Un an avant de fêter son vingtième anniversaire, le salon des étalons de sport de Saint Lô s’est affirmé une fois de plus comme le rendez-vous incontournable entre éleveurs et étalonniers. De la génétique de pointe des plus jeunes à celle des performers titrés, la vitrine ne laisse que l’embarras du choix après deux jours et demi de show dans une ambiance très sympathique.
Cent soixante seize étalons, dont trente-huit poneys, attendaient les éleveurs en quête de plan de monte pour la saison à venir dans les belles infrastructures du Pôle Hippique de Saint-Lô, du vendredi 21 au dimanche 23 février. Le public a été au rendez-vous, la fréquentation tournant à nouveau autour de huit mille visiteurs avec des temps forts sur les soirées de vendredi et samedi. Yann Adam, directeur du Pôle hippique de Saint-Lô, avait de bonnes raisons d’avoir le sourire tout au long du week-end. “Nous avons fait le plein en termes d’exposants et avons même dû refuser certains prestataires de services, notamment les vendeurs d’aliments, afin de donner la priorité aux étalonniers”, s’est-il satisfait, preuve de l’engouement généré par l’événement normand.
Les abords de la pistes et les gradins ont été pris d'assaut tout au long du week-end, en particulier samedi ! © Mélina Massias
Entre les stands entourant la piste de présentation, et les boxes, où les éleveurs se plaisent à observer les potentiels prétendants de leurs juments, soixante et onze étalonniers ont pris place pour mettre en avant la génétique mâle. Aux côtés des principales boutiques de l’étalonnage français, emmenées par le Groupe France Elevage (GFE) et France Étalons, présentant chacun plus de vingt étalons, d’autres sont plus modestes en effectif, sans pour autant lésiner sur la qualité et l’attrait de leurs catalogues. C’est notamment le cas d’Ibreed Agency, qui peut se satisfaire de la victoire de Jericho de Hus (Emerald van’t Ruytershof), vendredi soir dans le Masters des étalons de six ans.
Jericho de Hus, protégé de Joris de Brabander et Greg Broderick, n'est pas passé inaperçu à Saint-Lô ! © Mélina Massias
Certains syndicats d’éleveurs, à l’image de l’Association des éleveurs des Pays de Loire, qui compte parmi ses adhérents l’élevage des Isles de la famille Hubert-Chiché, ou encore celui de Sophie Laroche présente avec son Selle Français Originel Heroe de Cafeny (Diamant de Semilly), crédité d’un très bon ICC 140 en 2022, proposent aussi à leurs adhérents un stand commun, permettant la promotion de leurs étalons. Unique dans son ampleur en Europe, ce salon à la ferveur croissante est devenu un rendez-vous incontournable dans le processus de promotion et commercialisation des étalons. Venu peaufiner ses croisements 2025, le Mâconnais Sébastien Fonck, naisseur du gagnant du Critérium des quatre ans Kokoriko Dorchival (Cornet Obolensky, né Windows vh Costersveld), en fait le constat. Il explique son projet pour son joli gris : “Mon idée était de gérer moi-même la carrière d’étalon de Kokoriko, mais je me rends compte que tout faire est compliqué ! Je réfléchis à me rapprocher d’un étalonnier et je pense que pour un jeune cheval, être présent au salon des étalons de Saint-Lô est important pour faire sa promotion.”
