautes s’accumuler, j’ai progressivement changé mes plans initiaux ».
Visiblement, le n°3 mondial a vite trouvé les solutions et Leconte est allé rejoindre Catoki pour un barrage qui allait tourner au championnat d’Allemagne, version « simple messieurs ». Un barrage qu’aucun des deux protagonistes n’a vraiment aimé : « Pas facile de partir en second quand le premier a fait un parcours rapide avec une faute. On ne sait quoi faire : aller vite ou assurer le sans faute. J’ai commencé par la deuxième solution, et puis j’ai fait cette faute dont je suis le seul responsable. J’ai dû accélérer et c’est passé, mais de justesse, » résumait Ehning avec un grand sourire. « Pas facile de partir en premier quand on sait que l’on n’est que deux et que c’est Ehning qui vient après. Normalement, je devrais me réjouir de finir second ce soir, après ce terrible parcours. Et puis après coup, je regrette. Je perds d’un centième de seconde, vous savez ce que ça représente un centième de seconde sur un parcours de 250 mètres ? Trois centimètres et demi ! Flûte, Marcus en a gagné assez de victoires, alors pour trois centimètres et demi, j’aurais pu lui prendre celle-là ». Le jeune Philippe Weishaupt a déjà le sens de la communication. En tout cas voilà un nouvel Allemand fort sympathique, lui qui devait ensuite défendre l’erreur de jeunesse de Simon Delestre qui a un peu forcé Couletto à poursuivre son parcours après s’être écrasé dans l’un des juges de paix de la soirée, la barre de Spa : « J’ai 25 ans, et j’aurais sans doute fait la même chose. C’est à partir de ce genre d’erreur que l’on acquiert de l’expérience. »
Patrice Delaveau est sans doute celui qui, malgré un quatre points (« Une faute que je prends à mon compte ») a fait la meilleure affaire de la soirée. Le chrono rapide de Katchina Mail devait lui permettre de compléter ce podium et d’accéder à la finale de la Coupe du monde à Genève en avril. Un résultat qui permet de revoir les ambitions du début de saison Coupe du monde que s’étaient fixées Laurent Elias : « L’objectif était de voir trois cavaliers qualifiés, mais désormais j’espère en voir un quatrième à Genève », précisait l’entraîneur national de saut d’obstacles à l’issue de cette étape bordelaise.
Mais c’est bien Ehning qui reste le héros de la soirée. Ce centième de seconde restera dans les annales comme l’égalité parfaite entre Ludo Philippaerts et Willi Melliger en 2001. Le public ne s’y est pas trompé, lui qui s’est levé comme un seul homme pour rendre hommage au Centaure allemand.
Communiqué R&B Presse
photo : bricotchristophe.com / CEB