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“Je suis très heureuse d’être dans la position qui est la mienne à cette étape de ma carrière”, Laura Kraut (1/2)

Laura Kraut
vendredi 27 octobre 2023 Mélina Massias

Malgré les années qui passent, la passion et le talent de Laura Kraut restent intactes. Et il y a de quoi. La souriante et avenante Américaine peut compter sur un piquet de chevaux de très haut niveau fourni et complémentaire. Baloutinue, Bisquetta, Dorado 212, Calgary Tame, Confu… Tout ce beau monde fait le bonheur de la meilleure cavalière du monde, qui aidera l’équipe américaine dans sa quête d’une qualification olympique dans quelques jours dans la capitale chilienne, à Santiago, où se déroule les Jeux panaméricains. Vaincus à Barcelone, où la vingt-deuxième mondiale s’est livrée, les Etats-uniens ont une dernière chance à saisir. Dans la première partie de cet entretien, Laura Kraut évoque avec ferveur quelques-unes des montures qui lui permettent de continuer à vivre un rêve éveillé au sommet du sport qu’elle aime tant, dont Dorado 212, son complice pour l’échéance panaméricaine.

Bien qu’elle ne soit pas tout à fait terminée, quel bilan tirez-vous de votre saison 2023 ?

J’ai le sentiment d’avoir vécu une bonne année. J’ai connu un peu de déception avec la blessure de Baloutinue (Balou du Rouet x Landor S) à Aix-la-Chapelle (qualifié pour la deuxième manche du Grand Prix dominical du CHIO 5* le bai brun avait été obligé de déclarer forfait, ndlr). Jusqu’à ce moment-là, il était inarrêtable. Heureusement, sa blessure semble être mineure. Nous recommençons déjà à le monter et idéalement il sera en mesure de reprendre du service l’an prochain. J’ai la chance de pouvoir compter sur un très bon groupe de chevaux, qui évoluent tous à un bon niveau, en ce moment. Je suis très heureuse d’être dans la position qui est la mienne à cette étape de ma carrière.

Baloutinue n'est plus apparu en compétition depuis juillet dernier et le mythique CHIO 5* d'Aix-la-Chapelle. © Mélina Massias

Entre cet incident à Aix-la-Chapelle et votre chute dans le Grand Prix du CSIO 5* de Rome où vous étiez en passe de vous imposer, vous avez pour le moins joué de malchance cette année…

En effet, nous n’aurions pas refusé d’avoir un peu plus de chance avec Baloutinue ! Ce qui s’est passé à Rome est tellement dommage ! Notre chute a été assez spectaculaire, mais Baloutinue est dur au mal. Cela n’a pas semblé l’avoir dérangé et les vétérinaires n’ont rien trouvé, mais au fond de moi, et même si je n’ai aucune preuve, je me demande si cela n’a pas joué un rôle dans sa blessure à Aix-la-Chapelle…

“Le sentiment sur Baloutinue est incroyable”

Comment avez-vous rencontré ce cheval qui semble occuper une grande place dans votre cœur ?

J’ai observé Baloutinue pendant un long moment, puis le fils de mon amie Katie Prudent, Adam, le montait. La toute première fois où je l’ai vu, je suis allée les voir directement pour leur demander qui était ce cheval et s’ils étaient prêts à le vendre. Et ils m’ont répondu par la négative. 

J’aimais particulièrement le fait qu’il me faisait penser à un Pur-Sang. Il avait tellement de sang et était si léger. Il est un peu du côté “fou” des Pur-Sang, mais j’aime ça chez lui. J’ai grandi en montant des Pur-Sang, j’apprécie donc toutes leurs qualités et facettes. Je suis très proche de Katie et Henry. Alors, lorsqu’ils ont finalement décidé de vendre Baloutinue, plusieurs années plus tard, j’ai eu l’honneur qu’ils viennent m’en parler en premier et la chance d’avoir un propriétaire, St Bride’s Farme, d’accord pour l’acheter. Tout cela s’est déroulé un peu au dernier moment, juste avant la date butoir pour les Jeux olympiques de Tokyo. Je crois que nous avions jusqu’au 9 avril (en raison de la reprogrammation des Jeux d’un an, la période de mercato avait été étendue, ndlr) pour déclarer un nouveau propriétaire et nous l’avons acheté le 8 avril ! Cela ne nous a pas laissé beaucoup de temps pour apprendre à nous connaître, mais pour une raison que j’ignore, je savais qu’il était mon type de cheval. Heureusement, j’avais raison et nous nous sommes bien entendus très rapidement. Baloutinue a aussi une personnalité rêvée. Aussi féroce qu’il puisse paraître en piste lorsque je le monte, il est littéralement comme un chiot aux écuries ! Il est d’une extrême douceur et gentillesse. Il a le meilleur des deux côtés.

