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DKS, la consécration de Dejan Krunic (1/3)

Ekano DKS Saint-Lô
mercredi 24 mai 2023 Thomas Danet Tribut

Avec patience, Dejan Krunic se fait peu à peu une place au sein du microcosme du cheval de sport, à force de travail et d’investissement, à défaut de coups d’éclats tonitruants mais trop vite éphémères. Discret, cet homme d’affaires à la tête bien faite a choisi de partager sa vie entre ses obligations professionnelles aux Etats-Unis et la concrétisation de sa passion pour le cheval, grâce au développement de son élevage “DKS” en France. Rencontre avec ce “citoyen du monde”, comme il se définit lui-même.

DKS sont devenues des initiales communément rencontrées sur les terrains français de compétitions réservés aux jeunes chevaux. Parmi les fers de lance, les noms d’Ekano DKS*Semilly (SF, Kannan x Cumano) – étalon protégé de la famille Levallois, champion de France des mâles et hongres de cinq ans en 2019 ayant signé son grand retour lors du salon des étalons de Saint Lô en février dernier -, Hanley DKS – propre frère d’Ekano, également étalon, actuellement en formation sous la selle de Reynald Angot - ou encore Belgrade DKS (Old, Darco x Montender) – lui aussi approuvé et propriété du cavalier olympique Grégory Wathelet -, semblent tous trois promis à un bel avenir tant au sport qu’à l’élevage. Lilly Express DKS (BWP, Baloubet du Rouet x Cento), formée par Axelle Lagoubie et dorénavant montée par le jeune serbe Ugrin Stanojevic et sa fille Gilly Express DKS, par Diamant de Semilly, dont la formation a été confié au belge Manuel Thiry, bras droit de Grégory Wathelet, ne sont pas en restent. Mais, avant tout, les initiales DKS, pour Dejan Krunic Sporthorses, traduisent la passion d’un homme, celle de Dejan Krunic.

Depuis qu'Ekano DKS*Semilly a retiré ses fers, il a retrouvé ses ailes, comme ici à Saint-Lô en février dernier. © Mélina Massias

De la Serbie au rêve américain… toujours entouré de chevaux !

Né à Belgrade en 1975 d’un père ingénieur en informatique et d’une mère chef d’entreprise, le jeune homme s’essaye à l’équitation grâce à sa sœur, Dina. “Grandir à Belgrade limitait les opportunités d'interagir avec des chevaux. Mais heureusement pour moi, ma sœur voulait absolument monter à cheval. Mes parents nous ont donc emmenés visiter un des rares clubs existants dans la capitale serbe. Une fois sur place, nous nous sommes rendu compte qu’il n’y avait que de grands chevaux. Les dirigeants, voyant les enfants que nous étions, nous ont poliment conseillé de revenir une fois plus âgés et plus forts. Le temps a passé et pour ma part, j’avais oublié cette visite, mais heureusement ma sœur s'en est souvenue, et cinq ans plus tard nous y sommes retournés.  Aujourd’hui, je peux remercier ma sœur pour sa détermination (rires) ! Voyant que je mordais à l’hameçon, mes parents m’ont alors encouragé à m’investir dans cette passion. J'ai donc débuté des leçons d'équitation au centre équestre de l'hippodrome de Belgrade, avant de rejoindre le ‘KK Milicionar’ (le club hippique de la police montée de Belgrade, nommé ainsi à l’époque, ndlr) qui entraînait également ses chevaux pour le saut d'obstacles, à titre récréatif. Les policiers avaient de bons chevaux d'obstacle qu’ils mettaient à la disposition des cavaliers juniors. La police montée s’investissait beaucoup dans notre formation. C'est là que j'ai réellement commencé à apprendre à monter et que m’est venue cette passion pour le jumping”, expose Dejan. Il fait alors ses armes en compétitions et concourt à l’international en catégories Junior et Jeune Cavalier avec Black Bush, un Irish Hunter importé d’Irlande. “Blacky, comme nous l'appelions, était incroyablement courageux ! Ensemble, nous avons pu sauter des parcours de 1,40 à 1,45m et obtenir le titre de champions de Serbie en Junior”, apprécie-t-il.

Le tout bon Black Bush, premier cheval majeur de Dejan dans le sport, photographié ici à Belgrade, en 1991. © Collection privée

Passionné de la première heure, Dejan a parcouru le monde, mais aussi les terrains de concours. © Collection privée

 



En 1992, le rêve américain s’offre à Dejan. Dans le cadre d’un échange scolaire, le jeune Serbe, âgé de dix-huit ans, s’envole pour les États-Unis afin de poursuivre une scolarité exemplaire, étudiant le génie civil à l’université de l’Arkansas, puis le génie structurel à la célèbre université de Stanford, en Californie.

