Notre site web utilise la publicite pour se financer. Soutenez nous en desactivant votre bloqueur de publicite. Merci !

“J’étais à deux doigts de laisser partir le cheval d’une vie”, Eugenio Garza Perez (2/2)

Contago
Interviews dimanche 28 juillet 2024 Mélina Massias

Eugenio Garza Perez n’est peut-être pas le cavalier de saut d’obstacles le plus connu du grand public. Pourtant, le jeune homme de vingt-huit ans ne manque ni d’ambition ni de raison dans les objectifs qu’il se fixe. Avec son brillant Contago, qu’il considère comme le cheval d’une vie, le Mexicain s’apprête à disputer son cinquième grand championnat et ses deuxièmes Jeux olympiques. Retour sur le destin du natif de Monterrey, issu d’une famille aisée et, elle aussi, passionnée par les chevaux.

La première partie de cet article est à (re)lire ici.

Malgré la perspective des Jeux olympiques de Paris, échéance pour laquelle il compte bien “faire de son mieux” et peut légitimement nourrir quelques rêves avec sa star Contago, Eugenio Garza Perez n’entend pas s’infliger une pression disproportionnée, ni changer sa philosophie, qu’il décrit comme très tournée vers les équidés. “Le système dans lequel j’ai grandi est celui d’Eddie Macken et Guga (Carlos Augusto Myrrha, ndlr), mon entraîneur actuel, qui sont deux personnes très tournées vers les chevaux. Ils passent en premier. S’assurer que les chevaux soient heureux est notre priorité”, assure-t-il. Mais comment faire pour parvenir à cet objectif ? “Peu importe la façon d’y parvenir”, répond le Mexicain. “Nous ne forçons rien avec les chevaux et ne sommes jamais dans l’abus. Chaque cheval a sa propre façon d’apprendre. Nous n’essayons pas de tous les mettre dans le moule qui nous convient. Nous essayons différentes méthodes. Si certaines ne fonctionnent pas pour tel cheval, nous en essayons d’autres, et vice versa. Nous n’essayons pas de reproduire un même schéma avec tous les chevaux, puisqu’ils sont tous différents.” Et de compléter : “Je ne veux pas avoir un piquet de chevaux trop conséquent ; je veux dédier mon temps à une poignée de bons chevaux.”

Eugenio Garza Perez considère chaque cheval comme un individu unique et adapte sa façon de travailler au cas par cas. © Mélina Massias

Une équipe nationale qui suscite la ferveur

Installé la plupart du temps dans sa superbe propriété familiale à Wellington, Eugenio se rend régulièrement en Europe ou au Canada pour profiter de quelques tournées estivales. Sur le Vieux Continent, les écuries Stephex sont son point de base, à lui et ses coéquipiers. “Les installations sont magnifiques et très pratiques. J’ai la chance que mes coéquipiers soient aussi mes amis, donc nous sommes installés tous ensemble au même endroit pour l’été”, explique-t-il. 

Sortie de piste en équipe, pour célébrer la deuxième place de Mexique dans la Coupe des nations d'Aix-la-Chapelle. © Mélina Massias

À mesure que le sport prend de l’ampleur au Mexique, ses représentants brillent de plus en plus sur la scène internationale. Eugenio était déjà de l’équipe victorieuse de la Coupe des nations de Dublin, en 2018, et encore de la partie, cette année à Aix-la-Chapelle, pour la deuxième place des siens. “C’était une soirée magique pour l’équipe mexicaine à Aix-la-Chapelle. Nous étions ravi de venir, mais nous savions que nous serions face à de très, très bonnes équipes. Nous avions à cœur de faire de notre mieux et avons réussi de très bons parcours. Nous étions proches des Irlandais (qui ont remporté la Coupe des nations, ndlr), mais pas assez. Cette deuxième place était toutefois incroyable. J’ai fait partie d'équipes fantastiques, mais cette soirée était vraiment spéciale”, souligne celui qui aime passer du temps en famille et apprécie pratiquer le VTT sur son temps libre. 