Chaque année, éleveurs et passionnés se rassemblent et se retrouvent pour échanger et discuter à Saint-Lô. © Jean-Louis Perrier
La démarche a déjà été entreprise par certains éleveurs, parfois venus de loin, comme les Colombiens de l’élevage San Isidro, partenaires de l’élevage de Semilly, qui présentait dix étalons, dont le remarqué Kornet San Isidro (Cornet Obolensky). “J’ai vendu la troisième mère de Kornet à l’élevage San Isidro et nous avons conservé de bonnes relations. Cela nous permet, aujourd’hui, de travailler ensemble”, explique Richard Levallois. En plus du succès de ses jeunes étalons maison, l’éleveur et étalonnier se satisfait d’encore signer des contrats pour la star de l’affixe : Diamant de Semilly ! Mais le haras de Couvains sait aussi s’ouvrir à la génétique étrangère et l’a prouvé cette année en enrôlant Untouched Son JPS (Untouched), un Westphalien de six ans qui n’est autre que le propre frère du phénomène United Touch S ! Sa venue en France ne fait que souligner la notoriété internationale du haras de Semilly. “Lorsque j’ai reçu un appel me demandant si nous étions intéressés pour distribuer le propre frère de United Touch en frais, j’ai cru que l’on me faisait une blague !”, s’amuse Anne-Sophie Levallois. “Son naisseur et propriétaire, Julius Peter Sinnack, est très mécontent que certaines paillettes qu’il a vendues aient été utilisées en ICSI sans son accord. Il ne voulait plus entendre parler d’étalonnage ! Des personnes de son entourage, qui nous connaissent, lui ont dit qu’il pouvait nous faire confiance pour Untouched Son JPS. C’est un immense honneur, d’autant plus que Julius Peter Sinnack apprécie la façon de monter de Dylan (Levallois, fils d’Anne-Sophie et Richard et cavalier de l’élevage, ndlr), à qui il a souhaité confier Untouched Son pour de futures sorties en compétition, dès lors qu’il sera complètement rétabli d’une tendinite, déjà en bonne voie de guérison.”
Untouched Son JPS était l'une des attractions du week-end. © Mélina Massias
Un salon très international
Il faut dire que les étalonniers étrangers sont très sensibles à l’attrait du marché français. C’est le cas du Holsteiner Verband, présent à Saint-Lô depuis 2019. Cette année, le livre de race allemand était représenté par Clarimo (Clearway), Uriko, né Clooney (Untouchable 27) et surtout Casall (Caretino), fringuant du haut de ses vingt-six ans ! Felix Flinzer, nouveau directeur de l’étalonnage du Holstein a découvert avec plaisir l'événement normand. “C’est très important d’être ici, car les éleveurs français représentent notre plus gros marché extérieur. En 2024 en France, Uriko a honoré environ quatre vingt-dix juments, Million Dollar (van het Schaeck, Plot Blue, ndlr) une soixantaine, juste devant Casall, qui est toujours dans le Top 3, comme chez nous, où il suit Million Dollar et United Way (Uriko) dans les demandes. De jeunes étalons comme Vigado (Vigo d’Arsouilles) et Charaktervoll (Comme Il Faut) sont également de plus en plus plébiscités. Notre présence internationale est d’autant plus importante qu’à la suite d’un changement de législation en Allemagne, les éleveurs de chevaux sont confrontés à une forte hausse des frais vétérinaires. Cela entraîne une diminution du nombre de juments à l’élevage. Tout le marché allemand est en régression. Le Holstein s’en sort bien, avec une baisse de dix pourcents, mais d'autres régions enregistrent de moins vingt à moins vingt-cinq pourcents de naissances. C’est donc doublement important d’exporter. Je suis très content d’être ici, j’ai été très bien accueilli par l’organisation et les partenaires. J’ai senti qu’ils étaient reconnaissant que nous venions avec nos trois meilleurs étalons, tous présents dans le Top 50 du classement des meilleurs pères de la Fédération mondiale de l’élevage de chevaux de sport (WBFSH). Je trouve qu’il y a un public très professionnel. On voit une clientèle passionnée qui fait l’effort de se déplacer, pose des questions : c’est très intéressant !”, apprécie le Germanique.
