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Checker 47, itinéraire d’un poulain devenu champion olympique (1/2)

Christian Kukuk et Checker 47 pendant la finale individuelle des Jeux olympique de Paris, le 6 août 2024, à Versailles.
lundi 16 septembre 2024 Adriana van Tilburg

La vie d'un cheval est composée de nombreux chapitres, chacun lié à différentes personnes. La carrière de Checker 47 (Comme il faut - Pamina x Come On) est le fruit de rencontres avec de véritables passionnés. De la famille Humburg, qui l’a fait naître, et l’a élevé jusqu’à ses six mois, à son titre de champion olympique avec Christian Kukuk.

Avec Hubert Vornholt, les débuts d’un cheval d'exception

Homme de cheval au regard avisé, Hubert Vornholt achète Checker à la famille Humburg alors qu'il n'est encore qu'un poulain. Son influence ne se limite pas à la carrière de Checker 47, puisqu’il a également joué un rôle important dans celle de son père, Comme il faut (Cornet Obolensky x Ramiro Z). Hubert Vornholt l’a entraîné dans sa ferme pour qu’il obtienne son approbation d’étalon, mais aussi pendant sa carrière sportive. Après son retrait de la compétition, Comme il faut a brièvement rejoint son propriétaire en Ukraine, avant d’être évacué du pays au début de la guerre, tout comme son père, Cornet Obolensky, pour retourner en Allemagne, chez Hubert Vornholt.

Hubert Vornholt avait une grande passion pour les jeunes chevaux, excellant dans leur formation et dans leur développement. Disparu tragiquement après une chute de cheval en août 2022, il n'a pas eu la chance d'assister aux meilleurs moments des carrières de Checker 47 et Christian Kukuk. Des succès, qui l'auraient, sans aucun doute, rendu très fier.

Berni Wickenbrock travaille pour la famille Vornholt depuis plus de 40 ans. Aujourd'hui, elle s'occupe de Comme il faut, veillant à ce qu'il bénéficie de la meilleure retraite et des meilleurs soins qu'un cheval puisse recevoir. Elle se souvient très bien de Checker 47 : “Il est arrivé sevré et a été logé dans une grande écurie, avec d'autres poulains. Il avait un très bon caractère, mais il était un peu lent en tout. Quand il était jeune cheval, il avait l'air un peu court sur pattes avec une tête très large. C'est étonnant qu'il soit devenu un si beau cheval. Il sautait déjà très bien en liberté, ce qui laissait présager un grand potentiel pour obtenir son approbation d’étalon. Je ne me souviens pas pourquoi nous ne l'avons pas emmené à la première sélection, mais à l'âge de trois ans, au printemps 2013, il a participé à un concours de saut en liberté, et s'est classé sixième.” 

Checker 47 au boxe, lors de son passage chez Otto Becker © Collection privée


Marcel Neugebauer a été le premier cavalier à concourir avec Checker 47. Ils ont même remporté leur deuxième compétition ensemble, à Warendorf, en 2014. Un souvenir resté ancré dans la mémoire du cavalier : “J'ai passé au total deux ans chez Hubert (Vornholt), où je montais trois à quatre fois par semaine. Je m’occupais essentiellement des jeunes chevaux, et j’ai commencé à faire sauter Checker quelques fois dans le manège intérieur, puis, lorsque le temps s'est amélioré, nous avons déménagé dans le manège extérieur. Je n'ai participé qu'à trois concours avec lui, avant qu'il ne rejoigne les écuries d'Otto Becker.

Checker avait un galop confortable, mais il fallait vraiment le monter vers l’avant. Nous nous entraînions aussi sur le bidet, que l'on rencontre rarement sur les parcours pour chevaux de quatre ans. Au début, il en avait un peu peur, mais nous lui avons montré à plusieurs reprises, et au bout de quelques fois, il le sautait normalement. C'était tout à fait lui. Même pendant le saut en liberté, si Hubert plaçait un bidet sous l'obstacle, Checker hésitait d'abord, puis sautait par-dessus. Je suis vraiment heureuse que Checker soit resté entre les mains de professionnels, et qu'il ait été formé par des cavaliers compétents. S'il avait pris peur pendant sa formation, les choses auraient pu se passer différemment. À mon avis, tout découle de la qualité de sa formation. Checker doit beaucoup de ses qualités à Comme il faut, et à l'excellent entraînement qu'il a reçu.”