Sortie de piste pour Laura Kraut et son Baloutinue adoré. © Mélina Massias



Que ressentez-vous lorsque vous le montez ?

Le sentiment sur son dos est incroyable ! J’en parlais avec Beezie (Madden, ndlr) hier (entretien réalisé le 30 septembre, ndlr). Pour moi, c’est facile. Tout ce qu’il faut faire et contenir son énergie, puis soit on ferme un peu plus les doigts sur les rênes, soit on les relâche légèrement, mais il n’y a jamais de rapport de force avec lui car il a toute la puissance nécessaire. Je n’ai pas besoin d’en créer moi-même ; tout est en lui, prêt à exploser. Finalement, tout dépend de ce que je décide de laisser passer ou non à tel ou tel moment. Il est super courageux. Il n’y a rien qu’il n’essaiera pas de faire. Cela me donne beaucoup de confiance, peu importe la situation.

Votre objectif avec lui sera donc d’aller à Paris l’année prochaine ? 

Absolument !

Avant de viser les Jeux olympiques de Paris, Baloutinue devra achever sa convalescence et l'équipe américaine se qualifier pour l'échéance. © Sportfot

“J’ai une grande confiance en Dorado”

En attendant, vous pouvez compter sur plusieurs chevaux pour prendre le relais au plus haut niveau, comme Dorado 212 (Diarado’s Boy x Chacco-Blue), votre partenaire ici à Barcelone. Quelle est son histoire ?

Je l’ai rencontré il y a un an. Il était en Allemagne et était monté par le même cavalier (Michael Hornung, ndlr) depuis ses cinq ans. Je l’adore ! Il est un peu différent de mon type de cheval habituel, mais il a une attitude formidable. Il fait tout le temps son maximum pour bien faire. Je dirais qu’il est encore un peu vert pour ce niveau, car il n’a commencé à affronter des parcours à 1,60m qu’il y a environ six mois, mais il comble son manque d’expérience par ses efforts. J’ai une grande confiance en lui.

Le jeune et fort prometteur Dorado aura une grande mission à relever à Santiago du Chili dans quelques jours. © Mélina Massias

Votre fidèle Confu (Contact Me x Cambridge) est toujours en pleine forme ! Quel est votre plan pour lui ? 

Il est merveilleux ! Il a désormais seize ans. En somme, j’essaye juste de lui proposer des choses qui l’amuse. Il adore venir en concours. Certains chevaux préfèreraient sans doute être mis à la retraite et profiter du pré toute la journée, mais Confu aime toujours autant l’attention qu’il reçoit. Alors, je l’emmène où je pense qu’il prendra du plaisir. Je ne le fais concourir que sur des hauteurs qui sont faciles pour lui, en général jusqu’à 1,55m maximum. 

"Confu adore venir en concours", assure Laura Kraut. © Mélina Massias

En mars 2022, vous avez remporté un Grand Prix 4* à Wellington avec lui, ce qui vous avait rendu particulièrement émotive. Qu’avait cette victoire de si spécial à vos yeux ?

Ce qui m’a vraiment émue est le fait qu’en décembre 2021, Confu est tombé très malade. Il s’agissait d’une situation à risque et très indécise pour lui ; nous ne savions pas s’il allait survivre. Il a passé trois semaines à la clinique. Non seulement les vétérinaires n’étaient pas sûrs qu’il s’en sortirait, mais s’il surmontait la maladie, ils n’étaient pas certains qu’il puisse de nouveau concourir. Mais parce que Confu est Confu, et qu’il est un battant, il a surmonté tout cela. Le fait qu’il remporte ce Grand Prix ce printemps-là était génial ! En fait, il a même vécu la plus belle année de sa carrière sportive l’année dernière. Peut-être était-il reconnaissant d’être en vie ! (rires) C’est aussi pour cela que j’ai décidé de ne pas lui mettre la pression cette saison. J’espère qu’il pourra continuer à faire cela un peu plus longtemps. Je crois qu’il me fera comprendre lorsqu’il sera prêt à prendre sa retraite. Pour l’heure, il adore ce qu’il fait. Tant que c’est le cas, je suis heureuse de l’avoir à mes côtés en concours.

Après avoir frôlé la mort, le petit Confu a retrouvé toute sa superbe. © Mélina Massias

En juillet dernier, vous avez remporté le Grand Prix 4* de Chantilly Classic en compagnie de la jeune Bisquetta (Bisquet Balou vd Mispelaere x Takashi van Berkenbroeck). Comment jugez-vous son potentiel ? 

