Notre site web utilise la publicite pour se financer. Soutenez nous en desactivant votre bloqueur de publicite. Merci !

Dubaï du Cèdre et Margaux Rocuet, la rencontre de deux âmes-sœurs (2/3)

Dubaï
jeudi 30 juin 2022 Mélina Massias

Depuis son plus jeune âge, Dubaï du Cèdre réussit tout ce qu’elle entreprend. Impeccable lors de ses années de formation, qu’elle a achevées par un titre de vice-championne de France à sept ans avec sa complice Margaux Rocuet, l’alezane s’est confrontée, du haut de ses neuf ans, à ses premières épreuves à 1,55m, fin mai, lors de l’étape du Longines Global Champions Tour de Ramatuelle. Sélectionnée pour sa première Coupe des nations 3* il y a quinze jours, à Gorla Minore, la Selle Français Originel amorce une ascension exponentielle dans sa jeune carrière. À l’origine de cette jument puissante, respectueuse et énergique, un croisement génétique imaginé par Sylvain Pitois et sa compagne, Perrine Cateline, entre des souches connues et reconnues. Portrait en trois épisodes. 

La première partie de cet article est à (re)lire ici.

En février 2020, Dubaï apparaît pour la première fois sous la selle de Margaux Rocuet. La jeune femme s’apprête alors à poursuivre la success story initiée par sa nouvelle partenaire de jeu les années précédentes. Pourtant, les débuts entre ces deux-là n’ont pas été les plus académiques. “La première fois que j’ai vu Dubaï, dans les boxes à la maison, elle avait quatre ans. Je me suis dit ‘mon dieu, qu’est-ce qu’elle est moche’ (rires). Quand je vois à quel point je suis folle de cette jument maintenant et à quel point je l’aime, l’anecdote est assez drôle”, plaisante Margaux Rocuet. “Je trouve qu’elle s’est embellie avec les années, bien qu’elle reste une jument très puissante. Ce n’est pas une petite chose. À quatre ans, les chevaux n’ont pas fini leur croissance et ont parfois le garrot plus haut que les fesses, ou inversement.” 

Après avoir suivi les performances de l’alezane à quatre, cinq et six ans avec les autres cavaliers des écuries, vient l’heure pour Margaux d’enfourcher celle qui deviendra sa nouvelle monture. Un “moment d’anthologie”, que la Bretonne n’est pas près d’oublier. “Il y a quelques années, j’ai monté un très grand cheval blanc, qui s’appelait Pardoes (KWPN, Koriander x Habsburg). Il était immense ; il faisait au moins 1,85m au garrot. C’était presque un Percheron ! Quand je l’ai essayé, il dérobait trois obstacles sur quatre. Pourtant, j’ai tout de suite dit à mon père que je l’adorais, qu’il était fantastique. Il m’a demandé si j’étais folle ! La première fois que j’ai monté Dubaï, elle revenait tout juste du champ, où elle était partie en vacances dans l’hiver de ses six à sept ans. Elle n’avait pas travaillé du tout. Fidèle à elle-même, elle était survoltée, branchée à 3000. Je n’étais pas du tout préparée au choc. J’avais mis un mors simple et ma séance ne ressemblait absolument à rien. Mon père m’a dit que ça allait être compliqué. Je lui ai alors répondu : ‘non, non ça va aller’. Il se passe toujours des choses étranges”, sourit la jeune femme, qui reconnait avoir toujours eu un petit faible pour sa chère Dubaï. “Lorsque je suis montée sur Dubaï, j’ai tout de suite eu le coup de cœur. Il y a vraiment eu une connexion. Dès le début, nous avons eu des atomes crochus. C’est formidable.” 

Margaux et Dubaï à Fontainebleau, où elles ont pris la troisième place d'une épreuve à 1,45m à barrage du CSI 4*. © Mélina Massias



“Au Global de Ramatuelle, nous n’étions pas ridicules”, Margaux Rocuet

Malgré cette première quelque peu mouvementée, la paire a rapidement trouvé ses marques, si bien qu’après à peine sept mois de compétition en commun, elle décroche le titre de vice-championne de France du championnat de France des chevaux de sept ans… juste derrière Djibouti de Kerizac (SF, Quincy x Le Tôt de Semilly), l’autre star de Margaux Rocuet. “Ces deux titres ont été marquants. Je montais ces deux chevaux depuis même pas un an. Et puis, tout le contexte de l’événement était particulier. Tout le monde était présent et nous étions tous contents. Que ce soit Dubaï ou Djibouti qui gagne, cela n’avait pas vraiment d’importance. Ce moment a été super sympa”, se souvient l’amazone de vingt-neuf ans.