Dejan et Greg Burrow lors d'un essai de chevaux aux Pays-Bas, en 1998. © Collection privée

“J'ai participé à un échange scolaire avec le lycée de Beebe, ville voisine de Little Rock et j’ai eu la chance d’être accueilli par une famille qui connaissait bien celle de Greg Burrow, qui à son tour connaissait Leslie Carter et une autre éleveuse, Susan Tracey.  Comme mon pays, la Yougoslavie, était en pleine guerre civile, je suis resté aux États-Unis pour mes études universitaires. J’ai aussi pu continuer à monter à cheval, d’abord en Arkansas, puis en Californie et enfin au Texas. Toutefois, en débutant ma carrière professionnelle dans la multinationale BP (British Petroleum, ndlr), j’ai dû me rendre à l’évidence qu’il devenait difficile de réussir à me ménager le temps nécessaire pour continuer à monter. Cependant, imaginer ma vie sans chevaux m’était intolérable. C'est comme cela que j’ai décidé de poursuivre ma passion en m’investissant dans l'élevage ! J’ai débuté modestement, aidé des conseils que me prodiguaient Leslie Carter, Koen Terryn (à la tête de Quality Stud, ndlr) ou encore Éric Goosens (de l’élevage de Vie, ndlr). Cela m’a aidé à développer mon programme d'élevage et à affiner mes recherches dans les lignées de poulinières et d’étalons. Pour l’anecdote, Leslie Carter m’a offert la chance de pouvoir obtenir un embryon issu d’une de ses meilleures juments, Berkeley (Old, Budweiser III x Karneval) accouplée à l’étalon monté par Jos Lansink, Concorde (KWPN, Voltaire x Marco Polo). Belle Clara DKS, la première de nos juments fondatrices, est ainsi née. Par la suite, je l’ai débourrée moi-même et montée jusqu'à l'âge de sept ans, avant de la confier à Holly Shepherd.  Ensemble, elles ont connu énormément de succès sur le continent américain. Belle Clara DKS a participé à son premier Grand Prix 1,50m à l'âge de neuf ans en se classant d’emblée deuxième, puis a remporté deux fois le ‘Jumper Derby’ du Gulfport Classic et bien d'autres, avant de se consacrer à l'élevage. Un détail amusant dont je suis fier est que j'ai monté cinq générations de chevaux de la lignée de Belle Clara DKS, à savoir Karrousel (ISR, Karneval x High Rank) sa grand-mère, Berkeley, sa mère, Belle Clara elle-même, Belle Starr DKS (Old, Montender x Concorde) une de ses filles, et Belgrade DKS, fils-étalon de Belle Starr, par Darco”, se remémore-t-il.

Dejan pose ici, en 1993, aux côtés de Karrousel, la grand-mère de Belle Clara DKS et Capers, deux poulinières de l'élevage. © Collection privée



Un coup de cœur collectif en Mayenne

“Aujourd’hui, je jongle quotidiennement avec mon emploi du temps, très chargé. De plus, n’ayant plus aucun de mes propres chevaux aux États-Unis, je ne monte plus autant qu’avant. Cependant, dès que je reviens en France, il me tient à cœur de participer aux débourrages et de monter mes jeunes chevaux. Parfois, je m’accorde même le plaisir de prendre part à quelques concours durant l’été”, glisse le passionné. Ce père de famille âgé de quarante-huit ans se définit comme un citoyen du monde, partageant sa vie entre Houston au Texas, où l’engagent ses obligations de directeur d’Advantage Testing, une société spécialisée dans le soutien scolaire, et Fromentière, en Mayenne, place stratégique de l’élevage DKS. “À vrai dire, le hasard de la vie m’a conduit en Mayenne, car je n’avais pas de liens particuliers avec la France”, avoue-t-il. “Une amie d'enfance voulait quitter Rotterdam pour venir s'installer en France avec son mari. De mon côté, je m’étais rendu compte que l’élevage de chevaux de sport aux Etats-Unis était extrêmement coûteux. L’idée nous est alors venue de chercher à acheter ensemble une ferme afin de permettre à mon amie et sa famille de vivre en France tout en m’offrant un endroit où élever et entraîner mes chevaux. Mais durant plusieurs années, nous ne trouvions que des châteaux délabrés ou des terrains tellement rocailleux qu’ils ne convenaient même pas à des chèvres ! Finalement, la chance a fini par tourner en notre faveur avec cette propriété située au cœur du pays du trotteur et du concours complet, pour laquelle nous avons eu un véritable coup de foudre collectif.”  Basé aux portes de Château-Gontier-sur-Mayenne, l’élevage DKS s’étend actuellement sur une vingtaine d’hectares et dispose d’une carrière et d’un rond d’Havrincourt pour débuter le travail des jeunes chevaux. Une écurie composée de plusieurs box de poulinage complète le tout.

Dejan dans ses œuvres à Wellington, en 2011. © Sportfot


Photo à la Une : Le remarqué et remarquable Ekano DKS*Semilly n'est pas passé inaperçu lors du dernier salon des étalons de Saint-Lô. © Mélina Massias

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