Frédéric Neyrat, l'aventure BLH.
A partir de quand avez-vous ambitionné de faire partie de ces quelques vétérinaires ?
F.N. : « Ca a surtout été une question de chance. Lorsque j'étais en école vétérinaire, dans les années 80, j'ai eu l'opportunité de décrocher un stage chez Francis Desbrosse, en région Parisienne, qui était un des premiers vétérinaires à ne faire que des chevaux.
Goldfever avec Sébastien Neyrat.
Là, le virus m'a pris et en sortant de l'école en 1981, j'ai été embauché par le Dr. Blanchard, qui, pendant la saison de monte suivante, a développé, avec les Haras Nationaux, l'insémination avec Galoubet A. L'opportunité de travailler chez Blanchard était exceptionnelle car il possédait une clientèle de haras de pur-sang phénoménale. Il y avait tous les plus grands haras français et pour un jeune qui sortait du Moyen Âge de la région lyonnaise en matière de chevaux et d'élevage de chevaux, c'était sensationnel. Du coup, j'étais sur une autre planète. C'était la première année de monte de Galoubet. Les Haras Nationaux s'occupaient de le prélever, alors que nous assurions le suivi gynécologique des juments au haras de Villepelée où débutait également Patrice Boureau, qui y était premier garçon, et est aujourd'hui un éleveur reconnu ayant notamment produit Orient Express.
Pour un jeune véto, c'était très stimulant, à la fois pour les pur-sang, que pour l'expérience de Galoubet. J'y suis resté pendant un an, mais c'était une période qui a été plus difficile pour mon épouse. Notre fils Sébastien avait un an et si je travaillais beaucoup. Il faut bien reconnaître qu'Argentan, dans l'Orne, quand il pleuvait tous les jours, pour une femme un peu isolée, ce n'était pas facile, mais elle a eu la gentillesse de supporter ce déplacement.
Par contre, Blanchard était un homme assez particulier et payait à coup de lance-pierre, nous avons donc décidé, au bout d'un an, de repartir dans notre contrée, mais nous avons rapidement eu l'opportunité d'aller travailler chez Francis Desbrosses, en région parisienne, durant deux ans. Pour moi, ça a sans doute été la chance de ma vie de rencontrer cet homme-là. C'était le premier qui a fait en sorte que la pratique équine soit structurée et scientifique, en plus d'être quelqu'un d'une grande valeur humaine. C'était vraiment très enrichissant et c'est sans doute la personne qui a permis à l'activité équine française de prendre un bon chemin. Ça a été une pépinière pour de nombreux vétérinaires qui ont ensuite exercé partout en France. Après deux années passées là-bas, et comme nous étions quand même attachés à notre région d'origine, on est venu poser notre plaque en Dombes, entre Bourg en Bresse et Lyon, avec l'intention d'y soigner des chevaux, car entre temps, l'évolution de la filière a fait que l'on pouvait envisager de ne vivre que de ça dans la région de Lyon. Nous avons développé une activité vétérinaire poly-active avec des boîteries, des visites d'achat, des urgences, coliques, etc… mais également le suivi gynécologique de juments de sport de la région.
Lorsque l'insémination artificielle a été autorisée en France, nous l'avons développée au haras d'Armont de Jean-Jacques Fristot l'un des premiers centres d'insémination français. Pendant un an ou deux, nous étions d'ailleurs le plus gros centre français. Nous mettions en place la semence d'étalons qui étaient présents au haras, puis ensuite également de la semence congelée distribuée par PHI, etc.
Un jour, nous avons décidé de séparer nos activités de celles de ce haras et nous avons commencé à Béligneux, à côté de la clinique vétérinaire que nous avions construite entre temps où nous faisions des chirurgies… etc, à inséminer des juments et prélever des étalons. Ça a également été l'occasion de développer une activité commerciale qui s'occupait de commercialiser des saillies qui s'est appelée Béligneux le Haras, puisqu'à Béligneux, il y avait également Michel Robert avec Béligneux, le centre équestre. Cette activité est dirigée par ma femme, d'autant qu'en tant que vétérinaire, je n'ai pas le droit de m'occuper d'une activité commerciale. Nous avons également commencé à louer des étalons pour les faire venir chez nous. Le premier était Aydin des Malais, que nous avons loué à Paul Maïs du stoeterij vd Helle.
Nous avons ensuite été plus heureux dans nos choix avec Quat'sous, qui a bien produit. Ensuite plusieurs étalons ont suivi, comme Vas Y Donc Longane, puis parallèlement, le studbook français s'est ouvert à la génétique étrangère alors que jusque-là, cela avait été très règlementé avec un maximum de 100 juments inséminées par des étalons étrangers. Cela nous a permis d'importer soit des étalons étrangers, soit de la semence.
Ensuite l'activité reproduction prenant de plus en plus d'ampleur, nous ne pouvions plus faire ça uniquement à Béligneux, donc nous avons installé toute l'activité reproduction au Montellier, dans l'Ain, où nous sommes toujours actuellement. Là, petit à petit, nous avons pu augmenter notre capacité d'accueil des juments et des étalons. Nous avons travaillé à cette époque-là avec le GFE, qui nous a confié des chevaux comme Mr Blue, Calvaro, etc.
Nous avons acheté notre premier étalon, qui était Trésor du Renom, que j'avais acheté chez Rob Hoekstra, qui l'avait lui-même monté après Roger-Yves Bost. C'était un Anglo-Arabe de croisement qui a pas mal produit. Ensuite, nous avons acheté Lando à Otto Becker. Cela a été un tournant pour notre structure car c'était à l'époque où la génération des 6 ans a bien tourné avec Ornella Mail, Oscar des Fontaines ou encore Oslo Biats.
Lando a rejoint la France fin 2006 pour y prendre sa retraite sportive.
C'est un cheval qui, lorsque nous l'avons acheté, n'était plus trop dans les feux de l'actualité, mais j'y croyais car je trouvais le cheval phénoménal et nous avons eu la chance que sa première génération, qui était peu nombreuse, se soit révélé de très grande qualité et ça nous a bien boostés. En parallèle, dans les années 2000, nous avons acheté beaucoup de semence congelée, notamment de For Pleasure, Baloubet du Rouet à Linalux ou encore Cornet Obolensky.
Cela a ensuite suivi son cours avec les locations de Tinka's Boy, puis nous avons réussi à ramener de très bons étalons Selle Français au pays, comme Epsom Gesmeray, que nous avons acheté à Paul Schockemöhle ou encore Huppydam des Horts, que nous sommes allés chercher en Espagne, ou encore Flamenco de Sémilly, qui est venu un an en France. Nous essayons d'aller chercher les meilleurs étalons, qu'ils soient Selle français ou pas, sans avoir d' a priori . L'essentiel étant qu'il soit de très bon niveau et susceptible d'être très bon reproducteur.
La suite, c'est demain.