R.D. : « Cela fait déjà une année que l'on ne peut plus sauter avec des rênes allemandes je pense mais on pouvait encore les utiliser sur le plat et aux remises de prix ce qui ne sera plus le cas au premier janvier. Je pense qu'une telle mesure peut avoir de bonnes répercussions à un petit niveau car on voit des gens qui malheureusement ne sont pas bien encadrés et font un peu tout et n'importe quoi. Lorsqu'on voit des gamins de 15 ans avec des rênes allemandes de 30 cm de long en pensant que c'est comme cela qu'ils vont régler tous leurs problèmes : je ne pense pas que ce soit une très bonne éducation pour de jeunes cavaliers. Après pour des mecs qui montent bien et ont de l'expérience, je crois que c'est une mesure un peu extrême. »
Le fait que Jennifer Meylan se soit installée chez vous, est-ce que cela montre aussi une volonté de votre part de transmettre à votre tour ?
R.D. : « Ce n'est pas ma passion favorite mais le faire avec des gens qui montent très bien, c'est complètement différent. D'ailleurs, lorsque Thomas Fuchs vient à la maison, elle s'entraîne également avec lui et peut aussi profiter de ses conseils. Notre travail avec Jennifer, c'est plus un travail en équipe même si je l'aide lorsque je suis à la maison et que je dis ce que je pense lorsqu'elle saute les chevaux… mais parfois, en la regardant avec un cheval, je me dis aussi « Tiens, c'est vrai pourquoi est-ce que je n'ai pas fait comme cela avec ce cheval-là. » Je pense qu'on est plus fort à plusieurs et que le pire, c'est de s'enfermer dans un coin tout seul en pensant que vous n'avez plus rien à apprendre. Je n'aime pas me sentir seul dans un coin et me dire que si j'ai un problème je serai seul. Après si une ou deux personnes ayant déjà un bon niveau me demandaient pour les aider, ça ne me dérangerait pas de le faire. Si c'est entraîner des gens pour sauter 1m-1m10 … tout de suite je n'ai pas le temps, pas le besoin et pas l'envie ! » Twentytwo des Biches (Mylord Carthago) a évolué conjointement avec Jennifer Meylan et Romain Duguet en 2015.Vos enfants, vous avez envie de les pousser un peu à évoluer dans le sport ?
R.D. : « Si j'ai une ou mes deux filles qui veulent essayer de faire ça, je les encouragerais et je leur donnerais la chance de le faire mais je ne les obligerai pas car c'est quelque chose dont tu dois avoir envie. Je pense qu'on le fait mieux lorsqu'on a envie de le faire, si on doit le faire parce que papa ou maman l'a fait, c'est terrible ! On s'épanouit dans la vie quand on fait quelque chose qu'on aime. Si vous vous dites que vous devez être architecte parce que votre père était l'un des meilleurs architectes au monde alors que vous n'avez pas de talent pour ça mais que votre talent est plutôt pour être pianiste : faites pianiste, pas architecte ! La première a neuf ans et a l'air vraiment mordue mais bon, entre monter à poney, aimer rouler les bandes avec ma groom et vouloir en faire sa vie, il y a encore un monde. Si c'est leur désir, je les aiderais. Après auront-elles du talent ou pas … . »
Votre famille, comment vivent-ils cela ?
R.D. : « Ils sont super heureux pour moi. Dès qu'un concours passe à la télé, ils sont devant leur téléviseur et mes parents sont venus me voir à Aix-la-Chapelle durant toute la semaine. Ils ne viennent pas souvent et là, ils étaient là. Ils vivent cela à fond. Ils sont très contents de ce qui m'arrivent même si ma s?ur a dû arrêter de travailler dans les chevaux à cause de problèmes de dos, elle est toujours derrière moi et c'est super d'avoir des gens qui sont derrière vous. »Après une année comme celle-ci que peut-on encore espérer ?
R.D. : «Que cela continue ! Que ma famille et mes chevaux soient en santé. Que l'on puisse continuer à gagner … et gagner plus encore, j'espère que c'est le début … même si on sait très bien que le palmarès d'un cavalier, ce sont les chevaux qui le font. Nous avons réussi à faire une médaille en équipe cette année, j'espère que nous en aurons d'autres et pourquoi pas une individuelle un jour ? Gagner un Grand Prix, c'est toujours une joie immense alors j'espère qu'il y en aura d'autres. »
Quand on voit votre position avant la finale individuelle des championnats d'Europe, c'est votre seule déception de l'année ?
R.D. : « C'était mon premier Championnat international et je n'avais pas fait beaucoup de championnats avant cela. On était parti pour se qualifier pour les Jeux Olympiques et nous sommes revenus avec une médaille par équipe. Je pense que nous avons eu une équipe fantastique cette semaine-là. Nous avons eu une très bonne année en coupe des nations durant toute l'année car nous sommes des gens qui nous entendons bien et qui nous battons pour l'équipe et ça, c'est chouette. Evidemment que quand on est troisième avant la finale individuelle, on espère rentrer avec une médaille … mais ça ne s'est pas produit, ça s'est joué à une faute. J'étais forcément déçu mais je ne voulais garder que le positif. »
La Suisse a eu des conditions de préparation relativement difficiles avec l'épisode autour des chevaux de Steve Guerdat, le départ des chevaux de chez Pius Schwizer mais avec Steve Guerdat à vos côtés durant le début du championnat alors qu'il était en pleine tourmente. Comment avez-vécu cela ?
R.D. : « Janika Sprunger et Martin Fuchs avaient des chevaux jeunes pour ce niveau d'épreuve. Les deux chevaux avaient fait une belle année et continuent de faire de belles choses. Janika avait déjà participé à plusieurs championnats alors que Martin a déjà beaucoup de médailles en junior et jeunes cavaliers. Ils savaient donc ce que c'était la pression et un championnat et Janika avait déjà vécu de grandes choses avec Palloubet. Paul Estermann lui avait déjà vécu trois ou quatre grands championnats et il est arrivé avec une jument en super forme. On avait quand même une bonne équipe sur le papier même si on avait des chevaux assez jeunes et moi qui n'avait jamais vécu un grand championnat. Après la réaction de Steve, je n'ai pas du tout été étonné car il a toujours dit qu'il était au service de l'équipe et cela lui arrive durant l'année de venir sur un CSIO en tant que 5 ème et dans ce cas-là, il fait la reconnaissance avec nous, il se met dans le paddock avec nous et nous motive. A Aix, il est venu sans aucune prétention et certainement pas en nous disant qu'il avait gagné plus que nous mais bien en nous motivant. Je pense que les deux jours où il était là ont été primordiaux. C'est chouette de voir le leader d'un pays capable de s'effacer pour motiver les gens à se battre pour notre pays et pour notre équipe. Là, ce n'est pas un nom individuel, c'est la Suisse, tout simplement. »
Après Quorida, avez-vous déjà d'autres montures susceptibles de prendre la relève ?
R.D. : «Oui, j'ai deux neufs ans : Sherazade du Gevaudan qui était un peu moins bien à Lyon mais elle a fait de très bonnes choses cette année et ça arrive de louper un concours, ce ne sont pas des machines. J'ai également Sucrette de la Roque qu'on a vu un petit peu moins cette année mais qui est une jument dans laquelle je crois beaucoup aussi, qui est également par Kannan grande et alezane. J'ai également deux bons 6 ans puis on continue à travailler et essayer de trouver d'autres chevaux pour continuer à avancer … »
FIN.