Ils sont les nouveaux champions du Monde des six et sept ans.
La déferlante britannique n’aura pas eu raison de tous : l’Allemande Anna Lena Schaaf et l’Australien Kévin McNab ont réussi à guider leurs montures, Lagona 4 et Cute Girl jusqu’aux titres de champions du Monde des six et sept ans.
Cette édition 2021 du Mondial du Lion n'avait définitivement rien à voir avec la précédente. Adieu les restrictions liées au Covid-19, le public a pu reprendre possession de l'hippodrome et ce sont pas moins de 40 000 spectateurs qui se seront massés tout au long du week-end pour admirer les futurs espoirs de la discipline. La présence de tant de personnes aura parfois joué en la défaveur de certains concurrents, mais quoiqu'il en soit, cela restera extrêmement formateur pour ces chevaux qui auront découvert la foule, l'ambiance et des difficultés techniques particulières.
Anna Lena Schaaf et Lagona 4, révélation des 6 ans
Qui dit championnat dit souvent révélations. Cette année, elle est venue de l'Allemande Anna Lena Schaaf. A vingt ans, la cavalière a déjà glané sept médailles aux championnats d'Europe dont la dernière remonte à cet été à Segersjö. Au Mondial, elle présentait Lagona 4, une jument OS au papier 100% allemand. Si d’aucuns pouvaient se montrer circonspects vendredi après le dressage en voyant ce jeune couple prendre les commandes du championnat, il a démontré beaucoup de qualité, notamment lors du test de saut d’obstacles qui fut de loin le juge de paix de ce concours. Sans toutefois être trop compliqué, disons que le chronomètre serré et l'atmosphère ont impacté les prestations des quarante concurrents encore en lice. Pourtant, Anna Lena n’a pas tremblé et déroulé un parcours sans-faute après un cross déjà maxi la veille. “Elle était vraiment attentive et elle m’a dit ‘ok je vais faire de mon mieux’, elle a été tout simplement brillante !”, s’est exclamée la cavalière, la voix un peu tremblante sous le coup de l’émotion et la victoire en poche.
Peu impressionnée par le public sur le cross, Lagona 4 a réalisé l’un des vingt-trois maxi de l’épreuve avec Anna Lena Schaaf © FEI/Libby Law
“L’équipe d’Allemagne a toujours besoin de nouveaux talents, surtout capables de former des jeunes chevaux. Anna Lena est une excellente cavalie`re, elle l’a prouve´ ce week-end et le week- end dernier en remportant son premier 4* (à Strzegom avec Fairytale 39, ndlr)”, appuyait la championne olympique Julia Krajewski qui connait bien la cavalière car elle est l’entraineur de l’équipe Junior de concours complet. Elle a donc vu évoluer Anna Lena un moment et elle était de nouveau à ses côtés ce week-end puisqu’elle montait Chintonic 3 (Contendro) dans la même épreuve. Pour l'anecdote, il s'agit du propre frère de Chimpunk FRH, qu'elle a formé jusqu'aux JEM de Tryon avant qu'il ne passe sous la selle de Michael Jung. Plus petit, plus léger, plus chic et plus facile que son aîné, Chintonic 3 a laissé bonne impression ce week-end et termine cinquième à cause d'une petite faute à l'hippique.
Si le cross n'a pas des masses bouleversé le classement avec vingt-trois maxi sur quarante-cinq couples au départ, le saut d'obstacles a effectivement rebattu quelques cartes et les sans-faute auront été largement récompensé, en témoigne l'Italienne Rebecca Chiappero, passée de la dixième à la troisième place avec Bohmahon Chelsea. Ce bon sauteur est un représentant de l'Irish Sport Horse (ISH) bien que son papier soit trempé du sang du Holstein Chellsini Z et de Ramiro B. L'élevage irlandais s'est d'ailleurs une fois de plus remarqué avec cinq produits parmi les dix meilleurs. Ce ne sont pourtant pas des ISH qui sont montés sur les plus hautes marches du podium mais un OS -la jument de Anna Lena Schaaf- ainsi qu’un Selle Français.
