Abou Dabi, Rome et… La Baule ! Disposant d’un vivier assez impressionnant en termes de chevaux et de cavaliers, l’équipe allemande de saut d’obstacles est décidément en pleine forme. À moins de deux mois du coup d’envoi des Jeux olympiques de Paris, Otto Becker a de quoi être satisfait. Au cœur du stade François-André, André Thieme, Kendra Claricia Brinkop, Marcus Ehning et Philipp Weishaupt, associés à DSP Chakaria, Tabasco de Toxandria, Coolio 42 et Zineday, ont tenu la pression face à une équipe de France elle aussi en grande forme. Les Belges ont complété le trio de tête.
Quelle après-midi pour l’Allemagne ! Dix-sept ans après sa dernière victoire dans la Coupe des nations Barrière du CSIO 5* de La Baule, l’escouade germanique a triomphé, vendredi 7 juin, comme il y a deux semaines à Rome. Du quatuor envoyé en Italie par Otto Becker, ne restaient que Kendra Claricia Brinkop et son impressionnant Tabasco de Toxandria, de nouveau au rendez-vous du haut de ses neuf ans. Le chef d’équipe, nommé en 2008, a dû patienter seize ans avant de soulever le trophée du temps fort collectif de l’Officiel de France. En 2024, à moins de cinquante jours du coup d’envoi des Jeux olympiques, il avait misé, outre la très en forme Kendra Claricia Brinkop, sur André Thieme et sa championne d’Europe 2021 DSP Chakaria, née Carelia, Philipp Weishaupt et Zineday, médaillés d’argent aux Européens de Milan en 2023, ainsi que sur un certain Marcus Ehning, déjà du collectif victorieux en 2007 avec Nolte’s Küchengirl et cette fois aux rênes de Coolio 42.
Au coude à coude avec l’Allemagne, la France n’avait pas le droit à l’erreur lors de l’ultime rotation du second acte si elle souhaitait conserver un infime espoir de s’imposer. Après un premier parcours entaché de dix points après un abord raté sur la rivière, Roger-Yves Bost et Delph de Denat n’avaient plus le choix. Déterminés à faire honneur au public, toujours présent en nombre dans les tribunes du stade François André, l’expérimenté Tricolore et son puissant fils d’Air Jordan ont parfaitement rectifié le tir, mettant alors la pression sur le dernier équipier allemand : Philipp Weishaupt. Chanceux sur le premier obstacle du second tour, le pilote de la Mannschaft a parfaitement gardé ses nerfs pour rentrer à l’heure et sans fausse note sur son brillant Zineday, dix ans. Révélation surprise l’an dernier, l’alezan endosse désormais un tout nouveau costume et semble presque incapable de renverser la moindre barre.
“La pression et l’enjeu sont ce qui rendent les Coupes des nations passionnantes. En étant quatrième pour l'équipe, on sait que tout peut arriver et que l’on doit être capable de répondre présent. Cela est plus simple avec Zineday qu’avec d’autres chevaux. Le monter est un immense plaisir. J’ai eu de la chance sur le numéro un dans la seconde manche. Je pense que je suis parti avec trop de relâchement”, a expliqué Philipp Weishaupt, l’un des cinq cavaliers à avoir réussi un double zéro cette après-midi. “L’an dernier, Zineday était un jeune cheval prometteur. Aujourd’hui, beaucoup de choses ont changé. Il est l’un des favoris et la pression a changé. Tout le monde pense qu’il sera sans-faute quoi qu’il arrive. Heureusement, j’ai la chance de bien tenir la pression. Je souhaite à tous les cavaliers de pouvoir un jour vivre le même sentiment que celui que me procure Zineday. Je suis extrêmement heureux et reconnaissant d’avoir la chance dans ma carrière de monter un cheval comme lui.” Et d’ajouter : “Je dois également dire que le public ici est hors pair. En étant sans-faute, j’ai eu l’impression de recevoir beaucoup d’applaudissements, alors même que cela reléguait la France au deuxième rang. Les gens ici sont de vrais hommes et femmes de sport. Je ne sais pas si dans la situation inverse la réaction aurait été la même à Aix-la-Chapelle !”
