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Après Ayade, la belle saga de Septon continue de faire vibrer ses créateurs, Yvonne et Christian Liégeois (1/2)

Christian Liégeois au milieu de ses chevaux, un jour de l’automne 2020.
Elevage samedi 23 août 2025 Mélina Massias

Chaque année ou presque, Yvonne et Christian Liégeois ont le bonheur de voir émerger de nouvelles stars sous leur affixe de Septon. Après la minuscule mais bondissante Ayade de Septon, qui reste à ce jour la plus connue de leurs représentants, No-Comment, Scoop, Phelina et Qallas arpentent désormais les plus belles pistes du monde, en Europe et au-delà. Passionné de la première heure, le couple, marié depuis bientôt cinquante ans, continue de voir évoluer ses protégés avec la même ferveur et un amour intact. Rencontré il y a quelques mois, au salon des étalons de Saint-Lô, Mecque de l’élevage s’il en est, Christian Liégeois est revenu sur l’histoire de son précieux trésor, et a livré son regard sur l’élevage de chevaux de sport. Rencontre, en deux épisodes.

D’Ayade à No Comment, en passant par Scoop et Qallas, l’affixe de Septon s’écrit toujours en lettres d’or au plus haut niveau. Derrière ce succès, long de plus de quatre décennies, se trouve un duo : celui formé par Yvonne et Christian Liégeois. “Lorsque mon épouse et moi nous sommes mariés, en 1976, nous nous sommes mis en quête d’une jument par Flugel van la Roche, qui était le père de la jument avec laquelle j’ai passé toute ma jeunesse. Elle était extraordinaire, mais malheureusement peu fertile. Nous avons alors trouvé Tamara, qui, croisée à Lugano van la Roche, nous a donné Questeur de Septon, l’un de nos tous premiers produits. Il a été approuvé au BWP. Tamara a aussi engendré une très bonne jument, Hesione, une propre sœur de Questeur. Elle était un peu petite, mais nous l’avons vendue à cinq ou six ans à François Mathy et à son ami espagnol, Luis Álvarez de Cervera. Cette vente nous a apporté un peu d’argent et nous a permis d’investir dans deux autres poulinières, dont Esprit, une fille de Nimmerdor avec une mère par Lucky Boy. Esprit est, en quelques sortes, le point de départ de notre élevage, puisqu’elle est à l’origine d’une grande lignée qui a produit notamment Vice Versa, Chellachic et No-Comment, qui ont sauté jusqu’à 1,60m, mais aussi Diva, qui a évolué à 1,40m”, résume avec modestie Christian Liégeois.

Yvonne et Christian Liégeois aux côtés de Del Piero P&B. © Dirk Caremans / Hippo Foto

Passionné de la première heure, le Belge a les chevaux “dans les gènes”. Fils d’agriculteur, il découvre ces fascinants animaux grâce à deux chevaux de trait conservés par son père après l’avènement du tracteur et de la mécanisation, au cours des années 60. Alors âgé de douze ans, le jeune adolescent exprime le souhait d’avoir son premier cheval de selle. “En avoir un n’a pas été très compliqué”, s’amuse-t-il. “Mon père a vendu ses deux chevaux de trait, et j’ai commencé à monter pour le loisir.” De fil en aiguille, la passion grandit, et le futur éleveur entame et réussit ses études de vétérinaire. Forcément, son métier se mêle à ce qui était son loisir, et ces deux pans de sa vie prennent de l’ampleur. “J’ai toujours inséminé”, se souvient le sympathique Belge. “J’ai appris avec Lugano, dans les années 80, chez Jef Brondeel dont le vétérinaire, le D. Spencemayer, diluait la semence avec du jaune d’œuf afin de pouvoir le transporter ! Ce ne sont que de bons souvenirs. Et c’était le début de l’insémination équine en Belgique !”



