Le CSIO 5* de Falsterbo dans les yeux de Louise Barraud
La semaine passée, quelques-uns des meilleurs pilotes du monde se sont donné rendez-vous en Suède, à Falsterbo, pour son mythique CSIO 5*. Initié en 1920, l’incontournable évènement suédois est devenu le Falsterbo Horse Show en 1969, notamment grâce à l’organisation de son traditionnel Derby. Présente sur place pour accompagner les chevaux d’Henrik von Eckermann, Louise Barraud est revenue, pour Studforlife, sur son expérience suédoise. Entre voyage, classements, courses de lapins, attelage, stress et émotions, une chose est certaine, la jeune femme n’a pas eu le temps de s’ennuyer en terres scandinaves.
Mardi 12 juillet, 22h. Louise Barraud prend la route depuis Kessel, aux Pays-Bas, direction la Suède et le Falsterbo Horse Show, situé au sud du pays dans la région de la Scanie. Dans son camion, Calizi (Brand, Cellestial x Stakkatol), Nababette Z (Nabab de Rêve x Gasper), les montures d’Henrik von Eckermann ainsi qu’Orelie (BWP, Emerald vh Ruytershof x Nabab de Rêve), celle de sa compagne Janika Sprunger. “Je suis partie avec la groom de Janika. Nous avons fait la route de nuit pour que cela soit plus agréable pour les chevaux et qu’il y ait moins de trafic. Nous sommes arrivées à Puttgarden, en Allemagne, aux alentours de 5h30 du matin afin de prendre le bateau. Au bout de quarante-cinq minutes, nous avons débarqué au Danemark puis repris la route direction la Suède pour finalement arriver vers 8h30 mercredi matin” raconte la jeune femme. Une fois sur le site du CSIO de Falsterbo, place à l’installation des chevaux, tous contrôlés par un vétérinaire depuis l’épizootie de Rhinopneumonie équine, puis des affaires. “En arrivant, il y avait déjà des copeaux dans les box des chevaux, ce qui est très arrangeant et qui nous a permis de rapidement les descendre. La priorité a été de leur donner à boire et à manger. Sur le concours, des bénévoles nous aidaient à décharger les camions et à emmener les affaires jusqu’aux box grâce à des remorques. C’est vraiment une superbe initiative qui permet d’aller beaucoup plus vite.” Une fois ses protégés installés et dans de bonnes conditions pour se reposer avant de sortir plus tard dans la journée, Louise Barraud a pu récupérer son “pack de bienvenue” auprès de l’accueil du site. “On nous a donné des sacs avec des petits cadeaux ainsi que des tickets pour nos repas du week-end. C’est toujours agréable, cela nous fait des souvenirs. Les repas des grooms sont presque toujours pris en charge lors des 5* mais c’est une chose plus rare dans les plus petites compétitions, ce que je trouve dommage. L’accueil là-bas était vraiment très bon, nous étions chouchoutés. Dès que nous avions besoin de foin ou de copeaux, tout était apporté très rapidement aux box” a-t-elle commenté.
Nababette Z, ici au CSI 5* de Monte Carlo, a réalisé un week-end exceptionnel grâce aux soins de Louise Barraud et sous la selle d'Henrik von Eckermann. Crédit Sportfot
Falsterbo, ses chevaux, ses chiens, ses plages et... ses lapins !
À partir du jeudi 14 juillet, place au sport. La journée a bien débuté pour toute la team Eckermann avec un parcours parfait de Calizi, neuf ans, lors d’une épreuve à 1,45m. Un peu plus tard dans l’après-midi, sa voisine de box Nababette Z s’est classée onzième d’une 1,50m, qualificative pour le Grand Prix. “Calizi doit encore prendre de l’expérience et tout s’est bien déroulé. Nous étions très contents de la performance de Nababette puisque cela signifiait qu’elle n’avait pas besoin de ressauter une épreuve avant dimanche, étant déjà qualifiée pour le Grand Prix. Avant le départ, Henrik la sentait très bien et avait beaucoup d’espoir. Vendredi, il n’a pas participé à la Coupe des nations et Calizi a rééitéré sa performance le samedi, terminant neuvième d’une épreuve à 1,50m. Les juments n’ont pas touché une barre du week-end donc ça a été un très bon concours!”