La suite a été du même calibre : classements à 1,40 et 1,45m, débuts prometteurs à 1,50m à l’été 2021, premières épreuves 5*, etc. C’est bien simple, l’alezane commet rarement, voire jamais, plus d’une faute en piste. Cette régularité sans faille lui a ainsi valu une place pour le Longines Global Champions Tour de Ramatuelle, en mai dernier, ainsi qu’une sélection au sein de l’équipe de France partie affronter la Coupe des nations Longines de Gorla Minore, sur le circuit de seconde division de la Fédération équestre européenne. Dans le Sud de la France, Dubaï s’est frottée à ses premières épreuves à 1,55m, conclues avec deux fautes, mais une aisance flagrante, avant d’effectuer un parcours à quatre points puis un sans-faute sous la chaleur écrasante de l’Italie, début juin. “Lorsque j’ai appelé Sylvain en lui disant que j’aimerais que Dubaï soit ma jument de tête pour mon premier Global, il n’a pas hésité une seule seconde. Cette expérience était vraiment incroyable. Il y a les meilleurs cavaliers et chevaux au monde et nous n’étions pas ridicules ! La jument n’a rien à se reprocher. En sortie de piste, elle n’était pas perturbée. Elle a sauté l’épreuve à 1,55m comme si elle avait fait ça toute sa vie, sur une petite piste et dans des conditions climatiques assez rudes. Et puis, Gorla était ma première sélection en Séniors. Finir deuxième était une belle performance et la jument a répondu présent. Les chevaux ont beaucoup souffert de la chaleur. Je n’avais jamais vu Dubaï comme ça. Avant la deuxième manche, elle avait la tête dans la haie et fermait les yeux avant d’entrer en piste, là où son comportement habituel consiste davantage à faire un grand cinéma avec des coups de cul, etc. Elle a été incroyable et m’a donné tout ce qu’elle avait, toute l’énergie qui lui restait. Même à la remise des prix, où elle gratte, fait des trous et ne tient pas en place, elle n’a pas bougé une oreille. C’était un vrai poney shetland ! Ce qu’elle a fait est la plus belle abnégation dont un cheval peut faire preuve. Dans ces moments-là, la relation, la complicité que l’on peut avoir avec son cheval fait la différence. Elle marchait à côté de ma groom, Virginie, comme un cheval normal, alors que normalement, elle passe devant et Virginie se retrouve en ski-nautique derrière elle. Cela m’a vraiment touchée, parce qu’elle est allée au bout de ce qu’elle avait pour l’équipe de France. Ça, c’est vraiment chouette”, narre Margaux avec émotion.

Margaux Rocuet et Dubaï du Cèdre sur leurs terres à Dinard. © Mélina Massias



Un caractère bien trempé 

Lorsque Dubaï attaque les parcours qui se dressent face à elle en piste, rien ne semble pouvoir lui résister. Le respect, la puissance et le sang que louent son naisseur et propriétaire en font une véritable jument de concours. “Je dis souvent que Dubaï est un cheval pour aller à la guerre. Elle se bat pour son cavalier, elle lui donne tout ce qu’elle a. Quand elle rentre en piste, qu’il pleuve, qu’il vente, qu’il neige ou qu’il fasse quarante degrés, elle est là, elle ne lâche pas le morceau et se bat pour aller au bout du parcours avec vous. Je trouve que ça vaut tout l’or du monde”, raconte la cavalière de l’alezane si spéciale à ses yeux. Pourtant, il faut savoir composer avec la personnalité débordante de la crack. “Je pense que nous nous ressemblons beaucoup, elle et moi”, sourit Margaux. “Nous avons un fort caractère ! Mais, en même temps, Dubaï a beaucoup de sensibilité. En raison de son modèle, on pourrait croire que c’est une dure à cuire, mais pas du tout. Elle est très, très sensible. Je pense que cela lui vient aussi de son origine, puisque Baloubet produit des chevaux très dans le sang. Elle est vraiment à prendre avec des pincettes, mais il faut aussi lui fixer des limites. C’est une approche assez particulière. Au début, elle n’était pas très câline. J’ai besoin d’être très proche de mes chevaux et je passe beaucoup de temps à leur faire des câlins. Maintenant, ça va, et elle est contente de me voir au box. Elle est super attachante. C’est un peu une force de la nature ; elle déborde d’énergie et il faut réussir à canaliser tout ça.” Et ce n’est certainement pas Virginie Gérard qui dira le contraire ! Groom aux écuries Rocuet depuis quinze ans, la soigneuse s’occupe de la remuante alezane depuis ses quatre ans. “Elle mûrit avec le temps et elle apprend. Désormais, elle fait des choses pour nous. Au départ, elle fonçait dans le tas et se moquait de ce que nous pouvions lui demander”, dépeint Virginie. “Maintenant, elle réfléchit à ce qu’elle fait. Mais il y a encore des jours où ce n’est pas facile pour elle, elle est blonde (rires). Dubaï est une vraie guerrière. Elle n’a peur de rien ; même pas d'elle-même, je crois. Qu’il y ait n’importe quoi devant elle, elle foncera toujours. Elle a ses humeurs. Parfois, il est facile de s’occuper d’elle, d’autres fois, c’est un enfer et elle ne veut rien. À la remise des prix des sept ans, à Fontainebleau, je n’ai pas réussi à envoyer son propriétaire la tenir à ma place. Alors, je me suis retrouvée avec mes deux chevaux : Margaux sur Djibouti et Dubaï en main. Ce n’était pas très drôle et elle était encore bien motivée (rires). Et il a fallu rentrer à pied au box !”
 Margaux et Dubaï à Fontainebleau. © Mélina Massias 

Et Sylvain Pitois de compléter : “En revanche, elle n’a jamais posé de problèmes pour les soins. Je n’ai pas le souvenir que cela ait été la bataille pour lui faire les pieds ou lui administrer ses vermifuges. Tout cela a été très simple. Il y a seulement avec la nourriture qu’elle pouvait montrer un peu de caractère. Elle est très nerveuse, peut vite monter en pression et a toujours besoin d’être occupée. Elle a aussi un petit côté bulldozer, donc il faut parfois faire attention, ne rien laisser au hasard. Rien ne l’arrête. D’ailleurs, elle n’a jamais fait le moindre refus de sa vie. Quel que soit l’obstacle, elle va toujours essayer de le sauter. Je pense que c’est aussi pour cela que Margaux l’aime bien ; elle sait qu’elle ne la lâchera jamais. Toutes deux forment un couple.”

La troisième et dernière partie de cet article est disponible ici.

Photo à la Une : Margaux et Dubaï à la fin de leur barrage lors du CSI 4* de Fontainebleau, dans une épreuve à 1,45m. © Mélina Massias