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“J’aime le sport, mais j’aime tout autant l’élevage”, Erika Lickhammer-van Helmond (1/2)

Cet été, I. Comme Tessa VHL et Erika Lickhammer-van Helmond ont vécu leur premier grand championnat, à respectivement douze et quarante-trois ans !
Interviews jeudi 18 septembre 2025 Mélina Massias

Sélectionnée pour le CSIO 5* de Gassin, Erika Lickhammer-van Helmond présente quatre chevaux dans le Sud de la France, dont trois à l’affixe VHL, initiales du nom qu’elle partage avec son mari, Joris. En plus de Vivi’s Diamond VHL, l’énergique I. Comme Tessa VHL est de la partie, après avoir permis à son amazone de courir ses premiers championnats d’Europe, cet été à La Corogne. Et la fille de Comme Il Faut a une voisine de box pas tout à fait comme les autres : sa fille, Vanessa VHL ! Sans racine familiale dans le milieu équestre, Erika Lickhammer-van Helmond s’est battue et a toujours suivi ses ambitions. À quarante-trois ans, la maman de Jonathan et Benjamin, passionnante et passionnée, savoure les sacrifices et les efforts fournis au long des années et récolte les fruits de son engagement sans faille. Cavalière, éleveuse, mère de famille ; la Suédoise narre son parcours, se confie sur son système et ses enjeux, et partage sa vision des choses. Une rencontre à découvrir en deux épisodes.

Prendre part à un grand championnat avec un produit de son propre élevage n’est pas donné à tout le monde. À l’image d’Olivier Perreau et GL Events*Dorai d’Aiguilly ou Pieter Devos et Casual DV, Erika Lickhammer-van Helmond l’a fait, cet été à La Corogne, au sein de l’équipe suédoise, avec sa fidèle I. Comme Tessa VHL. Et la Scandinave ne s’est pas contentée d’imaginer un croisement et d'apposer son nom dans la case naisseur : chez elle, tout est fait maison, des échographies à l’insémination, jusqu’aux poulinages, en passant par la formation, jusqu’aux CSI 5*. Pourtant, à l’origine, rien ne liait Erika Lickhammer-van Helmond aux chevaux, et encore moins au sport de haut niveau.

Peu de cavaliers peuvent se targuer d'avoir disputer un grand championnat international avec un produit de leur propre élevage. Grâce à I. Comme Tessa VHL, Erika Lickhammer-van Helmond le peut ! © Sportfot

Une ferveur innée

Née sur une petite île au large de la Suède, Gotland, en mer Baltique, Erika n’avait aucune raison de devenir cavalière professionnelle. Mais, petite, les animaux, toutes espèces confondues, attirent son attention. Un jour, elle assiste à une course de trotteurs, discipline très populaire dans sa région natale. Là-bas, naît sa passion pour les chevaux, qui, près de quatre décennies plus tard, est toujours aussi fervente. La Scandinave de quarante-trois ans dit d’elle qu’elle était une enfant têtue. Et sa ténacité a sans doute joué un grand rôle dans sa carrière et dans la vie qu’elle s’est forgée, aux côtés de son époux, Joris van Helmond, et de leurs deux enfants, Jonathan et Benjamin. “J’étais assez pénible avec mes parents et n’avais de cesse de réclamer un poney”, dépeint-t-elle. Alors qu’ils ne présentent aucun attrait particulier pour les équidés, ses parents finissent par trouver du charme à ces animaux extraordinaires et exaucent le vœu de leur fille, en faisant l’acquisition d’un poney Trotteur. Trop jeune pour prendre part aux courses attelées, Erika se met en selle, découvre les joies de l’équitation et participe même à quelques courses montées ! 

