L'an dernier, le Selle Français Oslo Biats (Lando x Hadj x) remportait le titre de champion du monde des 6 ans sous la selle du cavalier anglais William Fox Pitt lors du mondial du Lion d'Anger l'an dernier au plus grand plaisir de ses 17 propriétaires et de son éleveur Philippe Brivois!
Durant l'été, au hasard d'un reportage photo au Haras de la Pomme, nous avons rencontré cet éleveur passionné qui pratique désormais le transfert d'embryon avec sa jument fétiche, Aurélie du Prieuré, mère de son jeune crack.
Studforlife.com : Comment avez-vous débuté votre élevage ?
Philippe Grivois : En fait, au départ, j'achetais des poulains que je revendais avant d'acheter ma première jument qui n'était autre que la mère d'Oslo. Nous l'avons fait sortir en concours à 4 ans. Elle était très chaude et de ce fait un peu compliquée. Nous avons donc décidé de la faire saillir … et je me suis donc lancé dans l'élevage.
SFL : Quels buts vous étiez-vous fixés en débutant votre élevage ?
P.G. : N'avoir que des champions du monde, pourquoi ? (rire) Mon but était avant tout d'essayer de produire des chevaux de sport même si à côté de ça, je continuais d'acheter des poulains … même si à un moment, j'ai arrêté car j'avais vraiment beaucoup trop de chevaux !
SFL : Est-ce qu'aujourd'hui vous pensez avoir toujours les mêmes objectifs qu'à vos débuts ?
P.G. : Oui et non. Au début, comme je ne connaissais pas grand-chose en élevage, j'ai essayé d'utiliser des étalons qui avaient performé au haut niveau et j'ai fait des essais parfois un peu malheureux. J'ai par exemple utilisé Souviens Toi III qui n'a pas toujours apporté ce que j'espérais. C'était un cheval qui avait de gros moyens mais qui s'est révélé comme un piètre reproducteur. On apprend de nos erreurs tout à fait modestement …
SFL : Lorsque vous avez acquis la mère d'Oslo, qu'est ce qui vous plaisait chez elle ?
P.G. : Avant tout son modèle ! Je l'ai acheté dans les marais à Valognes dans la Manche. Elle était dans un sol très mou avec un pied plus long que l'autre. Elle m'a tout de suite plu, je trouvais qu'elle dégageait vraiment quelque chose. Elle a des points de force, du sang et un ?il expressif.
SFL : Pourquoi avoir utilisé Lando ?
P.G. : Ce cheval me plaisait bien. On disait qu'il avait énormément de caractère et c'est une chose qui me plait beaucoup car je reste persuadé que pour faire des épreuves actuelles, il faut des chevaux qui ont évidemment la qualité pour sauter mais aussi l'énergie pour le faire. La jument était gentille donc je me suis lancé et je dois dire qu'aucun des produits de Lando que j'ai eu ne m'a causé de soucis. Il se révèle d'ailleurs maintenant qu'à l'usage, c'est un cheval qui est très gentil alors qu'à l'époque, il avait une réputation de cheval difficile.
SFL : Lorsqu'Oslo est né, qu'avez-vous pensé du poulain ?
Ce n'était pas un poulain comme les autres. J'avais appelé Arnaud Evain en lui disant que j'avais un poulain qui sortait de l'ordinaire. Très poliment, il m'avait dit « oui, oui, oui … » mais finalement, il confirme.
Dès poulain, on pouvait voir qu'il avait énormément de force dans l'arrière main. Maintenant, dès que j'ai un poulain qui naît, je regarde … mais je n'ai pas encore ressenti de nouveau la même chose même si je pense qu'ils ont des qualités mais Oslo avait ce petit truc en plus.
SFL : Quel fut le parcours d'Oslo ?
J'ai d'abord fait les concours de 2 ans avec lui et je me suis vraiment bien amusé car c'était un cheval très facile, il montait dans le van comme un vieux cheval, c'était vraiment très agréable. Il s'est qualifié pour les finales nationales mais j'y ai été en prenant cela comme un exercice pour les ventes Fences de novembre en me disant que ça lui ferait une bonne répétition. Je l'avais juste sorti du pré avant de l'emmener et de ce fait, le cheval n'avait pas la condition pour faire cela et n'était pas très fleuri. Lors des ventes Fences, je l'ai racheté … puis Arnaud Evain m'a dit qu'il y avait 3 personnes très intéressées par le cheval et qui voulait bien négocier avec moi. Parmi eux, il y avait Eric Attiger qui m'a expliqué ce qu'il voulait faire avec le cheval. Il m'a laissé le cheval chez moi durant son année de 3 ans. C'était un bon arrangement puisque je suis reparti avec le chèque et le cheval ! (rires) A 4 ans, il l'a fait exploiter par un cavalier et à l'issu du championnat des 4 ans, Eric Attiger s'est rendu au Lion d'Angers où il a rencontré William Fox Pitt et il lui a amené le cheval pour qu'il l'essaie. William Fox Pitt avait bien aimé le cheval … mais trouvait qu'il était trop petit avec des oreilles trop petites. Cette année là, Attiger organisait des ventes de chevaux de complets en Angleterre un mois après le Lion d'Angers et il ramenaa le cheval en Angleterre pour que Fox Pitt le réessaie. De toute façon, vu sa taille, il doit tous les trouver trop petits … A l'issu de cet essai, le britannique acheta la moitié du cheval dans un premier temps avant d'acheter l'autre partie. Il décida ensuite de syndiquer le cheval pour être certain qu'il puisse rester dans ses écuries car il venait de se faire subtiliser un cheval par un de ses aimables confrères … mais néanmoins concurrent. A 5 ans, Oslo a fait tous ses tours en Angleterre avec quand même un certain succès avant de gagner des épreuves à 6 ans et d'arriver au Lion.
