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Carlos Hank Guerreiro, un savant mélange entre sérieux et ambition

Carlos Hank Guerreiro
Sport vendredi 11 mars 2022 Mélina Massias

Selon son entraîneur de longue date, rien ne peut freiner le jeune et talentueux représentant mexicain dans son ascension !

Finalement encore peu connu en Europe, Carlos Hank Guerreiro est une figure montante du saut d’obstacles mexicain. Derrière sa discrétion, le jeune homme de vingt et un ans cache un profond sérieux, mêlé à une touche d’ambition bien sentie. Pouvant compter sur deux nouveaux chevaux de niveau 5*, le pilote n’entend pas se reposer sur ses acquis et devra prouver sa valeur au nouveau sélectionneur mexicain, Mark Laskin, avant d’espérer pouvoir disputer les Mondiaux de Herning, cet été au Danemark. Fidèle, sympathique et la tête sur les épaules, Carlos se donne aussi le droit de rêver des Jeux olympiques. 

Le sérieux. Voilà la première qualité que loue Eduardo Perreira de Menezes lorsqu’il évoque Carlos Hank Guerreiro, son élève depuis près de dix ans. “Carlos n’est pas un gamin comme les autres ; il ne l’a jamais été. Souvent, les gens me demandent s’il est sympathique. Ce n’est pas une question ! Il l’est, mais il est aussi sérieux. Il sait ce qu’il veut et ne perd pas beaucoup de temps avec les choses qui ne l’intéressent pas”, abonde Eduardo Menezes. “Carlos est une bonne personne, tout comme sa famille. Ils ont beaucoup de respect pour les gens avec qui ils travaillent et pour les chevaux. Il serait incapable de faire du mal à un cheval. J’ai beaucoup de respect pour le jeune homme qu’il est devenu.” Étudiant à l’Université d’Anvers, Carlos occupe ses journées entre ses études, ses montures et quelques parties de golf occasionnelles avec son entraîneur. Ajoutez au sérieux du pilote une motivation à toute épreuve, une volonté de fer, juste ce qu’il faut d’ambition ainsi qu’une pointe de discrétion et vous obtiendrez une star montante du saut d’obstacles.

H5 Turbo Z et Carlos Hank Guerreiro ont disputé leur première Coupe des nations la semaine dernière. © Sportfot

Présent à Wellington, à l’occasion du Winter Equestrian Festival, le cavalier de vingt et un ans a parfaitement débuté son année, se classant dans différents Grands Prix 3* et U25. Né à Mexico City, le jeune homme a grandi sur ses terres natales pendant dix ans, avant de poser ses valises en Californie. “J’ai commencé à monter là-bas lorsque j’avais dix ans”, précise-t-il. “Ma famille a toujours été impliquée dans les chevaux et c’est pour cela que j’ai commencé. Nous allions en concours tous les week-ends.” Ces dernières années, le Mexicain a décidé de prendre ses quartiers en Europe, en Belgique plus précisément, afin de donner une nouvelle dynamique à sa carrière. “Je vis en Belgique depuis trois ans et je partage mon temps entre là-bas et ici, à Wellington, où je passe le début de la saison”, résume-t-il. “Pour moi, c’est le meilleur compromis. Pas seulement pour la vie - car il fait très froid en Europe et que l’on peut venir ici se réchauffer -, mais je pense que les chevaux apprécient également ce changement. Ici, nous pouvons sauter à l’extérieur, sur l’herbe et différentes pistes. Ensuite, nous sommes prêts pour la saison en Europe, où se jouent toutes les grandes Coupes des nations. Je pense que c’est un bon fonctionnement, autant pour les cavaliers que les chevaux. Cela permet de leur montrer différentes choses et de rafraîchir leurs esprits."

