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Entre père et fils, Danny et Jens Nijs écrivent l'histoire de l'affixe de Nyze en lettres d'or (1/3)

Danny et Jens Nijs
jeudi 16 janvier 2025 Mélina Massias

S’ils n’en sont pas à leur première réussite, Danny et Jens Nijs, père et fils, récoltent les fruits dorés d’un travail minutieux entamé voilà une trentaine d’années. Au nord de la Belgique, non loin de la frontière des Pays-Bas, fleurit l’affixe de Nyze. En 2024, deux de ses représentants se sont classés au niveau 5* : Calvino II de Nyze, sous la selle du jeune prodige Thibeau Spits, et Crack de Nyze, plus connu sous le nom de Landon et complice de Kent Farrington. Si le premier a été vendu au cours de l’été à l’écurie Iron Dames et que le second a perdu confiance lors du CSIO 5* de La Baule et manqué les Jeux olympiques, l’avenir ne s’en annonce pas moins radieux pour l’élevage. À raison d’une dizaine de naissances par an, concentrées sur deux lignées principales, et d’une formation homemade, tous les ingrédients semblent réunis pour connaître le succès. De pré en pré, où chaque poulain, chaque poulinière, chaque mère porteuse sont scrutées par le regard affûté de Danny, son fils conte les jalons ayant forgé cette belle histoire, toujours en cours d’écriture. Un reportage en trois parties.

Dans les recoins de verdure d’Arendonk, une commune néerlandophone située à la frontière entre la Belgique et les Pays-Bas, à trente-cinq kilomètres au sud-ouest d’Eindhoven, il n’est pas rare de croiser la descendance d’Urmina (Heartbreaker et Mayke x Saygon) et Indigo van de de Meulenberg (Quadrillo et Ravella x Wanderkries). Ces deux juments sont les reines de Danny et Jens Nijs, le duo père-fils qui fait prospérer l’affixe de Nyze. Parti de rien, le patriarche, ancien mécanicien et toujours le premier à être appelé par ses voisins lorsqu’ils rencontrent des problèmes avec leurs véhicules, a bâti les fondations du Stud de Nyze, qui prospère aujourd’hui grâce, entre autres, à Calvino II de Nyze et Crack de Nyze, alias Landon.

L'excellent Crack de Nyze, alias Landon, a décroché deux médailles lors des Panaméricains de Santiago, en 2023, avec Kent Farrington : l'argent individuel et l'or par équipe. © Shanon Brinkmann / FEI

Une aventure familiale

Les racines familiales ont toujours été liées à Arendonk. Voilà un peu plus de dix ou quinze ans, Danny a fait l’acquisition d’un bout de terrain, orné de deux vieilles maisons d’agriculteurs, à cinq-cents mètres d’où il vit encore aujourd’hui. “Mon père vit toujours là-bas. Il a cinq boxes et une petite carrière, qui ne sert que pour les juments et les poulains”, raconte Jens Nijs. Du lopin d’il y a une décennie, ont émergées des installations flambant neuves : des écuries confortables, un manège, une carrière, ainsi qu’un marcheur. “Il n’y avait rien avant, juste les deux maisons, où ma sœur et moi pouvions vivre. Elle a monté à poney, mais n’a pas souhaité poursuivre l’aventure et a choisi une autre carrière professionnelle. À l’inverse, je voulais continuer dans cette direction. Même si nous avions commencé à connaître un petit succès à l’élevage avec Absie (Corland), le premier produit d’Urmina, nous étions loin d’être professionnels. Alors, j’ai commencé à acheter des chevaux de commerce. J’ai construit cet endroit grâce à cette activité, pas grâce à la vente de Landon ou que sais-je. Une année, j’ai vendu peut-être deux-cent-cinquante chevaux. Cela m’a permis de voir trois grandes parties de notre monde : l’élevage, dans lequel je suis pleinement investi grâce à mon père, même s’il reste décisionnaire sur tout, le commerce ainsi que le sport, à bon niveau. Comme tout jeune cavalier ambitieux, j’avais envie de goûter au haut niveau. Je l’ai fait, et je n’étais pas trop mauvais, mais je sentais que le très, très haut niveau n’était pas pour moi. Désormais, je forme les stars de demain pour les meilleurs cavaliers du monde, comme Kent Farrington ou Thibeau Spits. Je n’ai d’ailleurs jamais vu un talent comme le sien, il est incroyable”, poursuit Jens.

