Grande Semaine de Fontainebleau
Philippe Rozier :
« On prépare des jeunes chevaux pour l'équipe de France ! »
C'est avec ces mots que le champion de France des 6 ans a voulu réagir aux critiques lancées par Christian Paillot dans le magazine L'éperon de ce mois de Septembre.
Fin 2006, Lauterbach est adjugé pour 280.000 euros lors des ventes PSI. 8 mois plus tard, il survole le championnat français des 6 ans.
SFL : Est-ce que le prix d'adjudication de Lauterbach représentait une pression supplémentaire sur vos épaules ?
Philippe Rozier : « Non, pas vraiment. J'ai la chance d'avoir un bon propriétaire qui assume tout à fait ses achats. Il dit toujours : « Le dernier qui décide, c'est moi et je ne reviendrai jamais sur une décision ». La pression, je me la mets car j'essaie que tout se passe bien pour mon propriétaire. Je veux avant tout bien faire mon travail. »
SFL : Ce n'est pas le premier Landor S importé en France, tous n'ont pas eu la même réussite, est ce que le caractère du cheval vous inquiétait ?
P.R. : « C'est vrai que c'est une des choses qui m'inquiétait lorsque nous l'avons acheté car c'était la même origine que L'arc de Triomphe. J'ai donc tout de suite été demandé au groom qui s'en occupait pendant les ventes mais il m'a tout de suite rassuré en me disant qu'il était très gentil. »
SFL : Est-ce que les ventes PSI représentait une découverte pour vous ?
P.R. : « Oui, tout a fait. Je ne connaissais pas du tout, c'est mon propriétaire qui nous y a emmené, Jacques Bonnet et moi-même. Au départ, nous étions intéressé par le champion du monde des 6 ans, A Pikachu de Muze ainsi qu'une jument française, Naiti Rouge. Ce sont les deux chevaux qui nous intéressaient sur le papier. Je pensais que le Kannan x Chin Chin allait partir pour trop d'argent et je pensais qu'il valait mieux resté raisonnable. Finalement, comme nous le craignions ces deux chevaux sont partis pour des prix beaucoup trop élevés (respectivement 570.000 et 440.000 euros), ce qui est monnaie courante dans ces ventes car ce sont des professionnels et non des amateurs qui achètent. Puis d'un seul coup, monsieur Baillet a levé la main sur ce cheval alors qu'il ne nous en avait même pas parlé et nous a dit « je vais l'acheter, j'aime ce cheval. » Nous étions un peu surpris car c'est la première fois qu'il achète un cheval tout seul sans nous demander au moins notre avis. Lorsque le cheval est rentré à la maison, monsieur Baillet m'a appelé pour savoir ce que j'en pensais et je lui ai dit que je lui donnerais mon avis dans un mois car le cheval sautait très haut, très fort … Par contre, le cheval était super dressé et gentil aux écuries. A première vue, cela avait l'air très bien. »
SFL : On reproche souvent aux cavaliers français de ne pas dresser assez vos jeunes chevaux. Est-ce que vous pensiez que celui-ci était trop dressé pour son âge ? P.R. : « Je ne sais pas. En fait, c'est le premier cheval allemand que je monte de ma vie et pour être honnête : je n'en voulais pas. Pour la bonne et simple raison que j'estime qu'il ne correspondent pas à mon style de monte. La réputation des chevaux allemands est qu'il faut les usiner beaucoup avec beaucoup de discipline … etc. Là, la coïncidence a voulu que j'aie ce cheval là et la première chose qui m'a interpellé c'est que j'ai eu la sensation d'être assis sur un pur-sang. Pas du tout sur un cheval ni allemand, ni français mais j'avais l'impression de monter un AQPS. C'est la première chose qui m'a impressionné et ensuite, j'ai trouvé qu'il était dans mon style. D'ailleurs, une chose qui m'a plu lorsque j'ai vu la video, c'est que c'était une fille qui le montait. Attention, je ne dis pas du tout que les filles sont plus ci ou plus ça, mais je pense que, dans ces écuries là, ce n'est pas une fille qui le monte mais qui gars d'un mètre 80 très physique car ce qui importe c'est que le cheval se présente au mieux et dans les meilleures conditions. Ca, c'est la chose qui m'a rassurée dès le départ car récupérer un cheval d'un Otto Becker ou d'un Ludger Beerbaum, c'est plus compliqué. Les parcours que l'on avait vu en vidéo, c'était très bien, le cheval avait quand même été second du championnat du Oldenburg … Au final, on est très bien tombé, monsieur Baillet a eu beaucoup de chance. »SFL : Vous avez un second étalon approuvé avec Jadis de Toscane, mais vous ne semblez pas essayer de les promouvoir spécialement ?
P.R. : « Pour Jadis, c'était une demande de ma part car c'était un cheval très tardif donc j'avais demandé à son propriétaire qu'il ne fasse pas la monte jusqu'à 7 ans. Après, les 80 cartes que nous avons mises à disposition des éleveurs ont de suite trouvé acquéreur. Cette année, j'avais de nouveau demandé au propriétaire de ne pas lui faire faire la monte puisque j'avais les championnats d'Europe comme objectif et je voulais vraiment mettre toutes les chances de mon côté pour que le cheval soit parfaitement en ordre pour débuter la saison. Mon propriétaire a tout de suite accepté mais malheureusement, j'ai eu deux soucis cette saison avec Jadis qui a fait une hernie inguinale juste avant La Baule qui nous a complètement stoppé dans notre élan, ensuite je l'ai remis en route, j'ai fait deux concours puis il a fait une tendinite à un postérieur au CSI de Bourg en Bresse. Il était deuxième de la grosse épreuve le samedi et lorsque je l'ai monté le dimanche matin, il boitait d'un postérieur. Ce n'est vraiment pas de chance car je pense que c'était vraiment une année pour Jadis.
Pour Lauterbach, la demande est évidement très forte. Pour le moment, ça ne me gêne pas car je pense que sportivement, il faut aller doucement avec un cheval jusqu'à 10 ans avant de pouvoir accélérer. Celui-ci a déjà fait la monte chez Paul Schockemoehle et il est bien dans sa tête, donc je ne pense pas que cela pose de problème. C'est monsieur Baillet qui va maintenant décider. »SFL : On vous a senti assez touché par les propos de Christian Paillot dans les colonnes de L'éperon.
P.R. : « Oui, tout à fait, et c'est pour cela que j'ai tenu à dire un petit mot lors de la remise des prix. Je trouve que c'est vraiment dommage de parler ainsi des cavaliers de l'équipe de France. J'étais très déçu de Christian Paillot car c'est quelqu'un que je connais depuis très longtemps et que j'apprécie … puis là, j'ai été très déçu de ses propos. Je ne comprends pas car, éventuellement, il pourrait nous le dire en face déjà plutôt que dans la presse. Ca nous a tous surpris et interpellé et c'est pour cela que j'ai tenu à dire un mot car nous on fabrique des chevaux, on est au boulot tous les jours, contrairement à ce qu'il pense, et tous les jours, on a une vingtaine de chevaux au travail grâce à des propriétaires qui nous font confiance et qui investissent pour le sport de haut niveau, pas pour le commerce. On conserve nos chevaux alors que nous recevons des grosses offres pour chacun d'eux, notre objectif, c'est l'équipe de France, ce sont les beaux concours alors lorsqu'on lit ces propos là, on pourrait comprendre que des propriétaires se retirent et arrêtent. Je trouve que c'est dommage et que c'est diffamatoire envers les cavaliers de notre génération et celle de dessus encore plus. »
Merci beaucoup