Championnat du monde - Lexington 2010
Finale tournante Philippe Lejeune, champion du monde !
Finale tournante Philippe Lejeune, champion du monde !
20h, le stade est bien rempli, le parcours magnifique à l'effigie des 2 plus gros sponsors du concours et de la FEI … ainsi qu'un obstacle aux couleurs du pays de chaque cavalier présent.
Abdullah al Sharbatly est le premier à s'élancer avec sa jument Seldana di Campalto qui n'a toujours aucune pénalité à son compteur. Tout semble bien se passer malgré une barre chancelante sur le vertical FEI … mais le triple Rolex Vertical, 2 foulées, oxer, 1 foulée, oxer placé en dernière position ne pardonnera pas : le premier et dernier élément s'écroulent : 8 points ! Rodrigo Pessoa est second à s'élancer avec HH Rebozo La Silla mais dès le numéro 3, la barre tombe et la compétition s'annonce prometteuse. Philippe Lejeune lui ne se fera piéger nulle part, Vigo d'Arsouilles est en grande forme et signe un nouveau sans faute tout comme Hickstead avec Eric Lamaze. La tournante peut commencer. Rodrigo Pessoa sera le premier à s'élancer avec une Seldana quelque peu récalcitrante au sanglage mais une fois en route, la puissante baie ne commettra aucune erreur. Philippe Lejeune change à son tour de selle et passe sur Rebozo. Aucun soucis, tout passe comme une lettre à la poste : sans faute ! Eric Lamaze redoutait Vigo d'Arsouilles, il sera le premier à le monter. Le puissant alezan s'emploiera très bien malgré un peu de chance dans le triple … mais n'évitera pas au champion Olympique un point de dépassement de temps. Abdullah al Sharbatly est le premier s'attaquer à Hickstead. Sans complexe, le cavalier saoudien montre tout son potentiel en laissant la liberté qu'il désirait au petit bai. Le rythme est plus que soutenu mais même si le dernier élément du triple a eu chaud, ça tient et c'est sans faute. Philippe Lejeune passe sur Seldana. Un magnifique parcours et un sans-faute à la clé ! Philippe Lejeune est toujours sans faute ! Eric Lamaze pensait que HH Rebozo serait pour lui le cheval le plus facile à monter et qui ressemblait le plus à son type de cheval pourtant, sur le milieu du triple … la barre de l'oxer tombe, c'est 4 points ! Abdullah al Sharbatly prend place sur Vigo. Pas de soucis jusqu'à ce satané triple qui posera pas mal de problème au saoudien mais même si les barres tremblent … tout reste en place ! Dernier changement de ce troisième round, Rodrigo Pessoa s'élance sur Hickstead et malgré un peu de chance sur le FEI qui lui avait coûté ses 4 points avec Rebozo et qui rebouge … mais ne tombe pas. Dernière rotation, Eric Lamaze pointe à 5 points mais Seldana ajoute 4 points au compteur sur l'entrée du triple ! Abdullah al Sharbatly a la pression en grimpant sur Rebozo. Si il signe un sans-faute il s'assure la médaille de bronze !! Pari réussi, 10 ans après la médaille de bronze de Khaled al Eid aux JO de Sydney, Abdullah al Sharbatly s'assure également d'une première médaille aux JEM. Avec un sans faute, Rodrigo Pessoa s'assurera d'une médaille d'argent … il lui reste Vigo d'Arsouilles. Malheureusement, sur l'oxer 5 la barre tombe … tout comme l'obstacle canadien placé en 6 ! Rodrigo perd tout et descend du podium ! « C'est vrai que je n'ai pas de chance avec deux 4 ème places mais nous aurions signé des deux mains pour une 4 ème place par équipe en étant qualifiés d'office pour les Jeux Olympiques. Maintenant, c'est clair que la barre avec mon cheval est vraiment dommage. C'est une toute petite touchette et je vois la barre tomber lorsque je tourne alors que j'étais déjà loin de l'obstacle. Les 2 autres chevaux se sont bien passés alors que c'était des chevaux délicats et atypiques … et finalement, je me fais piéger avec Vigo qui était le plus classique. Je suis arrivé un peu près de l'oxer puis il y avait beaucoup de bruits dans le stade, il est parti en avant et est sorti un peu du cadre et voilà, c'est dommage. Je suis passé tout près d'une médaille mais c'est comme ça. On est déçu mais ce n'est pas la fin du monde. De plus, je n'ai commencé à monter Rebozo qu'au mois de février, nous avons réalisé une belle saison et ici, il a démontré qu'il a beaucoup de classe, il n'a que 10 ans. Nous allons donc étudier au mieux son programme car il a sauté ici comme les meilleurs chevaux du monde et nous sommes dès lors très contents. Il y a une semaine encore, nous n'aurions pas pensé faire deux fois 4 ème » expliquera Rodrigo Pessoa en grand gentleman. Dernier à s'élancer, Philippe Lejeune peut se permettre une barre avec Hickstead mais il n'en sera rien, il passe la ligne d'arrivée sans faute … sans avoir renversé la moindre barre des 9 parcours