Ayade, dix-neuf ans et déjà matrone

En mettant sur pieds l’un des premiers centres d’insémination de Wallonie, Christian voit défiler quelques stars dans sa structure, d’Arielle (Acord II x Genever), gagnante du Grand Prix Coupe du monde de Malines en 2007 avec William Whitaker, à Reine Fée des Hazalles (Alcatraz x Nonstop), la mère de Venue d’Fée des Hazalles (President), la star de Fabienne Daigneux-Lange puis d’Eve Jobs. Peu à peu, une génétique de premier ordre vient garnir les rangs de l’affixe de Septon, qui continue de s’affirmer sur le devant de la scène. L’une des plus célèbres représentantes de l’élevage de Christian Liégeois reste, évidemment, Ayade de Septon, minuscule mais bondissante complice de Kevin Staut jusqu’au plus haut niveau. “Mon épouse avait repéré une très bonne jument de concours, qui était montée par l’une de ses amies. Elle m’a alors dit que je devrais faire quelque chose avec cette jument, qui s’appelait Naïade de Thieusies. Nous l’avons inséminée et avons obtenu deux embryons. Mais à cette époque, je n’avais qu’une jument porteuse ! Alors, j’ai téléphoné à Joris de Brabander et nous sommes allés chez lui, avec Naïade et ma receveuse. Il a récolté les deux embryons, en a implanté dans ma porteuse, et l’autre dans l’une des siennes. J’ai gardé la mienne, et le second embryon a vu le jour chez la propriétaire de Naïade. Elle a eu un grand mâle, et nous, une petite femelle !”, retrace le Belge, installé à Durbuy. 

Sous la selle de Kevin Staut, la petite Ayade de Septon*HDC a parcouru le monde entier. © Sportfot

Présenté à l’expertise du SBS, où il sera finalement refusé, Anarchiste du Blanquot (Wandor vd Mispelaere) effectuera une bonne carrière internationale à l’étranger, concourant jusqu’à 1,45m sous selle italienne. Petite, mais talentueuse, sa propre sœur ne laisse pas ses éleveurs indifférents. “Ma femme a toujours dit : ‘regarde son œil, il y a quelque chose’. Lorsqu’elle sortait de la stabulation, elle sautait déjà, et avec de la marge, au-dessus de la délimitation avec l’extérieur”, se rappelle son naisseur. Après des débuts “tumultueux”, Ayade trouve son pilote en Kevin Staut et empoche plus de dix victoires internationales à ses côtés, avant d’achever sa carrière sportive avec Patrice et Valentine Delaveau. Désormais, la fille de Wandor van de Mispelaere continue de faire parler d’elle grâce à sa descendance. Elle a ainsi donné Cayadix Hero (Cadence van’t Gelutt), classé jusqu’en Grand Prix 4* sous bannière belge, mais aussi Vitalhorse*Ebbadya Hero (Erco van’t Roosakker), montée par divers cavaliers, vue à son avantage en Grand Prix Coupe du monde avec Julien Epaillard et surtout mère de la prometteuse Kasbah Queen Hero (Kassander van’t Roosakker), neuf ans et déjà classée à 1,50m. Pour l’élevage de Septon, Ebbadya a engendré Houlahop et Indira Hero, deux filles de Jenson van’t Meulenhof, tandis que leur grand-mère, elle, poursuit son œuvre pour le haras des Coudrettes, qui l’avait acquise dès 2012. Et comme tout va plus vite en Belgique, Ayade est déjà la quatrième mère d’Univers Deluxe, étalon de trois ans fraîchement approuvé et fils… du champion d’Europe United Touch S, avec une mère par Excalibur de la Tour Vidal ! 

En plus de cette souche et celle d'Esprit, Yvonne et Christian peuvent aussi miser sur les précieux gènes de Reine-Fée des Hazalles, via l’une de ses filles, Lady-Fée Septon (No-Comment de Septon). Avec son associé, Gilbert De Roock, Christian tente aussi de créer de nouvelles souches à partir de jument ayant obtenu de bons résultats sur la scène internationale, avec notamment Kageena van’t Roosakker (Echo van’t Spieveld), la mère des tous bons Scoop de Septon (Scendro) et Qallas de Septon (Vigo d’Arsouilles).

