Martin Fuchs met Leipzig à ses pieds et offre à Chaplin son plus beau titre
En tête après la Chasse et auteur d’un parcours acrobatique à quatre points dans le Grand Prix vendredi, Martin Fuchs s’est une nouvelle fois sublimé, lors de la dernière journée de la quarante-deuxième édition de la finale de la Coupe du monde. À Leipzig, face à des gradins enfin noirs de monde, le prodige suisse a triomphé, aux rênes de son cheval de cœur, Chaplin. Déjà deuxième de ce même événement hivernal en 2019, derrière son ami et compatriote Steve Guerdat, Martin s’est cette fois emparé de la plus haute marche du podium, devant un brillant Harrie Smolders, relégué au deuxième rang en raison d’une infime touchette concédée dans la seconde manche de la finale sur le bondissant Monaco, et un très solide Jens Fredricson, remonté en troisième position avec Markan Cosmopolit.
On savait Martin Fuchs capable de remporter n’importe quel championnat avec son fidèle Clooney 51. L’été dernier, le Suisse avait aussi prouvé tout son talent avec le jeune géant Leone Jei. Dimanche 10 avril, le prodige de vingt-neuf ans s’est imposé dans une grande échéance avec une troisième monture, son cheval de cœur : Chaplin. L’étalon bai, fils de Verdi TN, l’ancien crack de Maikel van der Vleuten, et de Jaltha B, une descendante de Concorde, suppléé dans cette échéance par The Sinner, a remporté son plus beau titre, à l’âge de quinze ans, pour sa première apparition dans un championnat. Martin Fuchs, lui, complète un palmarès déjà renversant, auquel il ne manque plus qu’une médaille olympique.
Avant de grimper tout en haut du podium de la finale de la Coupe du monde Longines de Leipzig, Martin Fuchs figurait au troisième rang après deux jours d’épreuve. En tête après la Chasse, le cavalier helvète avait préféré monter The Sinner vendredi, afin d’économiser son vaillant Chaplin. Ce choix aurait pu être à double tranchant, puisque sa deuxième monture a concédé une grosse faute dans le Grand Prix et a nécessité tout le tact de Martin Fuchs pour ne pas alourdir la note. De retour en piste aujourd’hui, Chaplin a été plus qu’à la hauteur, déroulant deux clear rounds sur deux sérieux parcours, toujours parfaitement dosés par le chef de piste, Frank Rothenberger. Loin des stéréotypes qui pouvaient lui être reprochés, l’Allemand a rendu une copie parfaite tout au long de la semaine, proposant à chaque fois des parcours accessibles, mais délicats, puisqu’un seul cavalier est parvenu à ne renverser aucun obstacle tout au long de la compétition.
Dans la manche initiale de cette finale en deux actes, huit des trente paires au départ sont sorties de piste sans la moindre faute, tandis que quatre couples supplémentaires n’ont été piégés que par le temps. Parmi le Top 10, Jens Fredricson, Harry Charles, Martin Fuchs et Harrie Smolders ont assuré, signant chacun un tour parfait, tandis que McLain Ward, alors aux commandes du championnat, comme en 2002, déjà à Leipzig avec Viktor, a péché sur l’oxer numéro cinq, se retrouvant un peu court dans la distance séparant de trois foulées les éléments quatre et cinq. À ce stade de la compétition, l’Américain, vainqueur du circuit en 2017, à Omaha, avec HH Azur Garden’s Horse, pouvait encore rêver d’accrocher un deuxième titre grâce à Contagious. Pour autant, McLain se trouvait à égalité avec un certain Harrie Smolders dont la monture, Monaco, paraissait en pleine forme pour son tout premier championnat.
Déception pour Grégory Cottard
L’événement marquant de la première manche restera sans doute l’incompréhension subie par Grégory Cottard, aux rênes de sa formidable Bibici. Alors que la grise, sixième ex-aequo survolait l’épreuve, sautant avec une qualité irréprochable, le vertical numéro sept, qui surplombait un bidet, l’a surprise, la poussant à ajouter une impossible foulée… Alors que la distance semblait idéale, la fille de Norman Pré Noir et Uélème a tout bonnement traversé l’obstacle. Sage, Grégory Cottard a préféré effectuer un cercle et repartir sereinement sur la suite du parcours. La suite, justement, s’est déroulée sans accroc, Bibici ayant poursuivi sa récitation. Mais, comme le dirait si bien un commentateur bien connu, le temps est hémophile. En plus des quatre points encaissés après la destruction du numéro sept, Grégory Cottard a ajouté dix-huit unités supplémentaires à son compteur… Dura lex sed lex. Les lois du sport sont parfois cruelles et la vingt-quatrième place finale du couple français ne reflète nullement ses prestations tout au long du championnat. Loin de là. Il faudra retenir le positif de cette première expérience dans une échéance majeure, et nul doute que de grandes et belles choses attendent Grégory Cottard et sa reine.
Les jeunes confirment
Pour le second parcours, les vingt meilleurs couples - ou presque, certains ayant préféré jeter l’éponge -, sont revenus en piste. La jeune Hunter Holloway, vingt-trois ans, et sa plaisante Pepita Con Spita, lauréates de la qualificative de Las Vegas, fin novembre dernier, ont achevé leur semaine de bien belle manière, sortant de piste avec deux points. Visiblement abordable, cet ultime tracé a surtout mis en lumière les chevaux les plus frais et les qualités des meilleurs pilotes. Ainsi, Denis Lynch, en tête du circuit général d’Europe de l’Ouest, a enfin arraché un sans-faute, avec le surpuissant Cristello. Il a été imité par Angelica Augustsson Zanotelli, pas entrée de la meilleure façon dans la compétition avec Kalinka van de Nachtegaele. Geir Gulliksen, lui, a craqué, son petit mais si généreux VDL Groep Quatro ayant déjà beaucoup donné. Avec seulement deux points de temps de pénalité, John Whitaker a donné une nouvelle leçon d’équitation à bord d’Unick du Francport.
