Notre site web utilise la publicite pour se financer. Soutenez nous en desactivant votre bloqueur de publicite. Merci !

Dans les coulisses du quotidien de Melina Jobst, groom de Marcus Ehning

Melina Jobst, groom de Marcus Ehning
mercredi 16 août 2023 Rolex Grand Slam

En sept années passées au plus près du Centaure Marcus Ehning, Melina Jobst en a vécu, des grands moments. Des victoires de Prêt A Tout à Aix-la-Chapelle et Genève en 2018, à celle de Stargold dans le temple sacré des sports équestres l’été dernier, en passant par le titre de champion d’Allemagne 2023 qui échappait à son cavalier depuis plus de vingt ans, cette groom rock’n’roll est une pièce maîtresse du système Ehning. Toujours aussi attentionnée envers ses complices, que ce soit lors d’un concours national ou d’un grand championnat, Mel livre, dans une interview accordée au Rolex Grand Slam de saut d’obstacles, les dessous de sa vie à mille à l’heure.

Pourriez-vous commencer par vous présenter ?

Je m’appelle Melina, mais tout le monde m’appelle Mel. Je travaille en tant que groom pour Marcus Ehning depuis sept ans, en concours comme à la maison. Je fais tout ! 

Quel genre de patron est-il ?

Il est génial ! Il est très facile à vivre et il m’accorde toute sa confiance. Toute l’équipe de nos écuries forme une famille. La sœur de Marcus gère les écuries, après avoir été sa groom auparavant. J’adore travailler avec Marcus, il est serviable, jamais en retard - en fait, il est souvent en avance ! Quand on a besoin d’aide, il n’est pas avare de son temps. Il est, à juste titre, strict pendant la détente, mais dans l'ensemble, il est amical avec tout le monde, y compris avec les grooms. 

Mel, Marcus et Mill Creek's Filippa K à Aix-la-Chapelle, en 2018. © Mélina Massias

On imagine qu’en tant que groom, vous travaillez en étroite collaboration avec toute l’équipe qui entoure vos chevaux, que ce soient les vétérinaires, les ostéopathes, etc. Comment cela s’articule-t-il ?

Nous avons un programme établi pour les six prochains mois, avec les concours que nous voulons faire. Entre quatre et six semaines avant les concours, nous décidons avec toute l’équipe quels chevaux iront à tel ou tel endroit, et nous gérons ensemble l’organisation de leur suivi ostéopathique, des contrôles vétérinaires et tout le reste. Nous laissons généralement Marcus en dehors de cela, pour qu’il puisse se concentrer sur le fait de monter à cheval. Avec l'aide de l'équipe à la maison, nous préparons tous les certificats vétérinaires, l’hébergement des chevaux, le camion, etc. Marcus a seulement besoin de savoir quels chevaux nous emmenons à quel concours !

Mel et Judith Gölkel, fidèle propriétaire de Marcus, en route vers les tribunes du stade équestre de la Soers pour suivre Prêt A Tout. © Mélina Massias

“Stargold adore manger et être au pré”

Comment était-ce de faire partie de l’équipe de Marcus pour la deuxième fois lors d’une victoire dans le Grand Prix du CHIO d’Aix-la-Chapelle, cet été ?

C’est encore un peu difficile à croire, personne ne s’y attendait. Stargold est vraiment formidable d’avoir réalisé cette performance à Aix-la-Chapelle ! Il avait déjà obtenu de bons résultats plus tôt dans l’année, mais c’était la première fois qu’il sautait le Rolex Grand Prix du CHIO d’Aix-la-Chapelle. Il est arrivé à son apogée cette année, et c’était tout simplement génial. C’est la deuxième fois depuis que je travaille comme groom pour Marcus qu’il remporte le Grand Prix Rolex à Aix-la-Chapelle (après 2018 avec le généreux Prêt A Tout, ndlr), c’était une journée incroyable !

Cet été à Aix-la-Chapelle, le génial Stargold a remporté la plus belle victoire de sa carrière. © Mélina Massias



Qu’est-ce que Stargold a de spécial, et qu’est-ce qui fait, selon vous, son succès ?

Il est vraiment facile. C’est un étalon, mais il se comporte comme s’il n’en était pas un ! Il n’est pas du tout difficile à faire travailler, et il est très facile à comprendre. Il adore manger et être au pré, mais il n’aime pas sortir marcher en main ; il préfère les trucs un peu folichons ! Quand je suis avec lui aux concours, souvent le matin, je lui mets une selle et je le sors pour faire un tour, parfois avec d’autres chevaux.

