Vitalhorse*Fleur d’Oz, la magicienne de l’élevage d’Olivier Gaillard
Pour sa première année au niveau 5*, Vitalhorse*Fleur d’Oz a fait une entrée fracassante dans la hiérarchie des performers français, se hissant dans le quinté gagnant du stud-book Selle Français, au sommet du classement mondial de jumping de la Fédération mondiale de l’élevage de chevaux de sport (WBFSH) pour la troisième année consécutive. La complice d’Alexa Ferrer donne un joli coup de projecteur au travail de son éleveur, Olivier Gaillard, un de ces cavaliers discrets, mais formateurs efficaces. En croisant Manon de Semilly, une jument issue de la souche du regretté Jules Mesnildrey qui a produit Le Tot de Semilly, avec l’étalon performer de Jean-Michel Martinot, Olimbos Merzé, Olivier Gaillard marche dans le sillage de grands noms de l’élevage du cheval de sport français. Le tout en faisant naître, lorsque tout se passe au mieux, deux poulains par an !
Si son chef de file, Donatello d’Auge (Jarnac), a retrouvé le sommet du classement de jumping de la Fédération mondiale de l’élevage de chevaux de sport (WBFSH), le Selle Français peut aussi se féliciter de la percée de Vitalhorse*Fleur d’Oz (Olimbos Merzé), dix ans. Nouvelle venue au très haut niveau, l’alezane née dans l’Ain pointe au cinquième rang des meilleurs représentants du livre de race hexagonal, et au vingt-deuxième de la hiérarchie globale des douze derniers mois. Au 21 octobre, la perle de l’élevage d’Olivier Gaillard avait engrangé plus de 140.000 euros de gains sous la selle d’Alexa Ferrer, auxquels il faudra ajouter ceux de sa cinquième place dans le Grand Prix 4* de Liège, dimanche 19 octobre. Engagée dans le CSI 5*-W de Lyon, la pétillante jument pourrait bien ajouter de nouvelles lignes à son palmarès 2025. Aux honneurs au CSI 3* de Valence en février, puis dans deux épreuves, dont une à barrage à 1,55m à Doha, la paire a ensuite obtenu une cinquième place dans le Grand Prix du Saut Hermès, en mars, avant d’enchaîner par deux victoires à 1,45 et une dans le Grand Prix 3* de Gassin, en mai. Face à la montre, Fleur d’Oz s’est aussi montrée redoutable sur les épreuves secondaires des étapes du Longines Global Champions Tour de Paris et Monte Carlo. À Dinard et Valkenswaard, elle a ajouté deux victoires à 1,55m à sa collection, ainsi qu’une dixième place dans le Grand Prix CSIO 5* de Gassin en septembre.

Déjà gagnante à 1,55m au niveau 5*, Vitalhorse*Fleur d'Oz pourrait bien transformer aussi l'essai à 1,60m. © Mélina Massias
Comme sa cavalière, qui la monte depuis son année de sept ans, à l’exception d’un passage quelques mois aux rênes de Yuri Mansur début 2024, Fleur d’Oz est née dans l’Ain. Alexa Ferrer a longtemps fréquenté les mêmes concours qu’Olivier Gaillard, qui présentait alors, parmi d’autres montures, Manon de Semilly (Papillon Rouge). Quelques années plus tard, cette Selle Français aux précieuses origines a donné Fleur, la meilleure représentante de l’affixe d’Oz. Olivier Gaillard est installé depuis 2012 à Saint Trivier sur Moignans, petit village aux confins de la Dombes, de la Bresse et du Val de Saône. Jusque dans les années 70, une station du Haras national d’Annecy existait dans ce village situé dans un terroir où de nombreux éleveurs et cavaliers sont établis. L’Aindinois gère les écuries d’Astrée, où l’activité de poney-club s’est progressivement recentrée sur le coaching et la valorisation en compétition. Pour lui, l’élevage est presque génétique. Son grand-père maternel, René Berthet a, avant lui, été un personnage phare de l’élevage du cheval de sport dans le Centre-Est. Dans le Brionnais, son affixe avait donné de bons compétiteurs, dont les produits de son étalon Pégase Gerbaux (Count Ivor), à l’image de Domino Gerbaux, ISO 147 en 1998 puis excellente poulinière et mère, entre autres, de la bonne performer des écuries Stephex, Soory de l’Hallali (For Pleasure).

