Deuxième partie de notre rencontre avec Cesare Galli...
Aujourd’hui, vous vous intéressez toujours autant au développement dans la recherche pour les vaches et les cochons que pour les chevaux ?
« Nous sommes toujours intéressés de manière égale dans chacune de nos activités… mais le travail équin dépendra de nos mains et des gens. Le travail pharmaceutique dépendra du résultat de nos recherches. Si nous trouvons quelque chose d’important, cela aura un plus grand impact sur les gens… et donc financier. Nous avons notamment une start up en France, Xenothera, pour qui nous produisons les cochons qui serviront pour réimplanter des valves dans le cœur des patients. Celles-ci seront mieux tolérées que ce qui se fait à l’heure actuelle en réimplantant d’humains à humains. Aujourd’hui, nous utilisons des valves de lapins mais cela crée d’autres problèmes. Avec ces cochons génétiquement modifiés, nous devrions réduire fortement les rejets. Si cela réussit, cette société pourrait valoir plusieurs millions. Nous avons déjà des accords avec des sociétés américaines. Si cela réussit, cela pourrait avoir d’énormes conséquences, aussi bien techniques que financières. »
Concernant les chevaux, l’Italie n’est pas vraiment une grande terre d’élevage et pourtant aujourd’hui, la plupart des meilleures juments du monde de ces dernières années sont chez vous. Vous avez cru que cela arriverait ?
« Non, nous n’avions jamais pensé que nous pourrions nous développer dans une telle voie. Nous n’avions même pas pensé que cela pourrait prendre une telle tournure. Je pensais que d’autres personnes feraient la même chose… mais si cela nous semble facile, cela ne semble pas aussi simple pour d’autres. »
Giovanna Lazzari-Galli en plein travail.
Comment pouvez-vous expliquer ça justement ? Le fait que vous soyez le seul laboratoire à pouvoir maîtriser la fécondation ?
« Nous avons développé cette technologie depuis désormais plus de 30 ans ! Nous avons travaillé là-dessus pour les vaches, les moutons et l’an dernier, nous avons produit un embryon de Rhinocéros blanc, ce qui pourrait permettre de sauver cette race en voie d’extinction. Nous savons de quoi nous parlons et cela fait sans doute la différence. Lorsque vous êtes la personne qui développe ces choses. Lorsque vous comprenez et maîtrisez tout, vous êtes plus fort que quelqu’un qui doit l’apprendre de vous car ils perdent pas mal d’informations. Lorsque les choses vont bien alors, ça va … mais lorsque les choses ne se passent pas comme prévu, ils ne savent pas où reprendre. Nous, nous savons quoi faire, où regarder pour résoudre ces problèmes. C’est la différence. »
Le professeur Galli en compagnie de California que l'on a connu à l'époque d'Eurocommerce avec Gerco Schröder avant de passer sous les couleurs du Qatar.
Pour vous, faire un embryon de rhinocéros ou celui issu d’une crack jument, c’est la même chose ?
« Il est clair que l’embryon de rhinocéros est un challenge très excitant car personne ne l’a jamais réalisé. Personne n’a même jamais vu un embryon de rhinocéros. Nous allons faire une publication en juillet prochain à ce sujet. Il y a déjà eu un sujet à la télévision allemande car c’était un projet en collaboration avec une équipe allemande de Berlin. Ils s’occupent de la partie clinique. Ce sont des animaux aussi grands qu’un camion et il faut faire une anesthésie générale pour aller dedans mais les ovocytes sont venus ici. C’est ce genre de challenge qui anime ma vie. Je déteste la routine et j’ai la chance de travailler dans un milieu où tout est différent chaque jour. »
Vous n’avez pas d’intérêt particulier pour la compétition des chevaux. Du coup, vous avez une certaine frustration de ne pas pouvoir vraiment prendre conscience que certaines juments qui ont marqué le sport et tant de spectateurs sont chez vous, entre vos mains.
« Je sais qu’elles ont été de très bonnes juments mais je m’occupe de toutes les juments donneuses, clones, porteuses de la même manière. Il n’y a pas de préférence mais je ne tremble pas non plus en me disant en me disant « Ouh-la, il s’agit de telle jument.» Je pense que c’est un avantage car quand vous faites quelque chose, vous savez comment le faire et vous le faites que ce soit un champion ou pas. Je suis immunisé contre ses interférences émotionnelles qui peuvent intervenir lorsqu’il s’agit de votre animal, votre ami ou peu importe. C’est la même chose pour les docteurs dans les hôpitaux, vous devez prendre du recul ou vous devenez fou. Je suis heureux que certaines personnes apprécient notre travail et que nous puissions continuer à nous développer. Nous espérons pouvoir faire encore plus d’embryons mais aussi d’autres choses. Il y a toujours des compétences qui peuvent être utilisées à d’autres fonctions. Les gens de Berlin sont venus vers nous à cause de notre travail dans les chevaux car il s’agit de l’animal domestique le plus proche du rhinocéros. Notre projet serait désormais d’implanter un embryon de rhinocéros dans une jument mais pour cela nous devrons le modifier génétiquement car nous devrions changer des informations pour le fœtus. Si nous réussissons à faire cela, nous pourrions sauver des races en voie d’extinction… et scientifiquement, cela nous apprendrait beaucoup de choses. »
Le premier clone cheval et sa donneuse ... qui l'a porté. "C'est un peu comme si elle avait pouliné d'elle-même" nous glissera avec le sourire le professeur Galli.
Est-ce que vous suivez la carrière des embryons que vous fabriquez ou cela n’a pas d’intérêt pour vous ?
« C’est difficile d’obtenir des informations mais je sais que de nombreux jeunes produits que nous avons fait se comportent bien… mais le véritable boom a eu lieu dans les cinq dernières années donc il faut encore être un peu patient. »
Lorsque vous avez débuté l’ICSI sur les chevaux, vous avez eu principalement des chevaux arabes comme clients avant d’avoir une clientèle sportive.
« En fait, nous avons débuté avec des chevaux de jumping avec l’élevage italien de Villagana (éleveur notamment de Uncanto Di Villagana (Rachel Steffen), ndlr.) et aujourd’hui, la première jument a de bons résultats dans le sport. C’était il y a plus de dix ans. Par la suite, un Egyptien qui passait pas mal de temps dans le Colorado où nous avions un laboratoire qui faisait des choses similaires même si le procédé était plus compliqué. Il est venu nous trouver et du coup, nous avons eu pas mal de juments arabes de show avant que l’activité du jumping ne prenne le dessus. »
Suite et fin demain !