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« Il faut être bon cavalier mais aussi savoir utiliser sa tête » Victoria Tachet

Reportages dimanche 21 juillet 2019 Theo Caviezel

Très présente sur le circuit poney, Victoria TACHET s’est faite plus discrète ces derniers mois. Pour cause, la Bretonne d’origine préfère prendre le temps de se construire et d’engranger de l’expérience. Elle s’est pour cela rendue dernièrement aux États-Unis, où elle a travaillé dans les célèbres écuries Double H Farm. La jeune cavalière revient pour nous sur cette période passée outre-Atlantique.

COMMENT T’ES-TU RETROUVÉE CHEZ DOUBLE H FARM DURANT L’HIVER ?

« Le système américain, c’est quand même une autre dimension que ce que nous connaissons en France. J’avais une période assez calme en Europe, donc j’en ai profité pour vivre une nouvelle expérience. Tout s’est fait par le plus grand des hasards, si j’avais cherché je n’aurai pas trouvé ! Nous en rigolions encore avec Quentin (JUDGE, cavalier pour Double H Farm, ndlr) quand je suis partie. Il n’avait pas vraiment besoin de quelqu’un, mais j’ai appelé sur les conseils d’une amie et ça s’est fait ainsi. Il était finalement très content de mon aide et m’a même proposé de revenir la saison prochaine. Je vais y réfléchir parce que c’est tout de même mieux de passer l’hiver à Wellington qu’à Deauville (rires) !. »

COMMENT SE DÉROULE LA TOURNÉE À WELLINGTON ?

« Là-bas, tout est découpé en « Weeks » (Week 1, Week 2… Week 12). Ça peut paraître très long jusqu’à la douzième semaine de concours, au même endroit, mais ça passe vraiment très vite. Les chevaux et les cavaliers arrivent très souvent un mois à l’avance dans la région, le temps de la quarantaine sanitaire. Il y a tout un programme qui fait que certaines semaines sont plus prisées, notamment le CSI 3* de la septième semaine. On ne le sait pas forcément mais il y a trois sites de compétition. Il y a Wellington centre, le Stadium où prend place le CSI 3*, et le dernier, Deeridge Farm, où se passe la Coupe des nations. »

COMMENT AS-TU VÉCU CETTE EXPÉRIENCE ?

« Ça n’a pas été tout le temps facile. Là-bas, à seize heures, la journée est terminée mais c’est bien souvent à cinq heures du matin que ça commence. Comme il fait déjà vingt-quatre degrés à cinq heures, c’est bien plus agréable pour tout le monde de débuter tôt le travail. C’est vraiment un rythme effréné mais j’étais contente de le faire pour des chevaux de ce calibre. Quentin m’a également prise pour me faire évoluer. Il m’a trouvé un cheval de cinq ans, que j’ai pu monter en piste. J’étais contente d’assister Quentin car il est quand même bien implanté dans le commerce de chevaux, avec régulièrement des nouveaux. C’est intéressant de voir tout ça, c’est ce qui m’intéresse, ce que je veux faire. Une écurie de commerce, c’est un endroit où tu vois passer de nombreux chevaux, et tu en montes beaucoup.« 

FINALEMENT QUEL EST TON BUT ? AS-TU UN PROJET EN TÊTE ?

« Pour l’instant je travaille dans un élevage depuis mon retour en France. Je sors les jeunes, de quatre et cinq ans. Dès qu’il faut monter des chevaux, je les monte, car c’est ce que je veux faire. Pénélope LEPRÉVOST m’avait dit : « il faut que tu montes, car plus tu en fais, plus tu apprends ». Je suis encore dans cette période où je souhaite découvrir toutes les facettes du métier et prendre toujours plus d’expérience. Les choses vont se faire d’elles-mêmes, mais il faut être réaliste. Les vieux chevaux et les belles épreuves viendront par la suite, mais je ne veux pas y penser. Je sais ce que c’est car j’ai eu mes chevaux, et j’ai encore une jument qui peut m’aider à ne pas oublier ça, mais pour moi prendre de l’expérience avec les jeunes c’est obligatoire. »

QUELLES SONT LES GRANDES DIFFÉRENCES ENTRE ÉTATS-UNIS ET EUROPE ?

« Tout le système est bien différent, en France et même en Europe on ne connaît pas tout ce qui est « l’équitation », le hunter. Là-bas c’est un passage obligatoire, personne ne commence à monter à cheval sans passer par « l’équitation ». Faire du poney et se lancer directement dans les épreuves de CSO, c’est quelques chose qu’on ne voit pas du tout aux USA. C’est assez guindé, il faudrait finalement faire un mixte des deux cultures équestres. En Europe, nos cavaliers professionnels sont très bons mais c’est vrai qu’ils n’arrivent pas à garder les chevaux. Il faudrait plus de professionnels aux États-Unis, et plus de moyens financiers ici. Malheureusement ce n’est pas comme ça, et je pense qu’on part dans une mauvaise direction pour que ça le devienne. Maintenant, il faut être très bon cavalier mais il faut aussi savoir utiliser sa tête. C’est pour ça qu’avant de rentrer dans la grande cour, je préfère me construire tranquillement, prendre de l’expérience où je peux en prendre. Wellington c’était très bien. Chez nous des chevaux qui ne sautent pas 1.20m on ne peut rien en tirer, là-bas on peut vraiment en faire un commerce. C’est très différent mais c’est à prendre et je pense qu’il faut y aller pour constater ces différences. »

LES AMÉRICAINS SEMBLENT APPRÉCIER LES CAVALIERS ET GROOMS FRANÇAIS !

« Effectivement, j’ai vu Tony CADET qui est venu monter un peu à Wellington cet hiver, et beaucoup de cavaliers américains ont des grooms français. Nous sommes réputés pour notre sérieux et professionnalisme. En parlant de Tony, je trouve qu’en France nous avons beaucoup de cavaliers comme lui, qui seraient en CSI 5* s’ils avaient les chevaux pour. Arthur LE VOT a passé un moment aux USA, Nicolas PAILLOT est là-bas. Aujourd’hui si tu veux te lancer, prendre de l’expérience, tu vas là-bas. Il y a du monde, la saison dure trois mois alors même si c’est compliqué ce n’est pas très long. Je conseille vraiment de tenter l’expérience. Je vivais dans une grande maison avec une groom française qui vient de Saint-Lô et qui travaillait un peu dans toutes les écuries, notamment pour Katie PRUDENT depuis cinq ans. Elle est bien aux États-Unis, la France elle ne connait pas. Le SMIC dans les écuries françaises c’est quelque chose de lointain pour elle. Quand je vois des grooms arriver sur des concours français avec vingt chevaux, voire plus…  Pionter à partir de cinq heures, rentrer à vingt-trois heures… Aux États-Unis ce n’est pas du tout ça, tu as quatre chevaux maximum. Le système américain est fait pour que tu travailles et que tu puisses gagner de l’argent ! »

Propos recueillis par Théo CAVIEZEL et Alan CARARIC. Photo à la une : © Sportfot.com