Notre site web utilise la publicite pour se financer. Soutenez nous en desactivant votre bloqueur de publicite. Merci !

“Il n’y a pas besoin de venir d’une grande famille pour accéder au haut niveau : il faut faire les bonnes recontres et travailler”, M. Bourdeaud’hui (2/2)

Avec Oscar The Homage, son actuel cheval de tête, Mathieu Bourdeaud'hui espère bien concrétiser quelques uns de ses rêves.
mercredi 7 mai 2025 Mélina Massias

S’il devait monter, pour une journée, un cheval qui n’est pas le sien, Mathieu Bourdeaud’hui choisirait sans hésitation Ermitage Kalone. Un choix qui se comprend légitimement tant l’alezan de Gilles Thomas est exceptionnel. D’ailleurs, après avoir tout appris - ou presque - auprès de Wilm Vermeir, le jeune Diable Rouge a choisi Marc Van Dyck comme coach privilégié. Alors qu’il fêtera son vingt-deuxième anniversaire le 15 mai prochain, Mathieu poursuit sa route sous les couleurs des écuries Krismar, qui lui permettent de monter d’excellents jeunes chevaux, mais aussi le tout bon Oscar The Homage. C’est lui qui lui a permis de remporter son premier Grand Prix CSIO 3* en fin d’année dernière, de participer au CSI U25 de Genève, puis aux CSI 5*-W de Malines et surtout de Bordeaux, où il a sauté ses premiers Grands Prix 5* avec la manière. Né au sein d’une famille totalement extérieure au monde équestre, le Belge a fait ses gammes, d’abord en dressage, puis en saut d’obstacles, sa discipline de prédilection. De ses débuts internationaux, en 2018, à ses premiers pas au cœur de l’élite, la réussite et l'ascension fulgurante de ce discret cavalier ont de quoi impressionner. Portrait.

La première partie de cet article est à (re)lire ici.

L’année 2024 aura été celle de la révélation pour Mathieu Bourdeaud’hui. Le jeune homme a disputé ses premiers parcours à 1,55m, et son premier Grand Prix 5*. S’il reste encore des éléments à parfaire, l’affaire semble en bonne voie, en partie grâce à Oscar The Homage, son meilleur complice. Le puissant alezan, onze ans, a d’ailleurs gravi les échelons en même temps que son jeune pilote, après avoir fait ses gammes avec Brecht Bille de ses quatre à ses huit ans. “Je monte Oscar depuis ses huit ans. Précédemment, il avait fait quelques compétitions, notamment des épreuves réservées aux étalons. Il était régulier, mais avait assez peu d’expérience. À huit ans, il avait encore besoin de s’endurcir physiquement. Depuis un peu plus d’un an, il fait de super progrès. Il a un caractère très particulier. À la maison, il peut se montrer un peu fainéant. Mais en concours, il sait qu’il est là pour faire son travail et est très motivé !”, explique Mathieu, qui considère les moyens et la technique de devant de son complice comme deux de ses principales qualités. “Son geste des antérieurs est incroyablement bon ! C’est vraiment son point fort. Sa mentalité est aussi un sacré atout. Certains pourraient penser qu’il est assez lent, mais lorsqu’il est au barrage, il peut être très rapide !” Derrière sa timidité, Mathieu n’hésite pas longtemps pour décrire sa relation avec Oscar : “C’est mon ami. Je le sens. Je crois qu’il est content de me voir, et inversement : lorsque je le vois, je suis heureux.” 

A Bordeaux, en février dernier, Mathieu Bourdeaud'hui a bouclé son premier Grand Prix 5* aux rênes d'Oscar The Homage, son cheval de tête. © Mélina Massias 

En plus de ses qualités sportives, confirmées par ses performances ces dernières saisons, et mentales, l’alezan, qui a vu le jour chez Koen Geerits présente aussi un papier intéressant. Il est issu de la première génération de Quint vh Maarlo, qui apporte le précieux sang de Quidam de Revel, mais aussi ceux de Landetto et Darco. La mère d’Oscar est une fille d’Elton (Jasper, né Little One x Le Mexico) et une petite-fille de Darco. Cinquième des Sires of the World de Lanaken en 2023 et des championnats d’Europe Jeunes cavaliers un an plus tard à Peelbergen, l’alezan suscite aussi de l’intérêt à l’élevage et a déjà plusieurs produits en âge de concourir. Mais, compte tenu de ses obligations sportives actuelles, Oscar se consacre en priorité à la compétition. “Concourir et assurer la monte en frais en même temps est un peu difficile pour Oscar. Alors, la plupart du temps, il est distribué en semence congelée”, précise son cavalier. 



