“Je peux encore beaucoup apprendre de mes pairs”, Gilles Thomas
Le jeune Belge évoque sa tournée au Sunshine Tour et ses ambitions pour 2022.
Quatre-vingt-neuvième meilleur cavalier au classement mondial Longines, le Belge Gilles Thomas fait de plus en plus parler de lui. Âgé de vingt-trois ans, le pilote, installé à Nieuwenhof, tout près de Bruxelles, nourrit de grandes ambitions pour le futur. Malgré la vente de son meilleur cheval, Konak, qui lui offrait une médaille de bronze aux championnats de Belgique Seniors en septembre dernier à Lanaken, le jeune homme a su rebondir et devrait pouvoir compter sur plusieurs montures prometteuses à l’avenir. Né dans une famille ancrée dans le monde des chevaux, Gilles, qui a commencé à monter à l’âge de trois ans, peut compter sur le soutien de son oncle, Marc van Dijck, ancien représentant des Diables Rouges, et sur un système solide.
Vous avez participé aux trois premières semaines de compétitions du Sunshine Tour, à Vejer de la Frontera, en Andalousie, et vous êtes classé dans deux des trois Grand Prix 4* que vous avez courus. Quel bilan tirez-vous de cette reprise des compétitions extérieures ?
Je participais pour la première fois au Sunshine Tour. J’avais huit chevaux avec moi, de différents âges. Ils ont tous bien sauté. Le concours est vraiment super pour entraîner et préparer les chevaux, afin qu’ils soient prêts pour entamer la saison. Après avoir sauté ces trois semaines en février, ils auront un peu de repos en mars et nous verrons pour la suite. Vejer propose de nombreuses pistes, dix-neuf au total. Le site est très grand et permet de pouvoir sauter presque tous les jours dans une nouvelle carrière. Cela est vraiment intéressant pour bien se préparer en début d’année.
Quels bénéfices et avantages trouvez-vous aux tournées ?
Le Sunshine Tour était particulièrement intéressant pour moi car j’avais la possibilité de monter beaucoup de chevaux dans des épreuves à 1,40 ou 1,45m. Lorsqu’on participe à un CSI 2 ou 3* en Belgique, on ne peut souvent emmener que trois chevaux. Là, j’ai pu en monter huit dans un même week-end. La tournée proposait également trois semaines de 4* au même endroit, ce qui est une belle opportunité. Certains de mes chevaux manquaient un peu d’expérience et en ont acquis énormément au Portugal. Je pense et j’espère que nous sommes désormais prêts pour la saison !
Vous avez disputé les trois temps forts dominicaux avec Luna van het Dennehof (BWP, Prince van de Wolfsakker x Quidam de Revel), avec une troisième et une dixième place à la clef. Vous attendiez-vous à autant de réussite avec cette jument que vous montez depuis près de quatre ans ?
Luna disputait son deuxième Grand Prix 4*, après avoir déjà terminé deuxième de celui de Rouen, en France, fin novembre. Elle a été troisième puis dixième, avant de commettre une seule faute dans son dernier Grand Prix. Elle a signé trois bonnes performances. J’espère pouvoir monter encore en niveau cette année. Je pense qu’elle le fera bien. J’ai commencé à la monter lorsqu’elle avait six ans et elle prend onze ans cette année. Cela fait donc déjà cinq ans qu’elle est sous ma selle. Luna est née chez moi, donc elle a toujours été ici. Avant, elle était montée par un autre cavalier. Elle a beaucoup de qualités et veut toujours être sans-faute. Désormais, avec davantage d’expérience, elle a gagné en force et en moyens. J’espère qu’elle pourra participer au grand sport cette année. Comme je suis membre des Valkenswaard United dans la Global Champions League, je participerai aux étapes de Miami et Mexico. Je vais essayer de participer à un Grand Prix 5* à cette occasion. Ce sera sa première fois, mais elle a engrangé beaucoup d’expérience au Sunshine Tour en participant à trois Grands Prix.
“Je pense qu’Ermitage Kalone a tout pour être un grand cheval”
Depuis le départ de Konak (BWP, Nabab de Rêve x Cash), Luna occupe-t-elle le rôle de cheval de tête au sein de votre piquet de chevaux ? Avez-vous d’autres montures qui pourront l’épauler ?
C’est vrai que Konak était un peu mon premier cheval l’an passé. J’ai encore deux autres chevaux pour participer à ce niveau d’épreuve. Je peux notamment compter sur Calleryama (Holst, Casall x Contender), qui a disputé quelques épreuves à 1,50m au Sunshine Tour. Luna et Calleryama seront mes deux premiers chevaux pour cette saison. J’espère qu’ils resteront en pleine forme et que nous pourrons être performants. L’année passée, Feromas (van Beek, Z, Fantomas de Muze x Tangelo van de Zuuthoeve) m’a également accompagné sur le circuit Global Champions. Il a désormais dix ans et a déjà sauté des épreuves à 1,50, 1,55m. Il reste jeune, mais je pense qu’il pourra aussi participer à des épreuves du Global et à des Coupes des nations 3 ou 5* pour la Belgique.
Comment avez-vous accueilli le départ de Konak, qui semblait avoir une place particulière dans votre cœur ?
Konak avait onze ans et il était hongre. À l’inverse, Luna, qui n’est pas nécessairement à vendre, a un an de moins de Konak et est surtout une jument, avec un bon pedigree et pourrait être intéressante pour l’élevage. Konak a vraiment bien sauté l’année dernière, notamment dans des Grands Prix 4 et 5*. Il m’a aussi permis d’être médaillé de bronze à Lanaken, aux championnats de Belgique. Après cela, un Américain était intéressé pour l’acheter. Considérant son âge et le fait qu’il soit hongre, nous avons pris la décision de le céder. Parfois, nous devons faire un peu de commerce, bien que j’aurais aimé le garder un peu plus longtemps.
