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HHS Calais, soixante ans d’histoire pour un rêve olympique (1/3)

Michael Pender et son grand Calais
jeudi 18 mai 2023 Mélina Massias

Vejer de la Frontera. Vilamoura. Riyad. Valkenswaard. Rien ne résiste à HHS Calais. À douze ans, l’immense et atypique bai au cœur plus grand que lui s’impose comme l’un des chevaux du moment. Pur produit irlandais, la pépite de Tom Brennan, sublimée par Michael Pender et ses propriétaires, Marion Hughes et Miguel Bravo, est en marche pour se hisser au rang de pilier de l’île d'Émeraude. Lauréat de cinq Grands Prix en l’espace de sept mois, le hongre découle d’une excellente lignée maternelle, cultivée avec brio du côté de Kilkenny depuis plus d’un demi-siècle. Légitimement, son entourage se donne le droit de rêver de Paris. Portrait.

“Vous vous intéressez à Calais parce qu’il porte le nom d’une ville française ou parce qu’il est bon ?”, lance Tom Brennan à l’autre bout du fil, parfaitement à l’heure pour décrocher son téléphone à l’heure décidée en amont. L’Irlandais, figure majeure de l’élevage sur son île d'Émeraude chérie, est toujours enclin à une pointe de rigolade, et surtout à l’échange, sur l’itinéraire de ses protégés et leur filiation, domaine dans lequel sa science paraît intarissable. Et effectivement, HHS Calais est bien plus qu’un simple nom. “Son histoire débute dans les années soixante. Ma mère, Ida, s’est mariée en 1960. À cette occasion, elle a reçu une pouliche comme cadeau de la part de son père”, narre ce véritable globe-trotteur, qui parcourt régulièrement l’Europe mais retrouve toujours son Irlande natale. “Calais est le fruit brillant de tout cela. Cinquante ans après, il est arrivé. Nous avons toujours élevé à partir de cette famille, toujours. J’ai encore en ma possession le passeport de la jument de 1960, celui de sa fille, née en 1970, celui de sa petite-fille de 1981 et ainsi de suite, dans tout le pedigree.” Cette fidélité envers la souche, ces décennies de travail, de réflexions et de croisements suffisent à elles seules à légitimer tout l’intérêt du grand et atypique HHS Calais, qui aurait initialement dû porter le préfixe MHS, comme Going Global ou Fernhill, depuis renommé Kilkenny, avant lui. Pour autant, son histoire, intimement liée à celle du prodige et unanimement loué Michael Pender, regorge de bien d’autres anecdotes. 

HHS Calais en action. © Sportfot 



Cavalier Royale, le précieux sang de Cor de la Bryère

“La mère de Calais, MHS Obos Cruise, est par Obos Quality 004. Sa grand-mère est une descendante de Cruising, et cette-dernière est une fille de King of Diamonds”, récite avec minutie Tom. “Nous sommes chanceux ; où nous sommes installés en Irlande, à Kilkenny, dans le Sud-Est de l’Irlande, nous étions proches de tous les bons étalons de l’époque. Lorsque la semence pouvait difficilement être expédiée, nous emmenions directement nos juments aux étalons du coin pour les faire saillir. De fait, c’est une vraie chance d’avoir eu à proximité d’excellents mâles, comme ceux présents sur les quatre ou cinq générations de la souche maternelle de Calais.” 

La ponette MHS Glow, ici sous la selle de James Brennan, est la tante qu'HHS Calais. © Sportfot

Pour obtenir de bons chevaux, nul ne saurait renier l’importance de la lignée maternelle. Celle de Calais se révèle particulièrement intéressante, même si aucune de ses mères ne témoignent de résultats sportifs quelconques sur la scène internationale. Grange Queen, son arrière-grand-mère, né en 1981 a produit, selon la base de données Horsetelex, huit produits ; cinq juments et trois hongres. Two Mills Showtime, Splendido et Fuaran, des descendants de Cavalier Royale ont tous évolué à très bon niveau, tandis que leurs sœurs utérines se sont consacrées à la reproduction, avec un succès certain ! Elles ont ainsi donné vie à Coral Springs, complice du jeune Coréen Manjun Kwon lors des Jeux équestres mondiaux de Tryon en 2018, Rolo Tomasi, amateur de Derby en tout genre ou encore MHS Quidame Royale et MHS Clare Boy, deux montures vouées au concours complet. Limitless, la grand-mère de Calais a fait tout aussi bien. “Limitless s’est blessée lorsqu’elle était pouliche. Nous avons essayé à maintes reprises de l’inséminer avec Cavalier Royale, qui est pour moi le meilleur père de mère qui n’ait jamais existé, en Irlande et même en Europe. Il est une fantastique producteur de poulinières. Cela n’a finalement jamais fonctionné, alors nous nous sommes rabattus sur Obos Quality, un bon étalon dont la semence était très bonne”, explique Tom. De ce croisement, l’éleveur obtient MHS Obos Cruise, la mère de Calais, mais aussi MHS Glow, dont la petite taille a fait d’elle… une ponette ! “MHS Glow a été sacrée championne d’Europe par équipe en Pologne l’an dernier avec mon fils, James”, apprécie l’Irlandais. 

