“Je n’avais jamais monté un cheval comme Mosito van het Hellehof”, Bernardo Cardoso de Resende Alves
Onze ans après sa dernière sélection en équipe nationale, Bernardo Cardoso de Resende Alves va renfiler la veste verte de l’équipe brésilienne d’ici quelques jours. Choisi par Philippe Guerdat, qui avait conduit les Bleus à l’or olympique à Rio en 2016, pour représenter son pays, l’homme de quarante-sept ans semble prêt à relever ce nouveau défi. Pour l’aider dans sa tâche, il pourra compter sur Mosito van het Hellehof, dont il vante la grande qualité. L’ancien pilote du regretté Canturo, décédé en début d’année, a brillé du côté de Knokke, au début du mois. De quoi aborder les championnats du monde de Herning avec sérénité. Désormais installé au sein des écuries de Muze, chez Joris de Brabander, l’Auriverde se permet même de se projeter jusqu’aux Jeux olympiques de Paris 2024. Interview.
Quelques jours après l'annonce de votre sélection pour les championnats du monde, comment allez-vous ?
Je suis très heureux. Mosito van het Hellehof (BWP, Elvis ter Putte x Nabab de Rêve) est assez jeune et n’a pas beaucoup d’expérience à ce niveau. En début d’année, Philippe Guerdat (le sélectionneur de l’équipe nationale brésilienne, ndlr) m’a demandé de faire mon programme et m’a dit que nous verrions à la fin de la saison s’il était prêt pour cette échéance. Je n’ai pas pris part à beaucoup de gros concours ni de Coupes des nations pour le tester mais il s’est montré à la hauteur chaque fois que je lui ai demandé quelque chose. Philippe pensait que c’était une bonne chose que je participe à ce championnat.
Vous n’avez plus pris part à une telle échéance depuis les Jeux panaméricains de Guadalajara, au Mexique, en 2011. Vous devez ressentir beaucoup d’excitation à l’approche de ce rendez-vous…
Je suis ravi. J’ai fait d’autres championnats du monde, en 2002, 2006 et 2010 avec le haras de Joter, avec qui j’ai longtemps travaillé. Par la suite, j’ai essayé de trouver de nouveaux sponsors et je suis passé par une phase difficile pour trouver de bons chevaux. Grâce à Joris de Brabander, de l’élevage de Muze, j’ai commencé à monter El Torreo de Muze (sBs, Taran de la Pomme x Vigo d’Arsouilles), avec qui j’ai remporté quelques Grands Prix, notamment au Maroc (celui du CSI 4* de Rabat, en 2019, ndlr) et à Bourg-en-Bresse (en 2021, ndlr).
Je monte Mosito depuis deux ans et, honnêtement, je pense que c’est le meilleur cheval que j’ai monté dans ma vie. Il a gagné son premier Grand Prix en octobre à Lierre et s’est classé partout après cela. Il a gagné au Sunshine Tour, en Italie et s’est classé deuxième à Knokke, dans son premier Grand Prix 5*. C’est un cheval d’un autre niveau, je n’en avais jamais monté un comme lui.
“ J’ai eu une phase compliquée, durant laquelle je n’avais pas de bons chevaux”
Appréhendez-vous le fait d’enfiler à nouveau la veste verte lors d’une telle échéance ?
Non. En concours, je suis très calme et serein. Je connais tout le monde et suis le plus vieux de l’équipe. Nous avons de nombreuses fois monté ensemble, il n’y a pas de stress.
Depuis plusieurs mois, vous avez retrouvé le très haut niveau et votre place dans l'équipe brésilienne. Comment ce retour a-t-il pu se faire ? Qu’est-ce qui l’a impulsé ?
Les CSI 5* ne sont atteignables que grâce aux chevaux. J’ai eu une phase compliquée, durant laquelle je n’avais pas de bons chevaux. Désormais, avec ceux que je monte, dont Mosito et Torreo, tout est possible. Grâce à eux, je suis certain de pouvoir continuer à grimper dans le classement mondial et sauter de belles épreuves. Après les championnats, je vais donner un peu de repos à Mosito. Avec deux chevaux, il est difficile de rentrer dans les vingt ou meilleurs cavaliers, mais, avec un bon résultat à Herning et une bonne fin d’année, je pourrai me hisser le top cent, voire cinquante…
Vous vous êtes maintenu à un bon niveau également grâce à El Torreo de Muze, qui a participé à la finale des Coupes des nations l’an passé à Barcelone. Avez-vous songé à l’emmener à Herning ?
Mosito a gagné son premier Grand Prix (2* à 1,45m, ndlr) à Lierre en octobre et, dès cet instant, je me suis dit que c’était un tout autre niveau. J’ai décidé de le faire travailler davantage, afin qu’il évolue au maximum. Torreo a fourni beaucoup d’efforts l’an passé. Il n’a pas beaucoup d’expérience mais a sauté à Aix-la-Chapelle, Barcelone… Il avait droit à une année plus calme.
“Mosito est vraiment prêt”
Mosito van het Hellehof vous accompagnera lors de cette aventure, comment le sentez-vous ?
Il vient de terminer deuxième du Grand Prix 5* de Knokke. Pour moi il est vraiment prêt. J’ai fait un entraînement à Kronenberg jeudi (21 juillet, ndlr), lors d’un CSI 2* et je pense que c’est assez. Je n’ai pas besoin de forcer davantage. Il ne ressortira pas avant le départ ; ce parcours était la dernière répétition.
Depuis fin avril, il s’est classé à presque chacune de ses sorties. Sa régularité sans faille doit être rassurante avec les Mondiaux, non ?