Après un déménagement, Erika, sa famille et leur compagnon à quatre jambes s’établissent sur une petite propriété et élargissent leur troupeau. “Mes parents m’ont beaucoup aidée et soutenue, en particulier ma mère, qui a fini par adorer les chevaux elle aussi ! Cela est devenu une passion”, retrace la Suédoise. À cette époque, l’idée de mener une carrière professionnelle dans l’industrie équestre ne lui apparaît toutefois pas comme une évidence. “Devenir cavalière de saut d’obstacles n’a jamais été mon plan”, assure-t-elle. Malgré tout, son affection pour les chevaux et le sport ne baisse pas de pied. La jeune fille touche à tout, pratique largement l’équitation western, puis croise la route d’une excellente complice, Miss Sunshine, qui lui permet de découvrir les sensations du saut d’obstacles et lui ouvre une nouvelle voie. “J’ai commencé à faire quelques sauts, et il s’est avéré que j’avais un bon ressenti et des facilités pour voir les distances”, poursuit Erika. “La rencontre avec cette ponette était une coïncidence plus qu’autre chose. Finalement, j’ai remporté tout ce qui était possible de gagner avec elle et à mon âge. Nous nous sommes imposées lors des championnats nordiques et de Suède ! À partir de là, j’ai commencé à dire que ce serait ma vocation et que je ne ferais rien d’autre.”

La fille de Comme Il Faut et petite-fille de Casall I. Comme Tessa VHL permet à sa cavalière de vivre quelques uns de ses plus beaux rêves sportifs. © Sportfot

À seulement seize ans, Erika quitte le cocon familial pour suivre ses rêves. Une décision qu’elle ne regrettera pas, malgré les aléas et les difficultés rencontrées en cours de route. “Je ne suis pas partie parce que mes parents n’étaient pas de mon côté, au contraire, ils ont fait de leur mieux, mais je devais le faire. J’avais tant d’ambitions !”, explique celle qui vivra sa première immersion dans une grande écurie auprès de Peter Eriksson, triple médaillé d’argent avec l’équipe suédoise aux rênes de Cardento, aux championnats d’Europe d’Arnhem en 2001, aux Jeux équestres mondiaux de Jerez de la Frontera en 2002, puis aux Jeux olympiques d’Atlanta en 2004. Riche des enseignements acquis, Erika, vingt-trois ans, aurait pu s’établir sur ses terres natales et monter sa propre structure. Alors employée dans une écurie, la jeune femme convoite davantage de déplacements au cœur du Vieux Continent… forcément onéreux. Malgré le développement de sa propre entreprise, elle se tourne vers une autre option, qui marque un tournant radical et sans retour dans sa carrière. “J’avais participé à un stage avec Eric van der Vleuten en Suède. Grâce à cela, j’ai débarqué aux Pays-Bas. Initialement, ce n’était pas un déménagement : j’y allais pour découvrir ce que ce système et cette culture avaient à m’offrir. C’était un bon endroit pour moi, qui me permettait d’être proche de tous les concours”, se souvient-elle. Vingt ans plus tard, l’aventure a pris une tout autre ampleur et l’amazone n’a plus jamais quitté son pays d’adoption. 



Poser les fondations

Dans sa découverte d’un fonctionnement tout nouveau, Erika a “appris à survivre” dans le monde difficile du commerce. “Si on est suffisamment doué, on peut payer ses factures avec ses performances en concours. Mais, si on n’évolue pas à haut niveau, il faut trouver un autre moyen de vivre. Je n’avais pas amené avec moi des sponsors suédois, ou de quelconques économies : j’ai dû gagner ma vie par mes propres moyens”, détaille-t-elle. Quatre ans après avoir posé le pied chez les Oranje, Erika fait la rencontre de Joris, qui deviendra son mari et son plus fidèle supporter. Alors qu’elle approche du très haut niveau, la Suédoise prend un peu de recul, avec en ligne de mire l’avenir. Joris et elle œuvrent alors pour des propriétaires. “Je suis devenue cavalière pour les chevaux de commerce. Je montais pour vendre. Mon objectif était d'amener mes montures jusqu’aux épreuves comptant pour le classement mondial, au niveau 2*. J’ai donc fait un pas en arrière, car j’évoluais alors à plus haut niveau. Mais nous avions besoin d’avoir un socle, une vie. J’ai pris beaucoup de chevaux sous ma selle, et nous les avons vendus. Nous devions nous faire de l’argent”, confie Erika en toute honnêteté. “Nous avons alors construit notre endroit à nous, qui est aujourd’hui notre écurie. À l’époque, je n’aimais pas trop ce que je faisais, mais, aujourd’hui, je suis très, très heureuse que Joris et son père nous aient poussés à le faire.”

