Les préparateurs de jeunes chevaux sont nombreux dans l’Ain et en Saône-et-Loire. Il n’est donc pas étonnant que les concours de Bourg-Lent et de Cluny, placés sous l’égide de la Société hippique française, aient fait le plein sur la première quinzaine d’avril ! Près de huit cents chevaux ont concouru côté bressan, tandis que neuf-cent-cinquante ont foulée les pistes bourguignonnes du site d’Equivallée. Les origines des jeunes talents observés sur ces deux concours font la part belle aux sires les plus en vue, mais aussi à des lignées maternelles qui ont fait leurs preuves.
À quatre ans, place à l’apprentissage
De plus en plus d’éleveurs et/ou propriétaires optent pour une année de formation allégée pour leurs protégés de quatre ans, sans objectif de participation à la finale nationale. L’option des épreuves "Formation" est souvent utilisée, mais, surtout, beaucoup de jeunes pousses de quatre ans regagnent les herbages après leurs premières foulées sur les terrains de concours, qui leur permettent de se familiariser, se tester. Certains optent pour cette option après les CIR, d’autres juste après quelques tours de piste ! À Bourg-en-Bresse, lors du concours organisé par la dynamique Société hippique de Lent, quarante-six quatre ans étaient au départ le premier jour, pour vingt-huit seulement le second. Parmi ceux qui ont fait deux parcours, on remarque trois produits de l’exceptionnelle jument de Philippe Léoni, Shana de Kerglenn, ISO 157 en 2017, une fille de Diamant de Semilly, championne de France à sept ans, comme sa mère Jumpy de Kreisker (Quito de Baussy sous la selle de Jean Le Monze. Tandis qu’un des fils de Shana, souvent considérée comme l’une des meilleures poulinières de l’Hexagone, Dexter de Kerglenn, né comme sa mère chez Alain et Ronan Richard, s’illustre au plus haut niveau, la génération "K" a été confiée à l’écurie lentaise d’Eddy Seguin-Maure, qui, avec sa compagne Charlotte Arnaud, jeune maman, gère le travail de trente chevaux, dont une vingtaine sont destinés au circuit SHF. Kangelo de Shana, par Tangelo van de Zuuthoeve, signe un double sans-faute, tandis que sa propre sœur, Kelstar, est pénalisée d’une faute sur l’un de ses parcours, tout comme le troisième de la fratrie, Krocodile Dundee (Mylord Carthago). Ils ont ensuite rejoint les herbages, et reprendront le chemin des terrains de compétition en 2025 !
Pour ses toutes premières sorties, Kueenie du Bac, issue de la souche de Thor des Chaines, s'est montrée impeccable avec Nathalie Barbier. © Jean-Louis Perrier
Pour Karambole de la Roque, une fille de Mylord Carthago et Pocahontas d’Amaury (Kannan), la même stratégie d’apprentissage, sans objectif, a été adoptée. La baie n’est autre qu’une sœur utérine de Caracole de la Roque (Zandor), ISO 175 en 2023, brillante avec Julien Epaillard et désormais sous selle américaine. Les deux sœurs ne manquent pas de ressemblance ! Confiée par Philippe Berthol à Philippe Bernard, Karambole est sortie sans-faute sur son parcours à Bourg-en-Bresse, comme deux semaines plus tard sur celui à Cluny. Le cavalier bressan ne tarie pas d’éloge à son sujet : "Elle a encore un peu d’émotions, mais c’est une chouette jument ! On sent déjà un sacré potentiel avec une bonne galopade !"
Karambole de la Roque, déjà sur les traces de Caracole de la Roque ? © Jean-Louis Perrier
Parmi les chevaux forts bien nés et vus en piste à Cluny, on remarquait le propre frère de Bentley de Sury, ISO 171 en 2023 et treizième des championnats d’Europe de Milan sous la selle d’Eduardo Alvarez Aznar : Kodiac de Sury (Sunday de Riverland et Quivive de Sury x Calvaro). Brigitte de Faverges, qui a fait naître dans la Nièvre cet imposant alezan double sans-faute à Cluny, explique : "Mon fils Nicolas valorise les chevaux de l’élevage en parallèle de ses activités d’agriculteur céréalier. Nous avons l’habitude de travailler avec Edouard Coupérie et nous allons lui amener Kodiac pendant quinze jours pour l’évaluer, et programmer ensemble la suite."