Où que l’équipe mexicaine se produise, ses fans et supporters sont nombreux, très nombreux, et “facilement reconnaissables avec leurs casquettes vertes !”. “Nous sommes tous très amis et nous soutenons les uns les autres. Nous venons toujours avec beaucoup de personnes à chaque événement collectif. L’équipe est soutenue par un grand nombre de personnes à chaque fois, ce qui est génial. Je pense que cela constitue l’une de nos forces ; nous sommes tous très proches et voulons le meilleur pour chacun d’entre nous. Malheureusement, nous ne bénéficions pas toujours de la même exposition que les autres équipes de saut d’obstacles, qui participent à toutes les grandes Coupes des nations. C’est peut-être notre point faible. Venir depuis le Mexique est un long trajet… Mais notre prestation à Aix-la-Chapelle a prouvé que nous pouvions répondre présent et cela a donné une bonne dose de confiance à toute l’équipe”, se réjouit Eugenio. Un boost de confiance que les attachants Mexicains sauront, à coup sûr, mettre à profit à Versailles. 

Le clan mexicain, toujours présent en nombre ! © Mélina Massias

Contago, des débuts mouvementés pour le complice d’une vie

Dans la capitale française, Eugenio sellera Contago, un fils de Cornet Obolensky, né Windows vh Costersveld, et Cassandra, une fille de Cassini II. Ce gris de treize ans est né chez Anke et Wilfried Sandmann, qui sont aussi à l’origine de Greya, née Contina 47, la star de Kent Farrington, issue d’une sœur utérine de Cassandra, la mère de Contago, et d'un fils de Cornet Obolensky, Colestus. Si aujourd’hui l’alchimie entre le hongre et son pilote ne fait aucun doute, il n’en a pas toujours été ainsi et l’histoire aurait pu être bien différente sans l’intervention d’un certain Nick Skelton… 

Le fabuleux Contago a donné du fil à retordre à son cavalier. © Mélina Massias

“Nous avons acheté Contago lorsqu’il avait quatre ans. Jeune, il avait déjà tout d’une superstar. J’ai commencé à le monter à sept ans, mais nous ne nous entendions pas, alors j’ai laissé Guga, mon entraîneur, en prendre les rênes. Il a passé du temps avec lui, puis je l’ai récupéré à neuf ans. À nouveau, cela n’allait pas entre nous. Alors, j’ai voulu le vendre”, avoue Eugenio, qui fait appel à son ami Darragh Kenny en 2020 dans l’idée de se séparer de son gris. “Contago a un caractère tellement affirmé, et moi aussi, que nous nous retrouvions rapidement en conflit. J’ai ensuite commencé à m’entraîner avec Nick (Skelton, ndlr). Il a vu Contago et me l’a fait monter à nouveau. Petit à petit, nous nous entendions de mieux en mieux. Finalement, j’ai tissé un lien très particulière avec lui. À l’époque, je pense que j’étais simplement trop impatient avec les chevaux et trop immature pour un cheval avec autant de qualité et de personnalité que Contago. Je ne savais pas comment le gérer, mais j’ai appris à le faire avec le temps. Désormais, j’estime assez bien le connaître pour savoir quand ralentir le rythme ou, au contraire, lui en demander un peu plus. La route n’a pas été simple et j’étais à deux doigts de laisser partir le cheval d’une vie…” Nul doute qu’Eugenio aurait nourri de sacrés regrets s’il avait laissé filer son complice, qui l’a mené vers ses premiers Jeux olympiques, à Tokyo, et qui s’apprête à le porter lors de ses deuxièmes, à Paris.

Sans l'intervention de Nick Skelton, l'histoire entre Eugenio Garza Perez et Contago aurait bien pu connaître un terme prématuré. © Mélina Massias



Selon son cavalier, la plus grande qualité de Contago est… de ne pas avoir de défaut ! “Contago est maniable, dispose de tous les moyens du monde, est respectueux, courageux et régulier. Je ne peux rien dire de mal à son sujet”, glisse le Mexicain. Avec le temps, il est également parvenu à trouver le juste équilibre dans le programme sportif de son gris. “De façon assez intéressante, Contago est un cheval qui a besoin de sauter régulièrement pour rester en forme. Lui accorder de longues pauses n’est pas l’idéal. Par exemple, nous l’avons fait l’an dernier après les Jeux panaméricains. En novembre, il a profité d’un long break car il avait eu une longue saison. Lorsqu’il a repris le chemin des concours début 2024, il nous a fallu du temps pour le retrouver en pleine possession de ses moyens. L’hiver a été compliqué. Ce n’était rien de grave, mais nous ne parvenions plus à aligner les sans-faute comme nous le faisions l’an dernier. Tout s’est résolu en Europe et nous sommes de retour à notre niveau habituel. L’idée est de le garder en forme, sans en faire trop en concours. Nous sélectionnons les événements importants, puis intercalons des événements de moindre envergure entre, où il peut simplement entretenir sa forme physique tout en s’amusant”, décrit le cavalier de vingt-huit ans.

