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Nicolas Delmotte & Ilex, une ascension fulgurante

Reportages jeudi 3 août 2017
CSI***** Dinard 2017
Grand Prix

Ce week-end, le CSI***** de Dinard représentait une véritable inconnue. L'abondance des concours de haut niveau en plus des différents circuits mis en place avait confiné le Jumping de Dinard à un plateau plus restreint, offrant la possibilité de voir de nouveaux visages s'essayer au plus haut niveau. Le plateau pouvait compter sur quelques têtes d'affiches mais aura aussi permis de présenter au spectateur un schéma d'épreuve plus court … et c'est sans aucun doute la chose la plus positive de cet évènement. Le public a pu profiter d'un spectacle où même les néophytes n'ont pas eu le temps de s'ennuyer, qui se terminait à des heures raisonnables, permettant au public de rester à chaque épreuve jusqu'à la fin de la remise des prix sans s'enfuir pour rentrer au plus vite chez lui et ainsi de profiter encore aisément d'une soirée entre amis en découvrant cette somptueuse région.

Sportivement, gérer un Grand Prix doté de 300.000 euros avec 33 engagés n'est pas une chose aisée car il ne faut pas faire un parcours au rabais avec la moitié des partants au barrage … mais c'est quand même bien d'avoir un barrage. Après la première partie de l'épreuve, ce n'était pourtant pas gagné car les fautes se sont enchainées mais sans aucune catastrophe néanmoins.

Patrice Delaveau, qui s'est privé de voir sa seconde fille participer aux championnats d'Europe poney pour faire honneur au concours de Dinard, sortira de piste avec deux fautes sur Aquila SFN (Ovidius), comme deux des hommes en forme du week-end Therry Rozier sur Venezia d'Ecaussines (Kashmir van't Schuttershof) ou encore Louis Bouhana sur Qlandestin SAS (Elan de la Cour), ou encore le champion de France Romain Potin qui lançait pour la première fois Impressario vd Heffinck (Diabeau) à ce niveau d'épreuve. Tristesse pour Angelie von Essen qui bouclera un tour somptueux … mais avec un arrêt impromptu devant la rivière sur Crush (Corlensky G) alors que l'Américaine Adrienne Sternlicht pourra regretter cette faute sur l'oxer 3 vu la promenade de santé de la fantastique Cristalline (Cristallo I) qui s'était révélée sous la selle de l'Australien Chris Chugg. Même faute pour Emeric George qui pourra être très satisfait de son Rocker d'Ysieux (Crown Z). Après 15 partants, les spectateurs ont la réponse : le parcours est réalisable et ça peut même paraitre simple quand Nicolas Delmotte est en selle sur le BWP Ilex VP (Diamant de Sémilly) réalise le sans-faute. Laurent Guillet n'était pas loin de l'exploit mais voulant un peu trop assurer sur la rivière, il ne peut éviter une faute sur l'oxer Rolex qui suivait. Marie Hécart avec bouclé un très joli tour avec Cenwood Delle Lame (Emilion) mais avec malheureusement une faute d'antérieur sur la sortie du triple alors que Timothée Anciaume ne peut éviter la faute sur l'oxer central avec Kiamon (Kolibri). Un triple qui sera aussi fatal à Pénélope Leprévost avec l'étalon Selle Français Urano de Cartigny (Diamant de Sémilly) un peu trop généreux sur l'abord de l'entrée de la combinaison. Beezie Madden bouclera un magnifique tour avec Breitling La Silla (Quintero) qui aura juste eu une belle négligence sur l'oxer L'éperon placé en n°5. Déjà très en vue dès le vendredi, Cassio Rivetti était vraiment proche du sans-faute jusqu'à ce double de verticaux placé en fin de tour mais Ulahop Boy (Lamm de Fetan ) a prouvé aux juges du Selle Français et du BWP qu'il aurait pu recevoir sa chance dès ses 3 ans … même si le Selle Français vient de lui offrir son agrément sur performance. Le Brésilien peut être heureux de pouvoir compter sur son désormais cheval de tête depuis la vente de son autre étalon Selle Français de 9 ans qui lui était également confié par Joris van Dijck, Ut Majeur de Brecey (Diamant de Sémilly). Enorme déception pour Margaux Rocuet qui sautait ici son premier Grand Prix de ce niveau et réalise un tour magnifique tour avec Trafalgar Kervec (Quaprice Bois Margot) mais l'alezan se décale une première fois dans le triple avant d'éviter le double de