Kent Farrington prend sa revanche à Genève et assoit un peu plus le statut de Greya
Revanchard après sa deuxième place dans la finale du Top Ten Rolex IJRC, Kent Farrington a mis ses adversaires à l’amende dans le Grand Prix. En selle sur Greya, le numéro un mondial a cette fois fait respecter la hiérarchie mondiale et décroché un énième Grand Prix 5* en 2025. Extrêmement concentré et déterminé, il a infligé plus d’une seconde de débours à son plus proche rival, Shane Sweetnam, qui se hisse pour la sixième fois consécutive sur le podium d’un Grand Prix 5* avec le métronome CSF James Kann Cruz. Le tiercé gagnant est lui complété par Thibeau Spits et son génial Impress-K van’t Kattenheye. Tous deux confirment là leur rôle de pilier de l’équipe belge, après avoir contribué à sa médaille d’or européenne un peu plus tôt cet été.
Piqué au vif après avoir laissé la victoire filer entre les mains de Scott Brash vendredi soir à Genève, dans la finale du Top Ten, Kent Farrington n’a pas commis deux fois la même erreur. L’Américain a cette fois fait respecter la hiérarchie mondiale, dimanche 14 décembre, dans le Grand Prix Rolex, offrant par la même occasion la plus belle distinction de sa carrière à la presque invincible Contina 47, alias Greya. Cette saison, la fille de Colestus n’a pas remporté ni un, ni deux, ni même trois mais bien huit Grands Prix internationaux, dont sept au niveau 5*. Un nouveau record, qui dépasse celui établi par… Kent Farrington et Gazelle Ter Elzen en 2017. “Je crois que cela prouve juste que j’ai eu de très grands chevaux, et que j’en ai toujours ! On peut monter aussi bien que l’on veut, sans grands chevaux, tout cela est impossible”, a lâché le vainqueur en conférence de presse.
Prêt à en découdre coûte que coûte, le numéro un mondial a bouclé deux prestations souveraines, ne laissant aucune chance aux sept autres barragistes du jour. De quoi retrouver le goût de la victoire après sa légère déception de vendredi. “J’espérais vraiment un bon résultat aujourd’hui. Vendredi, j’étais très déçu de moi-même car ma jument, Toulayna, était formidable. Je n’ai pas été au niveau, donc je me suis mis beaucoup de pression aujourd’hui afin de faire mieux, car mes juments sont hors du commun. Je suis très heureux de ce résultat aujourd’hui, et ravi de ma jument. Cette victoire me fait plaisir pour mon équipe, qui rend tout cela possible. Gagner n’importe quelle belle épreuve ici est déjà exceptionnel compte-tenu du plateau de cavaliers. Cette victoire est la plus belle de Greya, et de loin”, a-t-il déclaré. “La frustration est un élément indissociable des sports équestres. On perd plus qu’on gagne. Mais ce qui est le plus frustrant c’est de ne pas être au meilleur de sa forme quand son cheval l’est. J’ai laissé tomber Toulayna vendredi, alors que je pensais qu’elle était dans de parfaites conditions pour performer dans cette épreuve. Cela m’a rappelé que je devais rester concentré, repartir de zéro, et me mettre en selle avec un esprit clair. Les chevaux se bonifient lorsqu’on est positif. De cette façon, ils croient en nous et les résultats ne peuvent qu’être meilleurs.”
Picobello van’t Roosakker et Impress-K van’t Kattenheye impressionnent, Greya et James Kann Cruz poursuivent leur mano à mano
Grégory Bodo et Gérard Lachat ont construit un parcours accessible pour célébrer les vingt-cinq ans de soutien de Rolex au merveilleux CHI de Genève. Dès le début d’épreuve, les sans-faute… aux obstacles n’ont pas tardé à se faire légion, mais le chronomètre imposé à piéger plus d’un couple. Ainsi, Simon Delestre, qui dû fortement pousser son excellent Golden Boy DK provoquant quelques murmures des tribunes, Peder Fredricson aux rênes de son très régulier Alcapone des Carmille, Ben Maher sur Enjeu de Grisien, Daniel Coyle en selle sur Incredible ainsi que Lillie Keenan associée à son phoenix Fasther ont ainsi été privés du barrage.