“Mathieu a tout pour réussir ; son talent ne fait plus de doute”, Fabienne Daigneux-Lange

Rapide et remarquable, l’ascension de Mathieu ne surprend guère ceux qui ont été les témoins privilégiés de son évolution. Wilm Vermeir, qui suit avec plaisir son ancien protégé à distance, loue sa sensibilité et son feeling à cheval. “Ce qu’il fait est magnifique ! Il aborde le haut niveau de manière très intelligente et bénéficie d’une excellente gestion, grâce aux écuries où il évolue. Ce qu’ils font ensemble est vraiment super”, s’enthousiasme l’olympique Diable Rouge. Fabienne Daigneux-Lange, ancienne sélectionneuse adjointe de l’équipe belge et reconnue pour avoir offert leur chance à de nombreux couples, ne tarit pas non plus d’éloges. “J’ai eu l’occasion d’observer Mathieu lors des épreuves Juniors, puis Jeunes cavaliers. Il montrait déjà beaucoup de talent”, confie-t-elle. “Il est impressionnant, notamment par le professionnalisme dont il fait preuve à son âge. Ses chevaux sont très bien gérés et travaillés, il a un véritable esprit d’équipe et est toujours présent au paddock pour soutenir ses coéquipiers lorsqu’il n’est pas à cheval. Il apporte une excellente dynamique à tout collectif. Mathieu est un garçon calme, très froid en selle, et toujours souriant. C’est quelqu’un de vraiment chouette. Il sait aussi aller très vite. Aujourd’hui, seule l’expérience lui manque. Je lui souhaite de poursuivre sur cette belle lancée, car il n’y a aucune raison que cela ne fonctionne pas.” Et la dynamique Belge sait de quoi elle parle, elle qui a propulsé de nombreux cavaliers vers le plus haut niveau ces dernières années. “La Belgique ne manque pas de jeunes talentueux. Mathieu est un vrai crack, issu de la même génération que Thibeau Spits, Gilles Thomas ou Thibault Philippaerts. Et derrière eux, une nouvelle vague remarquable est en train d’émerger, avec notamment Louis Lambrecht et Seppe Wouters. En tout cas, Mathieu a tout pour réussir. Son talent ne fait plus de doute. Pour moi, il est vraiment excellent”, complète Fabienne Daigneux-Lange, avec sa franchise et son honnêteté habituelles. 

Terre équestre par excellence, le Plat-Pays peut se targuer de compter parmi ses plus fiers représentants de grandes familles de cavaliers. Mais Mathieu Bourdeaud’hui, lui, a suivi une autre voie, source d’inspiration pour d’autres passionnés en herbe. “Si on est vraiment motivé, que l’on veut vraiment atteindre le plus haut niveau, on peut le faire. Il n’y a pas besoin de venir d’une grande famille : il faut rencontrer les bonnes personnes, au bon moment et travailler dur”, martèle-t-il avec maturité, à l’heure où les grands noms sont légion et où la méritocratie semble, parfois, ne plus être suffisante. 

Mathieu Bourdeaud'hui semble avoir toutes les cartes en main pour s'imposer au sein de l'équipe belge de saut d'obstacles dans les années à venir. © Sportfot

Pour étancher sa soif d’apprendre et de progresser, Mathieu Bourdeaud’hui évolue désormais sous la guidance d’un certain Marc Van Dijck, oncle et entraîneur de Gilles Thomas. “Je travaille avec lui depuis maintenant deux ans et demi. J’avais déjà pris quelques cours avec lui avant de travailler chez Wilm et je le connais donc depuis longtemps. C’est un entraîneur fantastique. Avec lui, tout part des bases. Avant de pouvoir sauter, il faut maîtriser le dressage. J’essaye de garder cela en tête. Et lorsque quelque chose ne fonctionne pas, on revient aux bases. Lorsque j’étais jeune, j’ai fait pas mal de compétition de dressage, avant de me tourner vers le saut d’obstacles. Mais les fondamentaux restent !”, confie celui qui cite Gilles Thomas et Ben Maher comme ses plus grandes inspirations. En 2024, Mathieu a également pu bénéficier des ressources de la Young Riders Academy pour étoffer encore un peu plus son CV. “J’ai énormément appris”, avoue-t-il volontiers. “Grâce à la Young Riders Academy, on peut avoir accès à de grands entraîneurs, comme Franke Sloothaak par exemple. C’est aussi un plus pour accéder à certains concours, et on bénéficie de cours sur des aspects plus théoriques, notamment sur tout ce qui concerne la gestion des écuries, les coûts que cela engendre, la gestion, etc. C’est très utile !” Parmi ses qualités, le Belge cite sa ténacité et sa volonté de fer. “Je ne baisse pas facilement les bras !”, précise l’intéressé. “Je pense que c’est ma plus grande qualité. Je crois que je gère plutôt bien la pression, et que je l’apprécie. À l’inverse, je dois travailler à rester plus calme dans certaines situations et à ne pas me précipiter. Il m’est parfois arrivé de penser avoir réussi un parcours sans faute, et de commettre une erreur en fin de tour…”