Le puissant Kodiac de Sury à l'œuvre. © Jean-Louis Perrier
Parmi les quatre ans ayant signés un double zéro à Bourg et à Cluny, citons deux pensionnaires de l’écurie dombiste de Nathalie Barbier, Nala NGR (Nixon van Meuhendof et Flyer B x Arizona), née chez Blandine Gallet-Roux, et Kueeni du Bac (Clintop van Overis et Kinie des Chaines x If de Merzé), née chez Maxime Royer-Torney et dont la troisième mère, Elska (Ti Frère) a produit le double vice-champion du monde de 1996, Thor des Chaînes (If de Merzé). Charlotte Arnaud offre aussi un grand chelem pour le début de saison à Koccianti de Vesvre (Mylord Carthago et Alouette de l’Arz x Idéal de la Loge), né chez Vincent Barletta. Kiss me des Joanins (Diarado et Djaina d’Emm x Con Air), née chez Stéphane Monier et confiée à Keith El Bied, se prévaut même d’un sans-faute de plus, acquis lors du concours jeunes chevaux organisé près de Roanne, dans les écuries de la famille Perreau. Basé sur les premières hauteurs du Massif central, David Astorg Ely a lui aussi fréquenté les concours de début de saison de la Loire et de Vichy, avec beaucoup de réussite pour Kissme de la Claye (Mylord Carthago et Anjou de la Claye x Diamant de Semilly), née à l’élevage de la Forêt Noire et qui totalise six parcours parfaits sur huit sorties. L’ainée de Kissme, J’Adore de la Claye, par Ogrion des Champs, est titulaire de sept sans-faute sur huit et pointe parmi les meilleurs du Top 100 SHF des cinq ans. Sous la selle de David Astrog Ely, le bondissant Holsteiner Unionjack de la Claye, né en Allemagne du croisement entre Uriko, né Clooney, et U Call Me, une fille de Cassini I, a aussi tiré son épingle du jeu. Il a jusqu’à présent réalisé cinq parcours parfaits en huit sorties.
Rare fils d'Uriko présent sur les circuits jeunes chevaux en France, le bondissant Unionjack de la Claye a marqué les esprits avec un double clear round à Cluny. © Jean-Louis Perrier
Cinq ans, l’heure de la révélation
En début de saison, le plateau de chevaux présents pour les épreuves réservées aux cinq ans est toujours assez hétéroclite, entre débutants ou quasi, qui n’ont effectué que quelques sorties à quatre ans, et montures plus aguerries, qui compte déjà une saison complète à leur actif. Les chefs de piste, Jean-Sébastien Brenier à Bourg en Bresse et Philippe Moutrille à Cluny, ont sagement respecté l’entrée en scène de cette génération. Le nombre de sans-faute a donc été élevé notamment sur l’effectif nombreux de Cluny : soixante-deux sans faute sur cent vingt-six le premier jour et soixante-quinze sur cent trente et un le second !
Parmi les auteurs de double sans faute Thomas Leveque poursuit la belle série ouverte à Bourg avec Cornets Girl G (Casall et Cornets Lady x Cornet Obolensky, né Windows vh Costersveld), né chez Franck Attali, qui montait sa mère en compétition amateur. Sur chacun de ces deux concours, Thomas Leveque présentait quinze jeunes, avec à chaque fois un bon lot de cinq ans, neuf représentants de cette génération étant apparus sous sa selle sur au moins l’un de ces deux rendez-vous. Parmi eux, deux produits de l’élevage de Sébastien Fonck, dont Jango Dorchival (Untouchable 27 et Rieke 63 x Rafael), le frère utérin de la fantastique Dzara Dorchival (Qlassic Bois Margot) ISO 174 en 2023, qui avait fait ses armes au niveau 2* avec Thomas Leveque avant de rejoindre le numéro un mondial, Henrik von Eckermann. L’alezan ajoutait un parcours parfait au doublé signé à Bourg, où avait aussi excellé aussi Janeiro Dorchival (Balou du Rouet et Atomik Dorchival x Nervoso), absent à Cluny. Jeup’Lou du Lavoir (Balou du Rouet et Up Star du Lavoir x Quick Star) déroulait, de son côté, son troisième tour sans pénalité. À Cluny, avec la tenue simultanée, sur deux pistes différentes, des épreuves réservées aux quatre et cinq ans, la journée a été sportive pour Thomas Levèque, mais la suite avec les six ans a prouvé qu’il avait de la ressource !