À cette fête, le premier invité fut Piergiorgio Bucci, finalement sanctionné de douze points sur son généreux Hantano lors de leur second parcours pour le huitième rang final. Deuxième à s’élancer, Shane Sweetnam, venu en Europe avec son seul CSF James Kann Cruz, merveilleux gris à qui tout réussi ces dernières semaines outre-Atlantique, a fixé le premier temps de référence à 41’’39. Une performance qui aurait pu lui permettre de s’imposer. Mais que nenni.
Marc Dilasser et Arioto du Gevres, excellents en première manche, dont ils ont fait une formalité, ont péché au barrage pour terminer à une non moins honorable sixième place, signant sans doute l’une de leur plus belle réussite commune. Les brillantissimes Jason Smith et Picobello van’t Roosakker ont ensuite suivi. Un an après avoir foulé leur toute première piste 5*, ici même dans les épreuves intermédiaires, tous deux ont prouvé au monde de quelle trempe ils étaient. Sans jamais trembler, le duo, seul représentant de la bannière suisse, a signé un parfait double sans-faute pour se classer cinquième. Suffisant pour ravir le public, le cavalier et toute son équipe… et pour rêver des Mondiaux d’Aix-la-Chapelle l’été prochain, après une saison et une progression maîtrisée de bout en bout.
Et puis, Kent Farrington est venu, a vu et a vaincu. Pour la onzième fois de sa carrière, l’Américain a raflé une épreuve majeure du concours genevois. Sur sa géniale et très efficace Greya, il a arrêté la montre en 40’’04 et n’a jamais été approché. Phénoménales, ses performances donneraient presque l’impression que le concours hippique est facile. Le propre des grands couples et des grands champions.
Non loin du temps de Jason Smith et Picobello van’t Roosakker, 43’’09, Sophie Hinners et le prodige Thibeau Spits se sont classés quatre et troisième. L’Allemande misait sur son talentueux Iron Dames*Singclair, fort démonstratif cette semaine, parfois trop, un peu acrobate mais toujours diablement efficace malgré une décontraction pas toujours évidente dans ses efforts. Son homologue belge, lui, avait sellé Impress van’t Kattenheye, son complice des derniers championnats d’Europe de La Corogne et médaillé d’or par équipe. Conscient des forces et des faiblesses de son petit-fils de Vagabond de la Pomme, le Diable Rouge a montré toute son intelligence en déroulant un tracé idéal pour son puissant étalon, qui lui a là offert la plus belle réussite individuelle de sa jeune carrière à ce niveau. “Être ici à côté de ces cavaliers me semble irréel ! C’est l’un des meilleurs sentiments que j’ai jamais éprouvé”, a-t-il souri, tout en maturité et en reconnaissance.
Dernier à partir, Christian Ahlmann n’a pas pu éviter deux fautes de son étalon Dourkhan Hero, qui avait frôlé plusieurs obstacles en première manche mais s’était déjà imposé à ce niveau plus tôt dans l’année, du côté de Hambourg. Le résultat de la paire a finalement scellé le podium définitif. “Les chefs de piste ont fait un très bon travail. Le parcours était juste, même si le temps a joué un rôle crucial. Les barres sont tombées un peu partout et il y a un bon nombre de sans-faute. J’ai déjà terminé deuxième derrière Kent Farrington à plusieurs reprises ! Sa jument, Greya, est brillante. J’ai fait un bon barrage pour mettre les autres couples sous pression, mais j’aurais certainement pu faire un peu mieux. Cela étant, même en faisant mieux, je ne sais pas si j’aurais pu les battre. J’ai gagné une place au classement par rapport à l’an dernier : je finirai peut-être par gagner l’année prochaine !”, a rigolé mais aussi prévenu l’Irlandais, qui semble bien prêt à revenir du 9 au 13 décembre prochain. Et il ne sera assurément pas le seul à profiter une nouvelle fois de la très grande et magnifique fête de ce CHI!
Photo à la Une : Kent Farrington et Greya ont conclu leur folle année de la meilleure des manières à Genève. © Mélina Massias
Les épreuves du CHI de Genève sont à (re)voir sur Clipmyhorse.tv.