Christian Dietz, ami de longue date d'Hubert Vornholt, a assisté, en sa compagnie, à de nombreux championnats d’Europe depuis 2009, pour observer les chevaux. Il affirme qu'Hubert Vornholt avait toujours un plan précis pour ses chevaux : “Je crois que Checker a été le premier poulain de Comme il faut qu'Hubert a acheté. Après avoir vu Checker sauter en liberté, il a été très impressionné par son potentiel. Hubert cherchait toujours le bon cavalier pour chaque cheval, et il en a été de même pour le père de Checker, Comme il faut. Très tôt, il a insisté sur le fait que Comme il faut était le cheval idéal pour Marcus Ehning. Franz-Josef Dahlmann a fait un excellent travail avec lui, le montant dans les championnats allemands des jeunes chevaux. 

Hubert était méticuleux dans le choix des cavaliers pour ses chevaux, en veillant à ce qu'ils puissent exploiter pleinement leur potentiel. Ce choix minutieux est également à l’origine du partenariat entre Hubert et Otto Becker. Ensemble, ils avaient un projet pour leurs meilleurs chevaux. Lorsque nous assistions à des concours de haut niveau où Comme il faut ou Checker concouraient, Hubert exprimait ses émotions de manière subtile. Il disait : ‘Tu as vu comment il a géré cette distance, comment il a aidé son cavalier ?’ C'était sa façon d’exprimer sa fierté. Le fait que Checker soit devenu champion olympique à la même période que le décès d’Hubert, il y a deux ans, est un sentiment particulier.”

Passage chez Otto Becker, et premier pas vers le haut niveau

Une autre personne à avoir joué un rôle très important dans la carrière de Checker est Otto Becker. Cavalier émérite, médaillé d’or avec l’équipe d’Allemagne pendant les Jeux olympiques de Sydney, en 2000 (avec Lars Nieberg, Marcus Ehning et Ludger Beerbaum), Il a également décroché une médaille le bronze par équipe quatre ans plus tard, à l’occasion des Jeux d'Athènes. Depuis janvier 2009, il est l'entraîneur de l'équipe allemande de saut d'obstacles. Il se replonge avec émotion dans la période où il était propriétaire de Checker 47 : “Je connaissais Hubert Vornholt depuis longtemps. Il était lui-même un très bon cavalier, et a même participé à plusieurs Coupes des Nations avec l’équipe d'Allemagne. Il vivait à Münster, pas très loin de mon écurie. J’admirais beaucoup Hubert, qui avait un système d'élevage exceptionnel. J'ai pris l'habitude de lui acheter un cheval par an. Quand il me disait qu’il avait un bon cheval prêt à être entraîné, je me rendais chez lui, et mon cavalier essayait alors le cheval (Andreas Kreuzer a essayé Checker pour la première fois.), et souvent, Hubert venait aussi chez nous pour présenter le cheval. 

Je me souviens des premiers sauts de Checker dans notre écurie. Dès le début, il a fait preuve d'une excellente forme à l'obstacle. Comme pour les autres chevaux, j'ai d'abord acheté la moitié de Checker. Il a ensuite été formé de manière classique, comme les autres chevaux. J'ai toujours eu de jeunes cavaliers talentueux sous la main, et, avec Niels Kersten, Checker a participé à son premier Grand Prix 2*. Il a toujours été excellent à l'obstacle. En tant que jeune cheval, il avait quelques difficultés avec son galop, qui n'était pas très rythmé ou rassemblé, ce qui rendait les premières étapes difficiles.