“Voir Kastelle Memo tous les jours m’a fait tomber amoureux d’elle”, Carlos Hank

Cette année, Carlos Hank a profité de sa tournée floridienne pour présenter deux nouvelles recrues : Turbo (Z, Thunder van de Zuuthoeve x Renville) et Kastelle Memo (BWP, Thunder van de Zuuthoeve x Cicero van Paemel). Anciens partenaires du Néerlandais Kevin Jochems et de l’Allemande Kendra Claricia Brinkop, le hongre et la jument ont tous deux évolué au plus haut niveau. Le premier cité a notamment décroché l’épreuve Coupe du monde Longines d’Oslo, tandis que la seconde a, entre autres, terminé deuxième de l’étape de Vérone. Soutenu par sa famille, qui gère les écuries H5, le jeune homme pourra ainsi compter sur ces deux cracks pour épauler ses autres montures. “En fin d’année dernière, certains chevaux de mon piquet ont contracté de petites blessures. Alors, mon père a décidé de m’aider avec ces deux chevaux, qui vont me permettre d’évoluer à un bon niveau rapidement. Je suis vraiment ravi de les avoir avec moi. Ce sont deux chevaux incroyables, bien que très différents. Ils sont expérimentés et ont sauté au plus haut niveau avec leurs anciens cavaliers”, reprend Carlos. “Je me suis très rapidement entendu avec Turbo en particulier. En fait, je l’avais déjà essayé lorsqu’il avait huit ans. Pour diverses raisons, nous avions acheté un autre cheval ce jour-là, mais je l’ai toujours suivi et aimé. J’ai fait plusieurs concours avec Kevin Jochems. Il n’a fait que s’améliorer et Kevin a fait un super travail, le faisant devenir une vraie super star. Concernant Kastelle, j’étais assez proche d’elle puisque je vis aux écuries Stephex avec ma petite-amie, Zoé Conter. J’ai donc pu voir la jument depuis ses jeunes années. Je l’ai toujours beaucoup appréciée. Elle est vraiment spéciale et je crois que la voir tous les jours m’a fait tomber amoureux d’elle.” 

Le jeune homme partage sa vie avec Zoé Conter, fille de Stéphan et cavalière des écuries Stephex. © Sportfot

Pour l’heure, les deux nouveaux couples que forme Carlos avec Turbo et Kastelle Memo se découvrent à Wellington. Avec le premier cité, le Mexicain a accompli son premier objectif de la saison avec une belle réussite, en signant un premier parcours parfait dans la Coupe des nations du CSIO 4* de Wellington, le week-end dernier. “Je pense que c’est une semaine importante pour moi”, avouait le jeune homme à quelques jours de l’épreuve collective. “Il s’agit de la première semaine majeure de la saison où l’on peut montrer ce que l’on a dans la perspective des championnats du Monde. Mon objectif est de faire bonne impression et d’obtenir un bon résultat dans la Coupe des nations.” Contrat rempli pour le Mexicain, qui regarde désormais vers le Grand Prix 5* Rolex de la douzième et dernière semaine de compétition au WEF. “Carlos semble s’être adapté rapidement aux chevaux, surtout à Turbo. Leurs débuts ont été encore plus rapide que je ne l’imaginais. Ce sont de très bons chevaux et je peux dire qu’ils sont tombés chez un très bon cavalier”, complète Eduardo Menezes.

Travail et détermination

“Actuellement, il est nécessaire d’avoir un large piquet de chevaux de Grand Prix tant il y a de concours, chaque semaine, partout. Pour rester au sommet, on doit avoir plusieurs chevaux, afin de pouvoir alterner chaque week-end. C’est la seule façon de garder ses montures en bonne santé et heureuses. Désormais, mes chevaux d’âge vont profiter d’un peu de repos. Ils ont beaucoup sauté l’année dernière donc je vais y aller doucement avec eux. Ils reprendront cet été. C’est aussi pour cela que nous avons fait l’acquisition de Turbo et Kastelle : pour pouvoir donner une chance à mes autres montures de se ressourcer physiquement et mentalement”, explique avec justesse le Mexicain. À seulement vingt et un ans, Carlos sait ce qu’il fait et ne prend pas les choses à la légère. Désormais solidement équipé, il peut ambitionner sereinement une fructueuse année 2022. Avec les Mondiaux de Herning comme finalité ? “Les championnats du monde sont mon plus grand objectif cette année. Je pense que le Mexique a un groupe de cavaliers et chevaux talentueux et j’espère que je pourrais intégrer l’équipe et obtenir un bon résultat là-bas. Avant cela, je devrais faire mes preuves. Nous avons quelques Coupes des nations, à La Baule, Dublin et probablement Knokke. Ce seront mes premières cibles et la plus importante sera l’échéance mondiale”, répond sobrement le cavalier.

