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Nicolas Deseuzes : un parcours atypique vers le haut niveau

Nicolas Deseuzes
Reportages mercredi 18 novembre 2020 Oriane Grandjean

Retrouvez la première partie de notre reportage chez le cavalier français Nicolas Deseuzes...

À presque 45 ans, Nicolas Deseuzes s’est fait tardivement une place à haut niveau. Pourtant, grâce à Quilane de Lezeaux, il a accumulé les succès, notamment en CSI 5*, avec des classements de choix dans le Grand Prix de La Baule en 2017, au CHI de Genève 2018, la neuvième place dans le Grand Prix Coupe du monde de Lyon en 2018 également, ainsi qu’une septième place lors du Saut Hermès en 2019. Le Tricolore, qui a posé ses valises à Divonne-les-Bains il y a six ans, nous a accueillis dans les spacieuses installations du centre équestre où ses chevaux de tête côtoient des chevaux d’avenir qui devraient lui permettre d’étoffer son piquet de haut niveau. Nicolas Deseuzes revient pour Studforlife sur son parcours, son organisation et ses chevaux. Un reportage en trois volets pour faire plus ample connaissance avec ce sympathique cavalier. 

Partie 1 : du cavalier de club aux Grands Prix 5*

Ses débuts comme cavalier, Nicolas Deseuzes les vit en club, à deux pas de la capitale où il grandit : « Je ne viens pas du tout d’une famille de cavaliers. Quand j’avais six ans, ma maman m’emmenait au poney-club une fois par semaine en région parisienne. J’étais assez mordu des poneys. Durant les vacances scolaires je faisais des stages. A mes seize ans, mes parents ont acheté un poney qu’on avait dans le jardin avec un box, à côté du garage. C'est aussi à ce moment que j’ai eu le galop 7, qui permet de faire des concours. »

Nicolas Deseuzes fait le planning dans ses écuries

Cette passion pour l’équitation ne quitte plus Nicolas Deseuzes, qui est toujours tourné vers le sport. Une fois son bac en poche, il obtient le STAPS pour être enseignant de sport et suit en parallèle la formation pour devenir moniteur d’équitation. « Après deux ans, je me suis dirigé complètement vers l’équitation. Et comme j’avais arrêté mes études, j’ai été rattrapé par le service militaire. J’ai pu faire mon service dans les chevaux, donc ça s’est bien passé. » Après ses premières années comme cavalier professionnel, durant lesquelles il travaille essentiellement avec de jeunes chevaux, il a l’opportunité d’être engagé comme enseignant dans un lycée agricole. «Durant dix ans, j’ai été professeur pour des apprentis qui travaillent avec les chevaux. Ce qui était bien, c’est que j’avais les week-ends de libre ainsi que de nombreuses vacances. Cela m’a permis d’avoir des chevaux dans une écurie à côté, à Maison-Laffitte, et de débuter plus sérieusement la compétition. Au fil des années, j’ai eu des chevaux plus performants et j’ai pu faire des épreuves plus intéressantes. J’ai d’abord diminué mon taux comme professeur pour finalement arrêter complètement et me concentrer sur la compétition. C’est à ce moment que j’ai fait la rencontre de Catherine Girardot, la propriétaire de mes chevaux de Grand Prix. On a acheté des chevaux ensemble, dont Quilane de Lezeaux (Grenat de Grez), qui m’a mené au haut niveau. »

Nicolas Deseuzes dans les belles installations de Divonne-les-Bains

Dans le parcours de Nicolas Deseuzes, pas de circuits juniors et jeunes cavaliers, qu’on cite souvent comme très formateurs pour accéder à l’élite. Il n’a donc pas été confronté à des Coupes des nations ou à de grands championnats durant ses jeunes années : « Comme cela ne fait pas longtemps que je fais ce niveau de compétition, j’ai pris part à des Coupes des Nations de niveau 3* seulement pour le moment. Je me retrouve donc souvent avec des cavaliers plus jeunes que moi, âgés de vingt cinq à trente ans, qui ont déjà de l’expérience acquise dans les Coupes des nations juniors et jeunes cavaliers et même des championnats d’Europe, et qui ne se posent aucune question dans ces situations, alors que pour moi, c’est plutôt nouveau. À dix huit ans, ils sautaient des 1.40m alors que moi je sautais dans le challenge local à 80cm ! »

