Alors qu’il avait fêté ses vingt-neuf printemps en avril dernier, Guépard de Brekka s’en est allé, en raison de son âge avancé. Selle Français Originel, issu de la souche de la géniale Magali, l’alezan avait performé en son temps jusqu’en Grands Prix 4* et autres CSIO, sous couleurs portugaises, après avoir été formé en France par Franck Schillewaert. Un temps stationné dans le Nord après sa retraite sportive, le fils de Papillon Rouge avait été vendu, fin 2018, à Marie Austin, installée dans la Creuse. Dans les yeux de celles et ceux qui ont partagé un bout de chemin à ses côtés, Guépard de Brekka restera un cheval attachant et charismatique.
Très régulier tout au long de sa carrière internationale, l’étalon Selle Français Originel Guépard de Brekka aura marqué plus d’un passionné de sports équestres de son empreinte. Son charisme et son œil bleu ne pouvaient laisser personne indifférent. Mais à vingt-neuf ans, l’alezan par Papillon Rouge et Carmen III (Quat’Sous) a poussé son dernier souffle, mardi 22 août au matin. “Guépard était très affectueux et proche de l’homme, très joueur. Il voulait toujours être au contact des humains”, se souvient avec émotion Antoine Gesquière, qui fut son propriétaire de fin 2015 à fin 2018 avant de le céder à Marie Austin, sa dernière gardienne. “Ce n’était pas n’importe quel cheval, il mérite un bel hommage.”
Initié à la compétition de 1998 à 2001 par Franck Schillewaert, de ses quatre à sept ans, Guépard de Brekka a ensuite connu une bonne carrière internationale, sous la selle du Portugais Filipe Malta Da Costa. Ensemble, les deux complices ont parcouru le monde et décroché de beaux classements jusqu’en CSI 4*. Si Guépard n’a peut-être pas rivaliser au plus haut niveau, son palmarès et surtout sa fiabilité sont remarquables. Finaliste à quatre et six ans à Fontainebleau, le fils de Papillon Rouge a ensuite remporté les Grands Prix 2 et 3* de Vilamoura et Vejer de la Frontera, terminé troisième de ceux des CSI 4* de Vilamoura et Madrid et CSI 3* de Vimeiro, avant de se classer dans des épreuves de plusieurs CSIO, dont ceux de Lisbonne ou La Corogne. En 2008, ses performances lui ont permis de décrocher un excellent ISO 165, avant d’être élu meilleur cheval du Portugal, quelques temps plus tard. Retiré de la compétition à quinze ans, l’attachant Guépard a pu profiter de presque autant d’années de retraite.
“Guépard a pris sa retraite à quinze ans. Il n’a pas été poussé au-delà de ses limites, ce qui est vraiment bien. Il avait fêté son vingt-neuvième anniversaire le 4 avril dernier et était encore en pleine forme”, explique le cavalier, installé dans le Nord de la France, qui était toujours en contact avec Marie Austin. “Lorsqu’il a arrêté sa carrière sportive, Guépard est revenu en France grâce à Marius Huchin, à la tête du haras des Princes. Malheureusement, Guépard était dans l’ombre de Number One d’Iso. Je l’ai donc acheté directement auprès de Marius. Je suis un fan absolu de Papillon Rouge, qui était pour moi l’un des meilleurs chevaux français. Et puis, j’ai toujours rêvé d’avoir un étalon. Alors, c’était un peu le Graal ! J’ai fait trois saisons de monte en main pour Guépard. C’était intéressant pour les éleveurs, notamment ceux qui avaient quelques problèmes pour remplir leurs juments. Guépard était très gentil avec les juments. Fin 2018, j’ai dû me résoudre à vendre Guépard car je suis parti en Allemagne, chez Marcus Ehning, pour me perfectionner. Ce sont les sept mois de ma vie où j’ai le plus progressé. Depuis, Guépard appartenait à Marie Austin, qui a eu la gentillesse de m’annoncer la nouvelle. Guépard était véritablement attachant. J’ai eu l’occasion de travailler avec Franck Schillewaert, qui se souvenait très bien de lui, alors qu’il a monté énormément de chevaux dans sa carrière.”
Frère utérin d’Hurlevent de Brekka (Quidam de Revel) et issu de l’incroyable souche de Magali, à l’origine d'innombrables stars des terrains de concours et de l’élevage, tels les frères Viking, Ratina et Crack d’la Rousserie (Quaprice Bois Margot, né Quincy), Freud de Kreisker (Taalex), Jumpy de Kreisker (Quito de Baussy), Baladine du Mesnil (Le Sartillais), First de Launay (Laudanum), Gloria des Besnards (Cicero van Paemel), Fend l’Air (Amour du Bois), Labrador de Brekka (Olisco x Paladin des Ifs) et tant d’autres, Guépard est né dans la Manche, chez Pierre Le Boulanger. Et malgré cette lignée solide, le précieux sang de Papillon Rouge qui coule dans ses veines et ses performances sportives, Guépard n’a, malheureusement, jamais vraiment conquis les éleveurs, en dépit de son intérêt certain. Ainsi, le Selle Français Originel, exempt du sang omniprésent de Diamant de Semilly, ne compte que cent-quarante-cinq produits, dont cent-douze sont âgés de sept ans ou plus. Parmi eux, dix ont obtenu un indice de performance supérieur à 120, dont Cyndrom Un Prince (mère par Heartbreaker), Dubrovnik (mère par Quinquin du Valon), Bagheera de Jaldis (mère par Querlybet Hero), ou encore Sacripan de Lyons (mère par Grain de Voltaire), tous vus entre 1,40 et 1,60m. Les filles de Guépard ont également engendré quelques bons produits, à l’image de Fiesta Vendéenne (Cap Kennedy), Elvis Do Pochino (Coltaire), Baccara de Wyl (Magic d’Elle), Carat de Wyl (Niagara d’Elle), Fabuleuse du Gonge (Top Gun Semilly) et Evita Perron (Nartago).
Chez Antoine Gesquière, Guépard a sailli, en moyenne, une quinzaine de juments chaque année. Après son départ du Pas-de-Calais, l’alezan a rejoint la Creuse et l'élevage de La Cour, chez Pierre Dominique Masson, à côté de Bourganeuf, où il était stationné ces dernières années. “Guépard était un vrai Selle Français Originel, assez old school. Forcément, il n’était pas le plus à la mode. Le seul regret que je peux avoir, c’est qu’il n’ait pas été utilisé comme il aurait dû l’être. J’ai deux produits de lui, âgés de cinq et six ans (Ilot GHC et Hawaï GHC, ndlr). Ils sont à son image : très proches de l’homme. Ils veulent toujours des caresses, des câlins et sont tout sauf craintifs. Pour ne rien gâcher, ils sont tous les deux bons et suivent le circuit des Cycles classiques”, complète le Nordiste. “Il reste quelques doses. Je vais essayer d’en récupérer une pour avoir un dernier poulain de Guépard. Pour ceux qui souhaitent avoir sa descendance, il est temps. Il n’y aura plus cent Guépard.”
Photo à la Une : Guépard de Brekka et Filipe Malta Da Costa à Estoril, en 2008. © Scoopdyga