Un peu loin après une faute dans la première manche, le Britannique de soixante-six ans a toutefois terminé douzième, pour sa première finale de la Coupe du monde depuis… 2000 ! Année lors de laquelle son neveu, Jack Whitaker n’était tout simplement pas né. Jack, lui, a délivré une nouvelle copie parfaite, faisant montre d’une équitation digne des plus grands. En selle sur un autre Selle Français, Valmy de la Lande, le jeune homme a été le seul à ne pas concéder la moindre barre de tout ce championnat. Une performance qui lui a valu une excellente cinquième place, un peu rageante puisqu’elle aurait pu se transformer en médaille de bronze sans un maudit point de temps échappé en route au premier tour aujourd’hui… Jack termine juste derrière son ami Harry Charles, d’un an son aîné, quatrième grâce aux performances de Stardust dans la Chasse et de Romeo 88 pour le reste de la compétition. Bref, la jeunesse et la délégation britannique a plus que tenu son rang !
Sans ses leaders, la Suède répond présent
Parmi les mieux classés à l’issue des deux premières journées de compétition, David Will, Conor Swail et Max Kühner ont subi un peu de mouvement au classement général. Le premier, associé à C Vier 2, a signé la meilleure performance des siens, à domicile, là où les Marcus Ehning, Christian Kukuk et Philipp Schulze Topphoff sont passés à côté. David Will et son fils de Cardento ont récité deux partitions parfaites, somptueuses de justesse, pour conclure leur prestation, s’octroyant une très solide sixième place. Deux parcours à une faute ont poussé Max Kühner et son Elektric Blue P au neuvième rang, juste derrière Conor Swail, d’abord sanctionné de quatre points, puis de deux, toujours en compagnie de Count Me In.
Alors que les meilleurs s’apprêtaient à entrer en piste, Jens Fredricson n’a pas tremblé, assurant un nouveau clear round sur l’excellent Markan Cosmopolit. “Mon cheval a sauté de façon fantastique et m’a rendu la tâche facile. J’ai pris plaisir à chaque seconde et je suis très content pour mon équipe”, a sobrement commenté le pilote à l’issue de l’épreuve. De retour au plus haut niveau depuis quelques mois, après près de six ans d’absence, le Suédois n’a rien perdu de sa superbe. Si l’on peut regretter l’absence des meilleurs Scandinaves au classement mondial, la prestation de Jens prouve une fois encore que les troupes d’Henrik Ankarcrona ont un sacré réservoir de couples et cavaliers.
McLain Ward perd tout, Harrie Smolders reconduit son abonnement à la deuxième place
Alors qu’on l’imaginait bien survoler un nouveau parcours, Harry Charles a été battu à l’entrée de triple avec le tout bon Romeo 88, qui retrouve le top niveau après quelques mois plus cool. Le jeune Britannique a donc laissé les trois meilleurs au provisoire en découdre. Le couteau entre les dents, Martin Fuchs n’a rien lâché sur Chaplin, son cheval de cœur. Le couple a tout donné, jusqu’au bout. Le sourire aux lèvres, le Suisse, champion d'Europe en 2019 et deuxième en 2021, a quitté la piste sans avoir son destin entre les mains. Juste après lui, Harrie Smolders pouvait encore espérer affronter McLain Ward dans un duel au sommet pour la victoire. Jusqu’au numéro sept, le scénario était fortement envisageable. Mais le bondissant Monaco, qui a tenu un très, très haut standing tout au long de la semaine, a à peine effleuré le vertical suivant… qui a roulé au sol. Rageant pour le Néerlandais. D’autant plus que McLain Ward n’a pas tenu la distance avec Contagious, renversant deux obstacles sur son passage et terminant septième… Une fois encore, Harrie Smolders a terminé deuxième, comme à Genève, Londres puis Bois-le-Duc ! Pour quelques centièmes, le Oranje a devancé Jens Fredricson, lui aussi avec huit points à son compteur final.
“Je crois que nous avons été assez malchanceux. Nous avons à peine touché la barre, et elle est tombée. Deuxième est quand même une position formidable”, a réagi Harrie Smolders. “Chaplin est un vrai battant et il a vraiment arraché sa victoire.” Interrogé par StudForLife il y a une semaine, le Néerlandais confiait que Monaco avait franchi un vrai cap. Le petit hongre de treize prenait part à son premier championnat et son fort taux de sang Pur-Sang lui a sans doute été d’une grande aide pour achever ce championnat avec tant de brillant.
“Je me sens super bien. Mes deux chevaux ont été incroyables. Chaplin est un vrai battant. Je suis juste extrêmement heureux d’avoir un cheval comme lui”, s’est exprimé un Martin Fuchs aux anges, des étoiles dans les yeux. “Il ne s’agit pas seulement de moi, mais de toute l’équipe autour de nous. Je dois dire que je pensais encore finir deuxième, avec Harrie et McLain qui passaient après moi. Je suis vraiment ravi de cette victoire.” Alors qu’il n’a pas encore la trentaine, Martin Fuchs est bien plus qu’un pilier pour le clan suisse. Comme un symbole, le jeune homme succède à son ami, Steve Guerdat, réputé pour exceller dans la préparation de grands championnats. Et Martin Fuchs n’a décidément rien à lui envier !
Le classement complet de la finale de la Coupe du monde ici.
Les résultats complets de la première manche ici.
Les résultats complets de la deuxième manche ici.