Alexa Ferrer et Vitalhorse*Fleur d'Oz se sont bien trouvées : elles sont toutes deux originaires de l'Ain ! © Jean-Louis Perrier

Manon de Semilly, vingt-cinq ans, a transmis ses bons gènes, qui la rallient à la souche du regretté Jules Mesnildrey, à sa fille, Fleur d'Oz. © Jean-Louis Perrier
Olivier a débuté son propre élevage il y a une vingtaine d’années avec sa première jument de concours, Astrée Genevries (Pegase Gerbaux), qui a donné son nom à ses écuries et a ses premiers poulains avant qu’ils ne prennent l’affixe d’Oz. “C’est mon épouse, Sophie, qui a choisi cet affixe. Elle m’a dit ‘comme ça, on aura des chevaux magiques’ !”, sourit la cavalier-éleveur qui n’a hélas pas échappé aux mauvais sorts que réserve parfois cette seconde casquette. Mais le vent a fini par tourner avec Manon de Semilly, une fille de Papillon Rouge que le regretté Jules Mesnildrey avait fait naître sur la bonne souche de Venue du Tot (Juriste), à l’origine de l’étalon phare Le Tot de Semilly (Nankin) et de plusieurs juments qui ont bien réussi à leur tour comme poulinières, comme Alesia de Semilly (Double Espoir), mère de Manon de Semilly, mais aussi troisième mère de Joe de Cerisy (Chrome d’Ivraie), médaillé de bronze des mâles de six ans mâles à Fontainebleau. Cet alezan brûlé est né chez Laurent Vincent… qui fut le premier cavalier de Manon de Semilly sur le circuit des quatre ans ! Passée ensuite sous la selle de Jean-François Decayeux, elle rencontre son nouveau propriétaire à sept ans. “J’avais gardé un bon contact avec une cavalière qui montait avec moi au Tournebride (un important centre équestre de l’ouest lyonnais où Olivier Gaillard a fait son apprentissage, ndlr) et qui m’a proposé de venir voir des chevaux en Picardie, où elle s’était installée. Quand j’ai monté Manon de Semilly, j’ai senti beaucoup d’énergie, des gros moyens. Mais lorsque nous avons commencé à travailler à la maison, je me suis vite rendu compte qu’elle était très compliquée. Elle n’était pas méchante, mais toujours sur le qui-vive, et je n’arrivais même pas à galoper sur la carrière. Je me suis posé des questions, mais en voyant dans ses origines que sa grand-mère, Géole (Nankin), était une sœur utérine de Le Tot de Semilly, je me suis dit que ça me ferait toujours une bonne poulinière !”, poursuit Olivier. Au moment de vouer sa protégée à la reproduction, il interroge Éric Levallois. “Il m’a confirmé que toute la descendance d’Alesia de Semilly avait beaucoup de sang et m’a conseillé Kalaska de Semilly (Diamant de Semilly) pour son bon tempérament”, se souvient l’Aindinois, qui a fait naître, en tout... une vingtaine de poulains seulement ! “On lui avait laissé la jument à l’élevage et c’était une bonne idée car à la naissance de sa première pouliche, Baghera, elle a été très difficile à gérer. Ensuite, cela a été, mais comme avec beaucoup de filles de Papillon Rouge, il fallait être très professionnel pour éviter un accident au premier poulain ! Manon m’a donné six poulains. À vingt-cinq ans, elle est désormais à la retraite, car elle a développé une cécité de l'œil droit, ce qui ne l’empêche pas de bien vivre au pré avec une copine !”

Après l'avoir montée en compétition, Olivier Gaillard a voué son alezane à la reproduction, à raison ! © Jean-Louis Perrier
Et de reprendre : “J’ai obtenu de bons résultats avec Baghera d’Oz (ISO 146/21), qui est maintenant poulinière. Elle a une pouliche d’El Barone 111 (Emerald van’t Ruytershof) qui va prendre deux ans et est pleine de Candy de Nantuel (Luidam). La dernière pouliche de Manon, Khloé d’Oz (Romanov) a fait une bonne saison jusqu’au CIR. Depuis de nombreuses années, les finales de Fontainebleau ne font plus partie de mes objectifs. On verra ce qu’elle donne à six ans !”

Olivier Gaillard et une sœur utérine de Fleur d'Oz : Baghera d'Oz. © Jean-Louis Perrier
Pour faire naître Fleur, Olivier a misé sur Olimbos Merzé, un étalon à la production modeste, composée de cent trente-neuf produits enregistrés au SIRE. Il justifie son choix, qui s’est avéré payant : “Olimbos Merzé était un beau cheval, doté d’un bon galop et d’un bon tempérament. Je choisis toujours des étalons qui peuvent corriger les défauts des juments. Olimbos était disponible en frais, ce qui est toujours un plus, d’autant que Manon était restée vide deux années de suite.”