Son parcours, loin des sphères du haut niveau de la relève, façonne le cavalier que Nicolas Deseuzes est devenu : « Mon apprentissage a été long, mais comme j’ai dû apprendre tout seul, j’ai fait des erreurs qui m’ont construit. Maintenant, quand je vois un cheval, je perçois rapidement comment l’exploiter, ses qualités et ses défauts. Pendant une période, lorsque j’étais au lycée, je montais avec ma sœur pour un éleveur de la région, qui n’avait aucune infrastructure. On prenait les chevaux dans le parc et dans un coin, il y avait un petit peu de sable étalé. On leur mettait une selle et on les montait. L’éleveur les emmenait au concours avec sa bétaillère. C’est comme cela que j’ai débuté. Je ne suis pas le seul dans ce cas, mais on est loin du papa qui confie son cheval de Grand Prix à son fils. »

Nicolas Deseuzes et Quilane de Lezeaux au Jumping de Crans-Montana

Si son parcours reste plutôt atypique à haut niveau, son style l’est aussi. Il l’avoue d’ailleurs sans le moindre complexe : « Je ne suis pas franchement classe à cheval, j’ai plutôt le physique d’un rugbyman ! » Une fois en piste, il fait néanmoins preuve d’une efficacité redoutable et est reconnu comme l’un des plus rapides du circuit. Et le Français de reconnaître que sa soif de victoire remonte à ses débuts : « J’ai un immense esprit de compétition. Quand je suis sans-faute, j’ai déjà l’impression d’être aux Jeux olympiques ! Un marchand à l’époque, qui m’avait confié quelques chevaux, avait dit “ L’avantage avec Deseuzes, c’est que quoi qu’il arrive, quand il entre en piste, il croit qu’il va gagner l’épreuve” », se souvient le cavalier, un sourire aux lèvres.

Quilane de Lezeaux et Nicolas Deseuzes au CHI de Genève © Sportfot

Faire sa place à haut niveau n’est pas facile, en particulier quand on éclot sur le tard. « J’ai commencé à faire des épreuves 1.50m lors du Grand National à Lyon 2013, où j’ai fait une barre, mais j’étais tout de même classé. Il ne m’en fallait pas plus pour que j’appelle l’équipe du sélectionneur pour demander à participer à des CSI. On m’a dit : “Va en Espagne faire des tournées, car ils prennent tout le monde”. Je suis donc parti plusieurs semaines à Oliva, en 2014, et là, j’ai classé plusieurs Grands Prix. Je cherchais les concours où je n’avais pas de problème de sélection : en Espagne, en Italie, en Pologne, au Maroc et en Algérie. De nombreux classements m’ont permis de me faire connaître un peu. Au Maroc, j’ai fait la rencontre de Fabrice Martin, un ami de Sylvie Robert (la directrice d’Equita Lyon, ndlr). Elle nous a poussé à former une équipe GL Events pour le Grand National. J’étais fou de joie. Dès que j’ai eu ce partenariat, Sylvie Robert m’a ouvert les portes de Lyon et du Saut Hermès. » En 2016, il participe ainsi au CSI 5* de Lyon où, grâce à un désistement, il se retrouve au départ de la grosse épreuve du vendredi, qualificative pour l’étape Coupe du monde du dimanche. Il y signe un double sans-faute et prend le quatrième rang aux côtés des meilleurs cavaliers du monde.

Toutefois, ses premiers pas dans le grand bain, c’est tout début 2016 qu’il les fait déjà grâce à Philippe Guerdat. Le Suisse, alors sélectionneur des Bleus, lui permet de prendre part à la Coupe des nations de Wellington, aux Etats-Unis. « Ma toute première Coupe des nations ! C’était incroyable de prendre l’avion avec un cheval. Bon, j’ai fait deux semaines là-bas et je n’ai pas signé un seul sans-faute. Je me souviendrai toujours de notre premier jour, dans une 1.40m en nocturne, ma jument a fait un gros saut sur la rivière et je suis tombé. Ce n’était pas le départ idéal pour ma première sélection en équipe de France ! Cela a été formateur, car quelques semaines plus tard, il y avait le CSI 3* d’Hardelot, qui servait de sélection pour La Baule. Là, ma jument fait deuxième du Grand Prix. L’expérience de Wellington avait porté ses fruits. J’étais moins tétanisé devant les grosses barres. » Nicolas Deseuzes peut ensuite prendre part à plusieurs CSI 5* ainsi qu’à des Coupes des nations. « Par contre, je n’ai jamais eu de succès dans les championnats de France. Sauf dans le championnat de France militaire et celui des enseignants, où j’ai décroché deux fois l’or. »

Découvrez la suite de notre entretien dès demain sur Studforlife !

Photos : © Clément Grandjean