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Audrey Morandat nous raconte son week-end à La Baule aux côtés des cracks de Simon Delestre

Reportages mercredi 11 mai 2022 Mélina Massias

Acteurs primordiaux du sport, les grooms officient souvent dans l’ombre de leurs chevaux et de leurs cavaliers. Après de bons résultats, notamment dans la Coupe des nations et dans le Grand Prix de La Baule, Audrey Morandat revient sur son week-end en Loire-Atlantique. Alors qu’elle avait connu deux premières expériences à l’Officiel de France en 2019 et 2021, la Drômoise a enfin pu vivre une Coupe des nations de l’intérieur, grâce au fort prometteur Cayman Jolly Jumper. Dexter Fontenis était aussi du voyage et a pu bénéficier des bons soins de la fée de Simon Delestre pendant ces quatre journées de compétition. Retour sur un événement à mille à l’heure. 

“Le week-end a été riche en émotions”, débute Audrey Morandat, fidèle groom concours de Simon Delestre depuis quatre ans. “J’ai participé à la Coupe des nations de La Baule pour la première fois ce week-end. L’an dernier, Simon ne jugeait pas Berlux (son partenaire des derniers Jeux olympiques, ndlr) prêt pour ce rendez-vous et, il y a trois ans, Uccello (de Will, désormais vendu à l’étranger, ndlr) n’avait pas pris part à l’épreuve collective. Là, j’ai enfin pu vivre pleinement cette Coupe des nations de La Baule, et ce n’était pas la même chose que les années passées ! L’ambiance est juste incroyable. Du côté des grooms, nous nous sommes serré les coudes : si quelqu’un avait besoin d'aide, nous n’hésitions pas à prêter main forte. Nous avons cette mentalité lors de chaque échéance collective et nous travaillons tous en équipe. Le fait d’être en France nous donne encore plus l’envie de bien faire.”

Portés par un stade plein à craquer et tout acquis à leur cause, les Bleus ont terminé deuxièmes de la Coupe des nations, vendredi 6 mai. Une belle performance, d’autant plus notable que Henk Nooren, le sélectionneur national, avait lancé dans le grand bain la jeune Mégane Moissonnier avec son formidable Cordial, mais aussi Cayman Jolly Jumper, grand espoir du clan Delestre. “Depuis que Cayman est arrivé aux écuries, il est un peu comme mon bébé. Forcément, je me disais que ces parcours étaient énormes ! C’était un peu un ascenseur émotionnel. Il a fait deux fautes d’expérience dans la première manche de la Coupe, mais il était là pour apprendre. Il va faire de grandes choses”, reprend la Drômoise, dont la passion pour ses chevaux est sans limite. “Les dernières Coupes des nations auxquelles j’avais participé étaient celles de Rome, il y a trois ans, de Sopot et des Jeux olympiques de Tokyo. L’ambiance y était bien différente (rires). Cela fait donc plaisir de réaliser une bonne performance à la maison, sur un tel concours. Pour chaque Français, La Baule est une vraie échéance. Lorsqu’on parlait de la Coupe des nations de La Baule, j’avais toujours hâte. Mais, jusqu’à maintenant, je n’avais pas trouvé le petit truc en plus que tout le monde louait en évoquant ce concours. En fait, courir la Coupe des nations change tout et cette épreuve à La Baule est simplement incroyable.” 


La joie de Simon Delestre après son sans-faute sur Cayman Jolly Jumper dans la Coupe des nations.