Venue en Suède avec seulement deux montures, la jeune femme a pu profiter d’un week-end plus léger et moins stressant, de quoi trouver le temps de bien s’occuper de ses protégées. “Cela m’a permis de passer plus de temps avec les juments que lorsque j’en ai quatre à gérer. Les conditions étaient idéales, il ne faisait pas très chaud, il y avait de l’herbe pour les faire brouter, des endroits pour longer… C’est un concours très ‘cheval’ et je pense qu’elles ont apprécié”.
Si les montures d’Henrik von Eckermann ont pu profiter d’un bon week-end, c’est en partie grâce à Louise qui n’a pu les laisser bien longtemps, pas même pour visiter la région! “Je n’ai pas fait beaucoup de tourisme, j’ai du mal à partir loin de mes chevaux même lorsque je n’ai rien à faire. Je ne suis même pas allée à la plage, ce que je regrette un peu (Falsterbo se trouve au sud de la Suède et donne sur la mer Baltique, ndlr)! Le premier soir, nous avons dîné au restaurant et nous sommes baladés dans les rues de la ville, qui est d’ailleurs très jolie. Autrement, je ne suis pas beaucoup sortie ailleurs qu’au supermarché (rires, ndlr)!”
Si la jeune femme n’a pu arpenter les réputées plages suédoises, elle a cependant pu vivre le Falsterbo Horse Show et ses mythiques animations, dont la plus célèbre: les courses de lapins, une épreuve à part entière lors de laquelle les petits mammifères sautent de véritables obstacles! “Je suis passée devant les lapins avant d’aller regarder la Coupe des nations (remportée par la Belgique, ndlr) et j’ai été obligée de m’arrêter, c’est une animation mythique. Je n’ai pu être là lorsque les cavaliers les faisaient sauter mais c’est une véritable épreuve qui attire énormément de monde. J’ai été impressionnée, ils sautent très haut (rires, ndlr)!” Si elle n’a pu le voir de ses propres yeux, il paraitrait qu’Henrik von Eckermann et Janika Sprunger ont affronté Peder Fredricson, numéro trois mondial, et sa femme Lisen, lors d’une course de lapins! Outre cette animation propre au concours suédois, la Française est également passée à côté des compétitions d’agilité des chiens, du dressage, de l’attelage, des épreuves nationales ainsi que du Derby de Falsterbo, remporté par l’Allemand Andre Thieme et Contadur. “Falsterbo est un concours très diversifié, il s’y passe vraiment beaucoup de choses” a-t-elle commenté.
Les célèbres courses de lapins, épreuves mythiques du concours suédois! Crédit Falsterbo Horse Show
Dimanche, jour de Grand Prix!
En Suède comme partout, dimanche est jour de Grand Prix. Traitant ce tour comme tous les autres, la jeune femme a tranquillement préparé sa Nababette Z, qui participait pour la première fois à une telle épreuve. “La jument se sentait bien et avait été massée par la physiothérapeute le matin afin de la mettre dans les meilleures conditions. La préparation a été la même que pour une épreuve normale. La piste se trouvait à dix bonnes minutes des écuries alors j’ai commencé à la brosser vers 13h45 puisqu’Henrik passait en fin d’épreuve. Là-bas, les chemins sont en sable donc j’ai pu lui mettre les crampons au box. Je préfère toujours être en avance et prendre mon temps pour leur éviter un stress supplémentaire en cas de problème. Vers 14h15, nous avons pris la route de la détente et, avouons-le, Nababette n’était pas très motivée (rires, ndlr)! À la détente, Henrik a effectué peu de sauts, comme toujours.”