verticaux. Le couple continuera sa route sans aucune encombre. Le sans-faute était si proche mais quelle déception ! La vedette de cette édition, Steve Guerdat a changé ses plans et n'en finit plus d'épater avec ses jeunes recrues mexicaines. Cette fois, c'est au tour de Cayetana (ex : Syvana de la Bride par Robin II Z) de se lancer sur les Grands Prix cinq étoiles. La Selle Français formée par Frédéric Busquet répond présent et réalise un magnifique tour même si elle ne pourra éviter une faute dans le double de verticaux. « Je suis content du classement et de la façon dont elle a sauté. A refaire, j'aurais refait exactement le même tracé. C'est une jument qui est chez moi depuis trois mois. Nous avions déjà gagné ensemble le Grand Prix de Roeser mais ici, c'est encore autre chose. C'était un Grand Prix assez difficile et je ne peux être que satisfait. C'est évidemment super pour moi d'avoir d'aussi bons chevaux qui viennent du Mexique actuellement. Tout cela, c'est grâce à un bon ami à moi, Juan Ramos qui travaille beaucoup avec le Mexique et qui a fait toutes ces connaissances. Tout le monde s'entend bien et c'est encore plus agréable comme cela. » glissera le Suisse. Quelle déception par contre pour Philippe Rozier qui verra tous ses espoirs de victoire s'éteindre devant ce même double de verticaux alors que Rahotep de Toscane (Quidam de Revel) aura survolé tout le Grand Prix avec une classe impressionnante. « Je m'en veux. J'ai vraiment offert ce Grand Prix. Je ne suis plus un junior, je sais que c'est de ma faute. Quand j'ai pris mon virage pour aborder ce double qui était très fautif, je me suis retrouvé avec une distance un tout petit peu courte. Le double de verticaux était mis en légère descente presque dos à la sortie. Je suis resté calme mais du coup, mon cheval a cru que tout était fini… c'est vraiment dommage car cela fait deux mois que Rahotep est en grande forme mais on a du mal à concrétiser. Je vais désormais lui accorder quinze jours de congés puis nous verrons la suite du programme. » réagira Philippe Rozier. Michael Greeve non plus ne fera aucune barre mais il ne pourra éviter un pied sur la latte de la rivière de Withney BB (Nabab de Rêve). Au final, il ne reste que trois couples pour voir enfin un barrage se dessiner. Gaëtan Decroix aborde son premier Grand Prix cinq étoiles sans complexe malgré un week-end difficile jusque-là. Son étalon Quel Homme de Hus (Quidam de Revel) s'emploie. Le couple est atypique mais il en veut. C'est une véritable lutte de chaque instant mais le parcours se déroule jusqu'à la ligne d'arrivée et aucune barre ne tombe ! Le chronomètre affiche deux points de temps dépassé mais le Bruxellois installé désormais en Normandie peut exulter : il a réussi son pari. « C'est mon premier cinq étoiles. Je remercie vraiment la famille Mars de m'avoir accueilli. J'ai vu la semaine dernière que plusieurs cavaliers belges s'étaient désistés et du coup, je leur ai envoyé un petit mail pour demander si je ne pouvais pas venir. J'ai appris ma sélection lorsque les chevaux étaient déjà partis au concours de Megève. Lundi dernier, j'étais en Belgique pour fêter l'anniversaire de Jérôme Guery et les chevaux sont repartis pour Dinard sans même que je ne puisse les monter entre les deux concours. Tout au long du week-end, il y a eu de belles choses mais nous avons souvent manqué de chance. Du coup, j'ai appelé Jérôme Guery et je lui ai envoyé toutes les vidéos. On a peaufiné les détails par téléphone et aujourd'hui, j'ai appliqué tout ce qu'il m'a dit. En fin de parcours, je ne me suis pas mis la pression mais je m'étais fait avoir il y a deux jours avec un virage similaire à celui d'aujourd'hui avant le double de verticaux où je m'étais un peu trop relâché et Jérôme m'a vraiment dit de ne rien lâcher jusqu'au bout et je me suis dit qu'il fallait vraiment que je donne tout jusqu'au dernier. Le dépassement de temps, c'était un peu mon plan dès le départ. Il ne restait que deux cavaliers après moi, mon cheval n'est pas très rapide et au barrage non plus alors je me suis dit qu'on n'allait pas risquer de faire une faute, on allait plutôt tenter d'être sans-faute avec un peu de