Quid des jeunes chevaux ? Vous semblez en avoir plusieurs sous votre selle qui présentent de belles qualités…
J’ai notamment Ermitage Kalone (SF, Catoki x Kannan), un étalon de huit ans. Il a déjà évolué à 1,45m au Sunshine Tour, ce qui est très bien pour son âge. Il est très populaire ici en Belgique, mais aussi en France (l’étalon est issu de la même souche maternelle que Prestige Kalone, vu jusqu’à 1,60m, notamment sous la selle de Patrice Delaveau, ndlr). Il va encore effectuer un certain nombre de saillies cette année, avant de se consacrer davantage au sport l’an prochain. Je pense qu’il a tout pour être un grand cheval. Je compte vraiment sur lui pour le futur. Je peux aussi citer Puskas de Kalvarie (BWP, Don’t Touch Tiji Hero x For Pleasure), un cheval de sept ans qui était lui aussi avec moi au Portugal. Il a d’ailleurs terminé deuxième de la finale des sept ans. Je pense qu’Ermitage et Puskas vont sauter au plus haut niveau. Cependant, ils restent jeunes et je dois encore prendre mon temps avec eux. En attendant, je m’appuie sur Luna et Calleryama.
En 2022, vous faites de nouveau partie d’une équipe de la Global Champions League, sous les couleurs de Valkenswaard United. Que vous apporte cette place au sein de ce collectif ?
Déjà, le circuit propose seize ou dix-sept très bons événements. Pour moi, comme pour mes chevaux, cela est vraiment génial. Je ne participerai pas à toutes les étapes, mais je pense pouvoir en faire six ou sept. À ce niveau-là, être dans une équipe comme Valkenswaard United est un très grand avantage pour moi. Non seulement les concours sont vraiment chouettes, mais je suis surtout dans une équipe très forte avec Marcus Ehning et John Whitaker, par exemple. Je peux ainsi apprendre beaucoup de mes coéquipiers. Nous faisons les reconnaissances ensemble, échangeons entre nous sur nos façon de travailler, etc. L’année dernière, Peder Fredricson faisait partie de l’équipe. Tous ses chevaux n’ont plus de fers en ce moment. Nous en avons discuté et j’ai décidé de retirer les fers de l’une de mes juments. Toutes les occasions sont bonnes pour apprendre ; même lorsque nous allons manger ou grignoter au restaurant, nous pouvons parler avec des cavaliers et élargir nos connaissances.
“Marcus Ehning et Grégory Wathelet sont mes plus grands exemples”
Comment fonctionne votre système actuel ? Quelle place donnez-vous à la formation des jeunes chevaux, au commerce, etc ?
Chez nous, nous faisons un peu de tout. Nous avons une écurie d’environ trente chevaux. Mon oncle entraîne beaucoup de cavaliers. La délégation chinoise qui a disputé les Jeux olympiques de Tokyo était notamment basée chez nous. Personnellement, je me concentre sur le sport. En parallèle, nous avons six étalons qui font quelques saillies. Nous élevons chaque année entre dix et douze poulains. Nous essayons de tout combiner ; quand nous ne comptons que sur le sport, ce n’est pas toujours facile. Lorsque l’un de nos domaines d’activité va moins bien, nous pouvons compter sur un autre. De temps en temps, nous achetons et vendons quelques chevaux, mais nous ne sommes pas vraiment une écurie de commerce. Nous nous tournons davantage vers l’élevage et le sport.
Dans votre sport, des entraîneurs ou collègues cavaliers vous inspirent-ils particulièrement ?
Je travaille beaucoup avec mon oncle, Mike van Dijck. Il m’aide énormément, tout comme Niels Bruynseels m’a beaucoup soutenu. Il y a énormément de bons cavaliers. Je pense notamment à Marcus Ehning et Grégory Wathelet, qui sont mes plus grands exemples. Lorsque Grégory a commencé, il n’avait rien. Désormais, il est au plus haut niveau et s’est construit lui-même. Je trouve cela très inspirant.
Quel regard portez-vous sur l’équipe belge, qui a obtenu d’excellents résultats ces dernières saisons, avec notamment un titre de championne d’Europe en 2019 à Rotterdam, puis une médaille de bronze à Tokyo l’été passé ?
Il n’est pas simple d’intégrer les rangs d’une équipe comme celle de la Belgique. Mais lorsque c’est le cas, on sait qu’on est dans un collectif très fort. Cela constitue une occasion de s'inspirer des autres cavaliers. C’est un peu la même chose avec mon équipe du Global, qui regroupe de bons cavaliers. Je pense que je peux encore beaucoup apprendre de mes pairs.
Pensez-vous aux Jeux olympiques de Paris ? Avez-vous déjà une monture dans vos écuries qui pourrait vous accompagner lors de cette échéance ?
Il s’agit toujours d’un rêve. Cette année, je vais déjà disputer les Coupes des nations CSIO 3* de Lisbonne et Madrid. Si mes résultats sont bons, je participerai peut-être à Coupe des nations 5* en fin de saison, mais cela dépendra de l’état de forme de mes chevaux et de mes performances. Paris est dans un coin de ma tête. En Belgique, nous avons beaucoup de bons cavaliers et chevaux, mais je pense qu’avec Ermitage et Puskas, j’ai deux excellents chevaux, avec lesquels je peux penser aux Jeux olympiques. Ils sont encore jeunes, alors, si ce n’est pas Paris, ce sera peut-être Los Angeles en 2028.
Photo à la Une : Gilles Thomas et Konak. © Sportfot