Parti avec le numéro trente-quatre, le Suédois et l’ancienne partenaire de la Luxembourgeoise Charlotte Bettendorf sont sortis de ce premier tour sans pénalité, se qualifiant donc aisément pour la seconde manche. Lors de cette dernière, le couple a été le deuxième à signer un nouveau parcours parfait. Pas assez rapide pour s’emparer de la victoire, il a tout de même pris la deuxième place derrière les champions d’Europe Andre Thieme et DSP Chakaria, une belle réussite pour le premier Grand Prix de cette jument. “Nababette est une jument très calme mais c’est une lionne en piste, le résultat est évidemment très satisfaisant. Une fois sur le parcours, je ne peux plus rien faire mais Henrik croyait beaucoup en elle et il était assez optimiste. Avant de s’élancer en seconde manche, il a beaucoup discuté avec Janika (Sprunger, sa compagne, ndlr) qui a regardé les premiers concurrents. Le cavalier qui l’a précédé a fortement glissé avant le vertical numéro douze (à la sortie d’une option qui a causé du tord à bon nombre de concurrents, ndlr) alors je pense qu’il a été un peu plus prudent que ce qu’il avait prévu. La jument a été superbe, elle se transforme une fois en piste, je pense qu’elle aime ça. Elle a prouvé qu’elle était largement à la hauteur du haut niveau.” Au sujet de cette fameuse option, justement, qui a piégé six cavaliers, Henrik von Eckermann a pu compter sur les très bons conseils de son compatriote des Jeux olympiques de Tokyo. “Je pense qu’il avait prévu de la prendre dès le début. Après le passage de Peder Fredricson, il lui a demandé si elle était réalisable. Ce dernier ne l’a pas prise, certainement pour assurer le parcours parfait (le numéro trois mondial avait écopé d’une barre en première manche avec H&M Christian K, ndlr), mais il lui a assuré que c’était faisable.”
Malgré le très bon résultat, la jeune femme, personnage de l’ombre ô combien important pour nos amis à quatre pattes, a révélé faire partie de cette catégorie de grooms qui, en bord de piste, retient sa respiration. “Au début, je n’étais pas tant stressée parce que c’est une jument que je ne connais pas encore beaucoup donc nous n’avions pas d’attentes particulières. S’il y avait eu un quatre points ou plus, ça n’aurait pas été dramatique. Quand il est entré en piste et qu’il a commencé à sauter, la pression est montée, c’est indéniable. Avant la deuxième manche, il n’y a aucun doute, j’étais très stressée! Je vis les parcours avec mes chevaux, je veux que cela se passe bien et qu’ils prennent plaisir. Je filme les tours donc j’essaye de rester stable mais, de temps en temps, je l’avoue, ma jambe monte un peu en l’air. J’essaye de me contenir mais le film est parfois un peu tremblant (rires, ndlr)!” Malgré quelques gouttes de sueur, ce résultat reste le plus beau souvenir du week-end de la jeune femme. Une deuxième place qui n’est pas sans rappeler les trois autres déjà acquises par le champion olympique par équipes cette année à Doha, Paris ou encore Stockholm… “Rentrer avec une deuxième place dans le premier Grand Prix 5* d’un cheval est une grande satisfaction. Le tour parfait en première manche était déjà une superbe performance alors un double sans-faute, c’était incroyable. On ne peut pas rêver mieux pour une jument qui débute à ce niveau après très peu de temps dans nos écuries (la fille de Nabab de Rêve a rejoint les écuries du Suédois fin mai, ndlr). Nous n’avons pas reparlé de ce résultat mais je me suis dis que deuxième était peut-être notre place, même si nous sommes évidemment très heureux. Nous ne sommes jamais loin mais ce n’était pas encore pour nous!”
Après le sport, place au retour. Douze heures de route pour rejoindre les écuries flambant neuves du couple, aux Pays-Bas. “Après la remise des prix, je me suis bien occupée de la jument. Je l’ai douchée, shampooinée, bien refroidie puis nourrie. La groom de Janika m’a aidée à graisser les cuirs et remballer les affaires qu’il restait. Comme en arrivant, les bénévoles du concours nous ont aidées à amener les affaires jusqu’au camion. Les chevaux ont pu se reposer puis nous sommes parties vers 20h. Il faisait un peu plus chaud mais, avec la nuit, la température est descendue. Nous sommes arrivées vers 7h30 aux écuries. Après une matinée de repos, les juments ont pu se dégourdir les jambes l’après-midi.” Une fin en tranquillité pour les héroïnes du week-end qui ont donc profité, tout comme leur fidèle groom, d’un repos mérité après plusieurs jours de grand sport.
Rendez-vous, en 2023, pour une nouvelle édition du Falsterbo Horse Show!
Photo à la Une: Louise Barraud à la visite vétérinaire avec Calizi Crédit Sportfot