Sous la selle d'Odile Girech, la styliste Qallas de Septon montre de belles choses. © Sportfot

Après avoir fait naître une quinzaine de poulains par an ces dernières années, le Belge lève aujourd’hui - difficilement - le pied. “Nous essayons de diminuer le nombre de naissances, à moins de dix par an. Mais cela nous donne des démangeaisons !”, plaisante-t-il. Désormais, sa structure a été entièrement repensée, pour devenir une clinique vétérinaire équine, avec un espace dédié à la chirurgie, sans sacrifier la partie reproduction, dont il était toujours responsable cette saison. “Nos chevaux sont désormais dans une autre structure située à quarante kilomètres, mais où ils disposent de tout l’espace nécessaire, aussi bien l’été que l’hiver”, précise Christian, qui conserve ses jeunes chevaux en général au moins jusqu’à quatre ans. Après une première sélection, basée sur leur physique, leurs radios, tempéraments, caractères et aptitudes au saut en liberté, les meilleurs éléments rejoignent les écuries GDR de Gilbert de Roock, où officie notamment Odile Gierech, qui compte quatre de Septon - Nikita (Echo van’t Spieveld x Jenson van’t Meulenhof), Nouba Nouba (Lector vd Bisschop x Jenson van’t Meulenhof), Qallas et Speciale Couleur (No-Comment de Septon x Del Piero P&B) - dans son piquet international cette année. “À cinq ans, les chevaux restent en Belgique pour travailler sur le plat et effectuer quelques sorties, puis ils débutent leur carrière internationale à six ans, à l’occasion du Sunshine Tour”, ajoute l’éleveur. 

La pétillante Ayade de Septon ici à cinq ans. © Sportfot



“Il y a une forme d’imprégnation de la mère porteuse sur les poulains”

“Une grande partie de notre élevage repose sur des juments porteuses. Il y a une forme d’imprégnation de la mère de substitution sur les poulains”, reprend Christian. “Par exemple, si elles sont craintives, cela peut jouer sur la personnalité du poulain qu’elle élève. À l’inverse, pendant un an ou deux, nous avions des juments de trait Ardennais, qui ne coûtent pas très cher à l’entretien. Mais nous nous sommes aperçus qu’elles étaient trop calmes. Elles ne bougeaient pas beaucoup, et les poulains non plus. Je crois que tout le monde a abandonné cela ! Nous sommes revenus principalement à des Trotteurs Français, qui ne passent pas leurs tests pour les courses. La sélection des porteuses se fait automatiquement, d’abord sur le caractère. Elles doivent avoir le tempérament pour mener cette vie-là, et notamment être coopératives pour les échographies. Elles doivent aussi avoir de la taille, et, évidemment, être fertiles. Après deux, voire trois échecs maximums, nous orientons les juments vers d’autres rôles, comme celui de nounou par exemple. Mais aujourd’hui, le marché devient difficile, et les juments porteuses deviennent de plus en plus chères, notamment en raison d’une trop forte demande pour l’ICSI.” 

Cette technique de reproduction, qui possède, comme toutes les autres, ses avantages et ses inconvénients, divise toujours. Christian s’est fait sa propre opinion. “Je ne pratique pas l’OPU moi-même, mais je travaille pour cela notamment avec Joris de Brabander et Kéros. J’ai eu recours à l’ICSI au sein de mon élevage afin de pouvoir utiliser United Touch S, qui n’est disponible que via cette technique. Je l’ai choisi pour une très bonne jument par Casall. Nous avons obtenu deux embryons et l’un d’eux a repris”, expose-t-il. “L’ICSI reste quelque chose d’assez lourd pour les juments. Il faut l’utiliser à bon escient : je ne le ferai pas pour une jeune jument destinée au sport, mais cela est très intéressant pour des juments d’âge, qui souffrent d’endométrite et d’autres pathologies qui peuvent affecter leur fertilité.”

Quelques jeunes chevaux de l'élevage avant l'hiver 2020. © Dirk Caremans / Hippo Foto

La seconde partie de cet article sera disponible mardi sur Studforlife.com…

Photo à la Une : Christian Liégeois au milieu de ses chevaux, un jour de l’automne 2020. © Dirk Caremans / Hippo Foto