temps, c'était le plan. Il y a quelques semaines, le sélectionneur a pris la décision de ne pas envoyer d'équipe sur un CSIO cinq étoiles car lui et deux cavaliers de haut niveau ont estimé qu'il n'y avait pas suffisamment de bons couples mais je pense qu'on peut nous estimer incapables de sauter des cinq étoiles qu'à partir du moment où on nous envoie sauter de tels concours et qu'on revient avec des catastrophes. Tant qu'on ne nous donne pas notre chance, je pense qu'on ne peut pas s'exprimer sur le sujet. Je suis persuadé depuis longtemps que mon cheval doit tourner sur du haut niveau, cela fait longtemps que je le dis mais j'espère désormais que ce résultat va nous ouvrir d'autres portes car malgré nos bonnes performances ces deux dernières années, cela est resté difficile d'avoir accès aux bons concours. Il faut parfois savoir prendre certaines défaites avec de l'humour comme hier dans le derby où je montais une jument dont je viens de faire l'acquisition mais qui est encore très verte et sans expérience même si elle a pas mal de qualités et une tête formidable. Après cette bévue, nous avons vraiment eu besoin de nous changer les idées et aujourd'hui, c'était notre jour. Je me suis isolé avant ce Grand Prix pour me concentrer car je me suis dit que j'avais vraiment une carte à jouer. Mon week-end avait moins bien commencé et comme je n'arrête pas de dire que j'ai un cheval pour sauter de gros concours, je savais qu'on m'attendait au tournant. Si cela s'était moins bien passé, on m'aurait dit « Voilà, tu as eu la chance d'y aller, ça s'est moins bien passé, reste un peu à ta place. » Je montais avec cette pression mais j'aime ça comme j'aime monter les épreuves en équipe car on travaille aussi pour les autres et c'est une bonne pression pour moi. Je pense que c'est ce qui m'a permis de tout donner aujourd'hui. » Mais ce n'est pas fini pour autant car le couple vainqueur de l'édition 2014, Karim El Zoghby réalise le parcours sans-faute avec Amelia (Cantos) et propose au public une revanche de son édition victorieuse où il avait battu Nicolas Delmotte. Il reste néanmoins encore un couple à s'élancer et la jeune Américaine Katherine Dinan peut cette fois compter sur son coach Beat Mandli revenu d'Hickstead pour le Grand Prix. Malheureusement, ses espoirs s'envoleront dès l'oxer numéro 3 même s'ils ne feront ensuite plus aucune faute. Ce sera donc un véritable duel où Nicolas Delmotte s'élancera en premier avec un ballottage défavorable alors qu'il participe à son premier Grand Prix cinq étoiles avec Ilex VP face à un couple expérimenté et rapide. Le Français l'a bien compris et il boucle un barrage sans faute sans prendre tous les risques mais en obligeant son homologue égyptien à en prendre plus. Karim El Zoghby connait très bien cette piste en herbe et il veut clairement réaliser le doublé. Malheureusement son rêve s'envole dès le deuxième obstacle, la barre de l'oxer Rolex très étroit s'effondre : Nicolas Delmotte tient sa revanche. L'Egyptien s'arrête, pas la peine d'aller plus loin. « Ma jument était heureuse ce matin et je sais que quand c'est comme ça, elle me donne tout. Elle a profité d'un très long repos après les jeux olympiques et ce n'est que son troisième ou quatrième concours. Le fait de partir en dernier me donnait un avantage d'autant que mon cheval est plus rapide et qu'en plus, j'aime monter avec la pression … mais ici, cela n'a pas été fructueux. Je me suis blessé aux adducteurs récemment mais heureusement, cela ne m'a pas gêné ici. Je n'ai ressenti aucune douleur. Je suis vraiment heureux de revenir chaque fois à Dinard car outre ma victoire en 2014, c'est une région que je connais très bien puisque j'ai travaillé il y a une vingtaine d'années pour Bruno Souloumiac qui n'habite pas loin. Je montais beaucoup de jeunes chevaux à cette époque. » Ce podium avait une véritable histoire puisqu'Ilex VP, le vainqueur, est un fils de la jument internationale Emma VP qui évolue sous la selle du troisième, Gaetan Decroix. « C'est assez incroyable car Ilex participait ici à son tout premier cinq étoiles. Nous avons commencé l'année en participant à des CSI** puis progressivement nous avons