Son look inimitable, son duo avec Malin Baryard-Johnsson, sa gentillesse, sa capacité à aligner les sans-faute au plus haut niveau : Tornesch n’aura laissé personne indifférent. À vingt-quatre ans, l’étalon KWPN a rejoint le paradis, après avoir marqué le sport et laissé plusieurs centaines de produits à l’élevage.
Sous la selle de Malin Baryard-Jonhsson, sa plus fidèle complice, Tornesch 1042, fils de Lux et Ninerta (Libero H), décédée deux ans avant lui, a arpenté les plus belles pistes du monde pendant plus de neuf ans. À vingt-quatre ans, et alors qu’une retraite dorée l’attendait après de bons et loyaux services dans le sport puis à l’élevage, le KWPN a rejoint le paradis, mardi 5 novembre, alors qu’il se trouvait encore au haras du Val d’Arnon.
Débarqué dans le piquet de la Suédoise Malin Baryard-Johnsson à sept ans, alors qu’il évoluait déjà jusqu’à 1,40m sur le circuit national, l’étalon à la distinction sans égale ne tarde pas à faire parler de lui sur la scène internationale. Il enchaîne les sans-faute, participe à la victoire de son équipe dans la Coupe des nations du CSIO 5* de Falsterbo en 2010 et 2012, se classe deuxième du Grand Prix associé en 2010, signe un double zéro à Rotterdam en 2012, remporte les Grands Prix 3* de San Giovanni et Stockholm en 2012, se hisse au deuxième rang de l’étape de la Coupe du monde de Londres en 2012, puis au troisième deux ans plus tard, termine troisième de celles de Vigo en 2011 et Vérone en 2012, quatrième de celles d’Helsinki, Göteborg, Bois-le-Duc et à nouveau Vérone entre 2013 et 2014, entre autres nombreux classements. Le bai, énucléé de l'œil droit au cours de sa carrière, fait la fierté de ses éleveurs, les Néerlandais Anneke et Henk Noordhof-Nieborg, qui avaient acheté sa grand-mère pouliche. Malheureusement décédée, Anneke a passé le flambeau à son fils, Freerk Pieter et sa belle-fille, Rianne, qui continuent de développer cette lignée grâce à Finerta, une sœur utérine du crack de la famille par Up To Date. Helsinki, le propre frère de Tornesch né en 2012 et également approuvé étalon, a, quant à lui, réalisé une poignée de sorties internationales, sans grand succès.
Triple finaliste de la Coupe du monde, sélectionné deux fois aux championnats d’Europe, à Madrid en 2011 puis à Aix-la-Chapelle en 2015 et au départ d’autant de finale du circuit des Coupes des nations, Tornesch prend du recul en 2016 et 2017, années au cours desquelles il disputera ses derniers parcours internationaux, notamment sur le circuit Junior, sous la selle d’Emelie Hugoson-Feldt, la fille de ses fidèles propriétaires.
“H&M*Tornesch était un cheval fantastique, doté d’une personnalité incroyable. Nous avons été vraiment proches durant les années que nous avons partagées ensemble. Nous avons vécu tant de grands résultats et de beaux souvenirs. Tornesch était unique et a joué un rôle capital dans ma vie et ma carrière”, s’est émue Malin Baryard-Johnsson sur ses réseaux sociaux, dans un dernier hommage à sa star.
Ses heures de gloire sportives derrière lui, Tornesch s’est pleinement consacré à sa seconde carrière, celle d’étalon, qu’a notamment géré le haras de Semilly. Le KWPN, dont les premières générations sont nées en Suède à partir de 2004, compte un peu moins de six-cents produits sur la base de données Horsetelex et un peu plus de quatre-cents nés dans l’Hexagone, où il avait commencé à faire la monte en frais dès 2014, alors qu’il évoluait encore à haut niveau. Parmi ses meilleurs représentants, dont seule une dizaine a, pour l’heure, concouru à 1,55m ou plus, citons Texas, champion de France en 2022 avec Pénélope Leprevost et gagnant des Grands Prix 4* de Rouen et Vejer de la Frontera, Dispo Cécé, double sans-faute dans la Coupe des nations du CSIO 5* d’Hickstead en 2022 avec le Brésilien João Victor Castro, WKD Toronto, classé jusqu’à 1,60m avec Sameh El Dahan, ou encore Cape Cod, troisième d’une épreuve à 1,55m au CSIO 5* de Rome au printemps sous selle italienne. Tittut, qui a elle-même évolué à bon niveau en Suède, ou encore Halita ES, honorent également leur père, Tornesch. La première a donné la géniale Cicci BJN, complice de Wilma Hellström, tandis que la seconde est à l’origine de Lolita ES, une prometteuse jument de huit ans, lauréate de son premier Grand Prix 2* à Drammen, en mai, avec le Norvégien Johan-Sebastian Gulliksen.