La Selle Français est la meilleure représentante de la production peu nombreuse de son père, Olimbos Merzé. © Sportfot
Sous la selle de son naisseur, Fleur d’Oz a effectué deux parcours à quatre ans et une bonne saison jusqu’au CIR de Cluny, où Jean-Philippe Clerc s’en est porté acquéreur. Cet ancien cavalier amateur, architecte de métier, connaît bien la famille Gaillard pour avoir, lui aussi, fréquenté le centre équestre du Tournebride et entretenu des relations professionnelles avec Charly Gaillard, le père d’Olivier ! Mais en juillet 2020, l’alezane donne une autre dimension à leur relation. “J’ai l’habitude d’aller voir les cinq et six ans au CIR de Cluny pour chercher des chevaux qui sont dans mon budget et présentent un bon potentiel dans un but de valorisation. Cette année-là, Fleur d’Oz sortait vraiment du lot par sa locomotion, son équilibre, sa propulsion !”, se remémore Jean-Philippe Clerc, qui a créé la société Vitalhorse il y a dix ans. À six ans, Fleur évolue sous la selle de Benoît Cernin, qui en profite pour réaliser un transfert d’embryon, dont il a gardé le produit par Crack d’Aiguilly (Comme Il Faut), en accord avec Jean-Philippe Clerc, peu attiré par l’élevage. L’année suivante Fleur d’Oz rejoint le piquet d’Alexa Ferrer qui l’amène au quatrième rang du championnat des sept ans à Fontainebleau, dans un lot très relevé où Falko de Hus (Baloubet du Rouet) s’impose devant Fancy de Kergane (Berdenn de Kergane, alias Casco Bay). Et la suite n’a fait que confirmer les qualités de la généreuse alezane. “Je suis très heureux de voir ce qu’elle fait aujourd’hui avec Alexa Ferrer, qui est une grande professionnelle. J’avais déjà eu des bons chevaux, comme Seurat Galotière (Iowa), qui s’était montré performant en 5*, mais ce n’était pas le même niveau que Fleur ! La voir à Equita Lyon est un grand plaisir. Et je ne dis pas cela par rapport au restaurant VIP : ce n’est pas ce qui m’attire ! Nous verrons ce que la suite nous réserve, mais la commercialisation a toujours fait partie de mon projet. Avoir des chevaux à ce niveau coûte très cher. Leur vente permet de faire perdurer le système”, complète Jean-Philippe Clerc, qui continue, pour l’heure, de savourer les belles performances de sa tête d’affiche… comme Alexa Ferrer !
Cette saison, Alexa Ferrer et son alezane se sont révélées et ont évolué dans des cadres d'exception, comme ici à Chantilly Classic. © Sportfot
La cavalière tricolore ne tarit d’ailleurs pas d’éloges au sujet de sa compétitive jument de dix ans. “À sept ans, Fleur était la meilleure jument de sa génération à la fin de la saison. Depuis, elle n’a cessé de progresser ! C’est une jument moderne, très dans le sang avec une bonne bouche et un super mental : je ne vois pas grand-chose à lui reprocher !”, assure-t-elle. “Elle peut tout aussi bien sauter des Vitesses que des Grands Prix. Elle est généralement mieux à la fin du week-end, car elle est infatigable ! Au box, elle est adorable. Il y a quelques jours, je l’ai tondue. Pour faire la tête, elle était en totale liberté dans l’aire de pansage. J’espère pouvoir la faire évoluer encore, jusqu’à remporter des Grands Prix 5*, mais son propriétaire à pour objectif de la vendre. Il est donc difficile de se projeter à long terme, mais cela fait partie du jeu !”
La suite de l’histoire reste donc dans l’inconnu, mais Olivier et son épouse profitent de cette année magique, qui les a propulsés au rang de vingt-deuxième meilleurs éleveurs du classement de la WBFSH. Mais les deux amoureux gardent leur modestie. “Je pense qu’il y a une part de chance, car Fleur a trouvé une cavalière qui a su la considérer et prendre du temps après son passage peu concluant chez Yuri Mansur. Il y a une belle alliance qui s’est créée entre elles deux, et c’est quand même rarissime d’arriver si vite au top niveau !”, sourit Olivier, qui continue, à son niveau, de s’appliquer à écrire de belles pages avec les éleveurs qui lui confient leurs chevaux !

Alexa Ferrer et Vitalhorse*Fleur d'Oz fouleront la piste d'Equita Lyon cette semaine, après leur cinquième place obtenue dans le Grand Prix 4* de Liège le week-end dernier. © Mélina Massias
Photo à la Une : Alexa Ferrer espère mener son alezane à la victoire dans un Grand Prix 5*. © Sportfot


