Impossible d’ignorer les récentes performances de Cyril Cools et l’impressionnant Milton, né chez Corien et Freek Hoogenboom. Révélé en 2021 par Jérôme Guéry, le gris par Mylord Carthago est monté en puissance au Morocco Royal Tour, retrouvant son meilleur niveau ou presque, en atteste ses deux deuxièmes places dans les Grands Prix CSI 4*-W de Tétouan et El Jadida, ainsi que son double zéro et sa victoire dans la Coupe des nations de Rabat avec la Belgique. Autant dire que le cavalier belge de vingt-neuf ans a vécu trois semaines de rêve au Maroc. Discret et encore peu connu du grand public, ce sympathique cavalier dont le style n’est pas sans rappeler celui de son idole, Marcus Ehning, s’est confié sur la route du retour de ses trois semaines de compétitions. Entre bilan de sa tournée, éloges de son incroyable partenaire, évocations de ses autres montures et retour sur son riche parcours équestre, le jeune homme se révèle humblement dans cette interview en deux épisodes.
La première partie de cet article est à (re)lire ici.
Comment jugez-vous le potentiel de la compétitive Cloe ? Pensez-vous que cette jument de treize ans, déjà lauréate d’une épreuve à 1,50m, puisse aller encore plus loin ?
Cloe n’est pas très usée. Cette saison, elle a réalisé un vrai bond en avant. Elle a tiré toute l’écurie et tous mes chevaux vers le haut ces derniers mois en l’absence de Milton. J’attendais justement son retour à ce niveau-là afin que lui puisse aider Cloe à aller encore un poil plus haut. Pour moi, elle a en tout cas le potentiel pour disputer les plus belles épreuves et les Grands Prix importants. Elle a un an de plus que Milton, mais a donné naissance à un poulain au cours de sa carrière (en 2020, la grise a donné la vie à Lina Of Heritage, une fille de Malito de Rêve, la conduisant a marqué une pause sportive entre juillet 2019 et mai 2021, ndlr). C’est une jument très sûre et super compétitive. Elle n’a pas la même classe que Milton, mais cela est difficile à trouver ! Elle est toutefois très facile et dotée d’un caractère en or. J’ai hâte de la remettre en route sur un ou deux petits concours et repartir sur de beaux événements avec elle et Milton. Cloe mérite d’aller plus haut et de tutoyer les sommets, d’autant qu’il s’agit d’une jument de notre élevage, que ma compagne a fait naître.
“Kyamara est à mes yeux la relève de Cloe et Milton”
Pouvez-vous compter sur d’autres chevaux pour épauler Milton et Cloe ? Avez-vous des jeunes prometteurs qui pourraient prendre la suite dans quelques années ?
Oui, j’ai plusieurs jeunes, dont de très, très bonnes juments de huit ans. Elles sont encore un peu vertes, mais très prometteuses. Il y a Coryfee T&L (Corydon van T&L x Bentley van de Heffinck), une jument que j’avais en co-propriété avec Luc Tilleman, l’éleveur et propriétaire de Toulon, mais qui a été rachetée par ma compagne, et Pippa Fine van T&L (Dieu Merci van T&L x Deauville van T&L), qui nous appartient toujours, à Luc Tilleman et moi. Je compte également sur Kyamara (Genius x Warrant), une jument de huit ans également que nous avions achetée pouliche et qui est vraiment fantastique. Elle commence à prendre part à ses premiers Grands Prix 1* à 1,35 et 1,40m. Elle a assez peu d’expérience, mais est à mes yeux la relève de Cloe et Milton. Il faut encore tout construire avec elle, et elle n’est pas encore tout à fait au point, mais elle représente un bon mélange entre Cloe et Milton.
J’ai aussi un cheval français, Darius Peguignon (Canturo x Diamant de Semilly), qui s’est déjà classé jusqu’à 1,50m. Il l’a encore fait lors de la première semaine du Morocco Royal Tour (MRT), à Tétouan. J’ai un bon piquet à la maison, avec beaucoup de jeunes. Il faudrait presque que je me coupe en deux pour pouvoir tout faire ! Nous sommes assez équipés et avons de très bons jeunes, notamment des produits de Milton, qui arrivent. Ils sont âgés de deux ou trois ans. En parallèle, nous continuons d’investir sur des chevaux qui nous plaisent afin de varier un peu avec notre propre élevage.
Combien de chevaux faites-vous naître chaque année en moyenne ?
