Réunissant le meilleur de l’élevage de Marc Kluskens, Picobello van’t Roosakker n’est pas qu’un condensé d’origines. À tout juste dix ans, l’étalon BWP fait des étincelles avec Jason Smith. Associés depuis un peu plus d’un an, tous deux découvrent les joies du très haut niveau ensemble. Natif d’Ecosse, le cavalier de trente-quatre ans, qui défend les couleurs suisses depuis la fin du printemps 2023, ne tarit pas d’éloges au sujet de son fils de Kassander van’t Roosakker… et Daniel Etter, dont l’expérience n’est plus à louer, non plus ! Tous deux voient en lui un cheval de championnat et prendront le temps de le mener vers cet objectif non dissimulé. Portrait.
Cette année, Picobello van’t Roosakker fête ses dix ans. Et, à chaque fois qu’il foule une piste 5*, le gris séduit, fascine et passionne par son aisance hors pair au-dessus des obstacles. Initié à la compétition internationale par Daniel Etter, qui l’avait repéré dans son année de yearling, puis confié à Steve Guerdat, le fils de Kassander van’t Roosakker et My Lady Belle van’t Roosakker (Canabis) poursuit désormais son ascension vers l’Olympe aux côtés de Jason Smith, talentueux cavalier d’origines écossaises qui défend les couleurs suisses depuis la fin du printemps 2023.
Un coup de foudre plus fort que tout
En 2014, Marc Kluskens, éleveur belge installé dans la commune néerlandophone de Saint-Gilles-Waes et dont la réussite n’est plus à présenter, marie la toute jeune My Lady Belle van’t Roosakker, une fille de Canabis et arrière-petite-fille de La Belle van Sombeke alors âgée de deux ans à Kassander van’t Roosakker, étalon maison fils d’Echo van’t Spieveld et Electra van’t Roosakker et petit-fils d’Usha van’t Roosakker, qui effectue sa première année de monte du haut de ses quatre ans. Un an plus tard, Picobello van’t Roosakker tombe dans la paille. Le BWP réunit à lui seul le meilleur des courants de sang de son affixe et son avenir s’écrit d’ores et déjà en lettres d’or.
Kassander van't Roosakker, le père de Picobello. © Sportfot
Quelques mois plus tard, Luc Henry, proche de Marc Kluskens et lui aussi éleveur de renom, sous l’affixe Hero, envoie une vidéo à son ami Daniel Etter, champion d’Europe par équipe en 2009, sixième en individuel, au départ de deux finales de la Coupe du monde et des Jeux équestres mondiaux de Lexington et excellent dénicheur de talents, dont les olympiques Baloutinue et Cylana. “Luc Henry et moi sommes très amis. Nous étions propriétaires de Ganesh Hero Z, un étalon par Gemini, lorsqu’il était jeune. Il a fait la monte en Irlande, chez ma sœur, puis nous l’avons vendu (en 2024, le bai s’est classé jusqu’en Grand Prix 5* avec le Mexicain Carlos Hank Guerreiro, ndlr). Après cela, Luc et moi avons continué notre collaboration et avons eu plusieurs poulains ensemble. Un jour, il m’a envoyé une vidéo d’un poulain gris qui sautait en liberté, et je lui ai répondu ‘celui-là, je le veux’. Je ne saurais pas vraiment dire ce qui m’a plu… Il sautait bien, mais lorsqu’on reçoit des vidéos, beaucoup de chevaux sautent bien ! Et puis, on ne sait jamais ce qui est naturel ou ne l’est pas… Mais dès les premières secondes, je suis tombé amoureux. Quelque chose me disait de l’acheter”, se souvient le Suisse. Seulement, pour concrétiser l’affaire et s’offrir ce jeune bijou, le marchand doit aussi faire l’acquisition d’un second poulain. Le coup de foudre est tel que Daniel Etter n’hésite pas longtemps et achète le jeune Picobello van’t Roosakker, de moitié avec Luc Henry. “Picobello est de loin le poulain le plus cher que j’aie jamais acheté ! Mais en voyant cette vidéo, il ne m’a pas fallu une seconde pour prendre ma décision”, souligne-t-il.
Fa-Belle van't Roosakker, grand-mère maternelle de Picobello, a évolué jusqu'à 1,50m avec Cindy van der Straten. © Sportfot
Une formation sans fausse note
Déjà sous le charme et convaincu du potentiel du gris, Daniel Etter décide de le protéger de la lumière des projecteurs. À trois ans et demi, il rejoint ainsi l’Allemagne et les écuries de Johannes Holzeder, qui dispose de l’expertise nécessaire pour assurer sa formation de jeune cheval, mais aussi les prémices de sa carrière d’étalon. “Je ne voulais pas qu’il vienne dans mes écuries avant ses cinq ans. Sinon, il y avait de fortes chances pour que certaines personnes s’intéressent à lui et je n’avais pas envie de cela. Picobello était notre projet”, justifie l’Helvète. Daniel Etter n'a jamais douté de Picobello van't Roosakker. © Sportfot
Outre-Rhin, le fils de Kassander van’t Roosakker n’échappe pourtant pas aux regards avertis. En 2018, il décroche haut la main son agrément au stud-book Zangersheide, avant de confirmer toutes ses prédispositions en terminant vice-champion du test des cinquante jours au haras d’Etat de Neustadt Dosse, avec une moyenne de 8,66/10. “Picobello n’a pas eu besoin de beaucoup progresser durant ces cinquante jours. Dès le début, il était vraiment bon, avec un saut en liberté de premier ordre et doté de beaucoup de talent. Dans l’ensemble, il s’agit d’un très, très bon étalon. On apprécie tout simplement voir comment cet étalon fait son travail”, dira même le jury au sujet de sa prestation.
