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Joris de Brabander ou la réussite de l'élevage belge !

Reportages samedi 7 mars 2009 Julien Counet

Dernier épisode sur Joris de Brabander, et on y parle studbooks, la vie des jeunes chevaux...

Changement de sujets : la Belgique comporte trois studbooks. Vous travaillez avec le sBs et le BWP, mais jamais Zangersheide. Pourquoi ? Comment déterminez-vous dans quel studbook vous inscrivez un poulain ?

Narcotique II de Muze (Darco & Qerly Chin (Chin Chin) et Eric Lamaze

Parfois c'est le hasard, parfois ce sont des choix un peu « politiques ». Généralement les souches qui sont plus sBs, j'essaie d'inscrire plus au sBs alors que quand j'ai des souches vraiment BWP, j'inscris au BWP. Maintenant, je trouve que tout le monde doit vivre et j'aime l'idée qu'il puisse y avoir une certaine diversité ou concurrence aux niveaux des studbooks. J'utilise également souvent les services de l'AES aussi, même si je n'ai pas encore inscrit de poulains là bas car j'aime inscrire mes poulains en Belgique et l'AES n'est pas belge. On inscrit également une partie des chevaux nés au haras de la Pomme au Selle Français.

En fait, les studbooks représentent juste un système pour enregistrer les chevaux sans faire beaucoup plus que cela. Jusqu'à maintenant, ils ne font pas grand-chose pour les éleveurs en tout cas car je trouve qu'ils pourraient organiser plus de choses pour eux. Mais tout d'abord, ils feraient déjà bien d'arrêter d'embêter les éleveurs ; et je pense surtout au BWP en disant cela car je ne trouve pas normal d'interdire d'inscrire tel produit ou d'utiliser tel ou tel étalon. Ils devraient être plus souple au niveau administratif et être plus compréhensif envers les éleveurs au lieu de toujours les critiquer. S'ils commençaient déjà à faire cela, ce serait bien.

Au final, à force d'être si stricte avec son règlement, est ce que le BWP ne fait pas une erreur ?

Si, d'autant plus qu'ils perdent énormément de « clients » à cause de cela. Mais les studbooks, c'est vraiment un long débat à part entière.

Par contre, les studbooks ont l'habitude de s'approprier les succès des chevaux nés dans leur studbook. Est-ce quelque chose de positif pour l'éleveur ?

Pour moi, un studbook est censé vivre avec les éleveurs. L'un ne peut pas aller sans l'autre même si je pense que c'est avant tout la réussite de l'éleveur que celle du studbook lorsqu'il y a de bons chevaux. Je pense que nous avons fabriqué de bons chevaux malgré les studbooks.

On voit ces dernières années l'avancement d'un cheval « européen » plus qu'un cheval attaché à une race. Vous pensez que c'est l'avenir du cheval de sport ?

Je pense que oui car à la fin, c'est quand même l'éleveur qui fait ce qu'il a envie de faire ! Personnellement, si j'ai envie d'utiliser un étalon : je le fais même et surtout si les studbooks me l'interdisent. Cela m'encouragera encore plus à le faire. Si je vais chercher un cheval en Russie et que je veux l'utiliser, je le ferai et chercherai juste un studbook qui acceptera d'enregistrer mon produit.

Genève de Muze (Vigo d'Arsouille & Nelke vh Waterschoot (Latano I))

Ce n'est pas justement un peu la philosophie de Zangersheide, qui est pourtant le seul studbook belge que vous n'utilisez pas ?

Peut-être. Je ne connais pas tellement le studbook Zangersheide. Ce que je regrette c'est qu'au début, ils ne voulaient que produire de bons chevaux de concours hippique mais maintenant, ils veulent avoir beaucoup de clients et surtout beaucoup de chevaux inscrits sans avoir nécessairement que des bons chevaux. Je pense que leur philosophie a quelque peu changé en laissant tomber une belle opportunité.

Quand on voit justement la progression du cheval européen, on constate un peu partout en Europe la faculté du Holstein de s'introduire dans les studbooks « concurrents » alors que pourtant, vous n'avez quasiment pas de sang Holsteiner dans votre élevage, à l'exception de Chin Chin et de Cumano via Malito de Rêve.