“Tornesch nous aura accompagné pendant six saisons de monte. Il était particulièrement attachant et d’une intelligence rare. Il comprenait très vite ce que l’on attendait de lui, ce qui le rendait facile à gérer même s’il était plein de sang. C’était une splendeur à regarder avec son look d’enfer, sa souplesse, ses belles allures amples, avec du rebond… et un régal à monter par son côté très félin. Il adorait les grandes galopades dans les champs, les moments de complicité lors de son pansage, les moments de détente au paddock… Il posait toujours fièrement, captant ainsi tous les regards. Il avait été difficile de le laisser partir, mais cela aura permis aux éleveurs d’autres régions de France de profiter de ses services en frais : dans le Sud au haras de Soual en 2020, puis dans le Nord, au haras de la Bouloye pendant deux saisons, et enfin dans le Centre au haras du Val d'Arnon ces deux dernières années. Ses propriétaires suédois, qui nous avaient fait l’honneur de nous le confier, lui prévoyaient pour ses vingt-cinq ans une retraite dorée au sein de leur cocon familial car c’était leur cheval de cœur. La vie en aura malheureusement décidé autrement. Nous sommes de tout cœur avec eux en ce moment difficile car nous savons ce que c’est que de perdre un cheval considéré comme un membre de la famille”, a écrit Anne-Sophie Levallois, à la tête du haras de Semilly, dans un vibrant hommage.
“Une époque de notre vie s'est éteinte ce soir. Tornesch, notre roi, est parti vers les verts pâturages. Ce cheval incroyablement sympathique, qui a toujours essayé de performer, de plaire, parfois plus qu'il ne le pouvait vraiment. Quels souvenirs, quel cheval.... Il était exceptionnel ! Nous te serons éternellement reconnaissants”, ont écrit les propriétaires de l’étalon, qui a donné son nom à l’écurie de ses naisseurs.
Le charismatique bai s’est éteint à Lignières-en-Berry, dans le Cher, où il faisait la monte depuis 2023. “Depuis un mois, il souffrait de coliques dès qu’il mangeait. Nous avons tout tenté en accord avec sa propriétaire, qui ne voulait pas l’opérer, puisqu’il avait déjà subi une première intervention et qu’il était assez âgé. Nous l’avons accompagné au mieux, en clinique et à la maison. Mardi soir, nous avons dû l’euthanasier après une torsion puis une rupture de son tube digestif. Malgré ces épisodes de coliques, qui n’avaient jamais été aussi graves, il avait une vie confortable”, a confié le Docteur vétérinaire Emmanuel Lagarde à GRANDPRIX.info au sujet des circonstances de la disparition de Tornesch, dont le souvenir restera impérissable dans la mémoire de ses fans.
“Mon cher Tornesch. Merci de nous avoir emmenés dans ton voyage. La petite partie à laquelle j'ai participé n'est qu'une fraction de ton histoire. Mais pour moi, c'est une très grande partie de la mienne”, a réagi à son tour Emelie Hugoson-Feldt. “Du premier au dernier voyage, je te suis éternellement reconnaissante d'avoir eu l'honneur de faire partie de ta vie. Je te remercierai toujours pour ce que tu m’as appris et ce que tu as donné à tous tes descendants, avec lesquels je continuerai d’apprendre. Maintenant, galope à pleine vitesse mon pote.”
Photo à la Une : Le charismatique Tornesch a connu ses plus belles heures sportives avec Malin Baryard-Johnsson. Dirk Caremans / Hippo Foto