Avec une faute chacun, au premier tour pour Marcus Ehning et Kendra Claricia Brinkop, piégés par la palanque, avant-dernière difficulté du tracé de Grégory Bodo, et au second pour André Thieme, Coolio 42, Tabasco de Toxandria et DSP Chakaria ont également donné satisfaction à Otto Becker… et à leurs cavaliers. “Je suis toujours heureux de venir ici. Je n’avais plus gagné depuis longtemps ! J’ai été très chanceux d’avoir de super collègues aujourd’hui. Il s’agissait de ma première Coupe des nations avec Coolio et j’espère que cela nous donnera une bonne impulsion pour les prochaines semaines”, a déclaré le Centaure. “C’est la deuxième fois que je viens à La Baule. Il y a cinq ans, lors de ma première venue, mon cheval avait une forte fièvre en raison du transport et je n’ai pas pu monter ! Je suis ravi d’avoir eu l’opportunité de revenir. Ma jument a été blessée l’an dernier, ce qui nous a écarté des championnats d’Europe. Nous avions beaucoup d’interrogations quant à la façon dont elle allait revenir. Cela fait quatre ou cinq mois qu’elle a repris le travail et elle s’endurcit chaque semaine. Elle se bonifie à chaque sortie ! Je suis béni d’avoir cette jument”, a ajouté André Thieme en conférence de presse.
Kendra Claricia Brinkop n’a pas non plus tari d’éloges au sujet de sa superstar, Tabasco de Toxandria. “Evidemment, je suis ravie du comportement de mon cheval. Il a seulement neuf ans et pouvoir évoluer avec un cheval comme lui est quelque chose d'absolument unique. Face à l’expérience de mes coéquipiers, j’avais envie d’être à la hauteur. J’ai eu de bons résultats ces derniers mois et je suis confiante pour l’avenir”, a notamment déclaré la jeune amazone des écuries Stephex. “Tabasco a passé quelques mois sous couleurs irlandaises. Mais dans ce sport, tous les cavaliers ne s’entendent pas avec tous les chevaux. Je suis chanceuse qu’il soit revenu chez moi. Je m’entends très bien avec Tabasco et je suis ravie de pouvoir le monter cette année. Nous avons des objectifs, mais nous sommes une écurie de commerce et je sais ce que cela implique…”
Entre Abou Dabi, Rome et La Baule, où l’Allemagne s’est à chaque fois imposée, et Ocala, Otto Becker a aligné… douze couples différents en Coupe des nations cette saison, soit assez pour composer trois équipes olympiques ! Le chef d’équipe de la Mannschaft va sans doute se gratter la tête dans les semaines à venir, son vivier de chevaux comme de cavaliers étant parfaitement riche et dense. Hot Easy, United Touch S, Checker 47, Limbridge, Dorette, Mumbai van de Moerhoeve, My Prins van de Dorpheide entrent tous en concurrence avec les Tabasco, Coolio, Chakaria et Zineday vus à l’œuvre aujourd’hui.
Le public s’enflamme pour la France
Chauffer à blanc par un Olivier Robert qui a vécu un rêve éveillé, signant un double clear round avec son sublime Iglesias DV, le public français n’a pas manqué de faire du bruit pour la France. Bien que la nation hôte n’ait pas pu rivaliser avec l’Allemagne, les quatre cavaliers de Henk Nooren avaient le sourire. “Je suis non seulement content du résultat de nos cavaliers, mais surtout de la façon dont ils ont monté et dont leurs chevaux ont sauté. Nous avons connu deux Coupes des nations un peu moins agréables cette année, mais aujourd’hui nous avons vu sept excellents parcours. Bosty a manqué la fin de son premier tour mais a rectifié lors de son second parcours et a été formidable. Nous avons collecté de précieuses informations. Comme toutes les autres équipes, nous devrons prendre des décisions décisives d’ici deux semaines, afin de savoir qui représentera la France à Paris”, a glissé le sélectionneur des Bleus.