Tout comme sa propre sœur, MHS Obos Cruise, la mère de Calais, la championne d'Europe MHS Glow n'est pas très grande ! © Sportfot



Toujours en quête de son croisement de rêve avec Cavalier Royale, Tom retente sa chance, cette fois avec MHS Obos Cruise. “Tout ce que je voulais était une pouliche, afin que je puisse la garder à l’élevage. Je n’avais pas l’ambition d’avoir un mâle ou un hongre. J’ai reproduit deux fois le croisement et obtenu deux poulains ! L’un d’eux était Calais, et l’autre MHS Fernhill Showtime. Il a d’ailleurs été sacré champion national au Portugal l’an dernier (sous la selle de Duarte Sabra, avec qui il a également remporté deux Grands Prix 2* en juillet 2022, ndlr). J’ai ensuite cessé d’utiliser Cavalier, car sa semence devenait de plus en plus rare. Je ne voulais tout prendre pour moi et laisser d’autres éleveurs l’utiliser. Quoi qu’il en soit, cela m’a donné deux bons chevaux !”, complète le passionné.

Propre frère de Calais, MHS Fernhill Showtime est également un excellent compétiteur. © Sportfot

1,55m VS 1,70m

Si Limitless a produit deux ponettes, MHS Glow mais aussi Off Limits (Lancelot), elle n'a donné guère plus de taille à MHS Obos Cruise, la mère de Calais. La belle mesure “15hh”, soit un peu plus d’1,52m. Parmi toutes ses qualités, Cavalier Royale semble avoir, lui, conféré quelques centimètres supplémentaires à ses deux fils, puisque le garrot du talentueux HHS Calais dépasse 1,70m ! “Lorsque Calais est né, il était un poulain bai très, très plaisant. Il était le premier produit de sa mère et est devenu un grand athlète”, se souvient Tom. “On n’embête pas nos poulains à cet âge et nous les laissons simplement courir dans les prés et découvrir la vie. Ils sont castrés au printemps suivant, en avril, avant qu’ils ne retournent dans les pâtures avec nos juments pour deux années de plus. Dans la génération de Calais, nous avons eu quatre ou cinq gagnants en Grands Prix. Nous avons eu une très bonne année !” 

À Barcelone, pour leur toute première sélection en Coupe des nations Séniors, Michael Pender et HHS Calais ont été plus qu'à la hauteur. © Mélina Massias

Dans le microcosme du Sud-Est irlandais, Calais ne tarde pas à attirer l’attention des cavaliers, éleveurs et aficionados des environs. Greg Patrick Broderick, le natif du comté de Tipperary qui avait obtenu l’unique et si convoitée place olympique pour Rio, en 2016, avec un certain MHS Going Global, est le premier à se positionner pour acheter un lot de jeunes chevaux de trois ans chez Tom, dans lequel se trouve Calais. “Mais il n’était pas prêt à m’en donner la somme que je voulais. Depuis, je dis que Greg Broderick s’est mordu les doigts de ne pas l’avoir acheté à ce moment-là”, s’amuse le naisseur du grand bai. Finalement, Marion Hughes, figure bien connue de l’île d'Émeraude et qui partage quelques aïeuls avec Ita Brennan, la mère de Tom, conclu l’affaire en moins de temps qu’il ne faut pour le dire et appose son préfixe HHS, pour Hughes Horse Stud, devant le nom de Calais. “Calais a été un super cheval de bout en bout. Il a mis du temps à prendre conscience de ses capacités tant il était grand, mais je l’ai attendu. Il a toujours été adorable, il marchait avec aplomb dans son pré et était hardi. Nous avons toujours eu de grands espoirs et de grandes idées pour son avenir. Lorsque Marion est venue le voir, nous l’avons fait sauter en liberté à trois ans, sur de tout petits obstacles. Il avait déjà tout d’une superstar. Marion était intéressée par un autre cheval et je lui ai dit à ce moment-là : ‘tu ne peux aller aux Jeux qu’avec un cheval, tu dois en choisir un’”, se remémore Tom. “Elle a choisi Calais et le rêve des Jeux olympiques est toujours bien vivant. Je ne vais pas dire qu’il ira, mais il a ses chances.”

Légitimement, Michael Pender peut nourrir de grands rêves avec son immense fils de Cavalier Royale. © Sportfot

Photo à la Une : HHS Calais et Michael Pender à Doha. © Sportfot

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