Christophe Ameeuw réagit à l'annulation de Shanghai.
L’annulation du Global Tour de Shanghai n’est finalement même pas un événement pour le grand public avec une date une nouvelle fois repoussée. Néanmoins, cette annulation a de quoi en irriter plus d’un dont Christophe Ameeuw, Président de EEM World, obligé d’annuler le New-York Masters. Il a accepté de réagir pour nous :
Studforlife : Avez-vous été étonné par l’annonce de l’annulation du Global Champions Tour de Shanghai ?
Christophe Ameeuw : « Non, cette annonce n’est pas une surprise … mais elle me laisse perplexe et rempli de regrets. En Chine, nous savions que les quarantaines sont interdites et les négociations avec les autorités chinoises impossibles. C’est d’ailleurs la raison qui a poussé les Jeux Olympiques de Pékin en 2008 et le Longines Hong-Kong Master en 2013 de se tourner vers Hong-Kong.
Nous avions pourtant demandé à la FEI les preuves de la faisabilité du GCT à Shanghai sans jamais avoir une réponse concrète.
SFL : Peut-on encore imaginer un revirement de situation de votre part pour l’organisation du New York Masters en octobre ?
C.A. : « Non ! C’est aujourd’hui impossible. On parle d’un évènement avec un budget colossal et une indispensable communication en amont pour séduire le tout New York et remplir les tribunes.
Nous avions signé des contrats avec nos partenaires et démarré dans la même année la 3ème étape du Masters Grand Slam Indoor, nous nous accrochions à la date tout en étant persuadés que Shanghai était compromis.
Par sécurité, nous avions opté pour être un National prestigieux, avec l'accord de l'USEF (Fédération Equestre Américaine), comme à l'époque au Madison Square Garden et communiquer sur le New York Masters avec 1 million d'US$ de Prize Money, à défaut d’être un CSI 5*.
Le timing devenant très court et mettant en danger le bon fonctionnement de l'organisation, nous relancions régulièrement la FEI pour avoir des nouvelles de Shanghai.
Début juin la FEI annonçait sur son site officiel qu'avec l'aide de la princesse Haya et de l'OIE, ils avaient organisé un espace de quarantaine uniquement pour le GCT à Shanghai... Nous nous sommes alors retournés sur un National. Mais dans le même temps nous nous sommes heurtés à la FEI qui estimait que l’événement de New York risquait d’attirer les meilleurs cavaliers froissant alors le GCT. La FEI nous a entre temps communiqué son intention d' interdire l’organisation de ce genre de Nationaux.
Nos sponsors et nous-mêmes étant découragés, le timing de l'organisation devenant très court, la date de Hong-Kong 2014 toujours pas confirmée à cette époque par la FEI...nous avons décidé de postposer la date de New-York à 2014. »
SFL : Quels sont les conséquences de cette annulation ?
C.A. : « Il faut bien comprendre que l'annulation de NY nous a contraint malheureusement de rapatrier nos équipes, de nous séparer de 6 personnes formidables, de déménager nos bureaux de Manhattan, de nous séparer de nos appartements, de réorienter notre communication, sans compter les coûts des opérations et la déception de nos sponsors et de notre partenaire américain. Vous pouvez imaginer la difficulté d'installer un tel événement à New York, de bloquer la date des Halls dans une capitale parmi les plus demandées au monde, sans compter l'aspect financier!
Si nous voulons installer notre sport dans des capitales mondiales comme New York, Hong-Kong et Paris, nous avons besoin de travailler avec des fondations solides et avoir le support complet des autorités compétentes pour inscrire ces événements à long terme dans les calendriers des grands événements sportifs.Si aujourd'hui nous acceptons l'inacceptable nous devrons vivre notre passion dans un aquarium et nous contenter d’organiser des garden jumping VIP ou autres en petits comités.
SFL : Est-ce que cet épisode pourrait mettre un frein au développement d’EEM ?