qu'il aura dû effectuer depuis le début de la compétition : Philippe Lejeune est champion du monde ! « Durant toute ma carrière, j'ai eu des hauts et des bas car mon travail a été de fabriquer des chevaux avant qu'ils ne soient vendus ou qu'ils ne me soient retirés comme ce fut le cas pour Nustria, Shogun, Maike ou encore Carlina et Ulysse. C'est aussi une grande fierté pour moi car tous ces chevaux ont eu une grande carrière grâce au travail que j'ai effectué. Mais si je suis là aujourd'hui, c'est grâce à une personne : Joris de Brabander, le propriétaire de Vigo. Il m'avait confié Nabab de Rêve lorsqu'il a eu 8 ans et j'ai remporté une médaille de bronze avec lui aux Jeux Equestres Mondiaux de Jerez. Ensuite, Joris vivant des saillies de ses étalons, il m'a demandé pour retirer Nabab du sport pour le consacrer exclusivement à la saillie. C'est une décision que j'ai très bien comprise et que je respecte. Mais il m'avait promis à ce moment-là qu'il avait un cheval capable de faire également Aix la Chapelle et les plus gros championnats et qu'il me le confierait également. Ce cheval, c'était Vigo. Il n'avait que 6 ans et j'ai attendu un an de plus avant qu'il n'arrive chez moi. L'année dernière, Joris a eu une très grosse offre pour Vigo et pour la première fois de ma vie, un propriétaire m'a demandé mon avis. Il m'a demandé de choisir entre l'argent de la commission ou de le garder. Je lui ai dit que c'était son cheval et que c'était à lui de prendre la décision mais que personnellement, je préfèrerais continuer à m'asseoir dessus … Joris m'a dès lors dit qu'il le conservait ! J'ai eu très peu de propriétaires qui ont fait ça et pour ça, Joris c'est un grand, c'est un seigneur. Les gens ont une fausse image de moi en pensant que je monte uniquement des chevaux du type de Nabab et Vigo qui sont des chevaux grands et fort mais quand j'ai commencé en junior, j'ai commencé avec des pur-sang alors les chevaux avec du sang, je les connais. En début d'année, nous avions décidé que Vigo n'allait pas courir toutes les petites coupes des nations où je me suis rendu avec un autre cheval néanmoins pour faire remonter la Belgique en Super League mais avec cette blessure en début d'année, cela a été une course contre la montre car si on savait qu'il allait guérir mais j'ai pris cela très au sérieux comme tout problème de tendons. Nous avons beaucoup travaillé avec mon fils Thibault qui, lorsque j'étais en concours, allait avec la camionnette par tous les temps jusque Knokke le zoute le promener dans l'eau, ce qui était très stressant car mon gamin n'a que 19 ans et partir seul avec un étalon d'une telle valeur n'est pas une chose évidente mais il a fait ça d'une façon extraordinaire. Je dois aujourd'hui en grande partie la condition physique de Vigo à mon fils ensuite, nous avons établi un programme en vue de Lexington. Il a débuté à Dinard avant de faire Royan où il fait deuxième de la grosse épreuve et où tout le monde me donnait gagnant du Grand Prix puis il y a eu un déluge et nous sommes rentré sans prendre de risques puis nous sommes allé à Gijon où il était 10 ème de la grosse épreuve puis sans faute dans la Coupe des Nations. Suite à cela, notre chef d'équipe a décidé que Vigo ne devait plus sauter pour le garder dans la même condition. Nous avons donc continué à aller à la mer et à faire quelques petits entrainements très anodins et nous sommes arrivés comme cela. En arrivant ici, le cheval manquait certainement un peu de concours et il a grandi de jour en jour dans le concours. Le premier jour, il a eu un peu difficile sur les 3 premiers obstacles mais déjà dans la dernière ligne, il était ressorti avec ses moyens et sa qualité et la suite, on la connaît. J'ai vraiment pris beaucoup de plaisir à faire cette tournante et à monter ces chevaux, c'était très agréable. J'ai deux fils qui ont mon sang mais pour le reste, mon père m'a appris à aimer les animaux. Un jour, on m'a demandé ce que j'avais comme souhait et j'ai répondu que si les chevaux pouvaient parler, ils disent qu'ils aiment être chez moi.» expliquera le nouveau héro belge sous les yeux de son papa très ému. « C'est formidable, c'est vraiment quelque chose d'exceptionnel qui n'arrive pas souvent dans une vie. Ca a été très dur à vivre pour mon c?ur mais j'avais confiance. Cet après-midi, j'ai dit que Philippe allait gagner parce que pour débuter sa carrière, il a eu avant tout des chevaux difficiles, des chevaux allemands, français, irlandais … toutes sortes de chevaux et cela lui a appris beaucoup de choses. Il pouvait évidemment toujours y avoir un petit accro mais j'étais persuadé qu'il allait gagner. » racontera son papa.