Nous élevons beaucoup et utilisons énormément Milton. Le nombre de poulains par an varie, entre huit et quinze. Il nous est arrivé de monter jusqu’à vingt, mais nous en attendons un peu moins pour 2024 car la saison de reproduction a été moins bonne pour les juments.
Avez-vous également recours au transfert d’embryon avec vos juments de concours ?
Oui, nous en faisons pas mal, notamment l’année dernière où nous avons beaucoup eu recours à cette technique.
“Je suis un peu triste d’être parti si rapidement des écuries de Marcus Ehning”
Vous avez pris part à vos premières épreuves à 1,40m très jeune, avez évolué plusieurs années en France, avant de vous former auprès de quelques grands noms de la scène sportive équestre. Pouvez-vous détailler votre parcours ?
Jusqu’à mes années Juniors, à l’âge de seize ou dix-sept ans, j’ai toujours travaillé avec mon père. Ensuite, je suis parti travailler en France, pour la famille Le Vot. J’ai ensuite rejoint l’Allemagne, où j’ai intégré les écuries de Marcus Ehning. Après une saison, je suis retourné en France, où j’étais employé par des propriétaires belges, mais qui étaient basés en Normandie. Et puis, je suis finalement rentré en Belgique, où j’ai d’abord travaillé pour l’éleveur Luc Tilleman, puis pour Constant van Paesschen. À travers ce parcours, j’ai touché plus ou moins à tout, de la formation des jeunes chevaux à l’apprentissage auprès de chevaux un peu plus âgés. Après mon aventure chez Constant, je me suis mis à mon compte et ai développé mon propre système petit à petit. J’ai alors rencontré ma compagne et nous avons mutualisé ce que nous avions. Nous construisons désormais les choses entre nous.
Où êtes-vous désormais installé ?
Nous sommes basés au haras de Ligny, au sein des anciennes écuries de Rodrigo Pessoa. La structure nous appartient et nous avons un bel endroit pour travailler.
Votre style à cheval n’est pas sans rappeler celui de votre mentor, Marcus Ehning… Qu’avez-vous retenu de votre passage au sein de ses écuries ?
Marcus a toujours été mon idole. J’ai donc toujours essayé de lui ressembler autant que possible. Le recopier, monter comme lui est de toute façon impossible. Il vient d’une autre planète ! Ce que j’ai vraiment appris chez lui, c’est la rigueur du personnage et surtout l’homme de cheval qu’il est. Ses chevaux sont d’une longévité incroyable. Il est travailleur et gentil, autant avec les gens qu’avec ses chevaux. Et puis, je retiens évidemment son style d’équitation exceptionnel. Tout le monde peut se rendre compte de cela ; même une personne qui ne connaît rien aux chevaux et à l’équitation va le remarquer.
Combien de temps avez-vous travaillé à ses côtés ?
Je ne suis resté qu’une saison, l’espace de quelques mois, chez lui. Je suis d’ailleurs un peu triste d’être parti si rapidement, mais j’étais trop jeune, trop immature. Je lui dis à chaque fois que je le revois : j’aimerais tellement faire machine arrière pour rester plus longtemps. Si c’était à refaire, je resterai cinq ans minimums ! J’aurais pu, en quelque sorte, être sa copie. J’étais un bon élément dans son équipe et il souhaitait que je reste, mais je n’ai pas eu une jeunesse facile et là-bas, la vie était assez dure pour un jeune. J’avais goûté à une autre vie un peu plus fun lorsque j’étais seul à Deauville. Avec le recul, j’aurais peut-être dû aller moins de droite à gauche. J’aurais certainement eu la vie plus difficile, mais j’aurais pu tout comprendre en restant au bon endroit. Malgré tout, entre-temps j’ai rencontré d’autres personnes, et cela m’a ouvert d’autres opportunités. À mes yeux, je ne suis encore nulle part, mais j’ai toutes les cartes en main pour accomplir ce que je veux.
En dehors des chevaux, avez-vous le temps de vous consacrer à d’autres activités ?
J’adore la course automobile, les voitures, le karting et ce genre de choses. C’est ce que j’essaye de faire sur mon temps libre, faire des activités de vitesse. J’aime bien conduire des voitures de sport ou faire du karting avec des copains de temps en temps. Cela m’amuse. Du reste, nous sommes une grande famille à la maison, donc nous passons beaucoup de temps avec les enfants. Cela, combiné aux chevaux, est déjà très chronophage.
Photo à la Une : Milton ne peut que ravir son cavalier, le Belge Cyril Cools. © Hippo Foto / Sharon Vandeput