CA : Nous avons déjà poussé l'aventure tellement loin et traversé de si nombreuses crises qu'il serait difficile de nous freiner. Cette passion nous a permis de réaliser nos rêves, développer notre sport et créer de l'événementiel dans un secteur qui en avait bien besoin.
Nous avons su séduire les marques de luxe, associer le lifestyle et les grandes sociétés, médiatiser notre sport, donner un souffle nouveau, tout en étant un événement populaire avec à la sortie notre sport toujours plus victorieux.
Nous les organisateurs, nous avons su créer entre nous une compétition pour améliorer chaque année la qualité de nos événements, une compétition entre nos partenaires, et bien entendu une compétition pour le Prize Money au grand bonheur des cavaliers et de leurs propriétaires.
Mais pour installer ce type de concept et démarquer notre sport parmi les plus beaux sports du monde et pérenniser ces événements pour notre génération et celle de nos enfants, cela demande énormément de confiance de la part de nos partenaires, une ambition démesurée et un zeste de folie et surtout le support des autorités concernées.
Les Masters démarrent en 2004 avec l' Audi Masters (première fois que le naming d'un jumping est vendu à un sponsor et ceci sur 5 éditions). Ensuite nous reprenons le Jumping de Paris en 2008 (quand toutes les fondations économiques s'effondrent sous nos pieds), nous créons la 1ère édition du Gucci Paris Masters en 2009 et emmenons avec nous le Salon du Cheval à Villepinte. Nous débutons notre communication sur les Masters Grand Slam Indoor en 2011 tout en essayant de réserver les halls à New York et de positionner Hong Kong.
En 2013 le Longines Hong Kong Masters est un grand succès, les tribunes sont pleines, le tout Hong Kong est présent, les cavaliers félicitent la qualité de l'organisation, la retransmission TV bat tous les records et les médias asiatiques perçoivent le LHKM comme un événement sur mesure pour Hong Kong qui devient un carrefour entre le reste du monde et l'Asie.
SFL : Votre société n’a pas été épargnée par les surprises cette année puisque Rolex a également décidé d’utiliser l’appellation « Grand Slam » pour la mise en place de son nouveau circuit.
C.A. : « Un Grand Slam avec 2 étapes Outdoor et une étape Indoor?? Nous admirons les organisateurs d'événements comme Calgary, Aachen et Genève et les sponsors qui ont aidé à les soutenir. Moi-même, j'ai emmené nos partenaires sur ces événements pour les montrer comme exemple de réussite, de quoi était capable notre sport. Mais il est difficile d'accepter encore une nouvelle formule de série d’autant que celle-ci reprend le nom utilisé en fin 2011 par notre société... Ce n'est pas parce que Rolex utilisait les Grand Slam dans l'eventing et d'autres sports qu'ils peuvent se permettre de nous copier dans le saut d'obstacles. Notre priorité était de communiquer depuis 2011 sur Grand Slam Indoor simplement pour nos sponsors et pour que le commun des mortels comprenne notre sport aussi bien que le tennis ou les grands événements sportifs. Par ailleurs, cela nous permettait également de nous différencier de ces trop nombreuses séries incompréhensibles pour le grand public et les médias.
Nous avons besoin d’être soutenus par les instances qui doivent nous aider afin d’assurer l'avenir de notre passion. Si nous donnons le droit à un seul homme de décider notre avenir sportif, alors nous perdons la crédibilité vis à vis de nos sponsors et futurs sponsors, des médias et ne pouvons faire vivre la démocratie sportive.... »
Cette annulation et l'absence de ces deux événements laissent perplexe. Si on veut espérer que notre sport se professionnalise comme bien d'autres sports et profite d'une bien meilleure médiatisation, il serait certainement temps que l'exemple vienne de la FEI elle-même. Pourquoi n'y a-t-il pas plus de rigueur au niveau de l'agenda ? Comment Jan Tops peut-il d'emblée annoncer une nouvelle date pour Shanghai en 2014 alors que d'autres concours éprouvent tant de difficultés à obtenir une date ? Veut-on vraiment continuer à décourager les organisateurs qui veulent encore relever le défi ?