débuté les trois étoiles avec deux semaines à Knokke en point d'orgue. Après, nous avons eu cette possibilité de participer au concours de Dinard et je me suis dit que cela nous permettrait de voir où nous en étions. Tout arrive un peu vite … alors nous allons voir la suite du programme gentiment en regardant avec Philippe Guerdat également, d'autant que je pense que c'est un cheval qui pourrait un jour être capable de sauter un gros championnat. Je ne peux que remercier mes propriétaires et toute mon équipe mais je dois aussi remercier le public de Dinard car qu'est-ce que c'est beau de voir le public rester à une remise des prix de la sorte. Je pense que sur les terrains en sable, la qualité du sol sur une surface plane oblige les chefs de piste à construire des parcours toujours plus gros et mettant toujours un peu plus les chevaux à l'effort alors qu'ici, cette magnifique piste en herbe et ses dénivelés ont fait leur travail. Le parcours aura vu des fautes un peu partout mais sans mettre les chevaux dans le rouge pour autant et je trouve cela très bien.  » Véronique Vastapane, qui n'est autre que l'ex-femme de Michael Whitaker, est connue comme une découvreuse de talents sillonnant les concours jeunes chevaux en Belgique. C'est elle qui a repéré le BWP de 9 ans : « Lorsque j'ai repéré Ilex, il débutait les concours avec Jolien De Schepper , il avait 5 ans. Je l'ai alors acheté à son éleveur Alex Van Pollaert. Il avait de gros moyens … mais de là à dire qu'il gagnerait en cinq étoiles, je pense qu'on ne peut jamais dire … mais j'avais espoir quand même. Je pensais bien qu'il ferait de gros parcours. Lorsque je l'ai acheté, je l'ai un peu monté moi-même en régional fin de son année de cinq ans puis lors d'une discussion au téléphone avec Nicolas Delmotte, je lui ai dit que je pensais avoir un très bon cheval … il m'a dit de lui emmener pour qu'il l'essaie. Il avait six ans et n'a plus quitté ses écuries. Je lui ai toujours dit que s'il n'était pas assez bon pour lui, je le reprendrais pour moi mais c'est lui qui a fait tout le travail. A 7 ans, je commençais à avoir de belles offres et Béatrice Mertens entendait cela toutes les semaines mais je n'avais pas envie de le vendre alors elle m'a proposé d'en prendre la moitié pour que je puisse le conserver et grâce à elle, je vis un rêve. A Knokke, il a déjà été deux fois deuxième alors qu'il n'avait encore jamais sauté aussi haut puis le voilà gagnant de son premier cinq étoiles ! Tout cela arrive en trois semaines de temps, c'est incroyable. Le cheval a une tête en or, il est respectueux et il a des moyens illimités. J'essaie de faire du commerce avec de bons chevaux mais j'ai de la chance d'avoir pu garder celui-ci. Si on les vend tous, cela n'a pas la même saveur. Je prends de l'âge et c'est vraiment gai de pouvoir suivre son cheval d'autant que c'est une belle histoire d'amitié avant tout. Aujourd'hui, nous avons de très belles offres et c'est vrai que je serais tentée de le vendre mais Béatrice veut le garder alors pour le moment, on laisse cela en suspend … on ne sait pas ce que l'on fait mais j'espère qu'on va le garder. » Ilex est en effet une belle histoire d'amitié avant tout car sa co-propriétaire, Béatrice Mertens n'en est pas à son coup d'essai et de belles victoires, elle en a déjà connues. Véritable mécène des sports équestres, elle est une fidèle propriétaire de Michael Whitaker possédant notamment le vainqueur d'Aix-la-Chapelle, Amai. « C'est ma première victoire avec un cavalier français en cinq étoiles. Dès le départ, nous étions d'accord qu'Ilex resterait avec Nicolas. Cette histoire, c'est avant tout une amitié de tellement d'années que je n'oserais même pas le dire. Nous sommes avant tout des passionnées de chevaux. Véronique a trouvé le cheval, c'est elle qui a eu l'idée de confier le cheval à Nicolas et je trouve qu'il le mérite bien car c'est un cavalier d'exception. C'est un gentil garçon qui traite ses chevaux d'une manière remarquable et la récompense arrive vite. Après les résultats de Knokke, cette victoire à Dinard, c'est juste magnifique. C'est une belle aventure et il y a toujours autant d'émotion à suivre ses chevaux. »