Ce dernier n'est autre que Fibonacci de Lessac*HDC. L'ancien champion de France des mâles de trois ans Selle Français avait été repéré très tôt par Nicolas Touzaint et acquis dans la foulée par le Haras des Coudrettes. A quatre et cinq ans, il a été formé sur le Cycle classique de saut d'obstacles puis il a rejoint les écuries de l'Angevin cette saison. Depuis, il a engrangé cinq victoires et c'est assez logiquement que Nicolas venait au Mondial avec des ambitions. De là à espérer une médaille d'argent ? "J'avais beaucoup d'inconnues quant à son comportement par rapport à l'ambiance, la déco, le monde, le bruit. C'est pour cela que je suis resté prudent dans mes paroles tout le week-end. Après dans le potentiel et les aptitudes, il est vraiment au-dessus de la moyenne (...). Il dresse bien, il va suffisamment galoper sur le cross et il saute bien. Je l'ai toutefois senti plutôt inquiet à plusieurs reprises, notamment sur le saut d'obstacles. Il était vraiment parfait au paddock. Il s'est contracté un petit peu en piste avec le public. Déjà dans mon virage du deux au trois, il a regardé partout, il s’est désuni et j’ai perdu mon galop. Vu qu'il est très respectueux et qu'il a beaucoup de qualité je m'en sors. Aujourd'hui c'est normal, mais ça aurait pu coûter une faute. Au dressage, pareil, il fait une bonne reprise avec une ou deux petites instabilités", expliquait Nicolas. "Je pense que l'année prochaine il va assimiler les choses et prendre son temps. Il devrait être vraiment mûr et prêt pour l'année prochaine". Le rendez-vous est pris !
Chez les 7 ans, Kevin McNab et Cute Girl face à l'armada britannique
Non contente de s'être déjà adjugée l'or aux Jeux Olympiques et aux championnats d'Europe cet été, la Grande Bretagne prouve une fois de plus qu'elle dispose d'un réservoir de jeunes talents conséquent en plaçant six de ses chevaux parmi les sept premiers des sept ans. Trois de leurs montures proviennent de l’élevage irlandais de Richard Sheane and Georgina Philips : Cooley Rosalent, septième avec le numéro un mondial Oliver Townend, Cooley Rules, sixième avec Izzy Taylor, et Cooley Snapchat, médaillé de bronze avec Selina Milnes, juste derrière Laura Collett et Outback (Duke of Hearts). Peu de nations peuvent se targuer d'en faire autant…
Seul l'Australien Kévin McNab aura réussi à faire mieux en prenant la tête dès le dressage et en n'ajoutant pas un point à son compteur après le cross et l'hippique. Il était associé à Cute Girl, une jument Holstein par Coventry qui appartient à Scuderia 1918, une société à l'origine spécialisée dans la confection de chaussures haut-de-gamme et qui possède désormais plusieurs chevaux de haut-niveau dans plusieurs disciplines à l'image de Tobago Z, Viking d'la Rousserie, Halifax vh Kluizebos ou Don Quidam. “C’est une bonne sauteuse. Elle était en bonne forme et je n’ai pas fait d’erreur. Elle était encore très fraiche après le cross et plus relachée, donc un peu plus facile”, analysait Kévin. C’est en tout cas une belle revanche sur l’année passée où le couple avait été éliminé pour une erreur de parcours. L’Australien aimerait logiquement conserver cette jolie grise dans ses écuries en vue des échéances à venir.
Kévin McNab et Cute Girl © FEI/Libby Law
Avec les JO 2024 en ligne de mire, les négociations au parc de l'Isle Briand allaient déjà bon train. Le mercato devrait ainsi s'avérer intéressant dans les semaines et mois à venir.
Photo à la Une : FEI/Libby Law