C’est le cheval le plus respectueux que j’ai eu. Même avec le peu d’expérience qu’il a, c’est le meilleur cheval que j’ai monté. Lors de sa première épreuve à 1,60m, il s’est classé sixième (dans le Grand Prix 4* de Wiesbaden début juin, ndlr). Le championnat sera progressif et le premier jour ne devrait pas être très gros donc nous verrons, nous nous concentrerons sur l’équipe qui est très forte. Si je juge que cela devient trop difficile et que l’équipe n’a aucune chance d’aller en finale, je déciderai peut-être d’arrêter. Mais s’il continue à sauter comme cela, je peux espérer bien figurer.
Comment avez-vous croisé la route de cet étalon de dix ans, que vous pilotez depuis 2020 ?
Je montais déjà El Torreo de Muze, qui appartient à Joris de Brabander. J’ai commencé à travailler dans une autre écurie mais je m’entendais davantage avec les chevaux qu’avec les personnes qui y travaillaient. Joris m’a alors proposé de venir monter chez lui et m’a donné quelques chevaux, dont Mosito.
Est-il destiné à la vente ?
Je ne pense pas. Il est bon, mais produit aussi très bien. C’est peut-être l’étalon dont nous avons vendu le plus de saillies cette année en Belgique. L’an passé, dans la finale réservée aux chevaux de cinq ans lors du championnat de Belgique, la moitié des trente engagés descendait de lui (sur les soixante-sept chevaux au départ de la finale du championnat des cinq ans, neuf étaient des fils ou filles de Mosito, ndlr). Il a prouvé qu’il était un excellent étalon.
“Je pense que nous avons nos chances pour les championnats du monde”
Au Danemark, le Brésil présentera une très bonne équipe. Après un petit passage à vide, pensez-vous que votre escouade compte de nouveau parmi les favoris ?
Marlon Modolo Zanotelli est un des meilleurs cavaliers du monde (le Brésilien est actuellement huitième au classement mondial Longines, ndlr), Yuri (Mansur, ndlr) a le meilleur cheval brésilien des derniers Jeux olympiques (QH Alfons Santo Antonio, ndlr). Pedro (Veniss, qui montera Nimrod de Muze, ndlr) et moi avons de jeunes chevaux qui n’ont pas trop d’expérience mais qui montrent de très bonnes choses. Nous avons des chevaux peu expérimentés mais des cavaliers aguerris. Je pense que nous avons nos chances.
Quels rapports entretenez-vous avec votre sélectionneur national, Philippe Guerdat ?
L’équipe brésilienne dans son ensemble est très heureuse de pouvoir compter sur lui. Nous avons un entraîneur mais, le boss, c’est lui (rires). Tout le monde le respecte et en est très content, même ceux qui ne sont pas sélectionnés. Avec les résultats que nous avons eus cette année, je pense qu’il a choisi la meilleure équipe.
Avez-vous un pronostic sur les futurs médaillés par équipes et en individuel ?
La Suède est évidemment la grande favorite (l’équipe d’Henrik Anckarcrona avait été couronnée d’or collectivement aux derniers Jeux olympiques, ndlr). Les Pays-Bas seront très forts également, même s’ils ont perdu Willem Greve (victime d’une chute, ndlr), tout comme les Allemands, qui font toujours office de favoris. En individuel, je pense à Henrik von Eckermann et Ben Maher (qui monteront King Edward et Explosion W, ndlr). Explosion n’a pas beaucoup sauté cette année mais reste l’un des favoris (le hongre avait remporté l’or individuel l’été dernier à Tokyo contre l’or par équipes pour le complice du Suédois, ndlr).
“Après les Jeux panaméricains de 2023, l’objectif numéro un sera Paris”
Où êtes-vous basé ? Comment fonctionne votre système ?
Je suis installé à côté de Anvers, à Sint-Niklaas, aux écuries de Muze. J’habite assez loin, près de Waterloo, à une soixantaine de kilomètres. En termes d’élevage, je pense qu’il s’agit des meilleures structures possibles. Tous les chevaux qui proviennent de chez eux sont exceptionnels. Que ce soit Vigo d’Arsouilles, Nabab de Rêve, London (ex Carembar de Muze), I’m Special de Muze, … Le niveau est extraordinaire.
Êtes-vous coaché par quelqu’un ?
Depuis que je suis en Europe, je me suis toujours entraîné avec Neco (Nelson, ndlr) Pessoa. Aux écuries de Muze, je suis seul, mais il est très souvent chez moi. Il me donne des idées et nous parlons beaucoup. C’est un ami et un père, il m’a beaucoup apporté. Je suis arrivé en Europe en 2001 et, depuis, il a toujours été là. En revanche, il ne m’accompagnera pas à Herning. Nous sommes désormais dans le “système Guerdat” alors, là-bas, ce sera Philippe.
Une fois Herning passé, quels seront vos objectifs ?
Mosito aura des vacances, puis nous aviserons en fonction des résultats. Torreo a très bien sauté la dernière fois qu’il a participé au Moroco Royal Tour. Il avait gagné le Grand Prix de Rabat et avait réalisé un double sans-faute dans la Coupe des nations. Alors, je pense qu’il y retournera, mais rien n’est encore décidé.
Vos derniers Jeux olympiques, à Pékin en 2008, ne s'étaient pas idéalement terminés. Ceux de Paris approchent. Espérez-vous pouvoir y participer ?
Avec un cheval comme Mosito, c’est mon objectif. J’espère juste que ce ne sera pas trop tôt pour lui. Avec le championnat du monde cette année, je vise les Jeux panaméricains en 2023. Il m’a prouvé qu’il était prêt pour cela. Ensuite, l’objectif numéro un sera Paris.
Photo à la Une : Bernardo Cardoso de Resende Alves et Mosito van Hellehof à Knokke. © Scoopdyga