Otto Becker, entraîneur de l'équipe d'Allemagne de saut d'obstacles, pendant la Coupe des nations de La Baule, le 17 mai 2019. © Sportfot



À un moment donné, Niels Kersten est parti et Frederick Troschke a commencé à monter Checker. Ensemble, ils ont connu beaucoup de succès, et ont remporté plusieurs concours internationaux. Mais Frederick n'a pas eu l'occasion de concourir avec lui au niveau 4 ou 5*. Comme Checker était très talentueux, je pensais qu'il méritait sa chance pour le plus haut niveau. Cette opportunité s'est présentée quand Ludger Beerbaum et Christian (Kukuk) l’ont remarqué. Un investisseur avait déjà acheté la moitié de Checker à Hubert, et pour éviter qu'il ne soit vendu ailleurs, ma femme a racheté cette part. Notre objectif était de garder Checker en Allemagne. Si elle ne l'avait pas fait, il aurait probablement été vendu ailleurs. Finalement, Ludger a acheté la première moitié, et quelques mois plus tard, la deuxième.

J'ai toujours cru en ce cheval, mais espérer qu'il devienne champion olympique n'était bien sûr qu'un rêve. Il a toujours été clair que c’était un bon cheval, et je l'aimais beaucoup. À chaque fois qu'il participait à un concours, il était toujours très alerte, prudent, et avec une belle énergie. Il faisait toujours du bon travail. À cette époque, Andreas Kreuzer et Kaya Lüthi (Ehning) montaient tous les deux pour moi, et ils ont également concouru avec lui. Cependant, ils ne sont restés avec moi qu’environ deux ans.

J'ai souvent monté Checker pendant qu'il était avec moi, et j’ai toujours eu de bonnes sensations avec lui. Il avait du mal à engager ses postérieurs, à maintenir le rythme, et à garder l'équilibre au galop. Cependant, lorsqu'il s'agissait de sauter et d'enchaîner un parcours, il devenait un cheval différent, plein d'énergie, et impatient de sauter. Il franchissait les obstacles avec une telle facilité… Je me souviens que, même lorsqu'il était jeune cheval, s'il s'approchait un peu trop près d'un obstacle, il ajustait son saut sans effort et le franchissait sans commettre de faute. C'est ce qui m'a convaincu de son talent.

Checker 47 et Christian Kukuk pendant les Jeux olympiques de Paris, le 1er août 2024. © Scoopdyga

J'ai eu la chance de trouver, en la présence de Christian (Kukuk), le cavalier idéal pour Checker. Christian l'a aidé à se développer jusqu’au plus haut niveau. Nous avons suivi le chemin idéal, autant pour le cheval que pour le cavalier. C'est-à-dire prendre du temps, croire en son cheval, et lui donner la possibilité d’évoluer. Ça a toujours été ma philosophie. Je n'ai jamais cherché un succès rapide avec un cheval. 

J'ai formé presque tous mes chevaux moi-même, et j'ai conservé cette philosophie lorsque je suis devenu entraîneur national. J'ai immédiatement arrêté de monter, car, à mon avis, on ne peut pas cumuler les deux fonctions. C’est une méthode qui fonctionne uniquement avec de bons chevaux, sinon, elle n'est pas viable financièrement. Voir Checker gagner à Paris avec Christian a été particulièrement émouvant. On ne peut pas prévoir ce genre de choses…. Je n'ai pas beaucoup de chevaux, alors quand l'un d'entre eux va aux Jeux olympiques et gagne une médaille d'or, c'est bouleversant. J'ai essayé de contrôler mes émotions, mais après le premier tour, où Checker a exceptionnellement bien sauté, je suis restée sans voix. Après le barrage, j'ai retrouvé mon calme et la pression est retombée. Toute l'équipe a fait un travail remarquable à Paris. Gagner une médaille d'or grâce à un tel couple, avec un cheval avec lequel je partage une histoire, c'était vraiment incroyable pour nous tous !

Photo à la une : Christian Kukuk et Checker 47 pendant la finale individuelle des Jeux olympique de Paris, le 6 août 2024, à Versailles.

La deuxième partie de cet article sera disponible demain sur Studforlife.com...