En parallèle, Erika et Joris se sont lancés dans l’élevage et leurs premières pépites ont bien grandi. “Initialement, je n’étais pas du tout intéressée par l’élevage. Je ne voyais que par le sport à cette époque. Mais, depuis, je suis devenue complètement mordue par cette partie de mon métier. Le père et l’oncle de Joris, qui géraient un petit élevage, voulaient prendre un peu de recul. Alors, nous nous sommes lancés”, déroule celle qui vit aujourd’hui le très haut niveau depuis le dos de ses produits maison. “J’ai acheté Comtesse, la mère de Comme Tessa, ma jument de tête, lorsqu’elle était pouliche, juste pour ses papiers et son look. Elle était si mignonne ! Mais surtout, il s’agissait d’une fille de Casall, qui, à ce moment-là, était l’un des meilleurs chevaux du monde sous la selle du Suédois Rolf-Göran Bengtsson. Mais je ne l’ai pas achetée avec l’ambition qu’elle donne vie à mon futur cheval de haut niveau.” 

Vendue en 2019, Comtesse, la mère de I. Comme Tessa VHL, est finalement revenue auprès d'Erika et Joris en 2021 ! © Collection privée 

En plus de présenter un croisement intéressant entre Casall et Capitol I, Comtesse descend de la Stamm 741 du Holstein, une lignée qui a aussi donné… Cardento, Cartello*VDL ou encore Colore. Si sa branche n’est pas la plus fournie en collatéraux performers, la baie ne tardera pas à transmettre ses qualités. Croisée au bondissant Comme Il Faut à deux ans, Comtesse donne naissance à une pouliche en 2013, première à porter l’affixe VHL, les trois initiales du nom partagé par Erika et Joris. Douze ans plus tard, l’énergique et déterminée I. Comme Tessa VHL arpente les plus belles pistes du monde avec sa naisseuse et fait partie intégrante de la sélective équipe suédoise de saut d’obstacles. Pour parvenir à ce résultat, la chance n’a évidemment pas suffi. “Nous avons débuté avec une bonne base de juments, mais nous avons été très stricts en termes de sélection. Désormais, nous n’avons que quatre lignées. Lorsque certaines juments ne produisaient pas comme nous le voulions, nous avons simplement arrêté d’élever avec elles. Je pense qu’il est toujours important d’être ouvert et réalistes, mais aussi catégorique quand il le faut. Un cheval aux capacités lambda et un excellent cheval demandent autant d’énergie et d’argent. Et notre but est vraiment de viser la qualité”, partage la mère de famille, éleveuse et cavalière. 

Après trois poulains, Comtesse aurait dû suivre une carrière sportive. Mais la qualité de sa production a pris le dessus, et l’élevage, devenu plus qu’une activité secondaire pour Erika et Joris, l’a rattrapée. Sans doute pour le meilleur. 



De l’avantage de porter une double casquette

D’un simple hobby, l’élevage est ainsi devenu central et majeur dans le système Lickhammer-van Helmond. “J’aime tout dans l’élevage”, tranche sans tarder Erika. “Nous faisons tout nous-mêmes : Joris procède aux échographies, nous inséminons tous les deux, prenons toutes les décisions en rapport avec l’élevage et sommes présents à chaque poulinage. Le petit frère de Tessa est né durant la Coupe des nations de La Baule, donc nous n’étions pas à la maison, mais en temps normal, Joris, nos deux enfants et moi sommes aux premières loges. Nous voyons leurs premiers sauts en liberté, puis sous la selle. J’aime suivre tout le processus, du petit embryon que l’on voit à l’échographie aux premiers apprentissages. Il y a beaucoup de premières fois avant qu’un cheval soit un tableau complet.”