Contago participera à ses deuxièmes Jeux olympiques à Versailles. © Mélina Massias

La relève en marche

Si Contago reste la star des écuries, Eugenio peut compter sur d’autres montures de talent, dont son fidèle Victer Finn DH, dont il pense le plus grand bien. “Victer Finn est un cheval incroyable”, lance-t-il d’emblée. “Malheureusement, il a subi plusieurs blessures, qui l’ont écarté du sport un certain temps. Sa carrière a été en dents de scie, mais il est, à mes yeux, l’un des meilleurs chevaux que j’aie jamais eu. Il est extrêmement compétitif, peu importe les épreuves dans lesquelles il est engagé. Il peut tout aussi bien être un cheval de vitesse qu’un cheval de championnat ; c’est un véritable couteau suisse. Nous l’avons depuis longtemps et il m’a accompagné sur mon premier grand événement, la Coupe des nations de Dublin, que nous avons remportée, en 2018. Il a une place à part dans nos cœurs.” Entre novembre 2022 et février 2024, le bai n’avait plus participé à la moindre épreuve internationale. Resté sur une victoire à 1,45m à Monterrey, le fils de Va-Vite et petit-fils de Stakkato en a ajouté deux supplémentaires à sa collection cette saison, au CSI 4* d’Opglabbeek puis à Aix-la-Chapelle, sur des épreuves secondaires. 

Eugenio Garza Perez considère Victer Finn comme l'un des meilleurs chevaux de sa carrière. © Mélina Massias

En attendant que Juwel-Wish T et Prince Malko M déploient leurs ailes, Eugenio peut déjà s’appuyer sur le prometteur Chalouries PS, un fils de Chacco-Blue avec une mère par Baloubet du Rouet âgé de dix ans, qui a fait ses débuts en Grand Prix 5* à Rotterdam. “Nous avons acquis Chalouries lorsqu’il avait sept ans. Je pense qu’il sera un très, très bon cheval, un cheval compétitif. Il apprend énormément. Être deuxième cheval, derrière Contago, n’est pas facile. Il le suit dans des concours prestigieux comme Aix-la-Chapelle, Rome, ou sur les CSI 5* de Wellington. Pour un cheval peu expérimenté comme lui, les épreuves secondaires sont parfois un peu hautes. Mais il s’est montré à la hauteur et je pense qu’il commence à prendre ses marques à haut niveau. J’espère qu’il sera au point l’an prochain et qu’il pourra commencer à prendre part aux épreuves majeures de quelques beaux concours”, se projette Eugenio.

Le prometteur Chalouries PS est un soutien de taille pour Contago et continue de progresser de sortie en sortie. © Mélina Massias

D’ici là, un premier objectif se dresse sur la route d’Eugenio Garza Perez : les Jeux olympiques de Paris. Après avoir vécu la cérémonie d’ouverture aux premières loges avec ses amis et coéquipiers Andres Azcarraga et Carlos Hank Guerreiro, le Mexicain pourra sans doute ajouter cette nouvelle expérience à sa longue liste de souvenirs marquants, parmi laquelle il peine à faire le tri. “J’ai eu la chance d’avoir de super chevaux et d’être entouré d’une fabuleuse équipe qui m’a permis de me créer de nombreux souvenirs”, justifie-t-il. “Je pourrais autant citer le fait de passer du temps avec mon équipe, que traverser le monde, afin de profiter de ce que les chevaux nous offrent.” Une médaille célébrée à Versailles pourrait bien aider le jeune homme à établir une forme de hiérarchie parmi ses plus beaux moments sportifs.

Eugenio Garza Perez et Contago, en route vers une performance historique à Paris ? © Mélina Massias

Photo à la Une : Eugenio Garza Perez et Contago, impeccables dans la Coupe des nations d’Aix-la-Chapelle. © Mélina Massias