SFL : Comment avez-vous vécu le Lion d'Angers l'année dernière ?
J'ai été opéré du c?ur et j'ai maintenant 3 piles !! … Non, heureusement, mon c?ur va très bien mais ce fut énormément d'émotion d'autant plus que cela dure 3 jours et que le cheval a été en tête du début à la fin. Il a gagné le dressage, il a été bon sur le complet en étant sans faute puis il est sacré le jour du CSO ! Ca a été trois jours fantastiques. Pour un éleveur avoir un produit qui est sacré champion du monde, c'est quand même quelque chose qui n'est pas tout à fait ordinaire. J'ai eu énormément de chance que le cheval tombe au bon endroit, chez la bonne personne … et je pense que si moi, j'ai de la chance à ce niveau là, mon cheval a également énormément de chance quand je vois tout le soin et toute la préparation qu'on peut lui apporter, je ne vais pas dire qu'il est né avec une cuillère en argent dans la bouche, mais ça l'a bien aidé.
SFL : Quel regard aviez-vous sur le complet et quel regard avez-vous aujourd'hui sur cette discipline ?
J'en étais resté à l'image que j'avais du complet à l'époque où je montais à cheval. A cet époque Dominique Bentejac était la référence, c'était un format d'épreuve tout à fait différent où l'on voyait pour le CSO des chevaux avec énormément de sang et une grande tenue de galop. Maintenant, avec la nouvelle direction du complet, nos chevaux de CSO à partir du moment où ils ont du sang et qu'ils se déplacent avec une bonne locomotion peuvent aller faire du complet. Avant les chevaux faisaient un ou deux complets l'année aujourd'hui, ils en font un par mois. C'est complètement différent.
Personnellement, je ne connaissais pas du tout ce milieu car je n'étais tout simplement jamais aller voir un complet mais depuis qu'Oslo a été vendu, je me rends chaque année au Lion d'Angers et je suis également aller voir d'autres complets à Pompadour, à Saumur et cette année à Fontainebleau et c'est vrai que c'est passionnant. D'autant plus qu'il y a une relation éleveur - cavalier - propriétaire qu'on ne trouve pas ou qu'en tout cas, je n'ai pas trouvé dans le CSO. Par exemple, pendant l'année de 5 & 6 ans d'Oslo, William Fox Pitt appelait à chaque fois Eric Attiger pour lui donner les résultats du cheval et Eric Attiger m'appelait après et donc, une fois par mois, à chaque fois que le cheval sortait, j'avais un coup de téléphone le lundi pour me dire ce que mon cheval avait fait et me donner les ressentis du cavalier à propos du cheval. Pour un éleveur, je vis depuis 3 ans quelque chose d'exceptionnel grâce à ce cheval.
J'ai actuellement un autre cheval chez Aurélien Kahn et on n'est pas pressé. J'ai l'impression, je ne voudrais pas juger quoi que ce soit, mais j'ai l'impression que l'on fait un peu plus attention aux chevaux : qu'on les prépare, qu'on les dresse et qu'on fait véritablement attention au cheval. On a quand même un capital et il y a un véritable investissement du cavalier sur un cheval pour construire un capital de confiance, de dressage et un tas de chose comme ça. J'avoue que j'ai été un peu médusé et bluffé par le complet car je ne connaissais pas et j'ai vraiment découvert quelque chose.
SFL : Est-ce que ça a changé quelque chose dans votre optique d'élevage ?
Oui, tout a fait ! J'essaie maintenant d'utiliser des chevaux qui se déplacent, qui ont une bonne tête … Je pense qu'on arrive maintenant plus facilement à trouver des reproducteurs qui ont un coup de saut mais maintenant, il faut trouver des reproducteurs qui se déplacent bien avec de belles allures et un beau physique. Je suis en train d'essayer de faire des croisements dans cette optique. J'ai par exemple utilisé il y a deux ans Sandreo avec une mère Kannan, c'est vrai que c'est différent. C'est un poulain qui se déplace très très bien et qui a un coup de saut. J'ai toujours utilisé beaucoup d'étalons étrangers et je continue sur cette lancée. Pour mon élevage et vu les juments que j'avais, ça m'a apporté beaucoup de locomotions et de l'élégance. Maintenant, je ne suis pas du tout fermé pour autant et je ne voudrais surtout pas dire qu'il n'y a que ceux-là et j'utilise aussi des chevaux français.
SFL : Que peut-on vous souhaiter pour l'avenir ?
Continuer comme cela !! Ca m'irait très bien. Je ne veux pas faire la fine bouche et je suis très heureux d'avoir eu un tel cheval avec un tel palmarès dans ma jeune carrière d'éleveur, c'est extrêmement encourageant et ça donne du moral pour continuer, ça c'est certain.
Aurélie a donné naissance cette année à une pouliche d'Orlando et nous avons une porteuse pleine de Lando. Nous avons également une pouliche de Lando avec une s?ur utérine d'Oslo par Souviens toi III alors qu'une autre s?ur d'Oslo par Concorde est pleine de Lando pour 2010. Espérons que l'histoire continue …