Poulains, les porteurs de l’affixe VHL grandissent à Asten, au sein des installations construites sur l’ancienne propriété familiale de Joris. Puis, ils rejoignent d’autres prairies, parfois au Nord des Pays-Bas, pour profiter de l’herbe et vivre une vraie vie de… poulain. À trois ans, l’heure des premiers tests en liberté sonne, puis celle des radios, et des inséminations pour les meilleures juments de leur génération. “J’adore avoir la partie élevage à la maison. Si l’on m’avait dit cela quand j’ai déménagé aux Pays-Bas, j’aurais répondu qu’avoir un poulain était sympa, sans plus ! J’aime le sport, mais j’aime tout autant l’élevage. Après avoir fait travailler les chevaux, ou avant de les monter, nous les faisons marcher sur un petit chemin qui borde les prés des juments et leurs poulains. Désormais, tous mes meilleurs chevaux sont plus ou moins liés. Alors, lorsqu’on passe à côté d’eux, je dis à mes chevaux ‘oh, c’est ton frère, ta tante ou ta mère !’. C’est vraiment chouette”, sourit la Suédoise.

Vanessa VHL ne peut guère renier sa mère, I. Comme Tessa VHL, monture de tête de sa cavalière. © Sportfot

Avec sa chère I. Comme Tessa VHL, Erika est entrée dans la catégorie encore fermée, mais de plus en plus en ouverte, des cavaliers-éleveurs. Si la difficulté de trouver, puis acheter et conserver des chevaux destinés aux plus belles épreuves de la planète reste un argument de taille pour beaucoup, il n’est pas le premier pour la jeune quadra, profondément passionnée. “Trouver de très bons chevaux est difficile, et ils ne sont pas donnés. Et puis, on ne sait jamais vraiment ce que l’on achète… L’élevage m’aide à me constituer un bon piquet. Voir de plus en plus de cavaliers monter des produits maison à haut niveau est très sympa, mais il faut être vraiment intéressé par l’élevage. Certains cavaliers sont davantage tournés vers le sport et excellent dans ce rôle. Lorsque je vois un cheval qui me plaît, je demande toujours quel est son papier. Certains cavaliers me regardent et me répondent qu’ils n’en savent rien. Il y a des pilotes qui n’ont aucun attrait pour l’élevage, et d’autres qui sont très impliqués”, brosse la Suédoise. “En tant que cavalier, il est plus facile d’être un bon éleveur car on suit le sport de très près. On sait exactement ce que l’on cherche chez un cheval. Certains éleveurs font naître le jeune cheval parfait, le plus gentil, le plus facile du monde. Mais il n’atteindra peut-être pas le très haut niveau. Je crois que les jeunes chevaux doivent être spéciaux. Le fait de monter à haut niveau nous aide à ne pas juste élever le quatre ans parfait. Celui-ci rapporte peut-être une belle somme d’argent à court terme, mais, pour moi, il n’évoluera pas nécessairement au plus haut niveau. Ce sont deux choses différentes.” Assurément, pouliche, I. Comme Tessa VHL était d’une autre trempe.

Aux championnats d'Europe, I. Comme Tessa VHL a une nouvelle fois prouvé toutes ses qualités et son tempérament de feu. © Sportfot

La seconde partie de cette rencontre sera publiée samedi sur Studforlife.com…

Photo à la Une : Cet été, I. Comme Tessa VHL et Erika Lickhammer-van Helmond ont vécu leur premier grand championnat, à respectivement douze et quarante-trois ans ! © Scoopdyga