L'excellent Stargold sera au départ des prochains championnats d'Europe avec Marcus Ehning. © Mélina Massias

En tant que groom, vous voyagez beaucoup avec vos chevaux. À quoi veillez-vous en particulier pour vous assurer que les transports se passent bien ? 

On connaît très bien ses chevaux lorsqu’on travaille à leur côté au quotidien. On remarque s’ils ne boivent pas assez ou s’ils ne sont pas en forme. Alors, dans ces cas-là, on sait qu’il faut changer quelque chose. Par exemple, on peut leur donner du mash ou de l’eau. Il faut veiller à ce qu’ils s’alimentent correctement et qu’ils soient heureux. Chaque cheval est différent. Certains n’ont pas de problème pour manger et boire, tandis que d’autres ne touchent à rien. Si certains adorent avoir leur seau de nourriture posé par terre, d’autres préfèrent les avoir accrochés plus haut. Certains adorent le foin, d’autres ne le mangent pas. Cependant, comme je les connais très bien, je sais ce qu’ils aiment et, au contraire, ce qu’ils n’aiment pas. On peut habituer un cheval à voyager, ou, si c’est un nouveau cheval, on demande à son ancien groom comment il se comporte en voyage pour faciliter les choses. Certains chevaux sont très agités quand ils descendent du camion, alors que d’autres sont prêts à aller dormir ! Ils ont tous leur propre caractère et c’est ce qui rend ce travail si intéressant.

Mel et A La Carte, à l'occasion d'une sortie sur la plage de La Baule en 2022. © Mélina Massias

“Je suis extrêmement fière lorsque je vois les chevaux partir à la retraite”

Quel est le moment dont vous êtes la plus fière dans votre carrière ?

Il y en a quelques-uns ! J’ai été extrêmement fière de Misanto*Prêt A Tout lorsqu’il a remporté l’étape de la Coupe du monde FEI de Madrid en 2019, alors qu’il revenait de blessure. Les championnats d’Allemagne ont aussi été un moment incroyable cette année. Marcus n’avait plus été sacré champion d’Allemagne depuis vingt et un ans ! Lorsqu’il a remporté l’or cette année, je me suis dit “wahou, j’y suis arrivée avec lui”. 

J’ai aussi eu la chance de remporter quelques Majeurs du Rolex Grand Slam de saut d’obstacles avec Marcus. Nous avons remporté Aix-la-Chapelle (en 2018 et 2023, ndlr) ainsi que Genève (en 2018, ndlr) ensemble, et j’en suis très fière. Il y a également les sélections pour les grands championnats, pour lesquels nous travaillons très dur. Lorsque nous sommes sélectionnés, c’est une vraie satisfaction pour moi. Je me sens aussi extrêmement fière lorsque je vois les chevaux partir à la retraite. Evidemment, on est à la fois joyeux et triste, mais surtout fiers de ce qu’ils ont accompli et heureux de voir la nouvelle génération arriver.

Cette année, plusieurs stars des écuries Ehning ont pris leur retraite, à commencer par Funky Fred, plus fidèle compagnon de route de Mel. © Mélina Massias



Qu’aimez-vous le plus et le moins dans votre travail ?

J’adore voyager ! Je fais d’ailleurs sûrement partie des rares grooms qui disent encore cela ! Dans le camion, en avion, partout, cela ne me dérange pas. J’aime parcourir le monde et affronter de nouveaux défis. Je n’ai pas l’impression d’aller travailler, j’ai l’impression de faire de ma passion un métier, que j’aime toujours autant, même au bout de vingt ans. Je ne peux pas imaginer arrêter. Quand on voyage, on rencontre des amis, des nouvelles connaissances. On découvre de nouveaux concours et tout ce qu’il y a autour.  

Mel côtoie l'immense Priam du Roset depuis son arrivée à Borken, dans les écuries du Centaure. © Mélina Massias

Quels sont vos conseils pour quelqu’un qui s’intéresse à ce métier ?

Le métier de groom n’est pas facile ; il requiert beaucoup de travail. Si vous aimez vraiment les chevaux et voyager avec eux pour aller en concours, alors vous allez adorer. Parfois, il faut s’oublier soi-même, parce que ce n’est pas un trente-cinq heures/semaine. Les journées de travail durent parfois vingt-quatre heures ! Mais être groom est un métier qui peut apporter beaucoup. En plus, on vit des moments vraiment incroyables dans sa carrière. Tous les métiers ont des bons et des mauvais côtés. Certaines personnes peuvent rentrer chez elles à 17 heures, mais lorsqu’on est groom, cela n’arrête jamais ! On pense tout le temps aux chevaux. Mais on a la chance de rencontrer beaucoup de gens, de chevaux et de propriétaires, ce qui est fascinant.