Felix Flinze, nouveau directeur de l'étalonnage au Holstein, a découvert avec bonheur le salon des étalons de Saint-Lô. © Jean-Louis Perrier
Casall a effectué sa dernière apparition publique en dehors de l'Allemagne à Saint-Lô. © Mélina Massias
Les étalonniers et représentants belges ont aussi saisi l’ampleur de ce rassemblement. Déjà présent au nouveau salon de Lignières, le jeune retraité Quel Homme de Hus (né Quempas, Quidam de Revel) était du rendez-vous, pour un bel hommage entouré de ses proches, dont son copropriétaire, Gaëtan Decroix, ainsi que son épouse, Alice Decroix-Trehoust, qui présentait l’ancien complice de Jérôme Guéry sous la selle. Un autre ancien pilier de l’équipe belge, Nevados (Calvados), complice de Grégory Wathelet au plus haut niveau, a foulé la piste. Le gris était présenté par le haras de Xavier Hanneton, tout comme le bon Eras Ste Hermelle (Vargas de Ste Hermelle).
Beaucoup d'émotions autour de Quel Homme de Hus. © Mélina Massias
Saint-Lô a également accueilli d’anciens performers internationaux très attractifs, proposés pour la première fois en frais en France cette saison. Hello Vincent, né Coquin de Coquerie (Consul dl Vie) chez Annick et Raphaël Dulin, a retrouvé ses terres natales grâce à la confiance de Scott Brash, qui a confié son crack au haras de Clarbec. Le GFE présentait quant à lui Chat Botté du Ruisseau (Casall) et le bel Holsteiner Catover (Catoki), tandis que France Etalons intègre à son catalogue le mexicain Rubens LS (Rebozo la Silla) mais aussi, confié par ses propriétaires suisses, le Selle Français aux deux participations olympiques Vancouver de Lanlore, fruit du croisement imaginé par Anne Dafflon entre le BWP Toulon et une souche Selle Français Originel, sur une lignée maternelle Anglo-arabe. Pour les adeptes du Selle Français Originel, justement, le retour d’Un Diamant des Forêts (Diamant de Semilly), bon compétiteur sous couleurs canadiennes, chez ses naisseurs, la famille Paris, est une bonne nouvelle, bien que le sang de son géniteur ne constitue pas une grande nouveauté. Force est de constater que la jeune génétique, vers laquelle de plus en plus d’éleveurs se tournent, est fortement imprégnée de sang étranger, comme chez les jeunes Larimar’Quill (Emerald van‘t Ruytershof) et Latino Gos (Comme Il Faut), présentés par le haras de Clarbec et le GFE, ou encore l’impressionnant produit de la famille Fardin, La Tour du Rouet, issu du croisement entre Dollar du Rouet (Chacco Blue) et une fille de Zandor. De son côté, la génération des H apporte aussi de belles promesses, avec des étalons tels Huricane de Champloué (Cornet Obolensky), qui retrouvait Grégoire Hercelin pour une semaine avant de poursuivre son ascension aux côtés de Bertram Allen, ou Hitchcock Bois Margot (Qlassic Bois Margot). Tous deux ont déjà été très utilisés ces dernières saisons.
Le charismatique Hello Vincent n'a laissé personne indifférent pour son grand retour en Normandie. © Mélina Massias
Au-delà des choix d’étalons et de croisements, le rendez-vous saint-lois est aussi une belle occasion de dialoguer pour les institutionnels, Société hippique française (SHF) et Stud-book du Selle Français en tête, et de mise à l’honneur à travers différentes cérémonies. Ce fut le cas pour les éleveurs des chevaux de Selle Français médaillés lors des Jeux olympiques de 2024, mais aussi pour les primes aux naisseurs distribuées par la SHF. Richard Levallois, pour le haras de Semilly, en est le premier bénéficiaire, devant Mickaël Varliaud pour Riverland et Fabrice Paris pour l’élevage des Forêts. Le tout dans une ambiance très conviviale, ponctuée du début à la fin, de cocktails de l’amitié et d’échanges en tout genre entre passionnés.
Les éleveurs des médaillés olympiques des derniers Jeux ont été mis à l'honneur lors du salon. © Jean-Louis Perrier
Photo à la Une : Vancouver de Lanlore était l'une des stars du salon des étalons de Saint-Lô en 2025. © Mélina Massias