Jens Nijs dispose de toutes les installations nécessaires pour former ses jeunes pépites à l'affixe de Nyze. © Mélina Massias

“J’aime à dire que je vis aujourd’hui le rêve de mon père”, reprend-t-il. “Mon père vient d’une famille nombreuse. Il avait cinq frères et sœurs et était le fils aîné de la fratrie. Comme la coutume le voulait à l’époque, il a dû travailler pour subvenir aux besoins de la famille. Mais il était déjà passionné par les chevaux. Alors, avec ses propres économies, il a acheté un poney. Lui et ses frères tombaient tout le temps ! Les années sont passées, et il avait toujours un cheval, mais n’en n’a jamais fait naître étant jeune.” Âgé de soixante-cinq ans, Danny s’essaye à l’élevage pour la première fois en 1992, avec une jument Pur-Sang baptisée Bruscine qu’il croise à Saygon (Alcanar xx x Dukat), qui laissera sa marque sur l’élevage belge. Un an plus tard, naît Quimper. “Quimper était un cheval de concours complet. Après quelques années, mon père a demandé à Joris Vanspringel, un cavalier belge qui a disputé quatre fois les Jeux olympiques dans cette discipline, de monter Quimper. Joris vit dans notre village et est un ami de longue date. Au fil des années, il a continué à monter fréquemment nos chevaux. Il a, par exemple, participé à l’éducation de Landon, Max de Nyze ou encore Calvino. Cette histoire dure depuis presque quarante ans !”, s’émerveille Danny.



La jument d’une vie

Né en 1988, une poignée d’années avant le fameux Quimper, Danny a évolué jusqu’en Grand Prix 4*. S’il assure qu’avoir mis un terme à ses ambitions purement sportives et ne pas avoir poursuivi sa carrière au-delà a été “la meilleure décision” de sa vie, il fut le catalyseur de l’élevage de Nyze. Petit, Danny monte à poney, mais son père, dont la vision s’établit toujours à long terme, voit déjà plus loin. “Lorsque j’avais peut-être huit ou neuf ans, mon père a vu une pouliche. Une fille d’Heartbreaker avec une mère par Saygon. Cette fille de Saygon, Mayke, était la propre sœur de City Banking, qui a participé aux Jeux olympiques avec Beat Mändli (terminant onzième à Atlanta en 1996 et quatrième de la finale de la Coupe du monde de Göteborg un an plus tard, ndlr) et était probablement le meilleur produit de Saygon. Mon père a voulu acheter cette pouliche, mais elle n’était pas à vendre. Malgré tout, il l’a acquise, pour beaucoup d’argent pour l’époque. Tout le monde lui disait qu’il était fou. Heartbreaker n’avait pas la réputation qu’il a aujourd’hui, City Banking commençait certes à être connu, mais sa propre sœur n’était qu’une poulinière. À ceux qui lui demandaient pourquoi il avait acheté cette pouliche aussi chère, mon père répondait qu’il voulait que la carrière de ma sœur et moi commence sur des bases solides. Cela a toujours été son état d’esprit”, déroule avec passion Jens. “Cette pouliche n’était autre qu’Urmina, la mère de Calvino I et Calvino II de Nyze (Calvaro), d’Absie, qu’a monté Andrew Ramsay, et bien d’autres produits. Il faut avoir un peu de chance, mais on l’a créé aussi. Il fallait avoir du cran pour acheter cette pouliche qui n’était pas à vendre et qui a rendu tout cela possible pour nous. Urmina a changé nos vies, et je ne parle pas seulement du côté financier ; elle nous a appris ce qu’était la qualité chez les poulains, dès la naissance.” 

Urmina, la meilleure poulinière de l'élevage de Nyze, est une nièce de l'olympique City Banking. © Dirk Caremans / Hippo Foto