Dexter et Cayman, deux stars en devenir

En Loire-Atlantique, Audrey était accompagnée par deux chevaux en devenir : Dexter Fontenis, un hongre Zangersheide de neuf ans par Diarado, et Cayman Jolly Jumper, un fils de la légende Hickstead âgé de dix ans. Encore inexpérimentés, tous deux continuent d’apprendre à chaque sortie. “Dexter participait aux épreuves intermédiaires pour poursuivre sa prise d’expérience. Il est hyper sensible, extrêmement drôle et terriblement attachant”, décrit la soigneuse. “Il n’a pas fait le meilleur week-end de sa carrière à La Baule, mais il n’y a aucune catastrophe ni pression mise sur lui (Dexter a notamment signé deux parcours à quatre points et un à treize ce week-end, après avoir enregistré d’excellents résultats en début d’année, dont une victoire dans un Grand Prix 3* à Oliva, ndlr). Nous ne sommes pas stressés par rapport à cela et, ni Simon, ni moi, ne nous faisons de souci. Il va rebondir. Cela nous arrive à nous aussi d’être moins performants certains week-ends et on ne nous le reproche pas. Alors, pourquoi nos chevaux n’auraient-ils pas, eux aussi, le droit à l’erreur ? Dexter sera de nouveau avec moi le week-end prochain, à l’occasion du CSI 5* de Madrid. Nous avons séjourné chez Olivier Robert, à Pompignac, avant de prendre la route pour l’Espagne.”  Dexter Fontenis et Simon Delestre.

Cayman Jolly Jumper.

Et de reprendre : “Cayman, lui, prenait part à sa première Coupe des nations et sautait pour la première fois sur l’herbe avec Simon. Cela ne fait que six mois qu’il est arrivé aux écuries. Il est très sensible et tout autant attachant. Il a un cœur bien plus gros que lui. Ce n’est pas un cheval banal, loin de là. Lorsqu’il se donne, c’est toujours à 100%, un peu à l’image de Ryan (des Hayettes, le crack de Simon Delestre, ndlr). Cayman est très, très particulier. Une fois en piste, tout ce qu’il veut c’est sauter. Il est incroyable ; il est dingue. Je n’ai même pas les mots pour le décrire !” Particulièrement remarqué, par ses origines mais surtout par son comportement et ses qualités en piste, le Selle Français, né chez Nathalie Chevalier, dans le Morbihan, a répondu présent pour sa première grande échéance sous les couleurs de l’équipe de France, terminant la Coupe avec huit points puis un sans-faute, et une très bonne septième place dans le Grand Prix dominical, à raison d’une barre renversée au barrage.

Une dévotion totale pour ses pépites

Depuis cinq semaines, Audrey enchaîne les concours à travers l’Europe sans discontinuer. Si le rythme est intense, la souriante jeune femme semble ravie d’avoir retrouvé ses habitudes, après deux longues années en clair-obscur en raison, d’abord, de la pandémie de Covid-19, puis aussi de l’épizootie de rhinopneumonie équine. “Nous sommes lancés dans la saison ! Toutes les semaines, je suis en concours, mais je préfère ça. Restée confinée à la maison, merci, mais non merci ! Le Covid est peut-être terminé, du moins pour l’instant. Il y aura sans doute un nouveau pic épidémique, mais, en attendant, nous en profitons. Tout ce que nous voulons, c’est que les événements repartent comme avant”, glisse la bonne fée de Simon Delestre.

Moment câlin entre Cayman Jolly Jumper et Audrey.

