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Frédéric Cottier, un champion au service du collectif (2/2)

Frédéric Cottier avant la Coupe des nations de La Baule, le 16 mai 2014.
samedi 14 septembre 2024 Baptiste Royer

Dans sa série “le jour où”, Studforlife propose recueille les témoignages des acteurs du saut d’obstacles mondial. Qu’ils soient groom, cavalier, éleveur ou propriétaire, tous ont vécu des journées marquantes, en bien comme en mal. Quelles émotions ont-ils vécues ? Comment ont-ils rebondi après un échec ? Comment ont-ils appréhendé une gloire nouvelle, la retraite du cheval de leur vie ? Eléments de réponses à travers des souvenirs impérissables.

Né le 5 février 1954 à Neuilly-sur-Seine, en Île-de-France, Frédéric Cottier est l’un des grands noms du saut d’obstacles français. Champion du monde par équipe en 1982, médaillé olympique à Séoul en 1988, ou encore triple vainqueur du prestigieux Grand Prix de Rome, le Francilien et son fidèle Flambeau C ont gravi presque tous les sommets de leur sport durant la décennie 1980. De son premier contact avec un cheval à ses plus grands succès sportifs, en passant par une brillante reconversion en tant qu’entraîneur et chef de piste, le champion revient, pour Studforlife, sur quelques moments forts de sa riche carrière.

La première partie de cet article est à (re)lire ici.

La nouvelle génération adoubée à Dublin 

 Dès 1980, Frédéric Cottier et Flambeau s’imposent comme l’un des couples phares en France. Ils contribuent à la victoire des Bleus dans plusieurs Coupes des nations, et s’imposent une première fois dans le mythique Grand Prix de Rome. Logiquement sélectionné pour les championnats du monde de Dublin en juin 1982, le duo rejoint une équipe de France très jeune. À seulement 33 ans, Michel Robert fait office de doyen, associé à son fantastique Idéal de la Haye. L’équipe est complétée par Patrick Caron et Gilles Bertran de Balanda, associés à Éole IV et Galoubet A. 

Jeudi 10 juin 1982. Troisième avant le début de la finale par équipe, les Français entrent bien dans leur compétition grâce à deux parcours sans faute des duos Frédéric Cottier-Flambeau et Gilles Bertran de Balanda-Galoubet A, ainsi qu’un petit quatre points de Michel Robert et Idéal de la Haye. La médaille se rapproche, mais les Bleus doivent faire face à un coup dur en deuxième manche. “J’étais avec Gilles (Bertran de Balanda) en tribune pour regarder le parcours de Patrick Caron, car nous étions les deux derniers de l’équipe à passer. Il avait fait un mauvais parcours en première manche, et il a abandonné en deuxième. On a eu comme un petit frisson dans le dos.” 

Solide face à la pression, les deux hommes réussiront le double sans-faute, permettant à la France de s’offrir un premier sacre collectif dans un championnat du monde. “Ces grandes victoires collectives, à mon sens, ont plus de valeur que les victoires individuelles. Ce n’est pas le même esprit, c’est bien plus fort sur le plan humain. Une déception ou une victoire collective est bien plus intense qu’une performance ou une contre-performance individuelle.” 

Frédéric Cottier et Flambeau C, empereurs de Rome

Vainqueurs ensemble de pas moins de 45 Grands Prix internationaux, trois fois deuxième du Grand Prix d’Aix-la-Chapelle, et médaillés de bronze aux championnats d’Europe d’Hickstead en 1983, le couple a également collectionné les succès en individuel. De nombreux souvenirs, dont le plus ancré reste la domination presque boulimique du duo dans le mythique Grand Prix de Rome.

“Je crois que mon plus beau souvenir, à titre individuel, c’est d’avoir gagné trois fois le Grand Prix de Rome. Je l’ai gagné très vite, une première fois en 1980, puis en 1982, et en 1984. D’ailleurs, on reçoit une coupe particulière quand on gagne trois fois le Grand Prix de Rome. C’est une énorme coupe en argent massif, sur laquelle il y a le nom de tous les cavaliers qui l’ont gagné depuis que la coupe a été mise en jeu. C’est une satisfaction personnelle, mais ça n’a rien de glorifiant.”