Tout comme Olivier Robert, François-Xavier Boudant a quitté le stade François André sous des applaudissements nourris et sans la moindre fausse note à son actif. Sur son grand Brazyl du Mezel, qui n’avait plus affronté de parcours à 1,60m depuis décembre et le CHI de Genève, le Tricolore s’est montré souverain, rappelant les excellents souvenirs laissés de son année 2023 exceptionnelle. Ces deux-là viendront-ils joué les troubles fêtes dans les plans du sélectionneur national ? Tout est encore possible.
Associé au jeune I Amelusina R51, encore ému par la tâche qui se dressait face à lui, Simon Delestre a enregistré cinq puis quatre points. Un de trop en première manche pour espérer voir le dénouement de cette Coupe des nations se solder par un barrage.
Menée par l’inimitable Peter Weinberg, la Belgique a totalisé douze points après ses deux manches. Le chef d’équipe allemand aura de sacrés motifs de satisfaction après cette épreuve. Quel Homme de Hus, qui effectuait son grand retour sur ce format de compétition a d’abord commis une faute, avant de balayer les derniers doutes qui pouvaient subsister quant à son état de forme. L’étalon de dix-huit ans est bel et bien de retour, et de quelle manière ! Jérôme Guéry et toute l’équipe qui entoure le fils de Quidam de Revel ont eu raison d’y croire et de se battre : l’objectif Paris 2024 n’a jamais été aussi proche. Autre performance marquante, celle de Wilm Vermeir et Iq van het Steentje. Comme l’an passé, le duo a récité sa leçon, alignant deux prestations impeccables. De quoi se tourner, là aussi, vers Versailles. Avec deux parcours sanctionnés d’une faute, Olivier Philippaerts et Niels Bruynseels ont laissé entrevoir des choses intéressantes, avec H&M*Miro pour le premier, qui dispose déjà d’une petite expérience, et Origi vd Vosberg, encore méconnu du grand public, pour le second.
La Suède passe à travers
Quatrième, la Suisse n’a enregistré que deux sans-faute, signé Alain Juffer et Edouard Schmitz, accompagnés de leurs respectifs Dante*MM et Gamin van’t Naastveldhof. En parallèle, tous deux ont également réalisé un parcours sanctionné par deux fautes, tandis que Pius Schwizer et Steve Guerdat, aux rênes de Vancouver de Lanlore, de retour à ce niveau depuis mai et après un an d’absence, et Albfürhen’s Iashin Sitte, ont quitté la piste avec quatre points lors de leurs deux passages.
La Suisse a été suivie par l’Autriche, toujours portée par les impériaux Max Kühner et Elektric Blue P. L’escouade d’Angelika May a été à la peine, cumulant vingt-quatre points… comme les Etats-Unis. Pourtant bien engagé avec le nouveau parcours parfait de Karl Cook et Caracole de la Roque, sanctionnés ensuite d'une faute sur le mur, le Stars and Stripes a dû composer avec l’élimination puis le retrait de Kent Farrington. Semblant parfaitement à l’aise sur le parcours de Grégory Bodo, l'athlétique alezan à l’indéniable talent s’est arrêté par deux fois sur la dernière combinaison du parcours, de manière inexplicable ou presque.
Vainqueurs de cette Coupe des nations en 2023, les Brésiliens n’ont guère fait mieux avec vingt-cinq unités au compteur. Les sans-faute de Pedro Veniss sur Nimrod de Muze*Imperio Egipcio en seconde manche, et de Yuri Mansur et Miss Blue Mystic Rose dans l’acte initial n’ont pas suffi…
En queue de peloton, la Suède et l’Espagne n’ont guère connu meilleures réjouissances. L’équipe de Henrik Ankarcrona, dépourvue de son leader Henrik von Eckermann, a été bien à la peine, malgré la bonne prestation de Petronella Andersson et sa géniale Odina van Klapscheut (0+4), dont la régularité au plus haut niveau ces dernières semaines continue d’impressionner. L’Espagne, elle, n’a même pas passé le cut de la première manche…
Photo à la Une : Philipp Weishaupt et Zineday ont encore impressionné, signant deux parcours parfaits pour leur première véritable Coupe des nations. © Mélina Massias
Les épreuves du Jumping international de La Baule sont à suivre en direct et gratuitement sur GRANDPRIX.tv tout au long du week-end.