En cas de besoin, Mel, ici aux côtés de la jeune Flower Girl, sait qu'elle peut compter sur ses collègues et amis grooms ! © Mélina Massias

“Il n’y a jamais de discussion pour savoir si nous allons ou non à Aix-la-Chapelle !”

Quelle ambiance règne au sein de la communauté des grooms ?

Je me suis fait des amis incroyables, et nous essayons de nous retrouver au moment des concours, pour un barbecue ou pour prendre un verre. Mes amis viennent du monde entier. Nous faisons aussi parfois d’autres choses en dehors des chevaux, comme aller à un festival ou un concert, ce qui renforce vraiment les amitiés. Il y a aussi les moments où l’on a besoin d’aide, et c’est génial de savoir que l’on a des amis sur qui on peut toujours compter. Par exemple, il m’est arrivé une fois d’être bloquée à l’aéroport pour un problème de visa. Je suis arrivée au concours avec deux jours de retard et mes amis se sont occupés de mes chevaux, sans même que je leur demande. Si quelque chose se passe mal, ils m’aideront car ils savent que je ferai la même chose pour eux !

Bonheur partagé entre Marcus Ehning et sa groom après leur triomphe à Aix-la-Chapelle, le 2 juillet dernier. © Mélina Massias

Aimez-vous participer aux Majeurs, qui incluent Bois-le-Duc, Aix-la-Chapelle, Calgary et Genève ? En quoi ces événements diffèrent-ils des autres compétitions ?

Les quatre Majeurs de saut d’obstacles sont différents. Je suis allée à chacun d’entre eux et j’ai déjà eu la chance d’en remporter deux, le CHI de Genève et le CHIO d’Aix-la-Chapelle. Les deux pistes sont différentes, mais l’ambiance est toujours formidable. Il y a quelque chose de vraiment unique sur le circuit du Rolex Grand Chelem de saut d’obstacles. Lors de ces concours, on assiste toujours à du grand sport, avec les meilleurs cavaliers qui se disputent la victoire. 

Aix-la-Chapelle est particulièrement unique pour Marcus. Il adore participer à ce concours ; étant allemand, il joue à domicile. Il n’y a jamais de discussion pour savoir si nous allons ou non à Aix-la-Chapelle ! Je pense qu’il en est de même pour les autres cavaliers. Pour Martin Fuchs, c’est à Genève qu’il retrouve son public. Les Néerlandais, comme Harrie Smolders, aiment particulièrement Bois-le-Duc, tandis que d’autres cavaliers, comme Eric Lamaze, ont un lien particulier avec Spruce Meadows. Le Rolex Grand Slam n’est pas seulement une opportunité de gagner beaucoup d’argent ; c’est avant tout l’occasion de décrocher un titre qui reste avec soi pour toujours. La Grand Chelem de Scott Brash est quelque chose dont tout le monde se rappellera. Ses trois victoires en autant d’étapes différentes, aussi uniques les unes que les autres, sont remarquables.

Mel n'est jamais loin de ses protégés. © Mélina Massias

Le Rolex Grand Slam de saut d’obstacles fête ses dix ans cette année. À vos yeux, dans quelle mesure ce circuit a changé la donne pour le jumping au cours de cette dernière décennie ?

Le Rolex Grand Slam a permis que de plus en plus d’argent soit investi dans le sport, ce qui encourage et motive les cavaliers. Pour tout le monde, même pour les non-initiés, remporter le Rolex Grand Chelem est quelque chose de reconnu comme étant phénoménal. J’ai des amis qui ne connaissent rien aux chevaux, mais qui connaissent le Rolex Grand Slam.

Avec le Rolex Grand Slam, les émotions sont décuplées, comme ici pour Marcus Ehning et Prêt A Tout, lors de leur victoire dans le Grand Prix du mythique CHIO 5* d'Aix-la-Chapelle, en 2018. © Mélina Massias

Photo à la Une : Le sourire de Mel en sortie de piste à Aix-la-Chapelle en 2018, aux côtés de Prêt A Tout, en passe de remporter le mythique Grand Prix Rolex. © Mélina Massias