Frédéric Cottier au CSIO de La Baule, le 17 mai 2019 © Scoopdyga

Le rêve olympique 

En 1988, Frédéric Cottier et Flambeau s’envolent pour Séoul (Corée du Sud) pour participer à leurs deuxièmes Jeux olympiques. Ils sont accompagnés par Michel Robert et La Fayette, Hubert Bourdy et Morgat, ainsi que Pierre Durand et Jappeloup de Luze. “Nous n’avons pas eu de bons résultats aux Jeux olympiques de Los Angeles, en 1984. Je termine septième en individuel, ce qui est un peu frustrant, car mon cheval était très performant. Par équipe, il y a eu une grosse déception, Pierre Durand est tombé, Eric Navet et moi avons commis des fautes sur la rivière, et nous terminons sixième. À Séoul, on décroche le bronze par équipe. Elle était aussi belle qu’une médaille d’or, car on montait sur un podium olympique. Cette médaille, on l’a partagée, c’était une belle aventure humaine…”

“Et puis, quand on arrive aux Jeux, il y a une ambiance très festive dans le village olympique. Il y a une espèce de liesse, on découvre des sportifs du monde entier, on visite, et on s’échange des pin's. Ensuite, les Jeux commencent, et il y a une ambiance de concentration, de préparation qui s’installe. C’est une atmosphère très changeante, vraiment unique. Les Jeux s’étendent sur 15 jours, ce qui est différent d’un autre Grand Championnat, qui dure seulement quelques jours. Le soir, je sortais souvent avec Hubert Bourdy, on allait visiter la ville, et on revenait vers deux heures du matin, car on était en décalage horaire. On sort du monde équestre, ça nous a permis de découvrir d’autres sports. Je me souviens avoir vu des épreuves d’athlétisme. J’ai vu Carl Lewis à Los Angeles… Il y avait de l’humain, des moments émouvants.

Après Flambeau, comment garder la flamme ?

Après dix ans de sport au plus haut niveau, vingt victoires en Coupe des nations, et cinq médailles en Grands Championnats, Frédéric Cottier décide de mettre fin à la carrière sportive de son fidèle Flambeau. À 19 ans, l’alezan quitte la compétition après un vibrant hommage sur la piste du Palais omnisports de Paris-Bercy, le 11 mars 1990.

Frédéric Cottier et Eric Lamaze pendant les Jeux équestres mondiaux de Caen, en 2014. © Sportfot

Après la retraite de Flambeau, j’ai commencé à beaucoup entraîner, notamment l’équipe nationale de Turquie et du Liban. J’ai également eu plusieurs bons chevaux en compétition, dont un qui s'appelait Silverstone III, mais je l’ai vendu en Espagne. C’était un bon cheval, mais ce n’était pas Flambeau. (avec le cavalier espagnol Juan Diego Garcia-Trevijano, Silverstone III a participé aux championnats d’Europe, en 1997). À un moment donné, je voyais que c’était impossible de courir derrière ce que j’avais déjà fait, et d’essayer de faire mieux. Je me suis dit, si on n’arrive pas à se détacher du peloton, il vaut mieux vendre les chevaux. Je n’ai aucune nostalgie, je continue à monter à cheval et à sortir des jeunes chevaux sur des épreuves jusqu’à 1,30 m pour les valoriser et les vendre, mais j’ai totalement tourné la page, depuis très longtemps. Même quand je montais encore à 1,45 m ou 1,50 m, je n’avais aucune envie de remarcher dans mes traces sans être certain d’y arriver. 

Après sa carrière sportive, Frédéric Cottier s’est également reconverti en chef de piste international. En 2014, il a été chargé de la conception des parcours de saut d’obstacles pendant les Jeux équestres mondiaux de Caen. “Ce sont des expériences. On reste dans le milieu qu’on aime, et on fait du sport de haut niveau d’une manière totalement différente. Il y a beaucoup moins d’émotions et de stress. Quand on est aux commandes d’autres choses, comme la gestion de l’équipe, ou la conception d’un parcours, quand on a l’expertise et l’expérience, il n’y a pas le stress d’un cavalier qui se concentre, qui se questionne sur son cheval, espérant qu’il sera aussi bien que la veille. Sur le plan émotionnel, je le vis d’une façon plus sereine.”

Photo à la une : Frédéric Cottier avant la Coupe des nations de La Baule, le 16 mai 2014. © Scoopdyga