H5 Kastelle Memo et Carlos Hank Guerreiro ont fait connaissance à Wellington. © Sportfot

Pour Eduardo Menezes, le potentiel de son élève ne fait aucun doute : “Je lui dis toujours qu’il faut travailler très, très dur. Les résultats viendront avec le travail, la discipline et le respect des chevaux. J’attends de lui qu’il continue à fournir autant d’efforts et d’être le gars super qu’il est déjà. Carlos est un bosseur. Il respecte ses chevaux et les résultats seront une conséquence de son investissement.” Outre le soutien financier de ses parents, qui est évidemment un élément non-négligeable à haut-niveau, Carlos peut surtout compter sur une vision juste de son sport et un système solide, basé sur la confiance, l’échange et la fidélité. “Je travaille depuis dix-sept ans avec la famille Hank. J’ai rencontré Carlos alors qu’il n’avait pas encore cinq ans. J’ai d’abord aidé sa maman, qui montant à cheval, et nous avons commencé notre relation comme cela”, retrace Eduardo Menezes. “Je suis très fier de lui. Pour moi, c’est très gratifiant d’avoir vu l’enfant qu’était Carlos devenir non seulement un cavalier compétent mais surtout une bonne personne. Nous avons à la fois une relation professionnelle et familiale. À l’époque où nous nous sommes rencontrés, je n’étais même pas marié et j’ai désormais trois enfants. J’ai vu Carlos grandir, tout comme sa petite sœur, qui n’était même pas née au début de notre collaboration. Elle a désormais seize ans et monte aussi à cheval. Bref, c’est une relation un peu différente de ce que l’on voit d’habitude.” Et Carlos d’ajouter : “Je m’entraîne avec Eduardo Menezes depuis douze ans et il m’a appris tout ce que je sais aujourd’hui. Il m’a accompagné de mes premiers concours, à mes premiers Grands Prix et championnats. Enrique Gonzalez m’a aussi donné beaucoup de leçons au fil des années. Grâce à eux, j’ai pu atteindre le niveau qui est le mien actuellement. Pouvoir m’inspirer de deux si grands cavaliers olympiques, qui ont remporté tant de Grands Prix, est incroyable.”

Eduardo Perreira de Menezes a vu Carlos grandir au fil des années. © Sportfot

Une chose est sûre, Eduardo Menezes ne manque pas de louer les qualités de son élève. Décrivant une “grande facilité à se concentrer”, le Brésilien salue l’écoute et l’attention que Carlos porte à ses conseils. Surtout, le binôme a désormais développé une relation basée sur l’échange et le partage. “Aujourd’hui, comme il fait de la compétition au même niveau que moi, nous avons davantage des conversations, où nous arrivons à un accord. Ensuite, il est très doué pour suivre les plans que nous mettons en place. On peut vraiment compter sur lui”, poursuit Eduardo Menezes. Comme son élève, le Brésilien dépasse le mètre 90. Une particularité physique qui astreint les deux athlètes à encore plus de discipline et de travail, notamment pour gérer leur équilibre. “Il travaille régulièrement avec un entraîneur pour être prêt physiquement et un préparateur mental. Carlos a beaucoup de talent et de qualités. Je pense que rien ne peut le freiner s’il travaille pour arriver où il veut”, assure sans détour l’expérimenté Auriverde.