Parmi ses nombreuses montures, Thomas Leveque a notamment présentée la plaisante Cornets Girl G. © Jean-Louis Perrier
Malchanceux en 2023 avec des chutes qui l’ont obligé à interrompre sa saison, Alexandre Louchet compte bien être du rendez-vous bellifontain cette année. C’est bien parti avec Jadis (Nick de Launay et Quelea Rouge x Zandor), né dans l’élevage familial des Barrières, qui n’a pas touché une barre en six parcours. Sous sa selle également, la championne de France des trois ans sport 2022, Java‘s Queen Numenor (Balou Star et Bourgeoise Courcelle x Lamm de Fétan) n’a été fautive que le premier jour à Cluny, après des doubles clear round à Roanne et Bourg-en-Bresse.
Eddy Seguin-Maure peut, lui, compter sur une BWP née en Belgique, Thilly van het Lindehof (Amadeo van’t Vossebhof et Pippa van het Lindehof x De Flor 111). Des origines peu usuelles, qui n’enlèvent rien à la réactivité de cette pétulante baie qui a déroulé cinq sans-faute sur six sorties. Pour ses quatre parcours, Jaja d’Anchat (President et Ursule du Plessis x Diamant de Semilly), qui représente la lignée de l’excellente Bourrée, n’a pas failli sous la selle du haut-savoyard Cyrille Curtat. Également infaillible sur les deux concours disputés, Jerry du Chivallet (Mylord Carthago et Querie la Goutelle x Lupicor), monté par Gaëtan Scrive, est le frère utérin d’Hélios la Goutelle (Diamant de Semilly), "Excellent" à cinq ans. C’est aussi une quadruple réussite sous la selle de Yannick Martin pour Jones Varennes (Candy de Nantuel et Tinya Varennes x Hermès de Rêve), né tout près de Cluny, dans l’élevage familial de Jean Martinot. L’élevage charolais a aussi un bon représentant avec le bondissant Jackychan du Montceau (El Diarado d’Euskadi et Niobe de Nantuel x Rox de la Touche), monté par son éleveuse Marie-Juliette Jean. Double sans-faute à Cluny, il est le frère utérin de Denerys du Montceau (L’Arc de Triomphe) ISO 158 en 2023, très compétitive jusqu’à 1,45m avec Nicolas Delmotte et désormais sous la selle du Suisse Jordan Scherbakov. L’élevage des Joanins de Stéphane Monier est aussi très bien représenté dans cette tranche d’âge, notamment avec Jolicoeur des Joanins (Cicero van Paemel et Bianca de Riverland x Untouchable M) double sans-faute pour sa rentrée avec Jaime Fernandez Rey après une saison 2023 marquée par cent pourcents de sans-faute !
Jaja d'Anchat descend de la lignée de la grande Bourrée. © Jean-Louis Perrier
Belle prestation pour le bien nommé Jackychan du Montceau, frère utérin de Denerys du Montceau. © Jean-Louis Perrier
Iacapa de Blondel prive Ixora des Forêts du doublé chez les ainés
À Bourg-en-Bresse, la génération des six ans était déjà représentée par de nombreux sujets, dont beaucoup étaient qualiteux. Le rendez-vous de Cluny confirme cette double tendance, même s’il serait bien hâtif de tirer des pronostics sur ceux qui feront la une de la Grande Semaine et a fortiori de la scène internationale ! En effet, si la seconde épreuve se joue au chrono, certains cavaliers, et surtout en début de saison, n’optent pas pour le tempo supérieur et préfèrent peaufiner la préparation de leurs jeunes élèves. C’est le cas de Benoit Cernin avec Ilarius du Bary (Quabri de l’Isle et Cachemire Bel Manière x Salto de l’Isle), dont le style et l’aisance avaient déjà impressionnés lors du CIR 2023 "C’est un cheval qui a vraiment un potentiel pour le très haut niveau. Avec lui on joue le long terme, les finales de Fontainebleau ne sont pas au programme", déclarait alors son cavalier. Après neuf épreuves à cinq ans, le jeune étalon faisait sa rentrée en compétition en toute quiétude.