À La Baule, comme à chaque événement, peu importe le label des épreuves, Audrey a pris le plus grand soin de ses compagnons, quitte à passer des journées à rallonge. Hors de question pour cette passionnée de ne pas faire de son mieux pour Dexter et Cayman le week-end dernier. “Les journées étaient longues, presque interminables (rires). Je commençais chaque matin entre 5h30 et 6 heures. Simon vient monter ses chevaux tôt dans la journée et je tiens absolument qu’ils aient le temps de manger et de digérer tranquillement avant d’aller travailler. C’est primordial pour moi. Je ne conçois pas qu’on puisse venir les embêter à nettoyer leur box et à s’agiter dans tous les sens lorsqu’ils prennent leur petit déjeuner. Nous n’aimerions pas non plus être dérangés dès le matin, alors j’estime qu’ils ont aussi le droit d’être tranquilles”, résume Audrey. “Ensuite, Simon montait les deux à la suite. Après cela, je m’occupais d’eux, les dépréparais et leur faisais les soins. Le jeudi et le samedi, nous avions environ deux heures de break, pour passer un moment au calme avec les chevaux. En revanche, vendredi, le jour de la Coupe, et dimanche, pour le Grand Prix, il n’y a pas eu de répit. Tout s’enchaînait et il fallait tout calculer en fonction de nos horaires de passage, afin de permettre aux chevaux d’avoir des moments de détente dans la journée. Ils font suffisamment de belles choses pour que nous leur rendions la vie la plus agréable possible. Le jour de la Coupe des nations, par exemple, nous avons fini l’épreuve vers 18 heures. Après quoi, j’ai tenu à accorder un peu de temps à mes chevaux. Je n’aime pas trop les embêter tout de suite après, d’autant plus lorsqu’ils viennent d’enchaîner deux parcours par 25° à la sortie de l’hiver et qu’ils sont un peu fatigués parce qu’ils ont tout donné. J’en ai donc profité pour ranger le matériel, faire un peu de ménage, puis j’ai fait tous les soins nécessaires, en suivant ma routine habituelle. Ce week-end, j’avais la chance d’être accompagnée par notre ostéopathe, Nicolas Belin, avec qui j’ai pu discuter et échanger.” Avec des journées bien remplies, Audrey n’a pas eu le temps de profiter du cadre qu’offre la ville de La Baule, avec sa plage et son cadre idyllique, mais, qu’importe, Dexter et Cayman passaient avant tout.

Dexter Fontenis.

Des conditions d’accueil appréciables et appréciées

Particulièrement importantes pour les grooms, les conditions d’accueil des chevaux et de leurs accompagnants influent souvent sur le confort et la performance. Comme chaque année, l’Officiel de France a permis à tous de passer un week-end serein. “Nous avons été accueillis comme tous les ans. Les installations sont super pratiques. Nous sommes installés dans des écuries en dur, ce qui n’est pas le cas sur tous les concours. Pour les chevaux, cela est vraiment un plus car les boxes sont beaucoup plus grands et gardent davantage la fraîcheur par temps chaud. C’est mieux pour leur bien-être, et, lorsque nos chevaux se sentent bien, nous aussi ! La piste est assez éloignée des écuries, mais nous avons l’habitude. D’un autre côté, cela est même plutôt bénéfique ; lorsque les chevaux partent vers le paddock de détente, ils marchent déjà dix à quinze minutes, ce qui leur permet d’échauffer leurs muscles gentiment. Idem pour la récupération dans le sens inverse. Surtout, cet éloignement permet aux chevaux d’être très au calme. Je n’imaginerais pas que les boxes soient installés près de la piste, avec le bruit incessant des gradins et du concours. Les chevaux ne pourraient pas se reposer convenablement, et ils restent toujours notre priorité”, complète la jeune femme. “En tant que groom, nous nous sentons bien sur ce concours. Les camions sont garés très près des écuries, ce qui est pratique. Nous sommes nourris à côté des boxes dans la journée, ce qui permet de ne pas courir après le temps. C’est très important. Ensuite, nous avons tout ce dont nous avons besoin pour prendre soin des chevaux et avons la possibilité de les emmener brouter dans un stade, proche des écuries. Bref, tout est chouette et bien pensé pour les chevaux.”Cayman Jolly Jumper.

Audrey et Cayman Jolly Jumper.

Bien que le métier de groom soit exigeant, tant sur le plan physique que mental, Audrey tient à rappeler que les soigneurs ont un rôle primordial à jouer dans les performances des athlètes à quatre jambes. Alors qu’il semble de plus en plus difficile pour les cavaliers de trouver des petites mains prêtes à dédier leur temps et leur vie à leur pépites, il convient de souligner que cette profession permet aussi de vivre de grands moments, de sport, d’émotion et de passion. “Les grooms sont importants”, abonde-t-elle. “La reconnaissance de notre travail avance progressivement, mais il est important de continuer à mettre notre métier en avant et à donner envie à de nouvelles personnes de rejoindre l’aventure pour prendre la relève.” Gageons donc que la dévotion et la motivation dont fait preuve Audrey Morandat puisse faire naître des vocations !

Crédit photo : © Mélina Massias. Photo à la Une : Audrey Morandat et Cayman Jolly Jumper au paddock à l’issue de la Coupe des nations.