Un rêve olympique

En plus de ses montures expérimentées, Carlos s’efforce de préparer l’avenir. Conscient de l’importance de former les jeunes chevaux, le cavalier peut compter sur Pedro de Andrade Costa, un cavalier brésilien, pour l’épauler dans cette tâche ô combien fondamentale. "Normalement, nous laissons nos jeunes chevaux en Europe car les opportunités pour les former sont meilleures là-bas. Pedro fait un super travail avec eux. Lorsqu’ils ont sept ou huit ans, ils nous rejoignent à Wellington afin que je commence à les monter. Nous en avons plusieurs qui sont très talentueux et qui, je pense, pourront atteindre le haut niveau. Mais avec les chevaux, on ne sait jamais, il y a toujours des risques. Nous faisons de notre mieux pour leur donner les meilleures chances possibles”, souligne le Mexicain. “Je pense que faire évoluer des jeunes chevaux est une part importante de notre équitation. Développer une relation avec eux et les amener soi-même vers le haut niveau est très satisfaisant. Je suis un grand fan de cela.”

 

Carlos et H5 Chaccophanie. © Sportfot

Avant de voir ses montures en formation atteindre le sommet de leur sport, Carlos va se concentrer sur Turbo et Kastelle Memo, ses deux cartes principales pour espérer entrer dans les plans de Mark Laskin, nouveau sélectionneur pour le collectif mexicain, en vue des Mondiaux de Herning. “Je ne connaissais pas très bien Mark avant, mais nous avons fait connaissance ces dernières semaines. Jusqu’à maintenant, j’ai une très bonne impression. Il a obtenu de très bons résultats avec le Canada et remporté plein de Coupes des nations. J’espère qu’il en sera de même avec nous. Il est très impliqué dans son travail et veut bien faire pour le Mexique”, commente le cavalier. Ces dernières années, la nation s’est particulièrement développée, avec l’émergence de nombreux athlètes de bon niveau, mais aussi l’organisation de nouvelles compétitions de niveau 5*. Une bonne nouvelle pour la nation. “Notre équipe a beaucoup évolué ces dernières années”, confirme-t-il. “Nous avons beaucoup de cavaliers amateurs au Mexique, mais ils ont vraiment franchi un nouveau niveau. Je crois que nous sommes devenus une équipe qui peut être compétitive. Nous avons d’ailleurs déjà remporté la Coupe des nations de Dublin. Lorsque je suis parti du Mexique, à l’âge de dix ans, il n’y avait aucun Grand Prix 4 ou 5*. C’est impressionnant de revenir dix ans plus tard. Nous avons d’incroyables concours sur herbe et le niveau augmente. Les événements organisés à Monterrey et La Silla l’an dernier étaient vraiment équivalents à ce que l’on trouve en Europe. C’est bien de voir cela dans son pays de naissance et d’avoir des opportunités de sauter à haut niveau.” 

De quoi motiver encore davantage l’étudiant ? Probablement. Son entraîneur rappelle, en tout cas, qu’il ne faut pas relâcher ses efforts. “Je pense que tout cavalier doit essayer de s’améliorer tous les jours. Si Carlos garde cela à l’esprit, qu’il essaye de devenir meilleur chaque jour, et qu’il cherche ce que lui, en tant que cavalier, aurait pu mieux faire en sortant de piste plutôt que de se questionner sur son cheval, alors il peut obtenir les résultats qu’il souhaite”, philosophe le Brésilien. Bien entouré, lucide et assidu, Carlos Hank semble avoir toutes les cartes en main pour finir d’éclore à très haut niveau dans les prochains mois et années. S’il espère pouvoir célébrer sa première grande sélection en Sénior dès cet été, à Herning, l’échéance pourrait sans doute être un tremplin pour l’ambitieux Mexicain. “Je crois que les Jeux olympiques sont le plus grand rêve de tout sportif. J’adorerais aller à Paris. J’ai manqué cela à Tokyo l’année dernière. Je n’avais pas les résultats pour. J’étais sans doute encore un peu trop jeune, trop vert”, concède-t-il. “Mais nous allons faire de notre mieux pour être de la partie à Paris. Je pense que ce sera une expérience incroyable, dans une super ville. Je donne le meilleur de moi-même pour faire de cet événement un objectif. Mon plus grand rêve serait, d’un jour, remporter une médaille olympique.” Une bien belle ambition pour un cavalier discret mais tout autant réaliste et travailleur.

Carlos et son fidèle H5 Sunshine. © Sportfot

Photo à la Une : Carlos et H5 Just The Music. © Sportfot