Toujours aussi démonstratif et photogénique, Ilarius du Bary, fils de Quabri de l'Isle dont il a hérité du look, continue son apprentissage sans pression sous la selle de Benoit Cernin. © Jean-Louis Perrier
Pour d’autres, en revanche, le parcours au chrono est le moment idéal pour jouer la carte de la vitesse et montrer le potentiel de leur monture. À ce jeu-là, on peut faire confiance à Thomas Leveque ! À Bourg-en-Bresse, il imposait Ixora des Forêts (By Ceira d’Ick et Lavande des Forêts x Le Tôt de Semilly), un produit de l’élevage de la famille Paris entré dans son piquet peu avant l’épreuve des Jeunes Talents à Equita Lyon, dont ils avaient pris le deuxième rang. Ixora des Forêts a entamé sa saison 2024 par les épreuves réservées aux six ans sur les CSI de Royan, avec plusieurs classements à la clé. Auteur d’un sans-faute très rapide dès le début de l’épreuve à Cluny, le couple semblait bien parti pour un nouveau succès. C’était sans compter sur la vélocité de Iacapa de Blondel (Lauterbach et Queen de Blondel x Grain de Voltaire), née chez Eliane Ruel et associée à Thibault Thevenon, un cavalier doté d’un sens hors du commun du bon tempo ! Gérard Konczewski, propriétaire de la fille de Lauterbach, et qui a fait naître le prometteur Jagger de Marigny (Quabri de l’Isle), près de Beaune, raconte : "J’ai acheté Iacapa à six mois. J’avais vu une annonce qui avait retenu mon attention, car lorsque j’étais en Normandie, j’avais monté son arrière-grand-mère, Vergonne II (Paladin des Ifs, grande compétitrice avec Robert Breul, ISO 175 en 1996, à l’origine de nombreux performers, ndlr). À l’occasion du concours des trois ans de Saint-Lô, j’ai été la voir et l’affaire a été conclue. Je l’ai élevée depuis. À quatre ans elle a fait douze sans-faute sur quatorze, et à cinq ans dix-sept sur dix-neuf. J’ai commencé à travailler avec Thibault il y a quatre ans pour des débourrages. C’est un cavalier qui fait un très bon travail avec les jeunes et est vraiment doué pour monter dans une bonne galopade".
Iacapa de Blondel s'est imposé dans l'épreuve réservée aux chevaux de six ans à Cluny. © Jean-Louis Perrier
Le duel entre Thomas Levèque et Thibault Thevenon s’est poursuivi dans le classement avec une cinquième place au profit du Lyonnais, associé à Imanol du Moulon (Qody de St Aubert et Océane de Guinfard x Cabdula du Tillard), né chez Guillaume Comte, devant le Bourguignon, en selle sur une représentante de l’élevage d’Yves Chauvin, Ironie Courcelle (Mylord Carthago et Troublante Courcelle x Kashmir van Shuttershof). Sa mère, fille de la jument fétiche de l’ex-président de la SHF, Dancing Bride (Almé), avait deux autres produits dans cette épreuve : la propre sœur d’Ironie, Insomnie Courcelle, pénalisée d’une faute après un tour parfait la veille, et Ici et Là Courcelle (Cocktail de Talma), vingtième. Ce dernier, formé par Paul Delforge, est entré tout récemment dans le piquet de Thibault Thevenon, après l’accident subi par Pierre-Alain Mortier pendant le CSI de Cluny. Ce bel alezan avait été remarqué sur le circuit des trois ans mâles Selle Français, mais a depuis été castré, tout comme Impérial du Temple (Radieux et Vue du Temple x Quartz du Chanu), septième avec Yannick Martin, dont le père, Guy Martin, a fait naître ce bel alezan, classé "Elite" à quatre ans. Enfin, Jean-Christophe Galet met à l’honneur deux de ses élèves : le BWP Spencer van het Netehof (Chacfly PS et Caprice van het Netehof x Darco), né chez Roger de Winter et troisième, ainsi qu’Idem des Tourelle (Untouchable 27 et Eurydice x Laudanum), neuvième.
Thomas Leveque est passé à un rien d'un doublé avec la compétitive Ixora des Forêts. © Jean-Louis Perrier
Ironie Courcelle, petite-fille de Dancing Bride, était aussi de la partie en Saône-et-Loire. © Jean-Louis Perrier
Cluny sera le théâtre du CIR les 16 et 17 juillet, qui sacrera les champions régionaux et donnera le ton des favoris pour Fontainebleau.
Les résultats complets de Bourg-Lent.
Les résultats complets de Cluny.
Photo à la Une : Karambole de la Roque, la petite sœur de Caracole de la Roque, en route pour imiter son aînée ? © Jean-Louis Perrier