Je pense qu’il s’agit aussi d’un cheval très spécial. Bisquetta a neuf ans cette année et je l’ai récupérée alors qu’elle en avait sept. Je suis ravie de ses progrès. Lorsque nous l’avons achetée, je pensais qu’elle avait les qualités pour devenir un cheval de haut niveau, mais on ne peut jamais vraiment prédire une telle chose. Je pense qu’elle va devenir l’un de mes meilleurs chevaux. Elle a tous les moyens et un super comportement pour sauter. Elle adore être en piste et concourir. J’ai l’impression d’avoir atteint un bon niveau avec elle. Elle était sans-faute et sixième lors de son premier parcours au CSI 5* de Rome (la deuxième manche de la Global Champions League, une épreuve à 1,60m, ndlr), puis n’a concédé qu’une faute dans le Grand Prix. Je lui accorde désormais une pause et j’ai un très bon sentiment pour l’année prochaine. Je pense qu’elle sera de nouveau partante pour sauter tout ce qu’on lui demande !

Bisquetta fait partie des très bons éléments qui composent le piquet de Laura Kraut. © Mélina Massias



“Un jour viendra où Calgary Tame sera en mesure de gagner un Grand Prix 5*”

Quid du génial et compétitif Calgary Tame (Old Chap Tame x Kashmir van Schuttershof) ?

Il est l’un de ces chevaux qui est une pure surprise. Calgary est très, très petit. Lorsque les gens le voient en vrai, ils peinent à croire qu’il est capable de franchir ces gros obstacles. Il a été une super addition à mon piquet, car c’est un gagnant dans l’âme. Il commet rarement une faute et ferait n’importe quoi pour son cavalier. Il a onze ans cette année, mais il venait de traverser la période Covid lorsque je l’ai récupéré. C’était en quelque sorte une année blanche pour nous. De fait, son niveau d’expérience était inférieur à celui qui aurait pu être le sien en conditions normales. Un jour viendra où il sera en mesure de gagner un Grand Prix 5*. Il sera cependant de ces chevaux qui ont besoin de prendre part à de plus petites épreuves et cibler un bel événement, exactement l'était Cedric. Je ne pouvais pas enchaîner les parcours importants avec lui. Il fallait le faire redescendre en termes de hauteur, puis viser une épreuve plus importante. Pour moi, Calgary lui est similaire sur ce point. C’est aussi un cheval très drôle et sympa à monter ! 

Laura Kraut n'hésite pas à comparer Calgary Tame à son cher Cedric dans la façon de gérer leur carrière. © Sportfot

Diriez-vous que vous comptez actuellement sur le meilleur piquet de votre riche et longue carrière ?

Il en est en tout cas assez proche, oui. En fait, ce groupe de chevaux est vraiment tout sauf compliqué. Ils sont tous francs, volontaires, respectueux et courageux, ce qui est très chouette. J’ai eu quelques excellents chevaux dans le passé, mais ils étaient tous un peu délicats. Mes complices du moment, en tout cas ceux que nous avons évoqués, sont parfaits à monter pour une personne qui prend de l’âge ! (rires)

Après avoir connu pléthores de cracks dans sa carrière, Laura Kraut estime avoir aujourd'hui l'un des meilleurs piquets de chevaux de sa vie. © Mélina Massias

Parmi vos jeunes montures, vous comptez notamment sur Una Mariposa (United Touch S x Hors La Loi II), sept ans. Pensez-vous qu’elle a ce qu’il faut pour gravir les échelons jusqu’au niveau 5* dans les années avenir ? 

Oui, je le crois. Encore une fois, on ne peut pas vraiment en être sûr tant qu’ils ne l’ont pas fait, mais elle a assurément la qualité de saut, la puissance et le mental pour. Rien ne la dérange. Des quatre chevaux que j’ai emmenés à Aix-la-Chapelle cette année, elle était la plus détendue d’entre tous ! Désormais l’idée est de prendre notre temps avec elle, et la laisser progresser en attendant qu’elle ait neuf ans. L’an prochain, pour son année de huit ans, je vais sélectionner avec minutie ce que je fais avec elle et patienter jusqu’à 2025. 

Una Mariposa marchera-t-elle dans les traces de son illustre père ? Elle semble en tout cas avoir toutes les qualités pour ! © Mélina Massias

Vous rappelle-t-elle son géniteur, le spectaculaire United Touch S ? 

Bizarrement, pas vraiment, même si j’adore United Touch S, un peu comme tout le monde je crois. Je ne connais pas la mère d’Una Mariposa, mais je pense qu’elle lui ressemble. Elle a le coup de saut de son père, mais elle n’a pas hérité de son immense galop si explosif. Et je pense d’ailleurs que c’est mieux ainsi ! Sinon, cela serait plus difficile. Richard Vogel est un super cavalier pour monter un tel cheval ! Je dirais aussi qu’Una a la bravoure d’United Touch. 

L'avenir s'annonce brillant pour la jeune Una Mariposa. © Mélina Massias

Photo à la Une : La joie et le sourire caractéristiques de Laura Kraut, ici à Barcelone. © Mélina Massias

La seconde partie de cet entretien est disponible ici.