Avant de retrouver la Suisse et Daniel Etter, Picobello van’t Rossakker fait ses premiers pas en compétition officielle en 2020, toujours aux côtés de Johannes Holzeder. Comme pour tout, le gris ne déçoit pas et franchit les étapes les unes après les autres, sans montrer l’ombre d’une difficulté. L’année suivante, Picobello regagne les écuries et la selle de son propriétaire, avec lequel il concourt pendant un peu plus de deux ans, jusqu’à juin 2023. “J’ai monté Picobello jusqu’à ses huit ans. À ce moment-là, je ne concourais déjà plus vraiment à haut niveau, mais je savais que j’avais une superstar. Je l’ai toujours dit. À sept ans, j’ai racheté la moitié de Luc Henry. J’avais de bons chevaux, mais Pico avait besoin et méritait de prendre part aux grandes compétitions”, retrace Daniel, qui parle alors à Steve Guerdat, l’un de ses meilleurs amis, de sa pépite. “Steve n’a pas eu de grande réaction lorsque Pico avait sept ans. Il m’a dit qu’il était bon, mais je voulais qu’il me demande de le monter !”
Qu’à cela ne tienne, le Suisse continue de polir son diamant. Un peu plus d’un mois après son premier Grand Prix 2*, le couple boucle la finale réservée aux chevaux de huit ans du CSIO 5* de Saint-Gall à la quatrième place, grâce à un double sans-faute. S’il n’a jamais douté des qualités de son protégé, Daniel Etter en obtient une nouvelle preuve et se doit de donner un nouveau tournant à sa trajectoire. “À Saint-Gall, il n’a signé que des sans-faute lors des trois jours de compétition. Il n’a pas touché une seule barre. Je me suis dit qu’il était temps de lui dire au revoir. Alors, sur le chemin du retour, je me suis arrêté chez Steve, à quinze minutes de Saint-Gall. C’était désormais à lui de jouer”, sourit le Suisse.
Les prestations parfaites de son BWP à Saint-Gall ont fini de convaincre Daniel Etter de passer les rênes. © Sportfot
Un cadeau de Noël en or
Steve Guerdat fait très vite connaissance avec Picobello van’t Roosakker, et après un CSI 1* disputé fin juin à Roeser, l’engage à… Aix-la-Chapelle ! Le néo-duo signe un sans-faute et un parcours à quatre points, avant de s’octroyer la douzième place du Grand Prix réservé aux jeunes chevaux, pour un point de temps dépassé. Dans la foulée, le BWP et son nouveau cavalier sont huitièmes d’une épreuve de même niveau au CSIO 5* de Dublin, et décrochent la six puis la troisième place dans deux épreuves intermédiaires à 1,40 et 1,45m lors du CSIO 5* de Bruxelles, fin août. La paire poursuivra son aventure pour deux internationaux de plus, jusqu’à fin octobre, avant de se séparer.
“À Aix-la-Chapelle, Picobello a fait forte impression ! J’ai eu beaucoup de sollicitations pour le vendre. Steve avait beaucoup de chevaux à monter et ne pouvait pas emmener Picobello avec lui avant début 2024. J’en ai profité pour le faire prélever, afin d’avoir un bon stock de semence. Entre-temps, les propriétaires de Jason Smith, avec qui je suis ami depuis longtemps, m’ont fait part de leur intérêt. Jusqu’à présent, ils n’avaient jamais acheté de cette catégorie. J’ai prévenu Steve et lui ai laissé la priorité, mais il n’est pas parvenu à réunir des investisseurs pour le sécuriser. Après deux très courts appels entre lui et ses propriétaires, Jason est venu essayer Picobello”, reprend Daniel Etter.
Sous la selle de Steve Guerdat, l'étalon BWP s'est fait remarquer à huit ans. © Mélina Massias
Quelques jours avant son trente-troisième anniversaire, et juste avant Noël 2023, le natif de Glasgow rencontre celui qui pourrait bien devenir le cheval de sa vie dans les années à venir. “Je n’ai pas sauté grand-chose, ni testé ses moyens”, raconte Jason Smith. “Je connais Picobello depuis que Daniel a commencé à le monter. Je savais donc qu’il était un cheval fantastique. Lors de l’essai, mes attentes étaient forcément élevées ! Mais je voulais juste voir quel était mon sentiment en selle, savoir s’il correspondait à ce que je pouvais imaginer. C’est pour cela que je n’ai pas sauté très haut. J’ai été positivement surpris par la gentillesse de Picobello. Il est d’accord pour tout ce qu’on lui demande, heureux de travailler et il n’y a aucun rapport de force avec lui. Il aime simplement faire quelque chose. À l’obstacle, les sensations sont explosives. On a l’impression que rien ne lui pose problème !”
La seconde partie de cet article sera disponible jeudi sur Studforlife.com…
Photo à la Une : Picobello van’t Roosakker et Jason Smith dans leurs œuvres à Bâle, en début d’année. © Tiffany Van Halle