Après s'être formé auprès de Wilm Vermeir, le jeune Diable Rouge s'est tourné vers Marc Van Dijck, oncle et entraîneur de Gilles Thomas, pour poursuivre sa progression. © Sportfot



Tout au bout de ses rêves

Grâce au soutien des écuries Krismar, Mathieu peut se projeter sereinement vers l’avenir. En plus de partenariats avec divers propriétaires, une majeure partie des chevaux appartiennent à Kris Callewaert, son beau-père. Sous ses couleurs, le prodige belge forme les pépites de demain, à partir de leurs sept ans, puis les guide au mieux vers le plus haut niveau. En cours de route, certains sont vendus, tandis que d’autres lui permettent de continuer à vivre de beaux moments de sport. Parmi ses grands espoirs, se trouve le fort prometteur Remco van den Uilenbos, qui, à huit ans seulement, a fait forte impression au CSI 5*-W de Bordeaux en quittant la piste avec une seule faute - sur le dernier - pour sa première apparition à 1,50m. “Je pense qu’il s’agit d’un cheval pour le grand sport. Il était deuxième de la finale des chevaux de sept ans lors des championnats du monde de Lanaken l’an dernier. Il a beaucoup de moyens, un bon tempérament et je vois en lui le potentiel d’un cheval de Grand Prix”, souligne Mathieu. “Cet été, nous prendrons peut-être part à quelques épreuves un peu plus hautes, mais en attendant, il va affronter des parcours un peu plus faciles. Je vais continuer à le former et à lui donner de l’expérience, afin qu’il soit prêt pour l’année prochaine.” Le jeune Diable Rouge peut aussi compter sur de bonnes montures de neuf et dix ans, et surtout sur de prometteurs jeunes chevaux. “Nous avons beaucoup de sept et huit ans. Certains seront sûrement vendus, mais je vais m’attacher à poursuivre leur formation. J’aime monter les jeunes. Je pense que c’est un passage important.” Mathieu garde aussi un œil sur le monde de l’élevage. Les écuries Krismar ont développé leur propre programme, tandis que Pusha et Silhouette van d’Abdijhoeve, mère et fille, écrivent une belle histoire en accompagnant toutes deux leur cavalier sur les mêmes compétitions.

Mathieu Bourdeaud'hui fonde de grands espoirs en Remco van den Ulienbos, deuxième lors des championnats du monde réservés aux chevaux de sept ans en 2024 à Lanaken. © Dirk Caremans / Hippo Foto

En bonne voie pour s’installer parmi l’élite de son pays, richement doté en talents, Mathieu Bourdeaud’hui ne s’enflamme pas. “Le système belge est très bon. Nous avons de bons entraîneurs, et beaucoup de cavaliers de qualité. La jeune génération est très forte. Il y a beaucoup de grandes familles de cavaliers chez nous. J’espère pouvoir accomplir de plus en plus de choses. Nous allons continuer de travailler pour cela, et voir où l’avenir nous mène. J’espère que ce sera jusqu’au bout de mes rêves ! En tout cas, je ferai de mon mieux”, confie le jeune homme, qui entend bien continuer à apprendre de ses aînés, tout en restant ouvert, pour assurer l’avenir de son sport. Si les chevaux représentent toute sa vie ou presque, le Belge n’est pas contre regarder un match de football, ou admirer de belles voitures. De quoi lui permettre de trouver le juste équilibre entre sa carrière et sa vie. Mathieu Bourdeaud’hui, voilà un nom qu’il convient de garder en tête pour les prochaines années.

Bien entouré, la tête sur les épaules et déterminé, Mathieu Bourdeaud'hui a tout pour se faire un nom au plus haut niveau. © Sportfot

Photo à la Une : Avec Oscar The Homage, son actuel cheval de tête, Mathieu Bourdeaud'hui espère bien concrétiser quelques uns de ses rêves. . © Sportfot