Avant de prouver sa qualité de matrone dans les prés de la famille Nijs, Urmina a concouru jusqu’à 1,50m avec Jens. “C’était une jument pour les Jeux olympiques”, assure le cavalier, sans la moindre once de doute. Si elle-même n’aura jamais l’occasion d’affronter l’échéance tant convoitée, l’un de ses nombreux produits le fera peut-être ? La baie, dans un état absolument superbe malgré ses vingt-sept printemps en 2024, est la star de Danny et Jens. Et alors que l’avènement de Landon, classé dans plusieurs Grands Prix 5* aux Etats-Unis et médaillé d’or par équipe et d’argent en individuel aux Jeux panaméricains de Santiago en 2023 avec Kent Farrington, aurait pu pousser la lignée d’Urmina dans l’ombre, il n’en n’a rien été. Bien au contraire. À dix ans, Calvino II de Nyze a réalisé une saison 2024 plus prometteuse sous la selle du jeune prodige Thibeau Spits. Charismatique et brillant, le puissant fils de Calvaro s’est classé neuvième de son deuxième Grand Prix 5*, à Miami, un an après avoir décroché la troisième place de l’épreuve reine du CSI 4* de Moerzeke. Encore propriété de ses naisseurs jusqu’à l’été dernier, l’étalon Zangersheide a finalement été cédé à l’écurie Iron Dames et est passé sous la selle de Janne-Friederike Meyer-Zimmermann, après une belle aventure sous bannière belge. “Ma famille et moi sommes allés le voir à Miami, puis à Mexico. C’était fou et probablement l’expérience d’une vie, bien que nous allions tout faire pour revivre ce genre de moments”, savoure Jens. 

Calvino II de Nyze lors de son deuxième Grand Prix 5*, à Miami. © Sportfot

“Calvino II est le parfait exemple de la manière dont nous voulons travailler à l’avenir”, poursuit-il. “Nous ne sommes pas étalonniers et n’avons pas les installations pour garder des étalons, mais je crois que les principaux rêves des éleveurs sont de faire naître un champion olympique, un champion du monde et un étalon approuvé. J’ai monté Calvino II à quatre et cinq ans, puis, souffrant d’un problème de genou, Niels Fockaert a pris le relais. Niels a travaillé pendant deux ans pour moi, et j’ai toujours de très bonnes relations avec lui. J’ai repris les rênes de Calvino II à huit ans. J’ai vraiment senti qu’il avait quelque chose de spécial, au-delà du fait d’être un étalon. J’ai alors nourri l’objectif de participer au CSI 2* de Malines, un événement sacré pour nous les Belges, avec lui. Sur la piste principale, remplie par les spectateurs, je l’ai senti grandir. Il a sauté de manière spectaculaire et je me suis rendu compte qu’il était trop talentueux pour moi. Il avait tout le potentiel et j’ai senti ce jour-là qu’il deviendrait un grand cheval. J’y pensais déjà, mais je me suis vraiment dit qu’il avait besoin d’un cavalier à sa hauteur. Nous avons noué un excellent partenariat avec Thibeau Spits, dont nous avons été ravis”, résume Jens. 



Une descendance fournie et voulue 

Préservé par Thibeau Spits, le beau bai n’a certainement pas encore révélé toute l’étendue de son potentiel. À sa nouvelle amazone, désormais, d’en tirer la quintessence et de lui permettre de briller à sa juste valeur dans les années à venir. Avant lui, outre Absie, Calvino de Nyze, son propre frère né en 2009, s’est classé jusqu’à 1,60m avec Pieter Clemens avant de défendre les couleurs mexicaines. Et après lui, une ribambelle de fils et filles d’Urmina se préparent, dans l’ombre, à faire des étincelles. Entre 2000 et 2017, la matrone de l’affixe de Nyze a donné neuf poulains, selon les données de Horsetelex. Depuis, la fille de Heartbreaker a ajouté pas moins de trente (!) produits à sa descendance. “Tout tourne autour d’Urmina, ou presque. Lorsqu’on a le luxe d’avoir une jument comme elle, j’estime qu’on ne doit pas immédiatement utiliser ses filles à l’élevage. J’ai le sentiment que dans deux ou cinq-cents ans, Urmina serait toujours moderne ! Je pense qu’elle pourrait concourir parmi ces générations-là sans problème. Elle a prouvé sa qualité dans le sport, d’abord, et j’ai certainement gâché son talent en raison de mon jeune âge à l’époque, puis à l’élevage. C’est pour cela que nous utilisons l’ICSI et que nous voulons avoir autant de poulains d’elle que possible. Elle aura bientôt trente ans, et nous voulons qu’elle laisse le meilleur héritage possible”, justifie le Belge.

Urmina, ici âgée de vingt-sept ans, a été acquise pouliche par Danny Nijs et reste, à ce jour, la jument de base de l'affixe de Nyze. © Mélina Massias

Pour autant, Urmina n’est pas la seule star d’Arendonk. Sa camarade de prairie, l’explosive Indigo van de Meulenberg a aussi son mot à dire !

Photo à la Une : Danny et Jens Nijs auprès de leurs deux reines mères : Urmina et Indigo van de Meulenberg. © Mélina Massias

La suite de ce reportage sera disponible dans quelques heures sur Studforlife.com !