Oui, c'est vrai, mais si j'ai aussi utilisé Cento et Carthago sur Fragance. Je ne suis pas contre les holsteiners. Je pense que ce sont de bons chevaux, que c'est un studbook qui s'est concentré sur des chevaux qui présentaient des qualités de sauteurs… mais il y a d'autres chevaux qui sautent aussi très bien. Regardez aux jeux olympiques : ce ne sont pas des Holsteiner qui ont gagné cette année-ci, c'est un tout autre genre de chevaux : des chevaux plus compétitifs, plus vif, plus réactifs, plus dans le sang. Exactement le contraire de ce que l'on trouve dans le Holstein en fait.

Je pense qu'en Belgique, nous avons des chevaux meilleurs pour l'avenir : plus compétitifs et plus réactifs qu'au Holstein.

Et comment peuvent-ils réussir aussi bien à se promouvoir par rapport à nos studbooks ?

C'est peut-être aussi un peu grâce au hasard. Pour le moment, le Holsteiner est peut-être le meilleur, mais dans dix ans ce n'est pas dit qu'ils le seront toujours …

Pour en revenir à votre élevage. Entre la naissance du poulain et son passage à l'expertise pour certains mâles, de quoi est faite leur vie et comment les sociabilisez-vous ? 

Ce qui est vraiment important pour moi, c'est que les chevaux vivent en groupe et se déplacent un maximum. Chaque jour au box, c'est un jour de trop. Pour le reste, je ne fais rien de spécial. Mes principes de bases sont vraiment de mettre les chevaux dehors et de les faire bouger. De bien les vermifuger et surtout de ne pas leur donner trop à manger, c'est sans doute le plus gros défaut que les gens ont car bien souvent certains pensent que plus les chevaux ont à manger mieux c'est mais ce n'est pas le cas.

Je les fais sauter de temps en temps sans les faire forcer lorsque j'en ai l'occasion. Par exemple, lorsque je contrôle la porteuse pour voir si elle est de nouveau pleine, j'en profite pour faire sauter un peu le poulain … mais je pense que c'est aussi important de le regarder à chaque fois qu'on en a l'occasion pour le voir galoper ou trotter dans la prairie ou tout simplement le regarder se lever pour voir s'il n'a pas mal. Ce sont toutes ces petites choses comme cela, mais sans véritable système.

Madame Chantilly de Muze (Bamako de Muze & Farfelu de la Pomme (Vigo d'Arsouille & Narcotique II de Muze))

Après c'est toujours difficile de dire, mais pour moi, le poulain de Bamako que j'ai eu cette année, ça doit être un crack : à la manière dont il bouge, dont il galope, il change de pied … Vu son origine, si il a le caractère de son père, les moyens de Vigo et le respect de Narcotique … Au final, cela n'en sera peut-être pas un … mais c'est comme ça que les cracks sont faits et c'est souvent comme cela que j'ai remarqué les bons chevaux. Walnut lorsqu'elle bougeait en prairie, c'était une vraie vedette. Elle avait la force, elle avait tout puis après elle sautait bien. Mais évidemment, il y a aussi des exemples de chevaux qui sont de vrais cracks en prairie … mais pas du tout en concours car ils n'ont pas le respect ou pas la mentalité pour être un cheval de concours.

Justement, les moyens, on a l'impression que c'est la qualité que vous recherchez le plus dans votre élevage.

Pour moi, en concours, il y a trois choses qui sont importantes : les moyens pour faire de gros tours, le respect pour la barre, mais le cheval ne doit pas avoir peur de la barre. Pour moi, c'est très différent. Et enfin, un cheval doit être malin : il doit avoir un cerveau pour faire des doubles, des triples, la rivière … et là-dessus un bon caractère car je pense qu'il y a des chevaux qui ont la mentalité, qui veulent vraiment le faire mais qui ne sont pas malins assez pour se reculer sur un oxer puis de nouveau avancer pour couvrir la dernière barre.

Erco van't Roosakker (Darco & Babbe van't Roosakker (Kannan))

Il faut un mélange entre tout ça : comme Nabab ! Ses produits ont souvent tous les moyens, sont malins assez pour le faire mais n'ont pas toujours le dernier respect alors que les Heartbeaker ont souvent tous le respect, mais ne sont pas assez concours car ils sont trop chauds. La santé et pleins d'autres petites choses sont évidemment très importantes et … il y a des chevaux qui ont tout cela : ce sont les vrais cracks. Pour les autres, la majorité des chevaux, il leur manque un petit quelque chose quelque part et c'est au cavalier d'essayer de vivre avec les défauts d'un cheval … et quand il y a trop de défauts, ça ne marche plus, tout simplement.

FIN !